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impatiemment cette bague, & ne la voyant point
arriver, elle crut que le comte pouffoit le mépris
pour elle jufqu’à aimer mieux mourir que de lui
devoir la vie. De-là tant d’irréfolution & d’agitation:
cependant le comte avoit confié la bague à
la comteffe de Nottingham , & l’avoit chargée de
la remettre à la reine; mais le comte de Nottingham*
ennemi capital du comte d'EJfex, avoit exigé de fa
femme qu’elle gardât la bagne & laiffât mourir EJ]ex.
Prête à mourir elle-même, long-temps après , la
comteffe de Nottingham fit prier la reine de la venir
voir ; & , après lui avoir demandé pardon de ce
qu’elle al loir lut dire , & l’avoir affùrée qu'elle
mouroit de fes remords, elle lui avoua en pleurant
cette horrible infidélité : Dieu peut vous pardonner,
lui dit Elifabeth après l’avoir entendue , pour moi,
je ne vous pardonnerai jamais. Elle rentra chez elle
défefpérée, & mourut douze jours après , fans
avoir pu. recevoir la moindre confolation.
E ST , ( Hiß. mod.j grande & illuftre maifon
^Italie, dont l’origine ie perd dans les fables antiques
; elle a produit les ducs de Fèrrare & les
ducs de Modène. Lés uns & les. autres le font
alliés avec la maifon de France; Hercule d'Efi,
fécond du nom , duc de Ferrare, époufa la prin-
ceffe Renée , fille de Louis XII & foeur de la
reine Claude ? première femme de François I.
François-M irie dyE(l , duc dé Modène , époufa
n’étant eqeore que piffree héréditaire de Modène,
Charlotte-Aglaé d’Orléans, fille de Philippe, duc
d’O rléans, régent de France. La maifon d'Eßeü.
d’ailleurs alliée à toutes les maifons fouveraines
de l’Europe. Cette maifon fe glorifioit de rapporter
Ion origine au paladin Roger ; & Boyardo, dans
fon Orlando innamorato, donne à Charlemagne & à
Roger une origine commune ; cette origine eft
troyenng & la plus illufire que pût fournir l’hif-
toire de Troie; car c’eft d’H eâor lui-même que
Boyardo fait defeendre de mâle en mâle Charlemagne
& Roger : l’épée Durandal, donnée par
Charlemagne à Roland fon neveu , étoit l’épée
cFHe&or, qui s’étoit confervée dans fa famille.
Afiyanax, fils d’He&or, conquit la Sicile. Il eut un
f ils , nommé Polydore; celui-ci en eut deux,
Clodoaque & Confiant. De Clodoaque defeendoit
Roger par une longue fuite de princes & de héros;,
de Confiant defeendoit Charlemagne,
La maifon d}E ß a produit trois cardinaux célèbres,
Hipolythe d’E/2, mort le 3 feptembre 1520;
un autre Hipolythe d’E/?, dit le cardinal de
Ferrare, beau-frère de la ducheffe R énée, lequel,
folon l’ufàge du temps , poffédort en France feulement
les archevêchés d’Auch, d’A r le s d e Lyon ,
Févêché d’Autun , plufieurs abbayes, & n’en
étoit pas moins d’ailleurs archevêque de Milan
enfin, un autre cardinal de Ferrare, Louis d'Eß,
archevêque d’Auch,fils cfRercule, fécond due de
Ferrare (k dé-Renée de France* mort le 3 a décembre
i%86. Le célèbre Muratori a- donné une
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hifioire généalogique de la maifon d’E/?, fous ce
| titre : delle antichità Eflenfi ad Italiane. Mettons
| au nombre des titres de la maifon d’E/?, qu’elle
fut h proteôrice & la bienfaitrice de l’A riolle tk
du Taffe.
ESTAING ( d’ ) ( H f . de F r . } ou ESTEING.
( d’ ) ( de Jlagno ) Voyiez dans le didionnaire de
blafon , placé à la tête de ce didionnaire d'hifioire,
tome premier, page 70, colonne deuxième, au mot
fleur de las i la conceffion faite par Philippe-Augufte*
des armes de France, à Deodat ou Dieu-donné
d'Eflaing, & les caufes de cette conceflion à jamais
glorieufe.
Je vetix que la valeur de leur* ayexix antiques
Ait fervi de matière aux plus vieilles chroniques »
Et que l’un des Capets, pour honorer, leur nom ,
Ait d effrois fleurs de lis doré leur écufl'on.
On fait que Dêodat ou IXeu-donnê dFEflaîng
n’a pas été le feul ni le dernier héros de fa race^.
Léonard d'Eflaing a été foutenu avec éclat par les
deux Iieutensns généraux , Jean d'Eflaing fous
Henri IV & Louis XHI, & François d'’Eflaing
fous Louis XIV Si Louis X V , & par beaucoup^
d’autres guerriers de cette maifon.
. Louis-Claude d'Eflaing, marquis de Miiroî, fils-
deTrançois d'Eflaing, mourut, en 1719 , des bief—
fores qu’il avoit reçues au fiége de Fontarabie.
On fait avec quelle gloire ce nom eft encore
porté aujourd’hui I & combien a paru jufie l’application
qu’on a faite au théâtre .i l’héritier aduet
de ce grand nom, de ces vers de Gaflon & Bayard,
D’Eftaicg, coeur tout de flamme, à:qui le fangnie lie,
T o i , aé pour être un jour * par tes hardis exploits,
Ainfi que ton ayeul 1 le bouclier des rois S'ESTAMPES
, | | § ( Hift. de Fr. ) noble &
ancienne maifon, originaire du Berry, dont étoient :
i ° Le maréchal d'Efiampes pu de la Ferté-îmbaut*
mort le 20 mai 1668 ;
20. Jean-Baptifte , comte d'EJlampes, fon arrière-
petit-fils , tué à la bataille d’Hochfier, en 1704 »,
après avoir eu trois chevaux tués fous lui *
3e . Louis, marquis d’Efiiau, de la branche
d? Eflampes - Valençai, tué devant Mafiricht dans,
les troupes des Hollandais, en 1.632*
4e*. ’ Claude, feigneur d’Eftiau * frère du précédent,
ttié au fiége de Montauban ;
3 e. jean d'EJlampes dit le baron de Beilebruse *
tué au fiége de Privas en 1629 *
6a. François-Louis-Charles d'EJlampes, chevalier
de maite, de la même branche de Valençai:*
noyé fur la générale de Malte» au mois de février
1700.
Et plufieurs. autres, nobles viâiuies die Pétât &
de leur devoir-
De cette même mai fort, étoit le cardinal de.
Valençai, que fa valeur guerrière & fes talens
militaires élevèrent au cardinalats Chevalier de.
maite > il avoit forvi avec, gloire for les galères de
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la religion ; il fervit dans les troupes dé France
avec encore plus de diftinétion, & devint maréchal
•fte camp. Il alla fervir le pape Urbain V I I I , dans des
querelles qu’il avoit avec le duc de Parme ; il fut nommé
général des arméesdufaint-fiége, (bus le cardinal
Antoine Barberin, n e v^ du pape. La récompenfe
de fes fervices & de fes foccès Fut un chapeau de cardinal
, qu’on peut dire qu’il avoir conquis. Il fourint
à Rome avec fa vigueur martiale les intérêts de
la France contre i’Amirante de Caftille, ambaffa-
deur d’Efpagne, qu’il obligea à rendre vifite au
cardinal d’E ft, proteâeur des affaires de France
.auprès du faint-fiége. On difoit communément
alors : le cardinal de Valençai, qui dit tout & qui fait
tout hardiment. Il mourut le 7 juillet 1646.
La maifon d'EJlampes a produit encore d’autres
prélats célèbres , tels que Léonor ou Eléonor
d'EJlampes - Valençai, évêque de Chartres, puis
archevêque de Reims, qui joua un rôle coniidé-
« ble dans le elergé, & mourut le 8 avril 1651 ;
deux Jean d'EJlampes, frères, évêques, l’un de
•Carcaffone, l’autre de Nevers, tous deux enterrés
dans un même tombeau à Nevers.
De cette maifon étoit encore le grand-prieur
Henri d'EJlampes - Valençai, mort, en 1678 , à
Malte , où on le defiinoit à la place de grand-maître.
La fameufe duchefle d'EJlampes, inaîtrefle de
François I , n’étoit pas de cette maifon , mais de
de celle de Piffeleu ; on la nommoit mademoifelle
de Heilly : la prifon de François I l’avoit féparé
de fa première maîtrefie,la comteflb deChâteau-
briant r foeur des de Foix-Lautrec ; pendant le
règne de celle-ci, la mère du roi & fa maîtreffe
avoient formé deux cours rivales , occupées à fo
détruire ; quand lé roi revint de Madrid , la
duchefle d’Angculême fenrit combien il étoit
important pour la corlfervation de fon crédit,
qu’elle donnât de fa main une nouvelle maîtreffe à fon fils ; en allant an-devant de lui, elle menoit
avec elle mademoifelle de Heilly : le roi, en la
v oy an t, oublia la comteffe de Châteaubriant, dont
l’abCence avoit naturellement affoibli l'empire.
Heilly vit tous les jours croître le fien, qui ne
finit qu’à la mort cfo roi. Son inclination, ou là
complaifance, parut lui donner avec fon amant la
la plus heureufe conformité de goûts; elle fut la
bienfaitrice des arts Si des fctences , & même une
bienfaitrice éclairée ; on l’appelloît la plus favantc
des belles. Son indulgence à l’égard des protefians
1a fit accufer de penchant pour la reforme; les
■ courtifa-ns la haïffoient peu, les favans l’aimoient,.
les proteftans efpéroient en elle. La reconnoiffance
de la jeune de Heilly ne trompa point l’attente de la
ducheffe d’Angoulême, elleluifut toujours foumife.
L’amitié la plus tendre l’unit bientôt avec la reine
de Navarre , feeur de François I , princefle aimable
dont Heilly avoit fefprit oc l’indulgence.
François I lui fit époufer, en 1536» Jean de
Broffe, qui portoit le nom de Bretagne, ôc qui
en effet defeendoit de la maifon de Bretagne par
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femmes. Il étoit fils de René de Broffe, un de*
complices du connétable de Bourbon, condamné à
mort par contumace. René avoit été tué à Pavie.
Jean de Broffe, après le traité de Cambrai conclu en
1329, demandant en vertu de ce traité à rentrer
dans la poffeffion des biens confifqués fur fon père,
ne put l’obtenir qu’a condition d’époufor la demoi-
folle de Heilly. Pour prix de fa complaifance, il
fut comblé d’nonneurs en perdant l’honneur ; le
roi lui rendit les biens confifqués fur fon père, le
fit duc d’Eftampes, chevalier de l’O rdre, gouverneur
de Bretagne; « mais , dit le Laboureur, ce«
n biens & ces grandeurs lui venoient d’une fource
« empoifonnée, dans laquelle il n’ofoit fo mirer, n
Après la mort de François I , il fit faire une information
contre fa femme fur le commerce
qu’elle avoit eu avec le r o i, & Henri II fut entendra
comme témoin dans cette information : il foroit
difficile de dire quel côté l’indécence étoit plus forte*
On devine aifément le peu de confidération
qu’avoit un tel mari à la cour de François I ;
il ne devoit s’en prendre qu’à lui-même, il s’ en
prit à fa femme, & fe ligua contre elle avec le
dauphin Henri, qui fut depuis le roi Henri II t on
n’y fit pas attention d’abord; tous les hommage*
étoient pour la duchefle; on n’appercevoit pas les
petites cabales que l’envie vouloit former de loin
& en fecret; la duchefle jouiffoit avec éclat des
bienfaits du roi ; la donatioh que François I lui
avoit faite du duché d’Eftampes , a fourni à Maroc
le fujet d’un de fos plus jolis dizains:
Ce plarfant val que l’on nommoit Tempé,
Dont mainte hiftoire eft encore embellie,
Atrouzé d’fa u x , <î doux, fi attrempé,
Sachez que plus il n’e ft en ThelTalie :
Jupiter c o i, qui les cueurs gaîgne & lie .
L ’a de Thefîàle en France remué , -
Et quelque peu fon nom propre mué ;
Car pour Tenipé veut qu’ Eftampes sJappelIej
Ainfi lui plaift , ainli l ’ a fitu é , .
Pour y loger de France la plus jbellc.
La cabale du dauphin , qu’ animoit Djane de Poitiers
fa maîtreffe, allarma enfin la dusheffe d’E ftampes:
da s la dernière guerre entre François I
& Charles-Quint, ta ducheffe effrayée de la décadence
de François I , dont tout annonçoit la fin
prochaine, voulut fe faire un appui du duc d’Orléans
, frère puîné du dauphin, en lui procurant
un établiffement dans le Milanais ou dans les pays-
bas. Pour cette négociation , elle entretenoit avec
l’empereur des correfpondânces criminelles , lui
révéloîftous les fecrets de l’état * & trahidoit pour
lui fon bienfaiteur & fon amant, politique non moins
imprudente que perfide. Comment efperoit-elle
obtenir de Charies-Quint des facrifices, en lui procurant
des fuccès ï cette trahifon fut ignorée de
Erançois I. Un roi malade eft aifément trompé.
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