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né s , des prodiges de génie, d’intelligence 8c de ’
valeur , que le prince venoit de prodiguer dans le
combat , & vous aurez Condè tout entier.
Bofiîiet n’a pas oublié de le repréfenter dans
fa retraite à Chantilly, & de_peindre en paiTans
ce beau féjour.
« Toujours grand dans l'aûion St dans lé re-
” pos, il parut à Chantilly comme à la tête des
» troupes. Q u’il embellit cette magnifique &
» délicieufe maifon , ou bien qu’il munît im camp
» au milieu du pays ennemi, & qu’il fortifiât
» une place ; qu’il marchât avec une armée parmi
» les périls, & qu’il conduisît fes: amis dans ces
» foperb.es allées au bruit de tant de jets d’eaù
» qui ne fe taifoient ni jour ni nuit y c’étoit tou-
« jours-le même homme , 8c fa. gloire le. lui voit
» par-tOutv »
On a dit dit grand' Condè, qu’il n’etoi't jamais
foui dans- fes promenades folitaires de Chantilly ,
qu’il étoit accompagné par-tout des viçfoires. de
Rocroi, de Fribourg , de Nortlîngue , de Lens, &
environné des ombres des grands capitaines' qu’il
avoir défaits...
Mxilta oculis Noiiinga & Tentia milita- recurfât-
C ’eft aihfi que Silins Italiens avoit dit d-’Annibalr
T ô t b e llis quctfî'ta v i r a t ô t coedibus^ armai? -
J tïa je fia s ceterna d t t c c m J î admovéns ■ora■
Cannas- & Tiebiam a n tj aculos Tftrafÿîitenaque Ifujla
Ë t Pau li Jt'aré ingenienï miràbefis. umb^ain..
A travers mille feux" je vois Condé paroître':
Tour-àrtour la.terreur & lîappui de fan maître».
a dit M-. de Voltaire. Son caractère eft.bien peint
dans ces vers, du temps
J’ai le coeur'comme là naiffanca
Je porte dans les yeux un feu vif &..briliant %
J’ai de la- foi de,la oonftançe,;:
Je fuis prompt-,. je fuis fier généreux & vaillant
Rien n’eft-, comparable à ma gloire ;
Le plus fameux héros qu’on;vante dans l’hifloire.
Ne me le; faurôit difputeï,
Si je n’ai pas unà oourorihé
G'eft la fortune qui la donne
li fufik de' la méritera
On- a dît dü grand Condé', qu’il étoit plus capitaine
que Céfer, & aufiî foldat qü’Alexandre. Il
aimoit les lettres au moins autant queux; on voyoit
fou vent à fe table Boileau , Racine, Santêuil- : ce
dernier vécut dans rintimité dés princes- fes fils &
petits-fils.. Il à- peint noblement là-retraite dugrand
Condé à Chantilly, dans ces, vers placés au bas de
h. ftatue,for le; grand e&alier du. château :.
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Quem modo pallcbant fugitivis fludibus dmnea-
Terribilem bello, nunc docia per otia princeps'
Pacis amans., loetos dat in hsrtis ludere, fontes.
Il a célébré aufiî dans fes vers les princes 8t
les princefiès de la maifon de 'Condé, & les priiîr
cipales beautés de Chantilly , -la chute d’eau delà
tête du canal, la Fontaine, le château- & les
bois de -Sylvie, le labyrinte * le cabinet des armes
,8ce.
Le grand Condé mourût à Fontaibleati le n décembre
l686. Voyez à l’art cle .B ossu et ce que
cet orateur dit de la mort de ce héros. On ne
voit pas. fans émotion & faits-larmes ce même
tableau de Condé mourant dans les. hiftoirès les
plus (impies ; les derniers mots de Condè:, fa douceur,
fe réfignat-ion , fa modeftie , toutes, ces vertus
épurées par le cbriftianifine: & par l’attente
d’une autre vie ; fes adieux à fa famille, la ten-'
dréffe de fes difcours , la vérité de fes fentimens.j,
les larmes de toute la maifon s la douleur, tendre
de la ducheffe d’Enghien, le défefpoir énergique du
duc. d’Enghien ( le prince Henri-Jules,) , . ce délire
de tetidrefle 8c de regret qui le précipite aux pieds,
de fon père expirant pour lui demander pardon
d’offienfes qu’il n’a jamais, cooemifes ,. ce même délire
qui le force de rentrer malgré tout le monde ».
dans la chambre de ce héros, dont un cri finiftre 8s
Terrible vient de lui annoncer la mort... .... il ap-
perçoit un cadavre étendu fur un l i t ,. le vifage
eouver-t d’un, linge. Ah !. que vois-je ? s’écrie-t’il
eflrcé là, mon père ?. Voilà-donc tout, ce qui refie de-
ce grand homme ! 8c il tombe fans mouvement. I i
s’étoit déjà évanoui plufieurs fois pendant la tranquille
agonie de fon père.. '
x- On len t, dit madame de Sévigné;,Jâ-douleur dé
» voir fortir du monde an fi grand-homme , un &
» grand héros , dont les fiècles entiers ne fauront
» point remplit la place ».
Après cette réflexion i .qui efi un, fen riment ,
elle; fait un conte de bonne femme ,,quelle afiyre*
être vrai, mais qui prouve au moins quelle place1
l’idée d’un grand homme occupe dans lés imaginations
vives & dans Tes coeurs fenfibles.
« Il arriva une çliofe extraordinaire à Chantilly-
» trois, femaines avant la mort de M.. le prince..
» Un. gentilhomme à lui nommé Ver-nillon, reve~
» liant- à trois heures delaphafTe , approchant
» du château, vit- à une. fenêtre du cabinet des,
» armes un, fantôme , c’eft-ædire un homme en-
» fevell j.il defeendit de fon cheval & s’approcha „
» il le vit toujours : fon valet, qui étoit avec lui,,
ir dit ; Monßeur y p jy.oijS ce que vous voÿc^. Ver-
» nillon ne voulant pas lui,, dire-, pour leJaiffer
» parler naturellement, ils rentrèrent.dans le châ-
» ; teati, & prièrent leconcierge de donner la clef
» du cabinet des armes;.il y va-& trouve toutes
jj les fenêtres fermées,. & un filence qui n’avoit
», pas été troublé il y ay.oitplus. de fix mois., Qâ
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conta cela à M. le prince , il en fut un peu
» frappé, puis s’en moqua. Tout le monde fut cette
» hiftoire , & trembloit pour M. le prince , &
« voilà ce qui efi: arrivé. On dit que ce Vernil-
» Ion efi lin homme d’efprit, & aufiî peu capable
m de vifion que le pourroit être notre ami Cor-
» binelîi. outre queee valet eut la même apparition.
» Comme ce conte efi vrai, je vous le mande,
» afin que vous y fafliez vos réfléxions comme
v nous ».
Le grand Condè étoit le trifâïeul de M. le prince
de Condè d’aujourd’hui. Son père, M. le duc ,
mort en 1740 , a été le fuccefleur immédiat de
M. le régent dans, le gouvernement du royaume.
Son long féjoür à Chantilly a été très-utile à la
décoration de ce beau lieu
De héros en héros , d’âge en âge embelli. .
Le prince Henri-Jules, fils du grand Condè, avoit
aufiî orné ce féjour. Ce prince, outre la valeur
naturelle aux .Coudé, & qui a fait dire à M. de
la Motte avec tant de vérité, mais d'un ton fi
précieux :
Condé que je ne tiens pas.compte
De furnommèr Vaillant , car Vaillant & Condè
/C’eft même chofe , & j’aurois.honte
D’un pléonafme décidé.
Ce prince étoit à la cour l’arbitre des lumières
& du bon goût: il aimoit & cultivoit les lettres,
j ’ai entendu dans mon_çnfance de vieux officiers
de fe maifon raconter de lui un trait qui anç
Boncélune grande bonté jointe à une grande (implicite
de moeurs. Les écoliers-de la ville de Senlis
qui fe diftinguoient dans leurs études, il les invi-
toit à venir fe-promener à Chantilly les jours de
congé , leur faïfoit préparer une collation à la. fontaine
des truites.» les interrogeoit fur les auteurs
claffiques , s’àffiiroit de. leurs progrès » 8c leur donn
a it des prix pour les encourager.
C O N D IL L A C (E t ienn e B o n n o t d e ) (#(/?.
Tut. mod.), de l’académie françoife & de celle de
Berlin. Grandpîiiiofophe , bon écrivain, homme aimable
» du petit nombre de ceux qui ont fait faire
des pas à la métaphyfique 8c à la raifon ; il fut
précepteur de l’infant don Ferdinand, duc de
Parme. On connoît le cours d’études qu’il a confe-
créà l’éducation de ce prince , & qui pourra fervir
à celle de beaucoup d’autres. Il avoif publié auparavant
fon EJJ'ai fur l'origine des connoijpmces humaines
j fon Traité des fenfations; fon Traité des
fyftêmes. Son dernier ouvrage a pour titre : Ze
Commerce & le Gouvernement, conjidérés relativement
l'un à T autre. Mort le % août 178.0., dans fa terre
de Flux, près Beaugeaci,
CONFUCIUS ou CONGFUTZËE (Hifi. delà
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Chine). C ’eft le père des philofophes chinois, &
le nom le plus révéré à la Chine, où on l’appelle
le grand-maître y le premier doéleur, le précepteur des
empereurs & |des rois , le faint, le roi des lettrés. Ses
defeendans font mandarins nés, 8c ne. paient aucun
tribut. La morale de Confucius efi célèbre ; on
en a retenu plufieurs maximes.
Je ne vo.udrois pas qu'on fût ma penfée, ne la difons
donc pas. Je rie voudrais pas qu'on fût ce que je fuis
tenté de faire , ne le fiifons donc pas.
Le fage craint quand le ciel efi jkrein. Dans les
tempêtes , il marcheroit fur les flots & fur les vents.
C ’eft le fperat infauflis, metujt fecundis d’FIorace.
Un riche montroit fes bijoux à un fage : je vous re -
mer de du pré fa i t , lui dit le fajje. —- Je ne vous les
donne pas. — Pardonnez-moi, ne me les faites-vous pas
voir ? Quel autre moyen d’en jouir vous réfèrvez- vom ?
Ne parlez jamais de vous aux autres., ni eh bien, ils
ne vous croiront pas, ni en mal, ils en croient déjà
plus que vous ne voulez.
Avouer fes défauts quand on efl repris, c’efl mo-
4eflic ; les découvrir à fes amis , c'efl confiance » fe les
reprocher à foi-même, c efl humilité ; les aller dire à tout
le monde , c efl orgueil.
Confucius vivoit environ cinq fiècles 8c demi
avant J. C.
CONGRÈVE ( G u il l a u m e ) [Hifl. litt. moi)*
u Celui de tous les A n g lo isd it M. de Voltaire]»
» qui a porté le plus loin la gloire du théâtre co-
» inique , efi feu M. Congrèvc. Il n’a fait que peu
» de pièces, mais toutes font excellentes dans
h leur genre. Les règles du théâtre y font rigou-
•j reufement obferve.es. Elles font pleines de ca-‘
» raél ères nuancés avec une extrême fineffe;. on
j> n’y eftuie pas la moindre, mauvaife plaifante- •
>» terier vous, y voyez par-tout le langage des
jj honnêtes gens avec des avions de fripon ; ce
•j qui prouve qu’il ccnnoifioit bien fon monde »
jj oc qu’il vivoit dans ce qu’on appelle la bonne;
,jj compagnie. Ses pièces’ font les pins fp.irituelles
jj 8c les plus exaâes ».
Congrève n'étoit pas proprement anglois , il étoit
irlandoîs , né dans le. comté de Cork en 1672
mort en 1729. Ses oeuvres ont été*imprimées à
Londres en 1730 , en 3,,vol. in-12*
CONNECTE ( T h o m a s ) {Hifl. de Fr.}, carme
breton, fut brûlé à Rome en 14 3 1, pour des erreurs
ou pour des déclamations contre les abus de
fon temps, il étoit parvenu à faire tomber les
hautes coëfîures des femmes , en les faifant infuW
ter par les petits eflfans ; ce ne furent pas cependant
les femmes qui le firent brûler. Enhardi par
ce fticcès, il voulut, à Rome même , porter fora
efprit de réforme jufques fur les. défordres de lai
cour de Rome, 8c alors il fut hérétique. Mais fil
nous paroiftons ici acCufer d’un peu d’foipnide&ce