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EDOUARD le confeiïeur ou le débonnaire , fut
Couronné en 1043. Ce prince, plus fimpte que
politique , plus foible que généreux, plus indolent
qu’appliqué , laiffa ufurper foji autorité par
Godwin Ton miniftre , qui lui fit époufer fa filly ;
fe montra trop indifférent fur les troubles qui
menaçoient l’état , 8c prépara par fa foibleffe la
dévolution qui mit le fceptre d’Angleterre dans
les mains de Guillaume , duc de Normandie. Il
mourut en *1066 après un règne de 23 ans,
Edouard fut un modèle de charité , de douceur,
de patience, de chafteté ; mais il n’eut pas les
qualités d’un roi. ( L. C. )
E d o u a r d I , depuis la conquête. Ce prince
iètoit en Paleftine , où il partageoit avec S. Louis
les travaux ingrats d’une expédition malheureufe,
moins animé peut-être de cette fureur pieufe qui
s’étoit alors emparée de la plupart des fouverains
dè l’Europe, qu’empreffé d’échapper au fpeéïacle
des maux qui défoloient fa patrie fous le règne
d’H enriIH fon père , lorfque la mort de celui-ci,
arrivée en 1173 , le rappella en Europe. Les
Anglois qui l’attendoient avec impatience , le
reçurent avec les fentimens qu’infpire l’efpoir
d’un gouvernement meilleur que le précédent.
Leur attente jae fut point trompée. Il commença
par réformer plufieurs abus qui s’étoient gliffés
dans Tadminiftration de la juftice , donna lui*même
l ’exemple d’une équité exaâe , 8c remplaça des
juges iniques par des magiftrats intègres. Il ranima
l’induffrie languiffante , fit fleurir le commerce
autant qu’on le pouvoit vers la fin du treizième
fiècle , perfeâionna la conflitution politique , en
donnant au parlement d’Angleterre une nouvelle
forme, celle i-peu-près qu’il conferve aujourd’hui,
& fit paffer plufieurs loix auffi utiles que fages.
L a conquête du pays de Galles fur le prince
Lolin , qui ofa prendre les armes & déclartr la
guerre à Edouard, d’après une prédiction du
fameux Merlin qui fembloit lui promettre l’empire
de toutes les ifles britanniques ; la guerre
qu’il fit à la France, guerre terminée en 12^8
par une double alliance entre ce monarque 8c
Marguerite de France, 8c entre fon fils Edouard
éc Ifabelle-, l’une foeur & l’autre fille de Philippe*
le-Bel; fur-tout la conquête de l’Ecoffe en 1307,
illuftrèrent encore fon règne , mais fans rien
ajouter à fa gloire aux yeux de la poftéritè,
•Nous admirons moins en lui le courage du
conquérant , que nous ne dételions cette foifde
la vengeance dont il parut dévoré , la barbarie &
la mauvaife foi dont il ufa en plufieurs occafions
contre les Gallois & leurs princes , les Ecoffois
& leurs rois, 8c dont nous avons un monument
durable dans l’antipathie qui fubfifle encore aujourd’hui
entre les Anglois & les Ecoffois , malgré
la réunion des deux peuples. Edouard mourut en
13 0 7 , âgé de 68 ans: il en avoit régné trentc-
fjuaire. ( L, C.jj
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Edouard I I , fils 8c fucceffeur d'Édouard 1, peiï
jaloux de foutenir la gloire que fon père s’etoit
açquife dans la paix par la fageffe de fon gouvernement
, $c dans la guerre par fa valeur , fe
livra dès le commencement, de fon règne à des
maîtreffes 8c des favoris qui le perdirent. Gavefton,
le premier qui s’empara de fon efprit , fe rendit
fi odieux à la nation par fon infolence 8c fa
dureté ; il maltraita fi cruellement les grands du
royaume, qu’ils prirent les armes contre leur
fouverain , 8c firent le procès à fon favori qui
eut la tête tranchée. Cependant Edouard , infultant
au malheur du peuple anglois , affligé par une
horrible famine qui joignoit les ravages aux
défordres d’un gouvernement oppreffif, fit faire
à grands frais les funérailles de Gavefton, dont
le corps fut porté à la terre ' de Langley. Les
Ecoffois ehoifirent ce moment de trouble 8c de
calamité pour fecouer le joug de l’Angleterre.
Une guerre malheureufe contre la France acheva
d’aigrir les efprits. La reine Ifabelle, retirée à la
cour de France auprès de Charles-le-Bel, fon frère,
ofa concevoir le projet de profiter du mécontentement
des Anglois pour fatisfaire fon ambition.
Secourue par le comte de Hainaut, elle leva
l’étendard de la révolte, 8c repaffa la mer avec
trois mille hommes. Elle déclara, dans un mani-
fefte public, qu’elle venoit délivrer le peuple de
la tyrannie de Spencer, miniftre & favori nouveau
du roi fon époux. Edouard 8c Spencer , ne facharit
/OÙ trouver un afÿle, furent bientôt au pouvoir
de la reine. Spencer 8c fon fils moururent par la
main du bourreau. Le parlement s’affembla. Le
roi y fut accufé d’avoir violé les loix du royaume
de s’être livré à des confeillers indignes, d’avoir
rejette les avis de fes fidèles fujets , de s’çtre
rendu indigne du trône , en abandonnant le
gouvernement à des hommes perdus de crimes 8c
de débauches. Perfonne 'n’ayant ofé prendre la
défenfe d’Edouard, il fut dçpofé d’une voix unanime,
8c fon fils fut proclamé folemnelleinent
dans la grande falle de Weftminfter. Mais le jeune
prince, vivement affeâé de ce qui fe paffoit;
protefta qu’il n’accepteroit point la couronne du
vivant de fon père, à moins qu’il n’y confentit,
Edouard , dont la foibleffe étoit le plus,grand crime,'
| ne put entendre cette prôpofition fans en parojtre
indigné. On affure que les évêques de Lincoln 8c
d’Hereford, chargés par le parlement de le préparer
à réfigner de bonne grâce la couronne à fon fils,
l’inftruifirent avec dureté des intentions de la
nation, 8c osèrent même le menacer, s’il ne fe
rend,oit pas de bon gré à ce qu’elle exigeoit de
lui. Douze commiffaires furent nommés pour rece-
! voir fon abdication. Un des juges, faifant l’pfflçq
de procureur fpécial du peuple, lut l’aéle qui délioiî
les fujets du ferment de fidélité..Edouard répondit
qu’il fe foujnettoit à tout, & que cette difgrace
étois la jufte punition de fes péchés. Ifabelle . dont
l’ambitior
rambitîon '8c la paftion adultère pour. Mortimer
avoient conduit cette révolution , envia à fon
malheureux époux la vie qu’on lui avoit laiffee.
Maltravers 8c Gournay furent charges de le tuer
dans fa prifon. Cés infâmes bourreaux lui firent
fubir la mort la plus cruelle. Ils lurintroduifirent
une corne dans le fondement, & pafserent à travers
ùn fer chaud, avec lequel ils lui brûlèrent les.
entrailles. Ainfi périt Edouard I I , âgé de qua*;
ran te-trois ans. (£. O.')
, Edouard III n’avoit que quinze ans lorfqu’il
monta fur le trône en 1327. Quoiqu’il montrât
une maturité de jugement 8c une pénétration
«u-deffus de fon âge-, les loix du royaume^ ne
lui permettant pas de prendre fi jeune les^ renes
du gouvernement, Ifabelle fa mère fe mit à la
tête dés affaires avec Mortimer fon amant. Mais;
le jeune Edouard fi goal a dès-lors fon ardeur
martiale contre les Ecoffois qui ravageoient les
frontières de l’Angleterre. Au retour de cette
campagne il époufa une princeffe de Hainaut, 8c
en 1329 il alla en France rendre hommage a
Philippe de Valois , pour la Guyenne & le Pon-
thieu. Revenu en Angleterre, il eut de viôlens
fbupçons fur la conduite de fa mère 8c de fon
miniftre. Bientôt, il découvrit les noires.intrigues
tramées pendant fa minorité., la mort | de fon
père 8c d’autres crimes de cette efpèce. Le
parlement trop dévoué à Ifabelle fut cafte. Un
autre autorifa Edouard à prendre en main l’admi-
oiftration des affaires, quoiqu’il n’eût pas encore
l’âge marqué par les loix. Mortimer tilt enlevé
jufques dans le lit de la reine fon amante, 8c
pendu au gibet commun de Tiburn avec toute
l ’ignominie attachée à ce fupplice. Ifabelle fut confinée
dans un château avec une modique penfion
de cinq cents livres fterlings. Ayant ainfi vengé un
père encore plus malheureux que coupable , il fe
difpofa à conquérir le royaume d’Ecoffe. Après
cette expédition, où il trouva plus de difficultés
qu’il n’avoit penfé, 8c dans laquelle il montra
plus' de fureur que de courage, étant venu
jufqu’à quatre fois en Ecoffe, & ayant ravagé
de la manière la plus cruelle les provinces qui
s’étoient déclarées contre lu i, il fit la guerre à la
France par l’ambition de mettre fur fa tête la
couronne que portoit Philippe de Valois. Le combat :
naval de l’Eclufe (1339), dont il eut tout l’avantage,
fut fuivi d’une trèv.è de deux ans. Lorf-
,qu’elle fut expirée, Édouard fe remit en campagne
avec une nombreiife armée. I l alla camper a
C r e c y , où il remporta une vi&oire complette fur
les troupes du monarque françoisen 1346. Ce fut
dans cette bataille que les Anglois commencèrent
à fe fervir du canon, dontl’ufage étoit alors peu
connu. Enfiiite, Edouard ayant pris fa marche par
le Boulonnpis, vint mettre le fiége.devant Calais;
les affiégés, accablés par la force, donnèrent au
yainqueur l’exemple d’une magnanimité héroïque,
Hiftoire, Tome II, Seconde Par t•
propre à confondre l’inhumanité avec laquelle il
, les traitoit. A la bataille de Poitiers, en 1356,
i le roi Jean, qui avoit fuccédé a Philippe, fut fait
prifonnier., 8c orna le triomphe d'Edouard qui
eut la cruauté d’expofer ce prince malheureux à
la rifée d’une populace infolente.,
( La plupart des hiftoriens parlent au contraire
des égards 8c des refpe&s qu’Edouard I I I , 8c fur-
tout le prince hoir , témoignèrent au roi Jean
pendant fa captivité.)
Tandis que le roi Jean languiffoit dans les fets_,
l’Anglôis continuoit de ravager fes provinces. Il
s’avança jufqu’anx portés de Paris, 8c 1 on voyoït
par-deffilS’ les murailles, la fuméêdes villages qu’iL
brûloir. Tout-à-coup le' ciel fe couvre de nuages '
épais. En un inftant tout le camp d'Edouard elt
inondé ; lés tentes > les bagages, les munitions,.
tout eft entraîné par lès torrens ; une grele d une'
groffeur énorme accable les hommes 8c. les
chevaux ; la foudre 8c les éclairs les remplirent ^
d’effroi. Les foldats s’écrient que le ciel vengeur
de la France les punit de leur brigandage : Edouard^
tremble comme e u x , 8c fe tournant vers 1 Eglile
de Chartres, dont on appe^cevoit les clochers,
fait voeu de consentir à la paix, s’il échappé a ce
danger. Tant il eft vrai que la terreur entre
aifément dans l’ame du coupable ! Le traite de
Bretigny, fi avantageux à TAnglois , fut figne, cc.
le roi Jean revint en France après quatre ans de
captivité. . ,
La guerre fe ralluma entre les deux couronnes
en 1368. Charles V avoit fuccédé au rotJean,
mort quatre ans auparavant. La fortune le lalia
de favorifer un héros fanguinaire. Bertrand du
Guefclin battit les Anglois de tous cotes. En
moins de fix campagnes, E d o u a r d perdit les belles
provinces dont la conquête lui avoit coûté plus de
vingt ans de travaux, 8c tant de fan g & d argent.
Ces revers amortirent cette ambition effrenee
qui l’avoit agité jufqu’alors. Une paffion plus
douce, mais hors de faifon , lui fuccéda. Son fol
amour pour AlixPiercele fit tomber dans des foiblef-
fes indignes d’un grand prince. Uniquement occupe
de fa maîtreffe 8c de fes plaifirs , il laiffa ufurper
fon autorité par fes miniftres, 8c leur abandonna
les rênes du gouvernement. Les fonds de l’etat
furent bientôt épuifés par l’avidite d A lix 8c de
fes favoris. De-là un mécontentement univerlel.
E d o u a r d , qui jufqu’alors n’avoit encouru que le
reproche d’être un conquérant féroce , mérita dans
fa vieilleffe celui d’être un prince foible 8c efféminé.
11 eut pourtant des vertus. Auffi humain envers
fes fujets/ qu’implacable envers fes ennemis, il
fut le proteâeur des veuves, des orphelins, 6c
en général de tous les malheureux ; il aima la
jufiiee 8c la fit obferver. Il encouragea les feien-
ce s , les arts 8c le commerce, fit avec fon parlement
plufieurs ftatuts avantageux à la nation ,
8c fans fa maoie aveugle àp vouloir être roi dfif
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