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conjurations pour avoir droit de les punir. Rome
devint une arène arrofée du fan g des plus vertueux
citoyens. Ce monftr-e entouré de victimes, s’ab.n-
donnoit encore à toutes les brutalités de l’amour :
trois cent; femmes,& autant de jeunes garçons ,
furent deftinés à fervir à fes infâmes débauches;
& fes propres Coeurs ne fe dérobèrent à la mort
que par l’inceOe. Il avoit commis trop d’atrocités
pour fe diflimuler qu’il étoit haï : il regarda tous
les hommes comme fes ennemis ; & n’ofant plus
fe fier à perfonne pour fe faire rafer, il fe brûloit
lui-même la barbe. (O n a raconté la même chofe
de Denis le Tyran* )
C ’étoit une ancienne coutume que le fénat, au
renouvellement de l’année, accompagnât l’empe-
teurdansia place publique oùil haranguoit le peuple.
Ce pi in c e , qui préféroit le plaifir barbare de ter-
raffer les lions & les tigres à la gloire de régir un
empire , fe rendit la veille à l’amphithéatre des gladiateurs
, où s’étant retiré dans fa chambre, il
dreffa une lifte de profeript-ion contenant les noms
de tous ceux qui par intérêt pour fa gloire lui
avoient fait des remontrances lur fes abominables,
plaifirs. Martia même, fa maîtreffe, étoit du nombre;
elle forma une conjuration avec Lætns & Eleâus ,
qui préfenrèrent au tyran un breuvage empoifon-
né ; & voyant que la mort étoit trop lente, ils
l ’étranglèrent à l’âge de trente-deux ans, dont il
avoit régné treize. Sa mémoire infpira tant d’horreur
-, qu’après fa mort il fut déclaré ennemi du
genre humain. (T — jv. )
COMNÈNE ( Hijl. du Bas - Empire ) , grande
maifon impériale, qui a donné une fuhe d’empereurs
à Conftan tinoplé & à Trébitbnde. Voyeç les articles
A le x is C o m n è n e & A nn e C om n èn e fa fille,
qui vivoient du temps de la première Croifade ,
êk qu’on accufe de l’avoir traverfée.
Les perfonnages les plus célèbres de cette mai-
fon après ceux-ci, font, i ° . Jean Comnène, fils &
fiucceffeür d’A léxis, furnommé Calo-Jean, ou Jean-
le_- Beau. Ce fut un bon & grand prince dans un
pays & dans un temps qui en ont peu produit de
tels, & c’eft affez gratuitement que Campiftron a
diffamé fa mémoire en mettant fous fon nom la
trifte aventure de Philippe I I , & de dom Carlos.
Il mourut en 1 143 , d’une bleffure qu’il fe fit à la
main dans une chaffe avec une flèche empoifon-
née. Un médecin lui fit efpérer, dit-on, de confer-
v e r fa vie s’il vouloir fe réfoudre à fe laiffer couper
la main. Je nen aï pas trop, de deux, dit-il, pour
tenir les rênes de mon vajle empire. Le mot pouvoit
être bon, mais comme en matière d’empire les
rênes & les mains qui les tiennent font purement
métaphoriques & méta'phyfiques, le feu! moyen
de conferver ces deux mains-là étoit peut-être de
fe : faire couper fa main phyfique. Un beau mot
n ’eft pas toujours un bon raifonnement.
2 e. Emanuel eu Manuel Comnene fon fils, auquel
les chrétiens de la fécondé croifade ont fait
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les mêmes reproches que ceux de la prémièffc
avoient faits à Aléxis de plus, grands encore.
30. Andronic I. Voy. A l e x i s C omnène fécond.
La vie de cet Andronic reffemble à celle d’Ado-
nibefec ; il fit mutiler tous fes ennemis, & finit
par être mutilé lui-même le 12 feptembre 118/.
4 ° David , dernier empereur de Trebifonde, de
la maifon Comnène, que Mahomet fécond, empe*
reur des Turcs, détrôna & fit mourir avec fes
fils, l’an 1461,
COM T E ( Louis l e ) ( Hiß. litt. mod. ) , jéfuite;
auteur de mémoires curieux fur la Chine, où il
avoit été millionnaire en i6§y* Mort à Bordeaux,
fa patrie, en 1729.
CONCINA ( D a n ie l ) {Hiß. litt. mod. ) , domi-
. nicain italien, auteur d’une théologie & de beau-:
coup d’ouvrages théologiques, où , félon Pefprit de
fon ordre, il ne fe montre pas favorable aux jé-
fuites. Ces ouvrages font eftimés en Italie , & le
pape Benoît XIV faifoit cas de la perfonne de l’auteur.
Mort à Venife en 17<6. Né dans le Frioul,
en 1686.
CONCÏNI ou CONClNO ( Hiß. de Fr. ) , conn«
fous le nom de maréchal d’Ancre. Tofcan venta
en France à la fuite de Marie de Médicis, en 1600 ,
élevé par ta.faveur de cette reine à la place de pre**-
mier gentilhomme de la chambre, fous Louis XIII,
à la dignité de maréchal de France, à la puiffance
de premier miniftre. Eléonore D o r i, dite Galigaf,
femme du maréchal d’Ancre, contribua beaucoup
à fon élévation ; elle gauvernoit entièrement ta
reine, dont elle étoit dame d’atours. Concïnï & Ga-.
ligaï avoient toujours été ennemis de Henri IV ,
& ce titre feul les a condamnés dans la poftérité.
Le gouvernement du maréchal d’Ancre a été loué
par quelques perfonnes ; il paroît cependant qu’il
eut le tort de s’enrichir des dépouilles de l’état ; il
paroît suffi qu’il fe permit de ces coups d’état, &
de ces entreprifes hardies qui doivent moins réuflir
encore à un étranger qu’à un miniftre du pays : il
eft certain que ce gouvernement déplut à la nation,
quoique les gosvernemens fubféquens aient pw
contribuer à le faire regretter. Il eut cette mau-
vaife politique machiavellifte de divifer pour régner ,
politique qui fe tourne toujours contre ceux qui
la fuivent. En 16 14 , les princes & les grands, mé-
contens du gouvernement, prirent les armes ; oa
les appaifa, on les trompa par différens traités. Era
1616 , le maréchal d’Ancre ofa faire arrêter le
prince de Condé; Thémines , qui l’arrêta, fut fait
maréchal de France; mais Vitry, qui, Farinée fui-
vante, à l’inftigation de Luynes & par l’ordre dm
ro i, voulut arrêter le maréchal d’Anere „ & qui le
tua fur le pont du Louvre, parce qu’il parut vouloir
fe mettre en défenfe/utauflî fait maréchal deFranceï
La maréchale d’Ancre, enveloppée dans la diïgrace
de fon mari, fut condamnée , par arrêt du parU^
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îîient, du 8' juillet 16 17, à avoir la tête tranchée,’
& à être brûlée comme forcière. Si quelque chofe
peut juftifier l’opinion de ceux qui voudroient abolir
l’ufage du dernier fupplice, & de la peine de
mort, c’eft l’exécrable abus qu’on en a fait tant
de fois contre des innocens. On fait que la maréchale,
interrogée de quel fqrrilège elle s’étoit fer-
yie'pour parvenir à gouverner la’ reine , répondit;
je me fuis fervi de VafCendant -naturel .d’une.ame forte
fur un ejprit foible, réponïe que M. de Voltaire a
snife dans Ja bouche de Mahomet :
Du droît qu’un efprit vafte & ferme en fes defieinS ,
A fur l’efprit groffier des vulgaires humains, .
C O N CO R D A T , p r a g m a t iq u e . Ces objets
appartiennent à la jurifprudènce canonique, &
& nous lés y renvoyons.
CONDAMINE ( C h a r l e s - M a r ie d e l a )
( Hijl. litt. mod. ) , chevalier de Saint - Lazare , de
l ’académie françoife & de l ’académie des fciences,
& de ptefque toutes les académies étrangères il-
luftres. M. de Voltaire a dit:
Lorfque ce grand courier de la philofqphie,
CondamineTobfervateqr ,
De l’Afrique au Pérou conduit par Uranie ,
Par la gloire & par la manié >
S’en va griller fous l’équateur, &c.
Ces vers rie font pas feulement libres & gais,
Ils font encore cara&ériftiques; gloire & manie,
voilà la vie entière de M. de la Condamine, & tout
fon cara&ère ; jamais on n’a fait de fi grandes chofes
pour les fciences ; jamais on n’a montré tant d’ardeur
& de courage. On a retenu ce que M. de
Buffon lui dit en le recevant à l’académie françoife :
; « Avoir parcouru l’un & l’autre hémifphère, tra-
»> verfé les continens & les mers, furmonté les
» fommets fourcillenx de ces .montagnes embra-
» fées , où des glaces éternelles bravent également
s> & les feiix fouterrairis & les feux du midi ;
» s’être livré à la pente précipitée de ces catarac-
» tes écumantes, dont les eaux fufpendues fem-
»> blent moins rouler fur la terre , que defeend-re
» des nues ; avoir pénétré dans ces Vaftes déferts,
» dans ces folitudes immenfes, où l’on trouve à
v peine quelques veftiges de l’homme, où la nature
» accoutumée au plus profond filence, dut être
» étonnée de s’entendre interroger pour la pre-
» mière fois ; avoir plus fait, en un mot, par le
v feul motif de la gloire des lettres, que l’on ne
s> fit jamais par la foif de l’or ; Voilà ce que con-
» noît de vous l’Europe, & ce que dira la pofté-
» rité».
M. l’abbé de L ille, fucceffeur de M. dé la Conâa-
mine k:d’acad. françoife, dit aufli.: .« M. de la Conda-
p mine part pour.aller s’embarquer fur ce fleuve im-
» menfe ( la rivière des Amazones ) , large de 50
i v lieues à fon embouchure. . . i. vous le verriez avec
| » effroi marcher, fufpendu par des ponts d’ofier, fur
} » des rivières rapides & profondes Cuivre fur les
| >7 montagnes des chemins tracés p^r le cours des
» torrens, ou , la hache à la main , fe frayer une
v route à travers des bois épais:, côtoyer des pré-
n cipices, paffer.le même torrent vingt-deux fois
» en un jour, à chaque inflant prêt à faire pau-
>1 frage, & dans j e danger, continuel de fa vie.,
» toujours tremblant pour le recueil de fes obfer-
» varions.. . . . Il paffa huit jours heureux . . . . avec
» des fauvages. L à , refpirant pour ia première
» fois après, tant de fatigues, partageant les plata
» firs innocens des Indiens, fe baignant avec eux,
m recevant les fruits de leur chaffe .& de leur pêche,
» la liberté, le filence, la folitude, la beauté du
w lieu ie délafsèrent délicieufement de fes tra-
» vaux & du commerce des hommes. 1 . . . ( I l fe
» rem b a rq u e ).........Je né vous le peindrai point
» abandonné ail courant de ce fleuve immenfe ;
; d ic i, heurtant contre des rocs efearpés ; là , en-
» traîné par des tourbillons d’eau, tantôt arrêté
: jj par une branche qui tràverfe. fon radeau , & fuf-
» pèndu fur les. eaux qui décroisent à vue d’oeil ;
n tantôt frar.chiffant le. fameux détroit du Pongo ,
' jj où les eaux plus rapides & plus profondes, rou-
» tant fous la voûte qbfçure & tortueufe de fes
n bords rapprochés , avec un mugiffement entendu
» de plufieurs lieues, lancèrent fon radeau comme
w un trait à trayers les faillies des arbres, & les
m pointes menaçantes des rochers.
» Je ne vous le repréfenterai point, après un
» trajet de cinq cents lieues fur la rivière des Ama-
» zones , s’enfonçant dans la rivière du Para , large
jj de trois lieues, échouant contre un banc de vafe ,
» obligé d’attendre fept jours les grandes marées,
n remis à flot par une vague plus terrible que
w celle qui l’avoit fait échouer, & fauvé par où
i » il devorit périr. Je ne vous, peindrai point les
a jj tempêtes qu’il èffuya, les nations inconnues qu’il
I jj traverfa, tous les dangers enfin menaçant fes
i j> jours , tandis que lu i, tranquille obfervateur,
I » feul au milieu de ces déferts-, avec trois Indiens ,
I jj maîtres de fa vie, tenoit tour-à-tour le baromètre ,
I >» la fonde & là bouffole........
I. n Les tableaux variés qu’offioient à fes yeux les .
Ir> fleuves & leurs bords ; là , des animaux inconnus,
- » ici des plantes nouvelles ; tantôt des, peuples
| n également bizarres dans leurs parures & dans
I » leurs-moeurs, tantôt lés débris de ces nations ,
| n jadis fi floriffarites , épars dans des déferts qui
I n furent des empires, enfin tant d’objets nouveaux
* n expofés en filence à fes yeux dans ces immenfes 1» folitudes, où la philofophie voyageoit pour la
» première fois , tout payoit un tribut à fa curio-
»: fité; & comme ces vaftes fleuves fur lefquels il
» voguoit reçoivent à chaque inflant des. fleuves
a> qui grgiFjffent leur cours , ainfi dans une navi