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foit empaler ou enterrer vifs tous les prifonniers j
mais il fe vit bientôt contraint de ceffer Tes horribles
cruautés, parce que les hongrois ne tinrent
plus leur parole, & firent de même empaléî: ou
enterrer vifs tous les foldats de l’empereur qui
tombèrent entre leurs mains.
Si des états , qui fe font réunis, refufoient de
tenir les conventions faites à la guerre, fous prétexte
que l’ennemi a manqué aux loix de l’union,
ils fuivroient un mauvais principe j la qualité de
l’ennemi & la nature de la guerre , rie font rien
à de femblables conventions. Il fera toujours dé-
raifonnable & dangereux de donner lieu à un re- I
tour de cruautés & de barbarie dans la .guerre , j
en violant des conventions facrées par leur nature.
La loi naturelle , qui nous fait veiller à notre
confervation, ne peut jamais donner le droit de
violer un traité fait fous les armes, puifque c’eft
ordinairement le foin de fa confervation qui produit
ce traité 5 ainfi, quand les officiers , qui
ont donné leur parole d’honneur, fervent contre
l’ennemi , ou contre fes. alliés ,' fans avoir été
échangés , ou fans avoir payé leur rançon , ils
allèguent en vain qu’ils n’ont pas d’autre moyen
de fubfifter j car, lorfqu’on les a relâchés fur leur
parole , ils étoient cenfés pouvoir fe procurer leur
fubfiftance , fans manquer à leur parole j & fï
l’efpoir qu’ils en avoient, les a trompé , ils doivent
retourner prifonniers chez l’ennemi.
La fixieme loi ejl que les ambajfadeurs jouijfent de
la sûreté & de la liberté la plus parfaite.
Si le droit des gens exige que les états biffent
un chemin libre au retour de la paix, lorfqu’ils
fe font la guerre, il veut auffi que pendant la paix ;
ils donnent' un, libre cours à la négociation des
affaires. Et c’eft delà que réfultent les privilèges
des ambaffadeurs. M. de Montefquieu a très-bien
développé le principe & la fource de leurs droits,
& voici ce qu’ il en dit. « L é droit des gens a voulu
y» que les princes s’envoyaffent des ambaffadeurs :
5^ & la raifon, tirée de la nature de la chofe,
» n’a pas permis que ces ambaffadeurs dépendif-
» fent du fouverain , chez qui ils font envoyés ,
» ni de fes tribunaux. Ils font la parole, du prince
ss qui les envoie 5 & cette parole doit être libre : i
ss aucun obftacle ne doit les empêcher d’agir 5 ils'
ss peuvent feulement déplaire , parce qu’ils parlent
»s pour un homme indépendant : on pourroit leur
ss imputer des crimes , s’ils pouvoient être punis
ss pour des crimes ; on pourroit leur fuppofer des
ss d e t t e s s ’ils pouvoient être arrêtés pour dettes}
» un prince qui a une‘ fierté naturelle, parleroit I
ss par la bouche d’un homme qui auroit tout à
s> craindre. Il faut donc fuivre, à l’égard des am-
so baffadeurs , les raifons tirées du droit des gens,
s» & non pas celles qui dérivent du droit politi—
** que. Que s’ils abufent de leur être repr&enta-
»> t i f , on le fait ceffer 9 en les renvoyant chez
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»» eux } on peut même les accufer devant leur
»s ma>tre , ;qui devient par-là leur juge ou leur
99 complice, ss Les droits des ambaffadeurs découlent
immédiatement du principe du droit des gens ;
car fi les princes fouhaitent que leurs propres ambaffadeurs
jouiffent d’une liberté entière & d’une
parfaite fûreté, il faut que l’ambaffadeur d’ un autre
prince ait chez eux toute la liberté & toute
la fureté poffible.
Aucun peuple ne doit troubler la fociété des autres
peuples 3 & céjl la feptieme loi du droit des gens.
Aucune nation, pendant qu’elle eft en guerre,
& pendant qu’elle eft en paix, ne doit troubler
le commerce, ou les affociations que les autres
peuples font entre eux. Une nation peut, à la
vérité, rompre à fon gré tout commerce & toute
I affociation avec les autres peuples , en ce qui la
concerne j mais elle ne peut jamais être en droit
d’interrompre le commerce des autres nations ,
parce qu’elle bleffe par-là la liberté naturelle des
. peuples, qui eft leur plus grand bien.
Ceci dérive encore de notre principe général
du droit des gens ,* car un état ne pouvant fou-
haiter qu’on trouble fon commerce, il ne doit
troubler celui de perfonne.
Il fuit de-là que les ports doivent être fûrs &
le commerce libre, même en temps de guerre,
à l’ égard des puiffances neutres.
Une nation neutre peut être regardée^comme
1 ennemie en deux cas : i° . quand elle porte à l’ennemi
des vivres & des munitions de guerre, qu’il
n’auroit pu fe procurer, fans expofer fes vaiffeaux,
fi cette nation ne les lui avoit portés. La confédération
des neutres, durant la dernière guerre,
a fi bien expofé. les privilèges de la neutralité, &
en quoi confiftent les munitions cle guerre, qu’il
n’eft pas befoin d’ infifter là-deffiis. i ° . Quand
elle fait, pour l’ennemi, un commerce qu’il n’auroit
pu continuer par lui-même, à caufe du danger
où il auroit expofé fes vaiffeaux. Une nation
eft dans ce cas , lorfqu’elle va-chercher les mar-
chandifes qui font dans les colonies de l’ennemi,
qu’elle les exporte pour l’ennemi, & qu’elle importe
dans ces mêmes colonies, & pour l’enne*
mi , dès denrées & des marchandifes d’Europe ,
Iorfque la crainte empêche l ’ennemi d’y envoyer
fes propres bâtimens. Elle fe met à la place de
l ’ennemi : elle eft fon faéteur, fon agent.
Une nation ceffe d’être neutre dès qu’elle entreprend
ce commerce , & elle n’a pas à fe plaindre
, lorfqu’on traite fes vaiffeaux comme ceux de
l’ennemi.
Les nations neutres ont foutenu, à différentes
époques , qu’elles faifoient, pour leur compte ,
le commerce ave,c les colonies ennemies. Mais fi
elles ne faifoient pas ce commerce av^nt la guerre,
il eft clair que c’eft-là un prétexte : & il faudrait
qu’une nation fut bien fimple, pour fouffrir qu’on
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mît ainfi fous fes yeux les richeffes de fes ennemis
à couvert.
C e principe eft fi conforme au droit des gens ,
à la faine raifon & à l’équité naturelle, qu’il faut
avoir toute la cupidité & tout l’aveuglement des
négocians hollandois, pour n’en pas fentir la vérité.
En général, les vrais principes du droit des gens
exigent, qu’eu égard à la liberté & à la fûreté (
dont les nations neutres doivent jouir , on exa- )
mine le commerce & la navigation qu’elles faifoient
avant la guerre , & qu’on les laiffe libres
de les continuer, de' quelque nature qu’ ils foient.
Si elles portoient habituellement des vivres &
des munitions à la nation ennemie, avant la guerre,
je ne crois pas qu’on puiffe les en empêcher. Elles
renforcent l’ennemi , & elles le mettent en état j
de -prolonger la guerre ; mais quellé maxime de la
raifon ou du tdroit ,des gens peut, nous mettre en
droit de chercher nôtre avantage au préjudice d’un
tiers innocent, que la guerre ne regarde pas ? Et
fur quel principe raifonnable peut - on obliger
une nation à difcontinuer fon commerce, pour
une guerre qui s’ élève entre deux nations étrangères
, & à laquelle elle ne prend, point de part ?
au relie , chaque nation, obéit alors à. fa conve1
nance, & elle ne s’embarraffe pas des règles de
la juftice rieoureufe : enfuite , tous les peuples
s’ étant écartes des principes à différentes époques de
leur hiftoire, fi le droit des gens lui eft contraire,
le droit des repréfâilles l’autorife à-les imiter.
Il paroît qu’on peut enlever lès munitions &
leS'vivres qu’ on porte à l’ennemi , mais en les
payant leur véritable valeur. On fuit une règle
plus commode î on enlève les munitions de guerre,
& quelquefois les vivres } & fi on les paie, c’eft ;
lorfqu’on redoute la vengeance de la nation offen-
fée. Voye%_ l’article G u erre.
D r o it pub l ic . Voye1 le DiéHonnaire idc
Jurifprudence.
D r o it de l a G u e r r e . Voye1 l’article j
-Ç u er r e .
D r o it A lleman d , ou D r o it G e rm a nique
Voÿe^ le Dictionnaire de Jurifprudence.
D r o it A nglois. Voye1 le même Dictionnaire.
7 Voye£ dans le même DiCtionnnaire ce qui a
rapport au droit de beaucoup d’autres nations,
& des détails fur les diverfes accèptions du mot
D r o it .
D r o it pub lic en Fr a n c e . N ous croyons
devoir donner ici une notice hiftorique de l’étude
du droit public & de la politique en France, dans
les différens fiècles de la monarchie, avec quelques
remarques touchant les principaux ouvrages
qu’ on a publiés fur cette matière.
Ceux qui ont étudié notre hiftoire , fçavent
qu’en France le droit public & la politique ont
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été regardés , jufqu’au dix - feptième fiècle ,
comme un myItère réfervé aux rois & à leurs
miniftres. Les rois & les miniltres manquoienc
même ici de principes certains & de méthode
fixe.
Le droit de conquête fit celui de la première
race, & nos.françois, au berceau, étoient, à peu
de chofe près , du caractère d’A ch ille , duquel
on a dit :
Jura negat fibi ngta, nihïl non arrogat armis.
Le droit du plus fo r t, des notions confufes des
loix romaines , & quelques ufages particuliers ,
formèrent le code des conquérans des Gaules. Le
droit naturel & celui des gens n’ étoient irefpectés
qu’autant qu’ils s’accordoient avec l’intérêt des
paffions.
Sous Clovis I & fes fucceffeurs, quels défordres
ne voit-on pas dans l’ordre de fuccéder, dans les
moyens d’acquérir, dans les moyens de conferver,
dans les divers engagemens &-dans la manière de
les exécuter ! L ’égalité dans le partage du butin
entre le général & fes foldats, etoitla loi la plus
connue. Les récompenfes, les peines, tout etoit
arbitraire : celui qui condamnoit, puniffoit de fa
propre main : les traités les plus folemnels n’étoient
que le fruit de la néceffité , des liens qu’on brifoit
fans honte, & fouvent par les voies les plus odieu-
fes, par le meurtre & par là perfidie. La religion
même n’obtenoit fur les coeurs que ce foible empire
dû à l’impreffion trop fouvent paffagère d’ un
bien ou d’un mal invifîbles. Les événemens jufti-
fioient tout.
On a vanté les lumières politiques de Clovis I ,
de Clotaire l’ ancien , de Frédégonde, de Brune-
hault, & c . Mais fur quoi font fondés ces éloges ?
fur des meurtres -multipliés , des ufurpations , de$
perfidies manifeftes ; fur des guerres injuftes, &
dont l’ambition & l’avarice étoient le motif. Auffi,
le pillage, l’ incendie, le malheur des peuples en
étoient-ils les fuites affreufes. Il n’y a rien là qui
annonce un peuple policé par les principes du
droit & de la politique.
Sous les rois Carlovingiens, la légillation acquit
une forme qu’ elle n’avoit point encore eue. Charlemagne,
l’ame la plus élevée, le génie le plus
étendu, & l’ un des plus grands rois de la monarchie
, afpira au titre de légiflateur , & le mérita
par les foins qu’il prit de former un corps de loix
qui pût approcher de la dignité de celles des romains.
Son deffein étoit de les rétablir 5 mais les
livres du droit étoient perdus , & on ne put les
trouver. Dans un fiècle plus éclairé, que n’eût-il
point fait ! Mais , qu’ eft-ee que le code de fes
loix , én comparaifon dû recueil majeftueux de la
Jurisprudence romaine, même dans l’informe compilation
de Juftinien (1) ? Les capitulaires, la loi
(1) Il fitifupprimer les livres des jurifconfultes romains , après qu’on eut achevé les pande&es 3. il fut puni