
égale quantité des marchandifes dont on manque
5 & il y en a néceffairemenc une de la même
efpèce, quoique moins frappante, à tourner vers
un pareil emploi un trentième ou même un trois-
centième de plus de l’un & de l’autre.
Les marchands & les manufacturiers font ceux
qui tirent -le meilleur parti de ce monopole intérieur.
La défenfe d’importer en Angleterre du
bétail en vie & des falaifons, & ces gros droits
fur le bled étranger, q u i, dans le temps d’une
abondance ordinaire * équivalent à une prohibition
, ne font pas à beaucoup près fi avantageux
aux nourrilfeurs de. beltiaux & aux fermiers de
la Grande-Bretagne que les autres réglemens de
la même forte le font aux marchands & aux |
manufacturiers. Les marchandifes de ceux - c i ,
fur-tout celles de la plus belle efpèce, fe tranf-
portent bien plus aifément d'un pays à l’autre,
que le bled ou le bétail. Aufli elt-ce à faire ve-. \
nir ou à exporter le produit de ces manufactures
, que s’occupe le commerce étranger. En
fait de manufactures > il ne faut qu’ un très-petit
avantage pour mettre les étrangers en état de ven-:
dre, çiême en Angleterre, à meilleur marché que
ne vendent fes propres ouvriers 5 mais il en fau-
droit un très-grand , pour qu’ils le fiffent à l’égard
du produit brut. Si on permettoit Y importation
libre des manufactures étrangères , probablement
plufieurs de fes manufactures en fouffri-
roient j quelques-unes d’elles feroiènt peut-être
entièrement ruinées, & une partie confidérable
des fonds . & de l’ indultrie qu’on y emploie à
préfent, feroit forcée de prendre une .autre-route.
Mais la plus libre importation du produit brut
de la terre n’opéreroit pas le même effet fur l’agriculture
du pays. -
Si jamais , par exemple, on laiffoit pleine liberté
d’importer du bétail étranger, il en arri-
veroit fi peu que les nourrilfeurs de beltiaux ne
pourraient pas y perdre grand’chofe. De toutes
les marchandifes , le bétail en vie ell peut être
la feule dont le tranfport foit plus coûteux par
mer que par terre. Quand les beltiaux viennent
par terre, ils fe tranfportent eux-mêmes au marché.
Par mer, il faut non-leulement les embarquer
, mais tranfporter auffi avec eux leur nour*
riture & ieur boilfon , ce qui n’entraîne pas de
petits frais ni de petits inconvéniens. Le petit
trajet de mer y qui fcpare l’Irlande de la Grande-
Bretagne, rend, à la vérité , plus facile l'importation
du bétail irlandois > mais quand on auroit
permis pour toujours Yimportation libre de ce
bétail, qu’on n’a permife depuis peu que pour
un temps limité , elle n’affeCleroit pas beaucoup
l ’intérêt des nourrilfeurs de beltiaux. Les parties
de la Grande-Bretagne , qui bordent la mer d'Ir-
lande, font toutes des pays de pâturages. Ce
ne pourroit être pour leur ufage, qu’on tranfi-
porteroit le bétail d’Irlande. Pour qu’il arrive à fon
véritable marché >• il faut le faire paflèr^ à grands
frais & avec de grandes incommodités, à tra*
vers une grande étendue de pays. Les boeufs gras
ne peuvent aller fi loin. L’on ne pourroit donc
importer que les maigres, & cette importation ne
pourroit nuire à l’ intérêt des pays qui les nour-
riifent & les engrailfent} elle, leur feroit plutôt
avantageufe, en faifant baiffer le prix du bétail
maigre 5 elle croiferoitfeulement l’intérêt des pays
qui en font des élèves. Le peu de bétail d'Irlande*
importé depuis la permiflion donnée, & le prix
auquel fe loutient le bétail maigre femblent démontrer
que les diftriCls où l’on fait des élèves
dans la Grande-Bretagne , ne fouffriront jamais
beaucoup de la liberté de cette importation. On
d it , il ell vrai, que le menu peuple d’ Irlande
s’y ell quelquefois violemment oppofé } mais files
exportateurs avoient trouvé beaucoup à gagner
dans la continuation de leur commerce ,
comme ils avoient la loi pour eu x , il leur eût-
été facile de triompher de cette réfiftance de la
populace. ~
Ajoutez que les pays qui nourriffent & engraif-
fent, doivent toujours être bien cultivés , au lieu>
que ceux qui font des élèves, font généralement
incultes. Le haut prix du bétail maigre, en aug->
mentant la valeur des terrés incultes, eft comme
une gratification accordée au défaut de culture.?
Si un pays étoit très bien cultivé p a r - to u t, il
lui feroit peut - être plus avantageux d’importer
fon bétail maigre que de le nourrir. C ’ eft auffi ,
à ce qu’on d it, la maxime que la province de
Hollande fuit à préfent. Les montagnes d’Ecoffe,
du pays de Galles & du Northumberland nd
font pas , il ell vrai, des terreins fort fufeepti-
blés d’amendement, & femblent deftinées par. la
nature à faire des élèves pour la Grande-Bretagne.
La plus libre importation du bétail étranger
ne pourroit avoir d’autre effet que d ’empêcher
ces pays qui font des élèves de tirer avantage
des progrès de la population & de la culture
dans le relie du royaume , de les mettre à un
prix exorbitant, & d’établir ainfi une taxe réelle
fur les parties du pays mieux cultivées.
La plus libre importation des viandes falées
feroit auffi peu de tort aux nourrilfeurs de bel*
tiaux que celle du bétail en vie. Les viandes
falées ne font pas feulement une marehandife vo*
lumineufe , mais , comparées- à la viande frai-?
ch e , elles font d’une plus mauvaife qualité &
d’ un plus haut prix > à raifon de ce qu’elles
coûtent plus de frais & de travail. Elles ne pour*
roient donc jamais entrer en concurrence aveç
la viande fraîche, quoiqu’elles^ pulfent y' entrer
avec les viandes falces du pays. Elles peuvent
être bonnes à Ravitaillement d’un vaiffeau pour
un voyage de long cours, ou à d’autres uïagés
pareils ; mais elles ne feront1 jamais une partie coït-
fidérable de la nourriture du peuplé. La petitê
quantité de provifions falées , qui ell venue d’ Irlande
en Angleterre depuis la liberté de Yimp&n»-
tatuvt, eft une preuve d’expérience ^que les nourrilfeurs
de beltiaux n’en ont rien à craindre. Il
ne paroît pas que le prix de la viande de boucherie
s’en foit jamais relfenti fenfiblement.
, La libre importation du bled même ne pour-
jroit guère porter préjudice aux fermiers de la
Grande-Bretagne. Le bled eft une marehandife ,
encore plus volumineufe que la viande de bou.
cherie. Une livre de bled à un penny eft^ aufli
chère qu’une livre de viande de boucherie a quatre
pences. La petite quantité de bleds etrangers,
importée dans les temps même delà plus grande
difette , peut convaincre les fermiers angiois qu ils
n’ont rien à appréhender de Y importation la plus
libre de cette denrée. . |
, Il faut le dire , au grand honneur des proprietaires
vivans à la campagne & des fermiers, il
n’y a pas de gens moins fujets au malheureux ef-
prit du monopole. Si l’entrepreneur d une grande
manufacture apprend qu’il s’établit une fabrique
de la même efpèce à vingt milles"de'ta fienne ,
il n’en faut pas davantage pour l’ alarmer. L entrepreneur
hollandois de la manufacture de laine
à Abbeville , ftipula qu’ il n’y en auroit point de
femblable à trente lieues de cette ville. Les propriétaires
de la campagne & les fermiers ^ font,
au contraire, généralement plus difpofes a aider
leurs voifins qu’ à les traverfer dans la culture &
l'amélioration de leurs fermes & de leurs biens.
Ils n’ont point de fecrets , comme en ont la plupart
des manufacturiers j & > s’ ils ont trouve
quelque nouvelle pratique avantageufe, ils fe font
un plaifîr de la communiquer & de la répandre.
Plus qu&jius 3 dit Caton l'ancien, ft^ilijftmu.fque,
minimsque invidiofus ; minimeque male cogitantes
funt qui in eo fludio occupati Jiint. Les proprietaires
qui vivent à la campagne, & les fermiers
font difperfés & ne peuvent fe liguer auffi ai Cernent
que les marchands & les manufacturiers ,
q u i, raffemblés dans les villes & accoutumes a
cet efprit exclufif de communauté qui règne parmi
eux, tâchent naturellement d’étendre contre
tous leurs compatriotes le privilège exclufif qu ils
ont dans les villes, au préjudice de tous leurs
habitans. Aufli paroiffent ils avoir été originairement
les inventeurs des réglemens cjui s’ôppofent
étranger par une loi perpétuelle , c*eft, dans le
fa it , ftatuer que la population & l’indùftrie du
pays n’excéderont jamais ce que le produit bruc
de fon fol peut en entretenir.
Il femble cependant qu’il y ait deux cas où il
il feroit généralement avantageux de mettre quelque
à Y importation des marchandifes étrangères, &
qui leur affurent le monopole intérieur. Ce
fut probablement pour les imiter , & Pour *e
mettre au pair avec les gens difpofes à les opprimer,
que les propriétaires campagnards & les fermiers
fe font éloignés en quelques pa/s de la généro-
fité naturelle à leur condition , jufqu’au point de
demander le privilège exclufif de fournir leurs
concitoyens de grains & de viande de boucherie.
Peut-être ne fe donnèrent-ils pas le loiflr de con-
fidérer combien il y a.voit moins a craindre pour
eux de la liberté du commerce , que pour ceux
dont ils fuivoient Rexemple. ^
Péfçndre Yimportation des grains & du petaü
taxe fur l’ induftrie étrangère, pour encourager
l’indullrie domeftique.
Le premier cas eft lôrfqu’une efpèce particu*
lière d’ induftrie eft néceffaire à la défenfe du pays.
La défenfe de la Grande-Bretagne, par exemple
, dépend beaucoup de fes matelots & de fes
vaiffeaux. Par conféquent, l’aéte de la navigation
a cherché fagement à donner à fes matelots & à
fes vaiffeaux le monopole du commerce intérieur,
tantôt par des prohibitions abfolues, tantôt par
de gros impôts fur les vaiffeaux des pays étran*
-ge-fS'.'Les principales difpofitions de cetaéle font
celles qui fui vent.
i? . Tous les vaiffeaux dont les propriétaires ,
les maîtres & les trois quarts de l ’équipage ne
font pas fujets de la Grande-Bretagne, ne pourront
, fous peine de confiscation du vaiffeau &
de fa cargaifon , faire le commerce aux établif-
femens & plantations de l’Angleterre, ni être
employés au commerce côtier de la Grande-Bre*
tagne.
20. Un grand nombre des articles d’importation:
les plus volumineux pourront être importés
dans la Grande-Bretagne feulement, foie .
dans les vaiffeaux tels qu’on vient, de les décrire,
foit dans les vaiffeaux du pays produifant ces
articles, & dont les ^propriétaires , les maîtres
& les trois quarts des équipages feront de ce
pays-là ; & quand ils feront importés par des vaiffeaux
de cette dernière efpèce , iis feront fujets
à une taxe double de celle impofée fur les marchandifes
étrangères. S’ils font tranfportés dans
des vaiffeaux d’un autre pays, le vaiffeau & la
cargaifon feront copfifqués. Lorfqu’on fit cet
a& e , les hollandois étoient, ce qu’ils font encore
aujourd’hui, les grands voituriers de l’Europe
, & ce réglement leur ôta entièrement la
faculté d'être ceux de la Grande Bretagne , ou
d’importer en Angleterre les marchandifes d’aucun
autre pays de l’Europe.
3°. Défenfe, fous peine de confifcation du
vaiffeau & de fa cargaifon , d’importer, même
dans* des vaiffeaux britanniques , beaucoup des
divers articles d’importation les plus volumineux,
fi ce n’ elt des pays qui les produifent.
L’ intention de ce réglement fut probablement de
mortifier les hollandois. La Hollande étoit alors ,
comme à préfent, la grande foire où fe rendoienc
toutes les marchandifes de l’Europe, & par-là
on empêcha les vaiffeaux angiois de fe charger
en Hollande des marchandifes d'aucun autre pays
de l’Europe.
4°. Tout -poiffon falé, ainfi que les nageoires ,
les os & l’huile de baleipe, qui n’auront point
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