
vement cTenthoufiafme, on ne s'eft que médiocrement
exagéré les qualités de cette production,
elle deviendra une fource de richelTes pour la
colonie.
Cependant le terrein beaucoup trop fablon-
neux de la Floride orientale, en écartoit opiniâtrement
tout ce qui étoit avide de fortune.
Il-n'y avoit guère qu'un évènement extraordinaire
qui pût la peupler. Les troubles qui ont
agité l'Amérique feptentrionale , ont pouffé fur
ce fol 3 communément ingrat, quelques citoyens
paifibles, qui avoient un éloignement décidé
pour les diffenfions, & un plus grand nombre
<i'hommes, qui, par ambition, par habitude , ou
par préjugés, étoient dévoués aux intérêts de
la métropole.
, Les mêmes motifs ont donné, des colons à
l'autre Floride 3 beaucoup plus féconde, principalement
fur les bords riants du Miflïflïpi.
Cette province a eu l'avantage de fournir à la
Jamaïque , & à plufieurs illes Britanniques des
Indes occidentales ,• des bois & des objets variés
, qu'antérieurement elles recevoient des diver-
fes contrées de la Nouvelle - Angleterre. C e
mouvement auroit été plus rapide , fi les côtes
de Penfacola euffent été plus acceflïbles, & fi
fon port eût été moins- infeCté de vers.
L'Angleterre ayant cédé les deux Florides à
l'Efpagne, par le Traité de paix de „1782 , on
ignore ce qui réfuitera de ce changement de
domination, pour l'accroiffement de la nouvelle
colonie.
Combien feroient accélérés les progrès des
deux provinces , fi leurs nouveaux maîtres, s'écartant
des maximes trop conftamment fuivies,
daignoient s'unir, par les noeuds du mariage ,
à des familles indiennes ! On demandera pourquoi
ce moyen de civilifer les nations barbares,
qui a été fi heureufement employé par les politiques
les plus éclairés , ne feroit pas adopté
aujourd'hui? Et il eft peut-être à defirer que
l'Efpagne , renonçant à fes anciennes maximes,
fente la jufteffe de cette queftion.
Le voyageur Américain offre l'état fuivant
des marchandifes exportées de la Grande-Bretagne
, pour Penfacola, capitale de la Floride
occidentale ; & ces details étant très-propres à
donner une idée de cette partie de la Floride \
nous les inférons ici.
Fer , acier , -plomb , cuivre , : étain
fer blanc , & bronze travaillés", ouvrages'
de Birmingham & de Scheffield , ‘ chanvre ,
cordage, étoffe de fo ie , flanelle, baie de C b P
clïefter, ouvrages de Manchefter , mei'eërîè ,-
quincaillerie, ‘gants-.j 'Chapeaux ] ■ toiles- -d'Angleterre
& 'autres -, galons - d 'o r d ' a r g e n t ,1
màrchandifes dès Indes > mafquet’terie ta-
pifferies, agrès & proviflons dé navires ^’ couleurs,
peintures, eftàmpes , livres y modes ■, poterie
, pierres à a-iguifer, . bijouterie, pipes , fromages
, bière forte, vins, feumure , tabac , articles
, qui, au prix moyen de trois années, ont
coûté 97,000 liv. fterlings.
Des cuirs, dubois de campé- -v
che, & autres bois de teinture. ( y
Et de l’argent en pi affres, mon- i °*G
tant annuellement à . .
> 1. fte r L
Ainfi à l'époque de 1766 ou de 1768, les importations
de la Floride occidentale, excédoient
les exportations de $7 mille livres fterling : cette
difproportion à dû s'affoiblir depuis j mais il y a
lieu de croir#que les exportations & les importations
n'ont pu fe mettre au pair, & que la
balance du commerce fera encore plufieurs années
au défavantage des colons, ainfi qu'il arrive
toujours dans les établiffemens qui commencent à
fe former.
FOIRE. C e mot qui vient àtforum > place publique
, a été dans fon origine fynonime de celui de
marché ,1 & l’eff encore ,à certains égards : l’un &
l'autre lignifient un concours de marchands G*
d'acheteurs , dans des lieux & dans dés temps
marqués ; mais le mot de foire paroît préfenter
l'idée d'un concours plus nombreux, plus, fo-
lemnel, & par conféquent plus rare. Cette- réflexion
qui frappe au premier coup-d'oeil, paroît
être celle qui détermine ordinairement dans l'u-
fage l'application de ces deux mots > mais elle-
provient elle-même d'une autre différence plus
cachée, & pour ainfi dire plus radicale, entre
ces deux chofes. Nous allons la développer.
Il-eft évident que les marchands & les acheteurs
ne peuvent fe raffembler dans- certains temps »
& dans certains lieux, fans un attrait, un intérêt
qui compenfe , ou même qui furpaffe les frais
du voyage, & du tranfport des denrées j fans
cet attrait chacun refteroit chez foi : plus il
fera confidérable, plus les denrées fupporteront
de longs tranfports , plus le concours des marchands
& des acheteurs fera nombreux & fo-
lemnel, plus le diftriiff ,~dont ce concours eft le
centre pourra être étendu. Le cçmrs naturel du-
commerce fuffit pour former ce concours, &
pour l'augmenter jufqffà un certain point. La concurrence
des vendeurs limite le prix des denrées
& le prix des denrées limite à fon tour le nom-:
bre des vendeurs : en e ffe t, tout commerce devant
nourrir celui qui l ’entreprend , il faut bien
’qtfe le nombre des ventes dédommage le marchand
de là tnbdicitédes profits qu'il fait fur char
!cune, &;que' par conféquent le nombre des marchands
fe proportionne au nombre a&uel des
confommateurs , en forte que chaque marchand1
correfponde au nombre, de ceux-ci. Cela pofé
je fuppofe que lé prix d’une dénrée foit tel que:
pour foutenir le commerce, il foit néceffaire d’etv
vendre pour trois cens familles,-il eft évident'
que trois villages , dans' chacun defquels il ■ n'y
aura que cent familles, ne pourront foutenir*
qu'un marchand de cette denrée 5, .ce marchand-
* m
fe couvera probablement dans celui des trois j
Villages, où le plus grand nombre des acheteurs, j
pourra fe raffembler plus commodément, ou à
moins de frais, parce que cette diminution de
frais fera préférer le marchand établi dans ce
village, à ceux qui feroient tentés de s'établir
dans l'un des deux autres : mais plufieurs efpèçes
de denrées feront vrailemblablement dans lé meme
cas , & les marchands de chacune de ces denrées,
fe réuniront dans le même lieu, par la
même raifon de -la diminution des frais & ’
parce qu'un homme qui a befoin de deux efpeces
de denrées,aime mieux ne faire qu'un voyage pour
fe les procurer, que d'en faire deux: c'eft réellement
comme s'il payoit chaque marchandife
moins cher. Le lieu devenu plus confiderable
par cette réunion, même des différens commerces
, le devient de plus en plus } parce que tous
les artifans que le genre de leur travail ne retient
pas à la campagne , tous les hommes à qui
leurricheffe permet d'être oififs, s'y raffemblent
pour y chercher les commodités de la vie. La
concurrence des acheteurs , attire les marchands
parTefpérance de vendre j il s'en établit plufieurs
pour la même denrée. La concurrence des marchands
attire les acheteurs , par refpérance du
bon marché.} & toutes deux continuent à s'augmenter
mutuellement, jufqu'à ce que le défavantage
de la diftance compenfe pour les acheteurs
éloignés le bon marché de? la denrée, produit
par la concurrence, & même ce que l'ufage &
la force de l'habitude ajoutent à l'attrait du bon
marché. Ainfi fe forment naturellement les différens
centres de commerce ou marchés, auxquels
répondent autant de cantons & d'arron-
diffemens plus ou moins étendus , fuivant la nature
des denrées, la facilité plus ou moins grande
des communications, & l'état de la population
plus ou moins nombreufe. Telle eft , pour le dire
enpaffant, la plus commune origine des bourgade
« & des villes.
La même raifon de commodité qui détermine
le concours des marchands & des acheteurs à
certains lieux , le détermine aufli à certains jours,
lorfque les denrées font trop viles pour foutenir
de longs tranfports , & que le canton n'eft pas
affez peuplé pour fournir à un concours fuffi-
fant & journalier. Ces jours fe fixent par une
efpèce de convention tacite , & la moindre cir-
conftance fuffit pour cela. Le nombre des journées
de chemin entre les lieux les plus confide-.
râbles des environs , combinés avec certaines
époques qui déterminent le départ des voyageurs
, telles que le voifinage de certaines fê te
s , certaines échéances d’ufagedans les paie-
mens, toutes fortes de folemnités périodiques,
enfin tout ce qui raffemble à certains jours un
certain nombre d'hommes, devient le principe
de fl'établifïement d’un marché à ces mêmes
jours, parce que les marchands ont toujours intérêt
de chercher les acheteurs , & réciproquement.
.
Mais il ne faut qu’une diftance affez médiocre
, pour que cet intérêt & le bon marché ,
produit par la concurrence , foient contrebalancés
par les frais de voyage & de tranfport des
denrées. C e n’ eft donc point au cours naturel
d’ un commerce animé par la liberté , qu’il faut
attribuer ces grandes foires , où les productions
d’une partie de l’Europe fe raffemblent à grands
frais, & qui femblent être le rendez-vous des'
nations. L ’intérêt qui doit compenfer ces frais
exhorbitans, ne vient point de la nature ; mais
il réfulte des privilèges & des franchifes accordées
au commerce en certains lieux & en Certains
temps, tandis qu’il eft accable par - tout
ailleurs de taxes & de droits. Il n'eft pas éton-
. nant que l’état de gêne & de vexation habituelle,
dans lequel le commerce s’eft trouvé long-rems
dans toute l’Europe, en ait déterminé le cours
avec violence dans les lieux où on lui offroit un
peu plus de liberté. C ’eft ainfi que les princes ,
en accordant des exemptions de droits, ont établi
tant de foires dans les différentes parties de
l'Europe 5 & il eft évident que ces foires doivent
être d’autant plus confidérables , que le
commerce, dans les temps ordinaires , eft plus
furchargé de droits.
Untfoire & un marché font l’un & l’autre
un concours de marchands & d’acheteurs dans
des lieux & des temps marqués ; mais , dans les
marchés , c’eft l’intérêt réciproque que les vendeurs
8c les acheteurs ont de fe chercher ; dans
les foires , c’eft le defir de jouir de certains privilèges
,■ qui forme ce concours ( i ) d’où il fuit
qu’il doit être bien plus nombreux & plus fo