
Nous ^indiquerons pas ici les nombreux impôts
qu’il fupprime , ou qu’il diminue. Pour rem
placer les impôts abolis ou diminués , & pourvoir
à l’amortiffement des dettes } il veut que tous fes
bleds & menus grains qui fe moudront à la cam-
pagne, paient y baioques ( à peu-près 5 fols tournois
) par corba ( la corba pèfe réo lïv. ) 3 & les
habitans de la montagne , vivant de châtaignes 3
qu on confomme 3 fans les porter aû moulin, il
*net fur les châtaigniers un impôt équivalent à
celui des f baioques par corba, Il augmente du
double l’impôt fur le Tel, & il permet d'augmen-'
ter aufïî du double, fi on le croit nécelfaire, l’im-'
pôt fur le tabac ; enfin, il ordonne la confection
d un cadaftre > & il ajoute à ces impôts un impôt
fur les te r r e s d o n t lë produit, joint à celui des
autres tributs , pourra fatisfaire à toutes les dépends
& charges publiques , & amortir par
annee 70 mille écus romains de dettes. La
répartition de l ’impôt fur les terres, telle qu’ elle
eft fixée{ femble avoir befoin d’une explication :
Ejfendo poi giufio , dit l’ordonnance, che tra le
diverfe clajji dei poJfidenti3 quella rifenta maggior pefo3
èhe meno contribuifce al bene délia focieta, o che
meno participa del di lei pefo 5 quindi ordiniamo ,
the fijfata che fia fecundo La regola gia indicata ,
quella Jomma che dovra contribuirfi dài terreni in
genere 3 debba la medefima ripartirfi in modo che il
filmants paghi la meta piii di quello 3 che pagara
i l cittadino 3 e che i l foreftiere pagki due volte altret-
tanto pih. di quello che dovra pagkare il cittadino,
cofi , che fe la quota del cittadino far a 3 per efem-
pio y di Bajoecki quatro per ogni cent6 lire di efti-
tno , quella del fumante fia g di fe i, e in confiequen^a,
fia di dodici Bajocchi quella del foreftiere. La raifon
pour laquelle on impofe les habitans de la campagne
au double des habitans des villes, ne paroît
pas affez développée. S’il eft vrai que les habitans
des villes paient plus d’impôts fur les con-
fbmmations, ne peut-on pas obferver que les habitans
de la campagne font fujets d’ailleurs à plus
de redevances & de contributions ? Les agriculteurs
contribuent plus au bien de la fociéte que
les citadins ; ils fupportent davantage lé poids de
fès charges 5 & les habitans des villes, plus riches
en général, devraient payer des impôts plus con-
fidérables. Nous fentons que pour faire réuflir une
fi grande opération , il falldit fur-tout ne pas révolter
les habitans des villes , & on jugera ces
ménagemens bien excufables , lors même qu’on
critiquera la manière dont on les a motivés.
Cette ordonnance affujettit à l’impôt fur les
terres tous les -propriétaires, fans aucune exception
; & elle y foumet expreffément les laïcs, les
eccléfiaftiques féculiers ou réguliers , de quelque état 3
grade, condition , infitut & congrégation quilsfilent,
même ceux des ordres mendians , ou autres qui auraient
obtenu les privilèges des ordres mendians , les
chevaliers de Malte , de S. Etienne , de S. Maurice ,
de S* Lazare & de quelque ordre militaire .que ce
fo i t , les religieux , les lieux pies , les hôpitaux ,
les confréries , & collèges , les chapitres-, les dignitaires
de ces chapitres , les abbayes & commandes 3
les eglifes , les prélats , les évêques, les archevêques »
ceux mêmes qui fe trouvent affiftans du trône pontifical
, & leurs manfes refpeclives , les cardinaux ,
les abbés , les palatins Gr* familiers du pape , les
conclavifi.es 3 les dapiferes 3 les camériers, la chambre
apofiolique 3 les clercs de cette chambre , les membres
de la régence 3 les brévetés 3 officiaux & minifires du
faint-office , de Notre-Dame de Lorctte 3 de la ma nfe
archiépifcopale & de tout autre tribunal quelconque,
les étudions, les auditeurs civils & criminels 3fujfent-
ils princes , marquis comtes , barons & feudataires
du fivge apofiolique j les gouverneurs & lieutenans ,
officiaux & minifires , lors meme que leurs terres fe
trouveraient -dans l'enceinte de leurs jurifdiftions ,*
les privilégiés a titre de pères de douqe enfans 3 les
familles Qolonnà Gr* Lambertini , ou toutes- autres qui
réclameraient des exemptions acquifes , ou par la pref -
cription 3 ou par des titres formels 3 accordés ou confirmés
par les papes , &c. etc. C ’eft avec cet efbrit
de juftice rigoureufe qu’il faut répartir les impôts :
les clercs du Bolonois n’ont pas réclamé d’exemptions
5 ils n’ont pu fe fouftraire à l’impôt général en
offrant des impôts particuliers, qui rendent toujours
leur cçntribution moins forte ; & après l’exemple du
fouverain pontife lui-même, dira-t-on encore que
les conftitutions de Yéglife ne permettent pas d’ af-
fujettir les clercs aux mêmes impôts que les laïcs ?
La circulation des grains dans l’intérieur des
provinces n’étoit pas libre ; les propriétaires ,
d’après un réglement inconcevable , étoient obligés
de les conduire à Bologne : le nouveau régime
établit la libre circulation intérieure, &
on peut les envoyer dans les autres provinces ,
depuis le i ero£tobre, jufqu’àla fin de mars de chaque
année. Il oblige feulement les propriétaires à
dénoncer au gouvernement la quantité de bleds
ou,de menus grains qu’ils ont récoltés j à les garder
dans le Bolonois , les mois de juin , de juillet,
d’août & de feptembre } à ne pas les vendre & à
ne point permettre qu’ils foient achetés par les
étrangers ou les-nationaux durant cet intervalle,
excepté par les particuliers du Bolonois pour
leur ufage, par les boulangers pour l’ ufage du
public , & par les greniers autorifés du gouvernement.
Nous ne ferons aucune remarque fur ces
modifications j il faut voir quel en fera le fuccès :
nous obferverons feulement que la difficulté de découvrir
fi un particulier ou un boulanger achètent
des grains pour les accaparer , ou parce
qu’ils en ont un befoin urgent, obligera de
faire un réglement particulier : l’excédant des
fommes que produira le nouveau régime, eft def-
t-iné à l’abolition des-péages j la nouvelle opération
n’ ajoute pas un écu de plus au tréfor du pape;
& elle porte ainfi tous les caractères de la bien-
faifance & de la juftice.
Le rapport du cardinal adrefté au pape & h
loi du fouverain pontife annoncent des légiflateurs
éclairés, qui dominent les livres, les auteurs &
les fyftêmes,, qurféparent avec adreffe ce qui eft
julte & utile, de ce qui eft exagéré & dangereux.
Us eftiment la fimplicité des impôts, ils en
parlent avec intérêt ; mais ils croient fort dangereux
de réduire toutes les contributions à une feule,
à l ’impôt fur les terres ; & M. le cardinal Bon
Compagni développe dans l’ouvrage que nous indiquerons
tout,à l’heure, les diverfes modifications que
les bons efprits mettent aux nouveaux principes.
Chacun des article? a été rédigé après un examen
profond de toutes les parties de l’économie
politique : ce n’ eft pas un adminiftrateur çjui adopte
la ferme,,des impôts, parce que cette méthode fa-
vorife la pareffe, & ne donne aucun fouci ; c’eft
un écrivain habile qui a pefé tous les fyftêmes &
qui fe décide contre là régie : ce point eft difeuté
for,t en détail dans l’examen des réflexions fur les
nouveaux régleméns. Ses raifons paroiffent convaincantes
, relativement au Bolonois ; mais elles laif-
fent plus que des doutes, relativement aux autres
pays ; & pour porter dans ces matières la modération
& la circonfpedtion, fans lefquelles on manquera
toujours le b u t, nous croyons qu’on peut
établir en principes, qu’il y a des pays où l’ on
peut affermer les impôts, mais que dans la plupart
, la régie feroit utile. Enfin, cet ouvrage eft
pour l’état de Yéglife un monument qui doit prévenir
àjamais les mêmes abus dans fes provinces,
& il offre aux autres pays des détails fur l’excès
des maux & les fottifes que peuvent produire
l ’ignorance & la multiplicité des loix fifcales.
Quoiqu’on en d ife , il faut admirer les heureux
effets de la noble franchife qui développe ainfi les
motifs des loix & i’état des affaires ; & l’on voit
avec plaifîr, qu’un bel exemple, donné par quelques
adminiftrateurs , n’ eft pas perdu pour toutes
les nations.
La lettre du pape eft intéreflante d’une autre
manière. Le fouverain pontife a concerté & achevé
cette grande opération avec fon légat, fans
aucun intermédiaire ; il n’a point porté l’ affaire
au confiftoire ; il n’a point entendu les
miniftres de la chambre apoftolique , les propriétaires
des fonds de terres, ni aucun des privilégiés.
Pie V I jugea fagement que des confeillers
ne manqueraient pas d’embrouiller une affaire parfaitement
éclaircie, & que fi ces formalités font
en général utiles , il eft bien des cas où- elles
arrêtent les meilleures combinaifons. Il n’ a point
fait enregiftrer fa lettre à la -chambre apoftolique
; mais il déclare expreffément qu’elle aura
force de loi , malgré les bulles ou les réglemens
de fes prédéceffeurs : il-ôte d’une manière expreffe
au cardinal camerlingue, au tréforier de la cham-
b ç e , aux tribunaux du faint-fiège , le droit de
jugertcontre fa-teneur, ou de l’ interpréter d’une
maniéré contraire à fon efprit : il veut que la fimple
fignatftre dont elle eft pourvue équivale, à une ordonnânee
munie de l’appareil d*ufage. Pour no
pas Iaiffer fon opération imparfaite, pour ne j)oinc
l ’abandonner aux caprices ou à la diverfité d opinion
des légats qui viendraient après lui 3 M .J e
cardinal Bon Compagni , après cette première
lettre du pape , demanda qu’on établît une congrégation
des comptes , qui ferviroit de confeil
au cardinal légat; & le fouverain pontife, par une
lettre particulière , du 7 novembre 1780 , a établi
un confeil , charge de la vérification des
comptes & de beaucoup d’autres objets.
Une réforme fi importante ne s’eft pas faite fans
exciter des plaintes & des murmures. Des ouvrages
clandeftins l’ont attaquée fur tous les points :
ces rapfodies étoient pleines de menfonges, on n’y
retrouvoit que les objections de l’ ignorance & les
petites fureurs de l’intérêt : le fénàt cependant les
autorifoit fourdement, il en approuvoit les fottës
raifons, pour inquiéter le minillre qui s’ étoit occupé
avec tant de zèle du bonheur de la province.
C e miniftre a dédaigné d’emplover l’autorité, .
lorfqu’il pouvoit faire ufage de fes lumières ; & Ü
s’eft donné la peine d’éclairer lui-même les mé-
contens , & de prouver la néceffité, la juftice &
futilité de l’opération dans 'l’enfemble & dans fes
détails: le principal pamphlet des mécontens a
pour titre : RifleJJÎoni fiopra ï chirographi di N. S.
papa Pio V I , de 25 ottobre e 7 novembre 178® , rif-
guardanti lapublica économie, di Bologna : M. le cardinal
Bon Compagni a fait les Reflejfioni îfc.cxami-
nate : & fa réponfe eft un bel ouvrage. L ’auteur
des Réflexions annonçoit hautement que le nouveau
réglement ruinerait la province : il s’e-
crioit qu’on vouloit réduire Bologne a la dépopulation
, a la misère 3 a l'inertie, a la langueur de
Ferrare , de Ravenne 3 & de toutes les autres villes
qui gémijjent fous le gouvernement du faint-fiège, &
qui n'ont pas /’avantage de jouir d’un gouvernement
mixte 3 d'un gouvernement monarchi-ariftocratique, &
de l'influence réciproque du fouverain & des corps des
citoyens : & afin d’ en arrêter l’ exécution, il em-
ployoit toutes les petites reffources & fctoutes les
exagérations ufitées en pareil cas.
Dans la première partie du plan de réforme fournis
au pape, le cardinal - légat avoit repréfenté
que le fyftême des impôts du Bolonois & les droits
d’entrées étoient injuftes en eux-mêmes, mal alfis
& fondés fur des proportions extravagantes > que
la forme de la recette étoit bizarre ; que toute
I’adminiftration étoit très-compliquée, très-embar-
raffante & très-difpendieufe.
Que les impôts affe&oient fur-tout les confom-
mations ; qu’une loi dont les inconvéniens font
très-fenfibles, obligeoit à amener à Bologne pref-
que toutes les productions de la campagne ; que
les objets de première néceflïté étoient les plus
chargés de droits ; qu’ il en réfultoit une partialité
vicieufe en faveur du riche , & un oubli cruel
des intérêts des pauvres.
I Que les matières brutes de la province fortoient
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