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lundi , le mercredi, le vendredi 8c le famedi. Le
cadilesker de Natolie eft affis à fa gauche dans
le divan , mais Amplement comme auditeur j &
celui de Romelie , qui a voix délibérative , eft à
fa droite. Lorfque ce miniftre eft trop occupé, le
caufch-bachi le remplace > mais s'il y affilie, ce dernier
officier fait ranger les parties fur deux files , 8c
pafîer de main en main les arzhaals ou requêtes > jusqu'au
buijuk-teskeregi 3 premier Secrétaire du grand-
vifir , auquel il lit la requête i & les deux parties
foiit entendues contradictoirement 3 fans avocats 8c fans beaucoup de formalités > on pèfe les rai-
fons : des affeffeurs réfument le tout., 8c donnent
leurs conclufions. Si leur décifion plaît au grand-
vifir, le miniftre la confirme par le mot fak3 c'eft-
à - dire 3 certain : finon , il fait recommencer la
plaidoierie, 8c décide enfuite de fa pleine autorité
3 en faifant donner aux parties un hujet, ou
copie de la fentence. Les caufes fe fuccèdent ainfi,
fans interruption, jufqu'à la nuit j on fert 3 dans
la fâlle même de l'audience 3 un dîner qui ne dure
qu'une demi-heure. Six vifirs , ou confeillers d'état,
le chancelier 8c les fecrètaires d'état compofent ce
divan § outre le grand-vifir. Le chiaoux-bachi fe
tient à la porte , avec une troupe de chiaoux,
pour exécuter les ordres du premier miniftre. Les
caufes importantes qui intéreffent les officiers de
fa hauteffe , attachés à fa peifonne , ou qui occupent
les grandes charges de l'Empire, les délibérations
politiques , les affaires de terre & de
mer reffortiffent en çonfeil priyé du grand -fei-
gneur : on l'appelle galibé-divan. Il fe tient tous
les dimanches & les mardis, comme nous l'avons
dit. Les officiers militaires font affis à la porte >
le muphti y affifte, lorfqu'il y eft mandé par un
ordre exprès j le teskeregi ouvre l'affemblée par
la IeCture des requêtes des particuliers j le vifir
azem propofe enfuite l'affaire importante qurdoit
faire là matière de la délibération > 8c après que
les membres du galibé-divan ont donné leur avis,
ce miniftre entre feul dans une chambre particuliè
re , où il fait fon rapport au grand-feigneur
qui décide.
Si le fultan le juge à propos, il convoque
un confeil général, qui ne diffère du galibé-divan
que par le plus grand nombre des membres qui
le compofent. Tous les grands de-la Porte y font
appellés, l'uléma, les officiers des milices & des
difrérens ordres , même les vieux foldats & les
hommes les plus expérimentés. Ce divan s'appelle
qja divani , le divan des pieds 3 peut-être, parce
que tout le monde s'y tient debout. C e tribunal
a quelque rapport à nos anciennes affemblées des
états, comme le gatibé-divan au confeil privé du
roi de France, & le divan au premier parlement
de l’Empire. Voye[ l'article Ottoman (Empire ).
D IV A N -B E G H I , miniftre d’état en Perfe.
Le divan - beghi eft le furintendant de la juftice ;
R n’a quç le dernier rang parmi les fix tnkfiftres
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du fécond ordre, qui dépendent, à certains égards,
de l'athemadoulet, ou premier miniftre.
On appelle au tribunal du divan-beghi 3 des
jugemens rendus par les gouverneurs. C e miniftre
a yo,ooo écus d'appointemens, afin de rendre là
juftice gratis. Il connoît des caufes criminelles des
khans, des gouverneurs, 8c autres grands feigneurs
de Perfe difgraciés pour quelque faute 5 8c il reçoit
les appels du baruga, ou lieutenant-criminel.
Le divan-beghi rend la juftice dans le palais du
prince, fans fuivre d'autre loi 1 ni d'autre règle
que l'alcoran, qu'il interprète à fon gré. Il ne con^
noît que des crimes. Voye% Tavernier, Voyage de
Perfe. Le chevalier delà Magdeleine, qui eft refté
fort long-temps chez les turcs , en parle dans les
chapitres 49 & 50 de fon Miroir ottoman. Voye:£
l'article P e r s e .
D IV O R C E . C'eft la diffolution du mariage
par laquelle ceux qui étoient époux, ceffant de
l'être, font rétablis dans l'état civil où ils fe trou-
voient avant leur union, ne font plus tenus, l’un
envers l'autre, aux devoirs mutuels qui réfultoierit
de cette relation conjugale, 8c recouvrent la liberté
de fe marier de nouveau. Le Dictionnaire
de jurifprudence a traité cet article en
jurifconfulte j nous allons le traiter dans fes rapports
avec l'économie politique.
Chez les athéniens, le divorce étoit autorifé par
les loix : & on le trouve établi dans la plupart des
nations orientales j les loix de Romulus & celles
des douze tables, le permirent à Rome > elles exigèrent
feulement des raifons valables qui fe dif-
cutoient entre les parens. Dans la fuite , un mari
put renvoyer fa femme , 8c une femme put quitter
fon mari, fans donner de raifon precife. Les
empereurs firent des loix pour déterminer ces raifons
, 8c fixer les formalités du divorce. Les minif-
tres de la religion chrétienne interdirent enfuite le
divorce , lorfque le mariage avoit été contracté
félon les loix, & ils ne voulurent dégager que ceux
dont on pouvoit prouver que le mariage étoit nul 5
dans les autres c a s , ils fe contentoient de féparer
de corps & de bien les époux , ils les condam-
noient au célibat, & ils ne leur permettoient pas
de contracter un nouveau mariage. Quelques pays
chrétiens, & même catholiques , permettent le
divorce pour certaines raifons, & le refufent pour
d'autres. Les uns rendent une liberté entière aux
deux époux j les autres ne l'accordent qu'à l'une
des parties. Tant d’ufages différens annoncent que
les pefuples n'ont pas fuivi par-tout les mêmes
principes fur cette matière, 8c qu'ils n'ont pas
fondé leur légillation fur les mêmes réglés de droit.
Nous allons examiner ce qu'enfeignent là-deffus la
raifon, le droit naturel, la philofophie morale,
la religion 8c la faine politique.
La loi qui permettroit le divorce, devroit être
rédigée avec la plus grande précaution j car l’éta-
bliffement du divorce paroit entraîner les , plus
grands abus ? mais eft-il poffible d'arrêter ces
abus,
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jÿbus,- & -peut-on calculer toutes lès précautions
qu’exigeroit la loi ? Il faut en convenir , les nations
'.de l’antiquité , qui- autorisèrent le divorce 3 n en
avoient pas calculé les abus , & elles avoient
abandonné au hafard les. fuites de eet établiffe-
ment , le plus délicat- de tous ceux; que peuvent
former les hommes; Si la force des moeurs publiques
en diminua les inconvéniens à quelques
é p o q u e s i l en eft d’autres où la licence ne connut
plus de frein , .'où-'Tpn vit tous les dé for-
dres que devoir produire la négligence du légif-
’Jateur.
Ainfi, les Juifs en vinrent jufqu’ à autorifer un
homme à répudier fa femme , fans autre raifon,
que la nouvelle pafiion que lui infpiroit une femme
plus belle à fon gré que la première, ou un fimple
réfroidiifement pour celle-ci. C e fut bien pis. a
Rome : f i , comme on le dit , on n’y vit point de
divorce durant fix fiè c le s, malgré les loix de
Romulus 8c celles des douze Tables , qui le
permettoient , ( 1 ) , fur la fin de la république ,
un mari répudioit fa femme $ il en prenoit une
autre , & fa femme prenoit un autre mari, fans
- autre prétexté que leur fantaifie. Les hommes , ;
dans les commencemens , jouiffoient feuls du ;
droit de répudier leurs femmes ; mais celles- ;
ci obtinrent bientôt*^ ou s’arrogèrent le droit
de répudier leurs maris, 8c un auteur contemporain
obferve , que les'dames romaines étoient
dans le cas de ne plus compter les années par les
confuls, mais par les maris , dans les bras def-
quels elles pafïbient fucceflîvement ; que les plus
illuftres ne fe marioient que dans l'efpérance du
■ divorce’, 8c me répudioient un mari que pour en
époufer un fécond. Seneca3 lib. de Beneficiis, III, 16.
I Comment s'y prendra-1-on ? quel fera le fort]
des enfans qui relieront après le divorce ? Quel
fera celui de la partie coupable, ou de celle qui
fe trouvera innocente ? Lorfque la volonté mutuelle
opérera le divorce, quelle fera là fortune des époux
féparés ? 8cc. 8cc. Il faudroit entrer, fur tous ces
•points, dans des détails précis, 8c on eft effrayé
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de la’ multitude■ d’é l ém e n s& des.cotfvbitraifons
fans 'nombre que demanderaient ces calculs-
Il faudroit enfuite,fixer les lots ou portions de
biens & de revenus qui feraient lé partage des
femmes ou des enfans , après le divorce , relativement
à la fortune & à la condition des familles.
Notre but n'eft pas de réfpudre ces quellions
préliminaires i & avant de. s’en occuper . il faut
voir fi rien ne s’oppofe à rétablilfement du ai-
rV'oTce.
La conduite des premiers fiècles du chriftia-
nifme , pendant lefquéls le divorce fut toléré ;
l'exemple plus récent , & toujours fubfiftant
d'un royaume catholique ( la Pologne , ) ou
le divorce eft compris dans le code des loix nationales
,- & s'exerce fans fortir de l'ordre, fem-
blent prouver que le divorce & la religion ne font
pas inéceffairement incompatibles.
Depuis Conftantin jufqu’ à l'empereur Léon ,
qui monta fur le trône vers la fin du neuvième
fiècle , la loi du divorce conferva toute fon énergie.
Les changemens qu'on y apporta, n'avoient
pour motif que l'honnêteté publique 8c la surete
des citoyens. On vit publier , dans' cet intervalle
de près de dix fiècles, une foule de loix , tendantes
à réprimer les abus du divorce, fatis qu aucune
elfayât de le détruire ; & ce foin meme,
que prenoient de fages légiflateurs , de conferver
au divorce fon intégrité B- prouve, bien qu on le
regardoit ..comme légal.
Théodofe II 8c Valentinien III , touchés du
fort des ènfans qui reftoient après le divorce 3 8c
qui fouvent manquoient de fubfiftance , voulurent
qu’ à l’avenir le mariage ne put être rompu
fans formalités.- Ils exigèrent que le divorce fût
conftaté par un a&e folemrtel.
Par cette fage précaution, Théodofe 8c V a *
lentinien réprimèrent quelques-uns des abus du
j divorce. Les caufes qui pouvoiênt le produire,
étoient exprimées dans leur lo i, 8c lorfqu'il n'étoit
que l'effet dû caprice ou d'un motif qaché ,
on étoit puni. Dans ce cas , x la femme per-
, (1) Dènys d’Halycarnaffe , Valere Maxime & Aulugelle difent que » quoiqu’on eût à Eome la faculté de
répudier fà femme," on eut tant de refpeâ pour les aufpices > que perfonne , pendant cinq cents vingt ans ,
n’ufa de ce droit jufqu’à Çarvilius Ruga, qui répudia la fienne pour caufe de ftérilite. Mais_ il lufht de
;connôître la nature de l’efprit humain , pour fentir que la loi donnant à tout un peuple un droit pareil, ce
feroit un grand prodige que perfonne n’en ufêt. Coriolan, partant -pour fon exil conleilla à fa femme de le
marier à un homme plus heureux que lui. La loi des douze Tables & les moeurs des romains etendirent
beaucoup là loi de Romulus. Pourquoi ces extenfions , fi on n’avoit jamais fait ufage de la faculté de répudier
? De plus , fi les citoyens eurent un tel refpeét pour les aufpices, qu’ils ne répudièrent jamais ,
.pourquoi les légiflateurs de Rome en eurent-ils moins ? Comment la loi corrompit - elle fans cefte les
moeurs ? * 3 >> »-s. ,■ £ . _
En rapprochant deux pafiàges de Plutarque , on verra difparoître le merveilleux dn tait en queition. La
loi royale permettoit au mari de répudier dans trois cas. « Et elle vouloit, dit Plutarque, que celui qui
» répudieroit dans d’autres cas , fût obligé de donner la moitié de fes biens à fa femme, & que l’autre
,»■ moitié fut confacrée à Cérès ». On - pouvoit donc répudier, dans tous les cas, en fe foumettant à là
.peine. Perfonne ne lé fit avant Carvilius Ruga, « qui • comme dit encore Plutarque , répudia fa femme
> pour caufe de ftérilité, deux cents trente ans après Romulus. » : c’eft-à-dire , qu’il la répudia foixante &
Onze ans avant la loi dés douze' Tables, qui étendit le pouvoir de répudier, & les caufes de répudiation.
.
(Econ, polit. & diplomatique. Tom, IJ. Q