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L e ‘grand confeil ou Taffemblée générale : efl
coràpolë delà feigneurie y de tous les nobles, ou
dés principaux citoyens de la république. Il étoit
originairement de 400 perforines. Il eft-encore
cenfé contenir ce nombre, qui varie du plus au
moins félon les -eircônftances. Polir entrer au
‘grand confeil, il faut être âgé de virigt-deux ans ,
noble depuis trois ans.' On élit fous lès ans
ceux'qui doivent le cotnpofer , mais1 feulement
pour la forme ; car- on chtaifit toujours les mêmes
•membres j c eft-audite, tous les nobles :quel-
ques-uns cependant'en ont été exclus, parce
•qu'ils étoient notés'défavorablement. - On imprime
‘ chaque:année -la lille des membres'‘du grand con-
I ie i l , & c'eft- ce qu’on appelle le livre d- or 3- o u
• le catalogue" de tous des nobles; génois. Le grand
confeil eft proprement le fôùverain y car il- eft
revêtu-de la puiffance légiflative. Lui feul a le
"droit d'établir de nouveaux impôts, de"faite de
• nouvelles lo ix , de changer ou :de réformer-la
conftitutian 'de l'état. ‘C-eft- lui qui nomme*le do-
' g e , les gouverneurs, les procurateurs & les prin-
• c ipatix officiers de1 la répùblique.
Deux cens membres du grand confeil forment,
avec la feigneurie les autres* collèges, le petit
c o n fe i lq u e l'ôn; appelle' auffr confeil des : Quo- .
'rum: C e petit corffieiî termineles affaires des plus!
importantes de l'état j ii Chbifît les magiftrats inférieurs
j il décide' de la? paix * 'de la guerre,
Sc mêmell fait des' loix y poiïrvu-qnelles ne foient
-pas 'contraires' àf telles de 1 576 , :-& ‘qu’élles obtiennent
les deüx tiers des fuffrâges } mais 9 on ne
;’peut établir d e : nouvelles' taxes ,• ou propôfer de
nouvelles loix- au* grand confeil, fans lès-quatre
cinquièmes des füffrages: Quoique' le petit confeil
foit- élu- tous 1 Je? ans , c'elbaùffi fèülem’ent- pour
la forme j Car On élit toujours les mêmes ' mem-
• b res : l'élèâiôn fe fait' le 15 décembre , par
"trente petfontfes ou électeurs appéllées fages ou
prud'hommes i v irip fohi, que ce confeil élit lui-
même , & 'rend‘dépolitâiVes du droit de nommer
ceux -qu'ils - jugent dignes d'y- entrer. O nrem-
'plit de là même mtnreré-leâ plates -qui viennent
;a y vaquer'pendant le cours dé l'année.
Il y à un autre Confeil ƒ -appelle V ajfemblée j qui
éft côm'pefé de là feigneurie , du Collège des procurateurs
ÿ & de cent- membres- du grand Confeil.
II eft chargé de juger les affaires civiles- en -dernier
à’effort >’ & c'eft devant-lui que fe portent
- tous les appels' des tribunaux inférieurs.-Il affifte
d'ailleurs la feigneurie &• le college, dans les cas
difficiles. Les corifeüÿou collèges font donc au nombre
de cinq : i ° la feigneurie: leconfeii dés procurât
eùrs : 5 0 . le : grand confeil : 4 0 ' . ' le confeil :
: appelle- Q u o r u m j° i l'affemblée ou-le confeil
proprement dit. Le; doge prëfîde tous' Cês ctn-
feils ; mais il n'a" g’uères d'autres droits que celui
de propofer -les délibérations.
Pour être élu ïioge y il faut être né-de légitime
mariage , de famille notais ,• âgé-de cinquante ans ,
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j fénateur ou membre du grand xonfeil, &r affe*
riche pour foutenir honorablement cette dignité.
On procède ainfî à fon élèérion : on tire au1 fort
yo membres du grand'confeil, qui désignent Vingt
d'entr'eux. Ge nombre éft réduit à quinze par
le grand confeil j ces quinze font réduits à fix
par le, petit confeil, Jk c'eft enfin' fur ces fix
que le grand-confeil choifit le doge. Il habite le
palais de-la feigneurie avec deux gouverneurs qui
demeurent -fans ceffe auprès de lu i, & obfervent
fcrupuleufement toutes fes aérions. Il ne peut
recevoir-de vifites, ni donner audien’c e , ni ou-
vrir les'lettres qui lui font adreffées, qu'en pré-
fence de-ces deux furveillans. Il a d'ailleurs des
gardes - un train nombreux , & il marche
avec une-pompe prefque femblable à celle des
fouveràins. Il porte, dans les jours de cérémonie,
-une-longue robe à l'antique de velours ou
de damas crâmoifi , & un bonnet - rouge de la
même étoffe , qui eft quarré , qui fe termine en
pointe en-forme de piramide , & qui èft furmonïé
par une toüffe dé’fôie y àppelléérfioceo. Au moment
de fon1 ihftallariôn, on lui mettoit Autrefois une
couronne fur la • tête & un feeptre à la main
cette eérémôffie :;rela%ive-au royaume de Corfe ,
dont ‘la-république-étoit alors fouveraine ne s'ob-
' ferve plus ,■ depuis quelle a cédé cette ifle à la
France- (éti 1768). On donne au doge , depuis l'année
1581 y qu'il lui' fut accordé‘par fempéreur
Rodolphe , le titre de férénijfime & dx:lluftrijfime
prince , de votre férénité ; ce qui éft- auffi celui de
tout le corps ‘de-la république, qu'on appelle
Jiréniffime république de Gênes. Quand un doge
éft forti de charge , "on lui donne l'épithète d'e#-
cellentijfime ± qui on donne aux gouverneurs & aux
procurateurs.
. Nous- avons déjà obfervé' que ;îe doge n'eft
plus qu'une vaine idole, accablée fous le poids
d'un attirail 81 d'un cérémonial fatigant, farts
poûvbir, fans crédit a ce n’e ft, en un mot , qu'un
vain fantôme qui repréfente la république. Auffi
fa dignité eft-elle plus: à charge que lucrative, &
on l'envie ft peu qu'un grand nombre de nobles
font ce qu'ils peuvent pour y échapper. Us ne
peuvent cependant la refufer ouvertement, non
pius-que les charges fupérieüres. Le même homme
ne peut être reçu doge qu'après dix-ans, ce
" qui n'eft jamais arrivé. Il ne deviendroit point
procurateur a Vie s'il' avbit contré'lui des plaintes
graves , 8ç fi l'on étoit mécontent de fon ad-
miniftration. Gar, à la fin de fon dogat, il refte
huit jours expofé aux plaintes publiques ; les cen-
feurs ou fyndics fupremes, dont nous parlerons
tout- à-l'hèure , reçoivent toutes les , àiëhôncia-
tibns toutes les accufations intentées contre lui,
- & rabfdivent ou le condamnent. S'il étoit convaincu
de malverfationv ou de queîqae crime
-.grave, il feroit-rigoüréüfementpuni, ou du moins
on le priveroit de la -procuratie perpétuelle»
Durant la Vacance du fiège d uca l, c'eft le plus
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ancîen dés gouverneurs qui fait lesfonftîons de
Il y a plufieuTs magiftratures d’ un ordre inferieur
: les plus importantes font celles, de cen-
feurs ou fyndics fuprêmes, efpè.ce d'éphores qui.,
font au nombre de cinq., & charges d examiner
avec foin la conduite du doge &, de tous les ma-
giftrats qui fortent de charge, ainfi que de veiller
au maintien & à l'exécution des lo,ix. Les cen-
feurs font quatre ans en charge. Apres eux viennent
les fept inquifiteurs d'éçat > tribunal fçvere: >
mais beaucoup- moins redoutable qu a yenife} ils
veillent à la fureté , à la tranquilité‘& a la police
intérieure de l'état : ils obfervent tout ce qui le
palTe dans la v ille, & même dans l'interieur des
maifons & le fein des familles, & ils ont 1 oeil
toujours ouvert pour prévenir les complots^ les
foulévemens. Il y a encore trois charges de le-
crêtaires d’état, magiftrature fubalterne , Çiu on
confère ordinairement à des citadins. en recom-
penfe de leurs ferviees. ou pour exciter I’emu-
lation des citoyens du fécond ordre 3 qui ne peuvent
parvenir aux magiftratures fupérieures. Ces
charges font très*lucratives, & donnent la no-
blefife à ceux qui en font revetus j ils les exercent
dix ans, & ils obtiennent quelquefois une
prolongation de trois années.
Suivant un ancien ufage, la juftice eft rendue
à Gênes par un podeftat./ou juge criminel, qui
eft étranger. C e font auffi des étrangers qui
jugent les affaires civiles. C e font pour 1 ordinaire,
des doéieurs en droit, tires ^des^états voi-
fins, ou de différentes univerfités d'Italie. Us font
au nombre de trois. On appelle de leurs jugeraens
devant trois doreurs de la nation, ou, deux docteurs
& un noble *, & en dernier reffort, devant
le confeil ou l'affemblée , dont-nous avons parle
plus haut. Il y a d’ailleurs une rote criminelle , 1
établie en 1 y y é , avec des loix qui fervent à diriger
fes jugemens. Quatre juges, tires egalement
de l'étranger , font à la tête de ce\ tribunal : fes
jugemens le portent pardevant la feigneurie^ &. le
collège des procurateurs , qui, comme on I a v u ,
décident de tous les délits graves, tels que conf-
piration , crime de haute trahi fon , parricide ,
&c. Outre le droit romain , qu’on fuit généralement
dan.s l'état de Gênes, il y a^ des coutumes
particulières , dont on a fait differens traites,
lelquelles, jointes aux décjfions de la rote & aux re-
glemens de 1528 & de 1^7^ » fervent de hafe
à la jurifprudcnce civile & criminelle de Gênes.
Gênes a un tribunal de l'inquifition , prélide
par un dominicain j mais ce tribunal n a prefque
aucun-pouvoir , & fur-tout il ne peut faire beaucoup
de mal 5 car il eft affilié de deux fénateuts
qui furveillent toutes fes démarches : ils confirment
ou infirment les jugemens de l inquifition ,
(c) Bufching donne le nom de ces familles»
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qui ne peut tien ordonner fans leur aveu. Ils
l’empêchent de rien entreprendre fur la fortune ,
la v ie , l’honneur & la tranquilité des citoyens.
En 1 fz8 , André Doria diftingua vingt-huit
familles. qu’on appella (x). l’ancienne nobleffe ;
il les déclara feule» capables d’occuper les char-;
ges du gouvernement & de parvenir, a la dignité
de doge, & il parut mettre toutes les autres familles
dans la claffe du peuple'. A ces fa il lie s ,
on en a depujs ? jouté quelques-unes quiiurent obligées
de changer de nom i ,ou, de prendre un de
• ceux de l'ancienne nobleffe. Dans la fuite, çour
conferver la p aix , il a fallu changer ces regle-
mens , & permettre , non-feulement que ces familles
réunies aux vingt-huit anciennes, rep ri fient
leurs vrais noms .& leurs armes, mais auffi qu on
créât une nouvelle nobleffe. La nobleffe ancienne
.s'arroge dés privilèges fur la moderne, quoiqu elles
aient l'une & l'autre ûn droit égal aux charges
de l'état.
S e c t i o n I V e.
De la banque de.S, George , & des revenus de la
république de. Gênes.
La banque de S. George a de fi grands rapports
avec le .gouvernement, l’adminiftratipivScies
finances de la république de Gênes , que nous,
•croyons devoir en parler avec quelques-détails.
La banque de S. George eft comme une,autre
république au. fein même de Gênes ; elle a fes
loix „ fes magiftrats & fes officiers particuliers.
C ’ eft par fa bonne adminifttation. qu’ elle, fe fou-
tient depuis plus de 400 ans ; elle a poffede autrefois
en propre -'l-’iftè de Corfe & differentes
polTeffions & colonies génoifês dans, le levant :
I le malheur des temps obligea la république de
les lui abandonner, parce, qu’elle^ étoit plus erv-
état qu’elle de pourvoir à leur défenfe j ce qui
obligeoit cette banque d’entretenir alors des flottes,
& d’avoir des. troupes à fa.folde-
.- La maifon, banque ou compagnie de S . George
eft-un des plus anciens étahliffemet« qu’on con-
noiffe ; il doit fon origine à des prêts que des
particuliers faifoient à la république dans fes besoins
, & pour les intérêts defquels on leur af-
fignoit le revenu de fes gabelles, dont elle recou-
vroit le produit. Ces prêts etoient une forte
d’achat du produit des gabelles 5 auffi les nomma
t-on d’ abord , Sc les nomme t-on encore com~
'■ pere. Les premiers compere remontent a 1534- En
14CH il exiftoit affcz de compere, pour que leur
intérêt fût prefque égal^ au produit annuel des
gabelles. En 1407 on réunit tous les compere ,
appartenans à différens particuliers, en une feule
compagnie qui prit le nom de S. George , du nom
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