
droits avec beaucoup de fagacité , 8c avec une
modération & une adrefîe vraiment dignes Reloges
3 nous allons le rapporter.
« Sa majefté le roi de Prufle fe trouve depuis
” quelque temps engagé inopinément dans une
9* conteftation avec Dantzic 3 qui attire l'attention
99 de l'Europe s & peut donner lieu à de faufîes
99 interprétations de la part du public non inf-
M truit. On eft ordinairement porté à donner tort
*> au plus puiflant vis-à-vis du plus foible, 8c à
99 lui attribuer des defleins cachés & étendus }
»> mais il fuffira d'expofer l'origine 3 les progrès
99 & l.état aéluel de cette difcuflion , avec fes
95 circonftances & les raifons qu'on allègue des
99 deux côté s , pour convaincre que de pareils
» defleins n’exiftent nullement ici } que la ville
99 de Dant^ic n'a pas même l'ombre de la raifon
95 de Ton côté ; que 3 par des'vues d'une politi-
» que mal entendue, elle fufcite au roi une que-
99 relie j qu'il n'auroit pu attendre d'un étatbeau-
» coup plus puiflant ; & qu'enfin fa majefté en a
” agi 3 dans cette occafîon, avec cette modéra-
99 tion & cet amour de la. juftice dont elle a de
99 tout temps dpnné tant de preuves convainquan-
99 tes. Lorfque la république de Pologne, parle
99 traité de Varfovie du 18 feptembre 1773 3 cé-
99 da à fa majefté toute la Prufle polonoife 3 on
99 n'excepta que les villes de Dantnc & de Thorn
99 avec leur territoire y & hors de là il ne fut rien
99 ftipulé en faveur de la ville de Dant^ic. Sa ma-
99 jefté reçut donc les bourgs de Langfurh, A lt ,
” Neufchottland , Schiedlitz & Stolzemberg ,
99 dépendans auparavant de la couronne de Po-
99 logne 3 & qu'on appelle fauxbourg de Dant^ic
99 à caufe de leur proximité. Les habitans de ces
99 bourgs 3 lorfqu'ils fe trouvoient encore avec
” Dantnc fous la même dénomination polonoife s
” commerçoient librement fur la Viftule, en paf-
« fant Dant^ic 3 & alloient chercher leurs den-
99 rées des contrées prufliennes fîtuées de l'autre
*» côté 3 lorfqu'ils ne préféroient pas de les pren-
99 dre à Dant^ic même. C e commerce & cette
99 navigation libre ont 3 autant que l'on en eft
99 inftruït 3 continué comme auparavant, lorfque
99 la Pruffe polonoife & avec elle les villes ci-
99 deflus furent cédées à fa majefté 3 & Réparées
99 de Dant^ic, A u mois d'avril de cette année
99 ( 1783 ) , le magiftrat de Dant fie commença à
99 défendre aux habitans des villes prufliennes ,
99 fituées en-deçà dzDantfic, de tirer directement
99 leur bled & autres denrées du territoire pruf-
99 lien fitué au-delà, exigeant que les cargaifons
99 achetées dans ce territoire fuflent vendues au
99 marché de Dantfic pour le prix déterminé par
99 les dantzicois 3 & que les fufdites villes pruf-
99 fiennes achetaient d'eux à des prix également
» arbitraires les denrées dont elles ont befoin.
" Tous les bâtimensdes fujets du roi 3 venant du
» territoire pruflien 3 furent arrêtés par la milice
99 poftée air Blockaus , & forcés avec des pro- |
» cédés même infultans de décharger à Dantfici
99 Par cette nouveauté 3 on interrompit le com-
99 merce & la navigation libre que les fujets pruf-
99 liens avoient de temps immémorial fur un fleuve
99 <^ui j à fon embouchure & dans fa plus grande
99 étendue 3 appartient à leur fouverain j & non
99 content de cette défenfe de la navigation 3 on
99 interdit également aux fujets prufliens 3 fé-
99 parés par la ville de Dantfic , toute com3
99 munication ou échange de leurs produits ré-
99 ciproques par terre. Les fujets du roi 3 .aban*
99 donnés ainfi aux procédés arbitraires & intérefles
99 des négocians dantzicois 3. en portèrent les
99 plaintes les plus amères à fa majefté. Le roi
99 fe borna d'abord à faire faire, par fon réfident
» à Dantçic , des repréfentations, tant verbales
. qu'écrites , au magiftrat $ mais ces repréfenta-
99 tions demeurant fouvent fans réponfe, & tou-
99 jours fans réponfe fatisfaifante, le miniftère du
99 cabinet du roi adrefla , le 20 juin & le 24
99 juillet, au magiftrat d e Dant fie des lettres auffî
99 pleines de modération que bien mptivées î fl
99 n'en reçut que des réponfes vagues, déclina-
» toires & obfcures, fondées fur des prétextes
99 vagues , & qui fe réfutoient d'eux-memes. Le
» public impartial, qui lira ces pièces telles qu'el-
99 les out été jointes à cet expofé publié en alle-
99 mand, s’inltruira par leur contenu des détails
99 de cette difcuflion, & fe convaincra de l'in-
» juftice évidente de la prétention de la ville de
» Dant f i e , & de l'équité manifefte de ce que
99 fa majefté exige d'elle. Le miniftère fit accôm-
99 pagner ces lettres de repréfentations verbales
99 du réfident, fommant le magiftrat de Dantzic
99 d'indiquer les raifons de fon procédé. On offrit
99 de fatisfaire à toute prétention fondée, deman-
99 dant feulement q ue , jufqu'à l'époque d'un ar-
99 rangement, on continuât de permettre aux fu-
99 jets du roi l'exercice de la navigation & du
99 commerce libre par terre, comme ils en avoient
99 joui auparavant. Mais la ville de Dant fie dé-
^9 clina toutes ces propofitions. Il ne reftoit donc
» à fa majefté d’autre voie , pour foutenir fes fu-
». jets , que celle des repréfailles, qu'on a pour-
» tant exécutée avec toute la modération pofli-
99 b le , quoique jufqu'à ;préfent fans effet. Le roi
» ordonna d'abord, au mois d’août de cette an-
» née, au colonel de Pirch de porter un petit
» détachement de troupes fur l'ifle de Holm 8c
» territoire pruflien, de s'afliirer ainfi du paflage
99 de la Viftule en cet endroit, 8c de renvoyer
» fans aucune violence tous les bâtimens dantzi**
» cois allant de la ville à la mer Baltique, ou
99 de la Baltique à la v ille , laifîant néanmoins
» pafler fans difficulté les vaifleaux des nations
» étrangères. Ceci ne produifit aucun effet ; toute
» cette difcuflion fembla devenir radins l'affaire
» d'un magiftrat fage & éclairé, que celle d’une
» populace effrénée. Aucun fujet ou employé
» pruflien ji'ofoit plus fe montrer avec fureté fur
m le territoire dantzicois. Le colonel de Pirch,
» voulant fai ré pafler fur la Viftule un bâtiment
» pruflien, fut infülté, avec les foldats qui 1 acr
» compagnoient-, par la populace, de la maniéré
99 la plus groflière, fans que la garnifon du Blo-
99 chauff, qui, fe trouvoit tout près de l à , eut
99 cherché à l'empêcher. Le confeiller de la re-
* gence, Meyer , fut attaqué dans la^ ville avec
99 danger de fa v ie , & le magiftrat s’excufa fur
» ce q.u'il ne pouvoit retenir la fougue du peu-
» pie. Le magiftrat fe replie toujours dans cette
9» affaire fur la volonté & les réfolutions de^ la
99 bourgeoifîe, & de ce qu'il nomme le troifieme
99 ordre , duquel il prétend % e gêné, & au
Ê point de ne pouvoir agir autrement. Une oblli-
nation aufli décidée obligea le roi àüldonner
» aux repréfailles un nouveau degré de force : on
» interrompit le commerce des dantzicois par ter-
99 re , & on fit arrêter leurs vaifleaux au Neu-
» fahrwafler. Ces nouvelles mefures relièrent en-
99 core fans fruit. Le magiftrat çrutfe tirer d'affaire,
99 parla déclaration plaufible,qu'il avoit abandonné
99 toute l'affaire à fon fouverain le ^oi de Pologne.
99 Comme en d'autres occafions, où elle n'y trou-
99 voit pas fon compte, elle a toujours évité de
99 reconnoître la fouyeraineté de la Pologne, par
99 exemple, en rejettant la convention conclue
99 entre la Prufle & la Pologne, pour l'abolition
99 de la traite foraine, on auroit pu avec raifon
99 décliner la médiation d'une cour éloignée, par
99 rapport, à une prétention aufli étrange. Cepen-
99 dant on attendit encore l'effet des foins du comte
99 d'Uuruhe que le roi de Pologne avoit envoyé
99 à Dant^ic ; toutes les repréfentations de. ce
03 miniftre n'opérèrent que la déclaration à laquelle
M la ville fe détermina enfin de vouloir rendre la
” liberté du commerce & de la navigation aux
** fujets du roi j mais fa/vo jure, feulement jufqu'à
M la fin de cette année, uniquement pour les den- 31 rées de confommation, fous condition que tou-
99 tes les repréfailles cefleroient aufli-tôt. Il étoit
» impoflible d’accepter une propofition aufli infi-
99 dieufe , puifque la ville obtenoit par-là une re-
»» connoiflartce inditeéle de fa prétention, & la
99 ceflation entière des repréfailles que l'on ne re- 1
» commence pas aifément, tandis que les fujets.
99 du roi n'obtenoient que pour deux mois d'hiver,
» où la nature même y met obflacle, cette liberté
99 de commerce & de navigation dont ils ont joui
» de tout temps, & qu'on n'auroit pas manqué
99 de leur contefter bientôt après. Le roi n'efpé-
99 rant plus obtenir , par la voie des repréfen-
99 tâtions, de la négociation, & même de repré-
99 failles modérées, cette liberté naturelle qu'il
» réclamoit pour fes fujets, s’eft vu avec regret
» forcé de pafler à des mefures plus férieufes. Sa
» majefté a ordonné en conféquence au général
» major Baron d'Eglofstein d'entrer avec quatre
» bataillons d'infanterie & quatre efcadrôns de
». cavalerie fur le territoire de D^nt^ic , que les
QScoti, jpolit, 6? diplomatique. Tome Ils
» troupes du roi nJavoient pas touché jufques-là >
si d'enfermer cette ville de tous cotés , par mer 8c
» par terre, quoique dans une certaine diliance5
» -d'obferver, du refte, la difcipline la plus fé-
« vère, 8c de laiffer pafler fans difficulté tous
11 les vaifleaux étrangers. .Cette démarche meme
11 n'a pu encore vaincre l'obttination de la ville
11 de Dantqjc, 8c n'a produit qu'une réponfe va-
« gue au général d'Eglofstein , dans laquelle ■ le .
twis magiftrat renouvelle fa première déclaration ,
» qui porte fur un intérémiftice de deux mois ,
« 8c envifageant comme obligatoires les premières
« offres qu'on n’avoit fait que par condefcendan-
» c e , fe plaint de ce qu'on exige maintenant une
11 liberté entière 8c illimitée de la navigation. Il
« eft vrai que, durant cette conteftation, le roi
>1 a fait propofer, pluiieurs fo is , tant à la cour de
11 Varfovie qu'au magiftrat de Dant^ic, d'accor-
11 der aux fujets du roi le libre paflage ^ feule-
h ment falvo jure, 8c jufqu'à l'époque d'un ar-
» rangement amical ; mais , fuivant la nature des.
11 chofes 8c l'équité la plus manifefte, ces pro-
!•' polirions portoient fur un commerce entièrement
» libre, 8c non reftreint à un court efpace de
'11 temps. Or le magiftrat les ayant déclinées^, 8c
» ne les ayant enfin acceptées que comme par
u grâce, 8c en reftreignant fa conceflion d'une
» manière vague 8c infidieufe aux denrées de con-
: » fommation des fujets prufliens 8c au court ef-
II pace de deux mois inutiles pour la navigation,
» 8c qu'il auroit fans doute laiffé écouler fans
11 arranger l'affaire, .après que les repréfailles au-
» roient une fois été lévées ; fa majefté ne peut
„ être rappellée à des offres volontaires 8c non ac-
» ceptées , 8c voyant la mauvaife volonté de
11 la ville de Dantçic, 8c fon obftination à oppri-.
11 mer conftamment les fujets prufliens, elle ne
! » peut qu'infifter- maintenant fur une* définition
I II entière 8c radicale de l'affaire , 8c fur la cpn-
. „ ceflion illimitée du libre paflage de fes fujets
» fur le territoire de Dantnc ^ 8c jufques-là con-
n tinuer les mefures qu'elle a été obligée d'adop-
» ter. Mais comme èlle n'a jamais eu 8c n'a en-
« core aucun deffein hoftile ou contraire aux
1. traités contre la ville de Dantçic ; quelle eftfeu-
n lement difpofée à foutenir fon commerce d’une
1. manière conforme aux avantages de fes propres.
» états, ces repréfailles ne dureront aufli que juf-
i> qu’ à ce que cette ville ait remis fur l'ancien pied
,i le commerce libre des fujets prufliens, leur
» ait affuré folemnellement, pour leuts perfon-
., nés 8c marehandifes, le libre paflige par fon
1, territoire, 8c ait procqfé à fa majefté une fa-
» tisfaélion convenable pour les procédés infolens
1, qu'on s'eft permis envers fes officiers 8c fujets ;
» ces points accordés, les repréfailles cefferont
» auffi-tôt ». p
Il feroit inutile d'examiner les raifons que donne
ce manifefte ; il fuffit de dire que le roi de
Pruffe a obtenu une fatisfaétion complette. Voici