
& fui vantes , 8c cette année commune eft de
1 1 ,4 17 , dont il y en a ordinairement 7,613 en
nourrice 8c en fevrage , 3,068 en penfion, 84 à
la maifon de couche, & 656 à la maifon de Saint-
Antoine.
J ’ai cru qu*on verroit avec intérêt la progreffion
du nombre des enfans-trouvés, depuis la naif-
fance de l’hôpital, jufqu’à cette année. C e relevé
a été fait avec la plus grande exactitude.
Ç— - — — —
TABLEAU DE R É C E P T IO N
des Enfans - trouvés depuis l'êtabliffement.
Années. Enfans.
1670 .» .
160O . . . . . . §90
1690 . . . . . . 1304
17GO . . . . . . 1758
1710 . . .
1720 . . . . . . I44I
1730 . . .
1740 . . . . . . 3150
1741 . . . . . . 5588
1741 . . . 3163
1745 . . . 3099
1744 ••• . . . 3034
174J . . . . . . 3234
I74<î . . . . . . 3271.
1747 . . . 3369
1748 . . . . . . 3429
1749 . . . ?77î
1750 . . . . . . 3789
I7f l . . . . . . 3783
l i » ••• . . . 4I27
‘753 . . . . . . 4529
I7H . . . 4231
17SS ••• . . . 4273
• 1756 . . . . . . 4723
1757 ••• -----4969 U
Années. Enfans.
1758 —
1739 . . . . . . 3264
1760 . . . . . . 3032
1761 . . . . . . 3418
1762 . . . . . . 3289
1783 — . . 3234
1764 — . . 3338
1763 — • ■ 549<5 17 6 6 ----- . . 3604
1767 . . . .
1768 ----- .• 6025
1769 . . . .
1770 . . . .
1771 . . . . . . 7136
1 7 7 2 ----- . . 7676
1773 ----- . . 39S9
1 7 7 4 ----- . . 6333
1773 . . . . . . 6303
1 7 7 6 ----- . . 6419
1 7 7 7 ----- 9 6703
1 7 7 8 -----
1 7 7 9 ----- 1780 •• • • -■ 3568
I781 . . . •
I782 . • • •. . . .3444
On eft effrayé de la différence du nombre des
enfans expofés, lors de l’établifïement de l’hôpi-
tal , avec celui des enfans qu’ il reçoit actuellement;
elle eft au moins d’un à treize. La première
année , on reçut 312 enfans, & en 1782,
on en admit 5,444.
Le tableau prouve que la diftance de ces deux
nombres a quelquefois été plus frappante.
Cette énorme progrefïion fait craindre à l’un
des concurrens ( 1 ) au prix donné en 1777 par
l’Académie de Chaalons, que pour peu qu’elle
continue, tous les enfans fe trouvent, avant un
fiècle, fans père & fans mère j que tous les pères 8c toutes les mères veuillent être fans enfans, 8c
que la France ne foit plus qu’ un hôpital d’enfans-
trouvés , 8c tous les françois, des bâtards. Cette
terreur, abfolument vaine & injurieufe aux moeurs
françoifes, & qui n’a d’autre fondement que l’oubli
de l’état aCtuel focial, fe diffipe aifément à
l’aide de la réflexion.
On en a prefque conclu , que l’ établiffement
de faint Vincent de Paul a été plus nuifible aux
moeurs, qu'il n’a été utile à l’humanité; comme
fi un plus grand nombre de malheureux qui profite
d’un afyle , étoit un outrage aux moeurs $
comme fi cette augmentation étoit le réfultat de
l’établiffement, 8c non pas celui de la combinai-
fon d’une foule de caufes étrangères ; comme fi
elle ne rappelloit pas la multitude de crimes qui
ont dû exiller avant lui ; 8c enfin, comme fi au
contraire en préfentant autant de facilité à con-
ferver les enfans , l’hôpital n avoit pas ainfi déraciné
prefqu’entiérement l’atrocité morale qui les
faifoit périr.
L ’augmentation du nombre des enfans-trouvés
à Paris n’a pas pour caufe unique le débordement
des moeurs. Si on veut qu’elles fe foient extrêmement
dépravées d’une p art, elles ont acquis de
l’autre plus de douceur ; ce qui auroit dû contribuer
a diminuer les expofitions. Peut-être même,
parce que la honte perfécute moins les foibleflfes,
la nourriture des bâtards par leurs mères ou par
des nourrices à gages, eft-elle devenue plus commune
? Mais ce feroit une erreur, de croire que
les enfans‘ trouvés font prefque tous illégitimes ;
ils n’en font que la plus petite portion, & encore
comprend-on dans ce nombre les enfans deftitués
de tout aile probatoire de leur état, & qui tous
certainement ne font pas les produirions du crime,
fi à ces confidérations on ajoute que les provinces
envoient ici leurs enfans expofés ; ce qui ne pou-
voit avoir lieu avant 1670 : on ne trouvera pas
que les mauvaifes moeurs aient confidérablement
accru le nombre des enfans-trouvés. D ’ ailleurs , il
eft trop vrai de dire actuellement qu’ elles nuifent
à la population. Ainfi, il feroit imprudent de conclure
du grand nombre de ces enfans que les moeurs
font plus que jamais corrompues.
La caufe la plus générale & la plus exaéte de
cette progreffion , c’eft la misère , qui pendant
longues années s’ eft appesantie fur le petit peuple, 8c que les efforts bienfaifans du prince qui' nous
gouverne n’ont pas encore pu foulager. Il eft en
effet aifé de concevoir la pefanteur du fardeau que
la naiffance d’un enfant va impofer à une pauvre
famille, 8c l’ une des confidérations qui frappent
(1) Moyens de détruire la mendicité, page le
le plus un obfervateur, c ’ eft qu’ elle puiffe fe déterminer
à en avoir.
Une preuve bien fenfible que l’indigence a oc-
cafîonne cet accroiffement du nombre des enfans-
trouvés , e’eft l ’état dè l ’hôpital de Clermont,
envoyé par l’intendant d’Auvergne.
Pendant les fix années qui fe font écoulées, de
1743 à 1748, il y a e u , année commune, dans
ce demie* hôpital, 625 enfans - trouvés. Le prix
du bled étoit alors à 9 liv. 5 f. 4 den. le feptier.
Dans fix autres années, de 1770 à 17 76 , il y a
eu 1290 enfans, parce que le prix du bled étoit
alors monté à 19 liv. 12 f. 11 den. Ainfi, lorfque
le prix du bled a doublé , le nombre des enfans
a doublé également. On n’a qu’ à jetter les yeux
fur le tableau d - deffus , 8c on y reconnoitra
quelles ont été les fuites d’années les plus mal-
heureufes par l’augmentation des enfans-trouvés.
On doit encore l’attribuer aux tranfports qui
s’en font à l’hôpital de Paris. Le gouvernement
fut obligé d’y pourvoir , dès 1722. L ’ abus fut
moihs exceffif pendant, quelques années ; mais il
reparut.
En 1 7 7 2 , l’àdminrftration ayant commis deux
de fes membres pour le vérifier, il fut conftaté,
que fur 6,459 enfans reçqs à l’hôpital, depuis le
i cr*. janvier , jufqu’au dernier oitobré, il y en
avoi^ 2,350 qui venoient des provinces ; ce qui
fait a-peu-près le tiers. Il fut en conféquence délibéré
qu’on engageroit les fecrètaires d’état à
donner des ordres pour défendre les tranfports ;
ils furent donnés & n’ont pas été fuivis. En effet,
depuis le I er. janvier 17 7 2 , jufqu’aü dernier décembre
1776 , il a été amené à l’hôpital 33,222
enfans } 8c dans ce nombre, il y en avoir 10,068
qui y ayoient été conduits des provinces. C ’eft
, un peu moins que le tiers. Le tranfport a dimi-
mré depuis l’ arrêt du confeil du 10 janvier 1779.
Mais il eft encore d’environ 1200 enfans au moins
par an, & on craint que cette dernière digue ne
foit trop foible contre le torrent qui menace d’inonder
l’hôpital.
Cette multiplication des enfans - trouvés feroit
tolérable, fi en rompant toute proportion avec les
fonds deftinés à l’hôpital 8c avec la mefure des
foins & d attention dont une adminiftration publique
peut être fufceptible, elle n’ intéreffoit pas
d’ailleurs leur confervation. On fent facilement que
leur trop grande réunion dans la maifon dé la
couche leur rend infiniment préjudiciable l’air de'
çette maifon extrêmement difficiles ; les foins multipliés
dont ils ont befoin dans les premiers jours
de leur v ie, & comme impoffible de trouver affez
de nourrices pour les allaiter. Il eft abfolument démontré
ique la plus grande partie des maux qui
défolent cet êtabliffement, vient du trop grand
nombre d'enfans.
Les deux caufes de cette furcharge font donc
en dernière analyfe, le trop grand nombre d1 enfans
deParis , que leurs parens feroient en état 1
(Son. polit. 6* diplomatique. Tom, II.
de nourrir, 8c l’envoi des provinces qui peut un
jour devenir encore plus exhorbitant.
On s’occupe depuis long-temps de trouver des
remèdes à ces deux abus. Leur exiftence tient à
la délicateffe des procédés qu’il faut fuivre pour
les extirper. Le point unique qu’il ne faut pas perdre
de vue, & qui a été le motif de l’établiffe-
ment, c’eft la confervation des enfans. Combien
il eft à craindre qu’en fe rendant difficile fur leur
. admiffion, en déployant la révérité des loix , en
mettant des conditions ou dures, ou humiliantes,
tout le malheur ne retombe fur ces innocentes victimes.
Je vais expofer les moyens qui ont été propo-
fé s , & j’oferai indiquer quelles font mes penfées
fur cet important objet.
Et d’abord une expérience de plus de vingt années
apprend que le nombre des enfans-trouvés nés
à Paris eft de 4000. Il a fallu plus d’un fiècle pour
| déterminer cette progreffion ; 8c il paroît que c’ eft
à ce nombre que le concours des caufes a fixé
pour long-temps les enfans du libertinage & de la
misère de cette ville immenfe.
Ces enfans font ou bâtards , ou légitimes. On
ne peut difeonvenir du droit que ceux - là ont à
l’hôpital. Son premier but a été de fauverles en-
fàns. Et pour peu qu’on ait étudié l’état moral du
fiècle qui l’a .vu naître , on conçoit que le plus
grand danger qui les menaçoit, c’étoit le aefir
qu’avoient leurs mères de conferver leur honneur.
Cependant ce feroit un préjugé mal fondé &
extrêmement dangereux de croire que l’hôpital eft
fait pour les bâtards, & qu’on peut les y envoyer
tous. FE la nature, ni la Société n’ont difpenfé les
filles & leurs fédu&eurs de nourrir leurs enfans.
Nous ne doutons pas même du defir que la plupart
en ont, fur-tout les mères. Si elles ne le fa~
tisfont p as , c’ eft très-foiivent l’effet des fuggef-
tions & des manoeuvres de quelques fages-femmes
8c de quelques accoucheurs. Ces mères timides ,
qui voudraient fe cacher à elles-mêmes leur état,
vont ordinairement faire leurs couches chez les
gens de l’a r t, propres à les délivrer. Elles y portent
quelquefois des Tommes affez confidérables
qui, ou leur appartiennent, ou leur ont été données
par ceux qu’elles ont malheureufement trop
connus : elles y portent même la layète qui doit
fervir à leur enfant. Ceux qui les reçoivent, ont
donc un grand intérêt à leur repréfenter vivement
l’embarras que leur caufera la nourriture de cet
enfant 3 les avantages exagérés de l’hôpital des enfans
trouvés 3 la facilité de les en retirer un jour ,
8c l ’ufage général d’y cacher, pendant quelques
années , les produirions de l’amour. Us reuffiffent
trop fouvent à perfuader une mère honteufe , 8c
leurs perfides infinuations font récompenfées par
des fommes d’argent & par l’abandon des linges
8c hardes deftinés à Y enfant. La police doit donc
porter un oeil vigilant fur ces officiers de famé,