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y trouvé une armée vraiment nationale. « Les ré-
« gimens font compofés en entiers de citoyens
» honorables, de laboureurs claflés ( quintas ) ,
s» qui payent à leur patrie le tribut qu'ils lui doi-
»9 vent3 & qui défendent leurs pofleflions en la
» fervant. Leur engagement eft de huit ans ; 8c,
»9 durant cet intervalle a ils ont le droit de vilîter
»9 plufieurs fois leurs foyers. Les fentimens de cette
39 efpèce d'hommes font proportionnés à leur con-
99 dition, & doivent afliirer les fuccès de YEf-
99 pagne.
» Dans aucun pays, le foldat n'a une certitude
39 de fortune à-la-fois aufli brillante 8c aufli folide.
»9 Celui qui a fervi trente-cinq ans, a de droit
■ 99 fa retraite d'officier 8c une penfîon de 400 liv.
* Mais avant ce terme éloigné il jouit 3 après
3» quinze ans de fervice, d'une foîde plus forte
a» qui reçoit de nouvelles augmentations a à me-
99 fore qu'il approche de la dernière époque. La
»» compofition de cette armée & tous ces excel-
»3 lents réglemens datent du règne du roi ac-
99 tuel.39.
D'autres écrivains ne font pas autant de cas âu
régime militaire. Les troupes a dit l'auteur du
99 nouveau voyage en Efpagne 3 fait en 1777 8c
93 1778, font fur un très-mauvais pied 5 & fi l'on
99 excepte quelques régimens étrangers 8c celui
a.» des gardes efpagnoles, il exifte peu de régimens
99 complets. La profeffion militaire eft tombée
>3 dans un tel difcrédit depuis la paix de 1748 ,
99 que le r o i, pour faire des recrues 3 n'a trouvé
v d'autre moyen que celui des quintas ; c'eft le
33 nom qu'on donne aux foldats enrôlés par le 09 fort : ils -fervent fix ans, & ne manquent pas
99 de retourner chez eux à l'expiration de ce ter-
»3 me, quelque bon traitement qu'on leur fafTe
a» éprouver. Il eft rare qu'un efpagnol s'enrôle de
99 bonne volonté.
33 L'ufage des quintas a plus d’un inconvénient ; '
33 il dépeuple les campagnes 5 il y répand une dé-
33 folation continuelle 3 par la fréquence avec la-
33 quelle il fe répète. Les fujets qui rentrent dans
9? les bourgs & les villages 3 au bout de leur en-
33 gageraient, ayant contraété le goût du liberti-
99 nage 8c de l’oifiveté 3 ne font plus propres qu'à
33 corrompre leurs concitoyens.
» Deux raifons entr'autres ont dégoûté en E f 93 pagne du parti des armes 5 la crainte fondée
93 d'être transporté aux Indes 8c le. traitement
9« qu’éprouvèrent à la paix ces fameux grenadiers 93 provinciaux 3 qui furent réformés & renvoyés
33 chez eux, où ils portèrent & répandirent le
33 dégoût & l'humeur que leur caufa cette manière
33 de payer leurs fervices. Les quintas ont encore
93 cela d'odieux, que les hidalgos ou fils de no- 39 blés étant fort nombreux, la claffe qui fouffre'
33 de cette vexation en eft d'autant plus accablée :
»s car les quintas n'empêchent pas qu'il n'y ait en
Efpagne des milices particulières.
Charles III a tenté inutilement plufieurs mo-
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îS yens d'accréditer la profeffion militaire > il a
augmenté, la paye du foldat ; il a eu foin qu'il
33 fût bien traité 5 il a recruté fes troupes, de va-
33 gabonds, de gens fans aveux, & meme de mal-
33 faiteurs. Mais on s'eft bientôt apperçu des
33 inconvéniens de cette compofition, 8c l’on a été
39 obligé de recourir à la reffource violente des
33 quintas, qui n'ont produit d'autre bien que d’a-
33 voir multiplié les mariages,. 8c qui font peut-
33 être une des caufes qui ont augmenté la popula-
3> tion en Efpagne. Mais combien de miférables
33 n'ont-elles pas produit 331 U ne nous appartient
pas de juger laquelle de-ces deux opinions eft la
mieux fondée y & fi nous nous fommes permis de
citer un paffage fur les inconvéniens de l'ufage
des quintas, c'eft afin .d'attirer l'attention fur cet
objet important.
On a publié l'état fuivant de l'armée de terre
efpagnole.
Capitaines généraux , 3 j lieutenans-généraux ,
52 j maréchaux de camp , 67 5 brigadiers, 129 ,
jnfpe&eurs généraux, 6.
Maifondu roi. Gardesrdu-corps, 3 compagnies;
gardes-hallebardiers ; gardes-à-pied efpag-nols , fix
bataillons ; gardes-à-pied Wallons , 6 bataillons 5
brigade de carabiniers du^roi, 4 efcadrons.
Infanterie. Chaque régiment eft de deux bataillons.
Régiment du Roi ; régiment du Prince royal 5
Gallicie ; Savire 5 Corôgne ; Afrique ; Zamore î
Soria; Cordova > Guadalaxara 5 Seville j Grenade »
Viétoria > Lisbonne; Efpagne j Tolède j Mayor-
que; Burgos ; Maria ; Léon j Irlande ; Cantabrie 3
Afturie; Ceuta 3 Navarre; Hibernia 5 Altonia 5
Arragon ; Oran ; volontaires d'Arragon ; Catalo-
nie, deux régimens ; Ame'rique; Princeffe; Eftre-»
madura.,Régimens italiens, Naples, milan ; régimens
wallons , Flandre , Brabant, Bruxelles ;
régimens 'fuiffes, Bruch, Saint - Gall ^ Ehaler 9
Boftchard.
Artillerie. C e corps eft compofé de y bataillons
8c d'une compagnie de cadets gentilshommes. Le
nombre des officiers eft de 72. Le corps du Génie
a 10, directeurs,. 10 colonels, 20 iieutenans-
colonels, 39 capitaines, 40 lieutenans-capitaines
& 40 adjudans.
Cavalerie. Chaque régiment eft compofé de 4 efcadrons.
Le régiment du R o i; de la Reine ; du
Prince j Infant j Bourbon ; Farnèfe ; Alcantara $
Efpagne ; Algarve j Calatrava ; Sanjago j Montera
; Granada ; Volontaires.—-Dragons du Roi 5
de la Reine ; Almanfa ; Paire ; Villaviciofa j Sa-
gunto ; I^umancia ; Lufitanie.
Les régimens de la milice provinciale font au
nombre de 4 2 , chacun d'un bataillon. Le régiment
de la milice réglée de Mayorque eft com-
pofé de deux bataillons.
Milice des villes. A C ad ix , 20 compagnies j à
Puerto de Santa-Maria, 9 j à Saint-Roch, 1 3 ;
à Çarthagènçj 9 ; a Zea ta, 5 ; àBadajoz., 14 j
à
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à Albuquerque, 8 j à Alcantara, 6 j à Valence,
7 i à la Corogne, 12 j à Cividad-Rodrigo, 9,5 & à
Tar ifa, 4.
Compagnies de garnifon.\Jne de fufiliers, à Saint-
Roch } une de cavalerie de Lanzas, à Ceuta j une
de cavalerie de Moros-Almogatages, à Oran,
& io" compagnies fur la côte de Grenade.
Le corps des invalides eft compofé de 46 compagnies,
8c réparti dans les provinces.'
Les espagnols conftruifoient autrefois - des vaif-
feaux prodigieufement lourds , mais forts comme
des châteaux 8c terribles dans Je combat. Les àn-
glois les craignoient, les fuyoient prefque toujours,
& ’en étoient fouvent maltraités. Ces vaif-
feaux étoient fi bien garnis d'hommes 8c de canons,
qu'on a vu au combat de Toulon, le royal-Phi-
lippe entièrement démâté, rafé comme un pontpn,
fôutenir un très-long combat, fe faire remorquer
8c fe fauver malgré tout le feu de la flotte angloife.
Les efpagnols fe dégoûtèrent de cette conf-
truélion maffive qui leur écôit particulière. Ils
adoptèrent la conftruétion angloife j étonnés de
la legéreté 8c de la prompte manoeuvre des vaif-
feaux de cette nation, ils détruifirent leurs vieilles
fortereffes.
Le gouvernement a adopté depuis la conftruc-
tion françoife ,, qui paroît tenir un jufte milieu entre
l'ancienne conflruélion efpagnole 8c j'angloife.
Il demanda à la cour de'Fi$nce 8c- obtint un conf-
tméteur. M. Gaut-hier, qui étoit attaché au département
de Toulon, alla en Efpagne, où il fut
fu'r le champvàgrégé à la marine.
Oh publia, il y a deux ans, l'état que voici de
la marine A3Efpagne.■ '
Il y avoit aü Ferrol, 16 vaifleaux de ligne, 13
frégates 8c 11 floops en état de fervir ; 4 vaiiTeaux
de ligne 8c 2 frégates en réparation, 3 vaifleaux
de ligne 8c 2 frégates en conftruétion, 2 vadf
féaux de ligne 8c deux frégates que l'on devoit
détruire.
A la Corogne, 9 vaifleaux de ligne, 7 frégates
8c 9 floops en état de fervir, 2 vaifleaux de ligne
8c une frégate en .conftrudtion , un vaiifeaù de ligne
8c 1 frégates en réparation.
A C adix, 21 vaifleaux de ligne, 7 frégates 8c
11 floops où barques d'avis en état de fervir ; 7
vaifleaux de ligne en conflruélion , y vaifleaux de
ligne ,£n réparation , 3 vaifleaux de ligne qui dévoient
être détruits.
A Carthagène, 4 vaifleaux de ligne 8c 2 frégates
en état de fervir, un.vaifleau de 60 canons 8c
3 frégates en conftruéfion 3 4 frégates en réparation
3 8c 2 frégates déclarées hors d'état de fervir.
A Malaga, 3 vaifleaux de ligne 8c y frégates
en état de fervir , un vaifleau de. 70 canons 8c une
frégate en conftruétion, un vaifleau de 60 canons,
8c une frégate de 40 en réparation.
A Majorque, 2 frégates de 38 canons chacune
en conftru&ion, 8c un vaifleau de 24 en répa-'
ration.
(Æcon. polit, & diplomatique, Tom. II.
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A la Havane , 7 vaifleaux de ligne en état de
fervir, 8c y vaifleaux de ligne en conftruétion.
' Selon ce calcul , 13Efpagne avoit 72 vaifleaux
de ligne outre les frégates, c'eft-à-dire, une marine
plus nombreufe- que dans les deux derniers
fiècles.
L 3Efpagne a toutes fes frontières bien aflurées.’
Du côté de la France, elle a pour rempart les.
Pyrénées } fes côtes font garnies de places fortes,
d’un grand nombre de redoutes , de forts, 8c de
tours j 8c dans l’intérieur, du pays-, une armée ennemie
trouve peu de commodités $ la cavalerie fur-
tout y manque-de fourrage, 8c ce qu'elle en trouve
eft très-difficile à raffembler.
S e c t i o n V I e.
Des confeils, d*aiminijlration , des tribunauux 3 de la
jurifpruàen'cè ù1 des loix de /’Efpagne.
Il y a en Efpagne onze collèges fupérieurs. Les
affaires d'état importantes font examinées au con-
feil d’état .( confejo de eftado ) 3 créé en 1616 par
l'empereur Charles V . Il eft compofé d’un doyen
8c de quelques confeillers : les fecrètaires d'état
font exécuter les décifions dé confeil, 8c ils font
chargés d'ailleurs d’un très-grand nombre de détails
relatifs à la g u e r r e à la marine, aux Indes
• 8c aux finances.
Le fuprême confeil de guerre, ( el confejo fu-
premo de guerra). Le roi Philippe l'érigea en 17 14 :
il y a parmi les confeillers un fecrètaire, un- fifcal
8c trois aflefleurs qui font miniftres du confeil
' royal de Caftille.
Le confeil royal fuprême ( el confejo real y fu-
. premo de fu magefiad ) , ou le confeil royal de Caftille
( el confejo di Caflilla ) , eft le tribunal fuprême
du royaume. Le roi Philippe III le partagea,
en 1608 , en cinq chambres, dont chacune
connoît d'une certaine nature d'affaires. La première
(fa/a prunier a dcl govierno ) eft compofée
■ d'un préfident, de fept confeillers 8c- de deux fif-
caux. La fécondé eft compofée de quatre confeillers
; celle, des quinze cents (fala de mil y qui-
niencas ) de cinq j celle de juftice de quatre, .Scia
chambre provinciale (fala de provincia j 3 également
de quatre : cette dernière a en outre un
préfident ( governador •) , deux juges qui prononcent
fur les compétences, deux qui prononcent
fur les commiflions , 8c un qui termine les difcuf-
fions relatives aux miniftres. Les provinces font
partagées entre fept confeillers ou miniftres de la
première chambre. Quelques affaires font terminées
en plein confeil, c'eft-à-dire , par les fept
chambres réunies : on y trouve alors un préfident,
quatorze confeillers, deux fifcaux , trois argentes
fiscales ( fubftituts ) , fept référendaires 8c fept
fecrètaires. *Ce confeil eft réuni à la chambre ro-
^ y aie de Caftille (la real caméra de Caflilla ) 3 laquelle
eft compofee d'un fifcal, focretaire du pa