en état de conduire une guerre avec plus de vivacité
, & fur quels objets il a befoin d’une nouvelle
autorité pour maintenir, durant la paix ,
l ’obéi fi ance 8c la profpérité parmi les républiques
de l'Amérique. La combinaifon de ces détails exige
beaucoup de foin, & les citoyens de T Amérique
doivent là-deffus confulter l'expérience.
On a dit que le gouvernement fédéral des Etats-
Unis 8c le gouvernement particulier des diverfes
provinces manquent d'énergie, qu’ il leur eft. difficile
de contenir les individus 8c les états : le fait
eft v ra i, 8c c'eft un inconvénient. Mais l'énergie
des gouvernemens abfoîus vient d'une force armée,
& de la bayonette toujours placée fur la
poitrine de chaque citoyen. La tranquillité qui en
réfulce, reffemble beaucoup à la tranquillité du
tombeau, & il faut avouer qu'une pareille énergie
a aùftî fes inçonvéniens. Les Etats-Unis pèlent
les inçonvéniens des deux côtés, & ils ajmënt
mieux fe foumettre à ceux du premier. Si on compare
les délits que les citoyens d'Amérique peuvent
commettre impunément, avec les délits que
commet le Cbuverain dans les autres pays, on
trouvera que ceux-ci font en plus grand nombre
, plus fâcheux & plus accablans pour la di- '
gnité de l'homme. Afin de donner aux nouvelles républiques
toute l'énergie dont elles font fufeepti-
bles , afin de les contenir furement, il faudroit
revêtir le congrès d'une autorité exceflive, 8c l'on
ne s’en avifera pas. Cette autorité révolteroit les
provinces, 8c bientôt elle deviendroitnulle ; 8c enfin
quelle que fût cette autorité , il y a lieu de croire,
d'après les droits réfervés par les conftitutions aux
citoyens & aux états de l'Amérique, qu'elle ne
fuffiroit pas pour réprimer tous les écarts.
C e qui a rapport au congrès, à la forme de
fes afifemblées 8c de fes délibérations, au nombre
de fuffrages- néceflaires dans les différentes quef
rions, 8c à fes procédés en général, eft fuf-
ceprible de quelques obfervations critiques , 8c
nous allons indiquer, toujours d'après des faits
exaéls , les changemens qu’il feroit utile d’établir
fur ces objets.
Le neuvième article de la confédération, §. 6 ,
établit trois fortes de queftions qui peuvent être
agitées au congrès : i®. les plus importantes qui
ont rapport à la paix ou à la guerre, aux alliances
, à la fabrication des monnoiës , aux réquifi-
tions d’argent, à la levée d'une force militaire,
ou à la nomination d'un commandant en chef : |
2.0. Les queftions ordinaires, d’adminiftration,-qui
comprennent toutes les autres matières foumifes
au jugement du congrès : 30. les fimples queftions
Relatives à l'ajournement de ce corps.
Pour décider ces queftions, les états^ d’Amérique
ont exigé un plus grand nombre de voix ,
félon qu’elles feroient plus importantes , 8c les
principes dont on a tiré les différentes efpèces de
fuffrages, annoncent beaucoup de fagacité 8C de
Qjti a festi qu’en certaines oeçafions f il
falloir avoir, i° . le. concours d'une majorité des
habitans de l'union. On a cru s'affurer de cé
concours en exigeant la Voix de neuf états ,
parce que, fui vautles eftimàtidhs générales qu?ori
avoit fait des'habitans 8c du rapport dès hommes
libres avec les efclaves, on penfa que neuf états,
même les plus petits, comprendroient une majo-»
rite des citoyens libres de l’union, & les queftions
les plus importantes ont befoin du füffrage de neuf
états. 20. On a jugé qu’ en d’aiitres circonftances,
le concours de là majorité des états fuffiroit. Lès’
nouvelles républiques étant au nombre de treize,
fepr conftituent cette majorité, 8c on a demande
ce nombre de voix pour les queftions ordinaires
de l'adminiftration. 30. Enfin on a penfé que l*
concours de la majorité du congres 3 c'eft-à-dire ,
des états qui fe trouveront afferqblés , fuffiroit
quelquefois y 8c comme il n'y a poitôt de congres *
lorfqü’oh n'y voit pas fept états, cette efpèce de
votation ne peut jamais comprendre moins de
quatre états. .Mais ces quatre états pouvant etre
j les plus petits, ne renfermeroient pas la neuvième
partie des citoyens libres de l'unionf, 8c on n’ a
donné à cette efpèce de majorité que le pouvoir
d'ajourner d'ün jour à l’ autre le corps légiïlatif de
l'union.
Ainfî toutes lés queftions fe décident au congrès
par la loi de majoris -partis ; mais il y a trois
fortes de majorités, i° . celle .des habitans, 2 '.
celle des treize états, 30. celle dés états qui fe
trouvent au congrès, 8c q ui, au lieu de treize >
peuvent n’être que fept. L’étendue de pouvoir >
accordée a Ces diverfes majorités, fe proportionne
à leur nature.
Le paragraphe 6 de l’ article 9 de la confédération
s'exprime groffiérement, & les ledteurs
nous fauront peut-être quelque gré de l’avoir rendu
plus clair. Oh y découvre cependant l'intention
des légiflateurs. 11 défigne d’une manière pré-
Cife lès queftions les plus importantes qui exigent
neuf voix } 8c quant aux queftions ordinaires d’adminiftration
, il déclare qu’elles auront befoin d'une
majorité des Etats - Unis ajfemblês en congres : ce
-pafTage eft applicable, il eft vrai, au nombre 7
qui forme la majorité des treize états, ou au nombre
4 qui forme la majorité d'ùne ajfemblée du
congrès compbfé de fept états. Mais on ne peut
fe méprendre fur celle des deux majorités qu'exige
la loi : il eft évident que'c’ eft celle de fept voix ;
car il faut bien, d’après l’explication que nous
donnions tout-à-l’heure, lailfer une autre efpèce
de majorité plus petite, pour décider la qùeftioh
de l’ajournement du congrès.
Le paragraphe 6 de l’ article 9 de la confédération
devroit donc s'énoncer de cettte manière :.
« les états affemblés en congrès ne s’engageront
« jamais dans aucune guerre, 8cc. A moins que
» ÇA DÉLIBÉRATION NE PASSE A L’AVIS D*E
as NEUF DES ÉTATS j ILS NE'DÉCIDERONT AtJ-
33 CUNE AUTRE QUESTION QUE DE l'AVEÜ
d’une
»3 d' une MAJORITÉ DE TOUS LES ÉTATS ,
» EXCEPTÉE CELLE de l' a jo u rn em en t DU
« .CONGRÈS, LAQUELLE POURRA SE DÉCIDER
„ PAR - UNE MAJORITÉ, DES ÉTATS QUI SE
33 TROUVERONT CE JOUR-LA AU CONGRÈS *>.
La plupart des membres du premier congres
avoient été membres des corps légillatifs dès differentes
^'colonies., 8c ils adoptèrent naturellement j
dans les délibérations, les règles que fuivoientles
chambres légiflatives de leurs provinces : ils lés
adoptèrent d'autant plus volontiers, que ces réglés
tirées de la meme fource, c’eft-a-diré du
-«parlement britannique, étoient à-peu-pres les memes.
Selon une de ces règles, une queftion une
fois décidée ne pouvoit être propofee une fécondé
fois dans la même feffion. Le congres I obferva^a
la rigueur durant fa première feffion ( z la fin de
1774 ) : mais la guerre éteit commencée ffirfqu'ii
s’affembla de nouveau au printemps de l’année
fuivante. Il fe trouva chargé de la direction des
hoftilites, en qualité de puiffance exécutrice 8c
de puiffance judiciaire, & il reconnut qu’une règle
fage en elle-même 8c néceffaire à un corps
légiïlatif, ne convenoit pas à un corps charge de
la puiffance exécutrice, q u i, dominée par les eve-
riemens, doit changer fes deffeins félon les circonftances.
Il étoit probable auffi que la feffion
dureroit autant que la guerre, & il ne pouvoit
s’ affujettir à une règle qui rendroit les a êtes le-
giffatifs immuables durant cet intervalle. H y renonça
donc dans la pratique, 8c depuis, les
queftions décidées ont toujours été propofées de
nouveau , 8c quelquefois réfolues d’une manière
contraire dans la même feffion. Mais ce qui étoit
excufable pendant la guerre, ne l’eft plus en tems
de paix ; 8c nous ne craindrons pas de confeiller
ic i, de ne plus revenir-, durant la même feffion,
fur des queftions étrangères à la puiffance exécutrice
: une pareille variation manque de nobleffej
elle nuit à la réputation du congrès , qui doit toujours
montrer de la fuite & de la fermeté dans
fes deffeins. Les circonftances^peuvent obliger fans
doute à changer dans la même année les réfolu-
tions qui appartiennent à la puiffance exécutrice 5
mais le congrès revient auffi fur des queftions
qu’on ne peut juftifier de la même manière ; &
pour n'en citer qu'un exemple, lés appointemeris
des Tniniftres des Etats-Unis en Europe, qu'il
augmenta en 1784 ( 1 ) , avoient—ils rapport à la
puiffance exécutrice, o u , s'ils y avoient quelque
rapport, la fécondé décifion contraire à la première
, 8c donnée peu de temps après, n'annonce
- 1 - elle pas de la légéreté ? On paroît fentir
que cet üfage eft un abus , 8c afin d’en diminuer
les inçonvéniens, on exige qu'une queftion décidée
une fois, foit propofée de nouveau par un
de ceux qui ont voté en faveur de la première
décifion, qui déclare alors qu'il a changé d’avis
: on n'a pu nous dire s'il eft néceffaire que
fon füffrage ait décidé la voix de Y état dont il eft
un-des repréfentans, & que la voix de fa province
ait détermine la rçfolution du congrès : mais
un pareil expédient ne détruit pas l'objeétion.
Le onzième article de la confédération laiffe au
Canada la liberté d’entrer dans l’union américaine
quand il le voudra 5 mais il ajoute que pour y
être admife, toute autre colonie aura befoin du
confentement de neuf états. Lorfqu’on délibéra,
au mois d’avril 1784, fur le plan d’après lequel*
fe formeront les nouveaux états, dont nous parlerons
plus bas ( 2 ) , le comité qui rédigea le
plan, y inféra cette claufe , « pourvu que neuf
33 états confentent à cette admiffion, félon la ré-
33 ferve du onzième article de la confédération
On cbjeéta, i° . que les mots de l’aéte fédératif
«e toute autre colonie 33 ne pouvoient avoir rapport
qu’au refte des poffeffions de la Grande-Bretagne
en Amérique, telles que des deux Florides, la
nouvel le-Ecoffe, 8cc. 8c que la loi « pour admettre
à l'union un nouveau membre » , ne pouvoit
s’appliquer à un diftriét qui étoit déjà dans l ’union
, puifqü’ il faifoit partie de l’un des états
confédérés : 20. qu’ il ne feroit pas convenable
d^xiger l’ aveu de neuf états pour recevoir
un nouveau membre, parce que les raifons
qui rendent à préfent ce nombre convenable, exigeaient
un nombre de voix plus grand , lorfque
l’union comprendroit plus d'états. C e paragraphe
fut rayé, 8c on y fubftitua celui-ci : « pourvu
»3 qu’on obtienne l’aveu du nombre d'états qui fe
»> trouvera alors néceffaire »». Quand de nouveaux
états demanderont à être admis au congrès , il
faudra décider fi le onzième article de la confédération
eft applicable à leur admiffion (3). C e
débat fit naître une autre queftion : on demanda
fi le confentement de neuf états, requis par la
confédération, devoit être donné par les légifla-
tures des diverfes provinces , ou par leurs députés
au congrès ? & il paroît qu'il fuffit du confentement
des députés.au congrès. Si l'on veut que
le onzième article de la confédération ne foit pas
applicable à l'admiffion de ces- nouveaux états ,
leur admiffion fera réglée par l'article 13 , qui
défend de rien changer aux difpofitions du paéte
fédératif*- à moins que ce changement ne foit
convenu dans un- congrès des Etats- Unis, & confirmé
enfuite par les légiflatures de chaque état.
Kentucke 8c Frankland ne tarderont pus à être
admis à la,confédération américaine, 8c toutes
ces queftions fe trouveront réfolues (4).
ÎO Voye•{. le journal du congrès de 1784 , pag. a i6.
1) Voyet^ la feôtion douzième.
3) Voye^ le journal du congrès du a© avril 1784. _ _
(4) Il eft vraifemblable qu’elles le font aujourd’hui : car nous dirons plus bas que„Kentuke eft lur le point,
d’être admis à l’union américaine. ^
(Scon, polit, â? diplomatique. Tom. I l , B b b