
cun fait que fi les créanciers accablent tous à la
fois un malheureux débiteur , dont les affaires ne
font qu’embarraffées , ils finiflent par perdre quelque
chofe , lorfqu ils p’auroient rien perdu 3 fi on
lui eût donné du temps 5 & telle elt la pofition
des débiteurs en V irginie 3 que fans le réglement
dont on vient de parler, leur ruine étoit inévitable
: le créancier anglois auroit ainfi perdu beaucoup
plus qu'il ne perdra par la rentrée tardive
de fes fonds.
D'autres états de l'union ont pafle des aétes
qu'on peut excufer de la même manière. Il paroît
que la Caroline méridionale permet à un débiteur
de payer fes créanciers en offrant telle partie de
fa propriété ou telles marçhandifes qu'il voudra.
La néceflité a produit cette difpofition. La Caroline
méridionale n'avoit point d’ argent , & elle
devoit beaucoup à la Grande-Bretagne : il eût été
facile aux anglois de ruiner le colon 3 & fi l ’af-
femblée légiflative a cru devoir les contenir 3 on
ne doit pas le trouver mauvais.
Il n'y a plus de furintendant des finances. Le
28 mai 17843 un a£te du congrès a créé un bureau
du tréfor , compofé de trois commiflaires.
Les opérations de ce bureau ne biffent rien à de-
firer 3 mais pour que l'effet en foit bien fenfîble 3
il faut de la patience. La paix n'eft lignée que'
depuis trois ans 5 & dans cet intervalle on n'a
pu réparer les pertes & les défaftres qu'ont produit
fept années d'une guerre cruelle. L'Europe
ne doit point juger avec févérité les arrangemens
de finances que prennent les Etats-Unis ,* & tout
fe réduit à examiner ici ce qui eft poffible & ce
qui né l'eft pas. D'un autre côté 3 le congrès &
les diverfes provinces doivent calculer leurs démarches
fur leur pofition 3 & ne pas former des
projets qui ont befoin d'un crédit national mieux
affermi. A in fi, lorfqu'on a cherché à donner de
la Habilité à la banque de Philadelphie 3 on s'elt
trop preffé. Si les banques font convenables aux
pays libres, c'eft aux pays libres qui ont un crédit
national éprouvé , & qui méritent d'en avoir
un. Les dernières nouvelles d’Amérique difent que
cette banque ell à-peu-près détruite 3 & il ne faut
pas s'en étonner.
Les Etats-Unis n'ont point encore de monnoie
particulière ( r ) : nous avons lu un pamphlet qui
propofe d'employer la piaftre comme mefure de
compte 3 & de fabriquer une première monnoie du
même poids 5 une fécondé , d'une demi-piaftre ou
de j ‘dixièmes 5 une troifième,* de 2 dixièmes ou
un cinquième de piaftre 5 une quatrième , d’un
dixième de piaftre 5 & enfin , une cinquième , d'un
vingtième de piaftre : l'auteur prouve très-bien
qu'on ne peut choifir une valeur qui offre plus
d'avantages , & il y a fieu de croire qu'on fe
rendra à la juftefle de fes raifons.
La piaftre d’Efpagne eft aujourd’hui la principale
monnoie courante en Amérique. Il n'y a pas,
à beauoup près , autant de louis qu’on pourroit
l'imaginer, d'après les Tommes qu'y a verfées la
France. Quant aux monnoies d'Angleterre, elles
font devenues fort rares 5 auffi, le numéraire n'eft-
il pas commun dans les Etats - Unis : il eft aifé
de prévoir qu'il y fera rare, au moins 20 ans. C e
n'eft que par la balance du commerce qu'ils pour-
roient avoir un numéraire confidérable, & la balance
du commerce ne peut leur être avantageufe
dans ces premières années où ils toanquent de fabriques.
Énfuite , quand cette balance du commerce
leur feroit avantageufe 3 l'intérêt des fom-
mes qu'ils doivent à l'étranger , abforberoit ce
bénéfice. Au refte , qu'ils ne s'en effraient pas.
Ceux qui s'intéreffent le plus à leur profpérité &
à leur bonheur, leur fôuhaitent, non ces richeffes
fa&ices que produifent l'or & l'argent, mais les
véritables richeffes qu'offrent la culture & des
manufactures bornées, c'eft-à-dire, l'abondance
convenable à des peuples libres qui ne veulent pas
fe corrompre.
S e c t i o n , V I I e.
Dans quel état fe trouvent aujourd'hui les nouvelles
républiques américaines,
En examinant fur la carte l'immenfe terrein qui
compofe les Etats-Unis , l'imagination embraffe
l'avenir : il eft doux de penfer que la culture &
la liberté vont s'établir fur les plus belles parties
du nouveau-Monde, & on peut dire à ceux qui
confervent des inquiétudes fur les finances des
nouvelles républiques : voyez ce ravilfant tableau,
& n'ayez plus de crainte.
Il faut louer le miniftre qui a fait la paix de la
Grande-Bretagne avec les Etats-Unis, il n'a point
eu la foibleffe ordinaire aux hommes d'état ; il a
fixé d'une manière généreufe les limites des provinces
de l'union : U a fend qu'on lui reproche-
roit de ne les avoir pas refferrées 3 mais voyant
que les nouvelles républiques n'avoientplus de bornes
que celles dont elles voudroient s'environner-,
il a cru devoir prévenir des querelles funeltes ;à
l'Angleterre pour les temps où elle auroit des mi-
niftres moins généreux.
D'après le fécond article du traité, les Etats-
Unis s'étendent au nord, depuis l'angle nord-oueft
de la nouvelle-Ecoffe, ou depuis l'angle formé
par une ligne nord, tirée de la fource de la ri-
I vière de Sainte - C ro ix , le long de la chaîne de
‘ Les dernières nouvelles d’Amérique, ( du mois de février 1786) , apprennent feulement qu’on vient
d’y fabriquer une monnoie de cuivre, & qu’on y fabriquera bientôt des monnoies d’or & d’argent.
montagnes qui féparent lés rivières, dont les em- I
bouchures font dans le fleuve Saint-Laurent, de
celles qui tombent dans l'Océan Atlantique, juf- i
qu’à la fource le plus ûord-ouéft de la riviere ,
Conneélicut. De-là le long du milieu de cette n- j
vière, jufqu'au 45 e degré de latitude 3 de la meme
latitude , par une ligne exa&ement oueft, julqu a
la rivière des iroquois ou de Cataraqui 3 de-la le
long du milieu de cette rivière , jufqu'au lac Ontario
3 & en traverfant Je milieu du lafc Ontario ,
jufqu'à la communication par eau, eiitre ce lac
& le lac Erie 3 de-là le long du milieu du lac
Erie, jufqu'à la communication par eau entre ce
lac & le lac Huron : de-là le long du milieu du
lac Huron , jufqu'à la communication par eau
ehtre ce dac & le lac fupérieur 5 de-la traverfant
le lac fupçrieur , au nord des ifles royales ou Fhi-
lipeaux , jufqu'au long lac 5 du long la c , coupe
par le milieu, jufqu'à la communication par eau
entre ce lac & le lac des Bots, & jufqu'au lac
des Bois 3 de-là traverfant ce la c , jufqu'à fa jointe
la plus nordroueft , & de-là jufqu'à la rivière du
Miflifiipi : à l'oueft , d'une ligne qui part du
dernier point, & qui fe prolonge par le milieu du
fleuve Miflifiipi, jufqu'à ce quelle coupe la partie
riord de 31 degrés; de latitude feptentrionale : au
fu d , depuis une ligne tirée directement à 1 eft du
dernier point, par 31 degrés de latitude nord ,
jufqu'au milieu de ta rivière Apalachicola oii Cata-
houche 3 de-là le long du milieu de cette rivière,
jufqu'à fa jonétion avec la rivière Flint 5 de-la directement
les citoyens des Etats - Unis formeront dé nouveaux
jufqu'à la fource de la rivière de Sainte- ;
Marie, jufqu'à i'Océati Atlantique^ : à l'e ft, fur
line ligne qui commence aux frontières de la Floride
, & qui Te prolonge le long de la côte juf-
qu'à l'embouchure de la rivière de Sainte-Croix
dans la baye de Fundy, en comprenant chacune
des ifles qui fe trouvent jufqu'à 20 lieues des côtes
des Etats-Unis3 & entre des lignes tirées exactement^
e ft, des points où les limites, entre la nouvelle-
Êcofle d’une part, & la Floride orientale de l'aur
tire, toucheront refpeCtivement la baye de Fundy
& l'Océan Atlantique, à l'exception des ifles qui
fbnt ou ont été jufqu'à préfent dans la dépendance
de la nouvelle-Econe.
Ces limites font ainfi déterminées d'une manière
très-précife : les montagnes, les rivières, les lacs,
lfOcéan Atlantique & les degrés de latitude fer-
virbnt toujours à les faire reconnoître , & il faut
ôbferver qu'on ferable ne pas avoir trouvé une
précifîon aflez rigoureufe dans les obfervations fur
les1 dégrés de longitude, puifque le traité n'emploie
jamais cette expreflion.
En parlant des terres de l'oueft qui ont été cédées
au congrès par la Virginie & la Caroline
feptentrionale , & de celles qui le feront bientôt
par la Caroline méridionale & la Géorgie , & où
établiffemens, nous n avons point calculé
leur étendue d’une manière rigoureufe. On verra
plus bas (1 ) , d’après des calculs précis, que le territoire
des Etats- Unis contient environ un million
de milles anglois quarrés, c’eft-à-dire, plus de
330 mille lieues quarrées ; 8c comme les treize
provinces ■ actuelles forment à-peu-près les trois
huitièmes du tout , ou 123 , 750 lieues qüar-
rées le territoire feül de l'oueft offre à la culture
206, 250 lieues quarrées. La Virginie ,
avant la ceflion qu'elle a faite à l’union des terres
fituées fur les derrières de fes établiffemens, étoit
d’un tiers plus étendue que les ifles de la Grande-'
Bretagne & de l’Irlande, 8c les bornes quelle
s'eft fixée elle-même depuis fes ceffiorts au congrès
, lui laiffent encore à-peu-près l’ étendue de
territoire que poffède la nation angloife en Europe.
V o y e\ l'a'rticle V ir g in ie .
Un auteur qui a tracé l’hiftoire des étalliffcmens
de toutes les nations dans les deux Indes , 8ï qui,
malgré fes fautes, a mérité leur reconnoiffance,
parle avec peu d’éloges des terres défrichées par
les Etats-Unis, 8e il fetnble leur fuppofer peu de
reffources. On l’a induit en erreur, 8c nous tâcherons
de rétablir ici la vérité des faits.
« L ’efpace occupé par les treize républiques,
» entre les montagnes 8c la mer, n'eft ^que de
I „ 67 lieues marines , dit-il ; mais fur la côte leur
». étendue eft en ligne droite,de trois cens quarante-
» cinq , depuis là rivière de Sainte-Croix jufqu'à
»! celle de Savannah.
-/ *> Dans cette région, les terres font pref^ue
» généralement mauvaifes, ou de qualité médio-
” cre. ..
» Il ne croît guères que du mais dans les quatre
» colonies les plus féptentrionales. ^L’unique ref-
» fource de leurs habitans eft la pêche, dont le
» produit annuel ne s’élevoit pas avant la guerre ,
» au-deffus de 6,b6©,oo. liv.
» Le bled foutenoit principalement les provin-
» de New - York , de Jerfey 8c de Penfîlvanie.
„ Mais le fol s’y eft fi rapidement détérioré , que
» l’acre qui donnoit autrefois jufqu’ à 60 boiffeaux
» de froment., n'en produit plus que vingt fort
» rarement.
»* Quoique les campagnes du Maryland 8c de
» la Virginie foient fort fupérieures à toutes les
• » autres , elles ne peuvent être regardées comme
» très-fertiles. Les anciennes plantations ne ren-
» dent que le tiers du tabac qu’on y récoltoit
» autrefois. Il n’ eft pas poffible d’ en former beau-
» coup de nouvelles, 8c les cultivateurs ont été
» réduits à tourner leurs trâvaux vers d'autres
objets.
» La Caroline feptentrionale produit quelques
grains , mais d'une qualité fi inférieure, qu'ils
(1) Voye\ plus basics calculs fur la population.
D d d 2