
celui qui ne fent pas en lui-même la force de la
foutenir , n'eft pas digne de la porter.
C'eft un ufage prefque univerfel, parmi ceux
qui gouvernent les états 3 de divifer les .efprits 3
de les tenir occupés de leurs propres querelles,
pour détourner leur-attention d'une autorité qui
s'étend au-delà de fes bornes légitimes j mais il
faut prendre garde que ces diyifions ne deviennent
fa dieu fes.
De quelque nature que foient les troubles, intérieurs
, ils font plus difficiles à calmer dans les
republiques, où l'autorité manque d'énergie. &
de point de réunion où la liberté fe rapproche
de l'indépendance abfolue. Lorfque. les.’ factions
ne s'y détiuilent pas d'elles-mêmes, il eft.prefque
împoffible de les réprimer , parce que toute l'autorité
réfide dans les loix , & que celle des ma-
giftrats eft empruntée & paifagère > les chefs de
la fattîon nJy rëconnoifient point de Supérieur $
ils partagent eux-mêmes l'autorité,- qui devient
nulle en. ces occafions.
Un effet de l'autorité divifée eft d'affoiblir le
reffort de la crainte, & de rendre impoffible
l'emploi de celui de la faveur. Soit que des haines
ou des fentimens oppofés , ou l'ambition de
parvenir à une dignité à laquelle il leur eft per
mis d'afpirer, divifent des familles puifiantes, les -•
loix - n'arrêtent ni ne puniffent ces- fources de dif-
fentions. Aucune autorité ne peut les contenir
dans le principe ; elles arrivent fans trouver d'ohf-
tacles , au point. où elles font fans remèdes j &
c'eft-là le grand vice , des conftitutions républicaines.
Si la haine s’empare : de deux rivau^dans une
république, ils put tous,deux leurs partifans î
le fénat, les magiftrats .eux-mêmes fe partagent ; ,
ils forment des partis fans s'en apperceyoir : on
ouvre les yeux trop tard. • Une- partie de l'autorité
fe trouve armée contre l'autre 3 & elle fe
détruit:elle-même;
Lorfque la méfintelligence eft entre les nobles
Sz le peuple,, il femble que l'autorité doit con-
ferver quelque empire en faveur des premiers ;
mais l'expérience ;de tous les âges a montré combien
cette autorité étoit foible ; & les remèdes
dangereux qu'employa dans cette’oecafion lé gouvernement
où les patriciens confervèrent le plus
d'énergie,. le prouvent, a fiez. '
La guerre fut long-tems la refiource des romains
i il la fallut? continuelle ; le temple de Janus
ne fut plus fermé- que deux fois en fept cens',
ans. On vo.ybit ceffer, aux approches du prin-
tems , les troublés qui avoient agité Borne pendant
l'hiver. La paix du dedans n'étoit due qu'à
la guerre du dehors.,: 'Rorne manqua cent fois de
périr par des mains étrangères , pour n'être pas
détruite par les fienn.es. «.■
Les romains portaient contre Tennemi l'ardeur
que laiffoîent dans les efprits--les querelles do>-
jueftiques : après les campagnes 4 la' vue des bieffures
que le citoyen avoit reçues pour la p atrie
fervoit à exciter le peuplé à une nouvelle émotion.
La guerre n'étoit pas un remède, c'était un
palliatif ciuel & fanglant.
Soloçavoit fait une loi* qui obligeoit chaque
citoyen de prendre un parti dans les troubles intérieurs
j elle ne permèttoit à perfonne d’ être
neutre. Cette loi paroît dure & injufte. Il n'é-
‘ toit pas libre de vivre en paix ; l'homme de bien
,étoit obligé de choifir entre deux partis , fou-
vent fondés l'un & l'autre fur la paffion , au mépris
de l'équité. Celui qui fe rangeoit du côté où
il croyoit voir le plus de juftice , ne penfoit^pas
comme fon père & fes frères 5, il fe trouvait en
guerre avec eux.
Cependant il feroit difficile d’imaginer une loi
plus iàge & plus fenfée dans, les, circonftances
oùfe trouvoitla république d’Athènes ; elle offroit
un grand inconvénient, celui de précipiter les
querelles au point de maturité où elles deviennent
factions $ mais , d’un autre cpté , elle don?-
.noit les moyens de hâter l'explofion de ces hm*
meurs qui font.toujours, dangeréufes , lorfqu'elles
fermentent fourdementj, & en adoptant un expédient
fi hardi, cet habile légiflateur compta fur les
forces d é jà lo f pour arrêter les défordres dans
leurs commeneemens. La légiflation des anciennes
républiques préfénte une foule de ces traits
de hardiefîe, qui étonnent le foible courage des.
modernes, ou plutôt, dans l-'impoflibilité où nous
fournies de juger de la force des moeurs & des.
loix anciennes, on ne,.g.eut que faifir quelques
anneaux de la grande xnaîne d’idées patriotiques
& politiques que montra Solon
Le premier mouvement des pcrfonoes fages &
pacifiques qui le trouvaient à Athènes , étoit de-
ne point fe mêler des querelles qui leur étaient
étrangères ; mais les y contraindre , c’était les
fervir. Si le feu s'embiafoit, elles devenoient tôt
ou tard les victimes des. deux partis , par la fuite
infaillible des grands défordres. Elles pouvoiént
au contraire efpérer de fe fauver de la déroute ,
.en fe rangeant de l'un ou l'autre des côtés.
L'inconvénient de fe trouver en. oppofition
avec fes proches j a quelquefois de bons effets».
Dans les guerres -de. religion qui. ont défolé la
France , & dans quelques-unes des guerres.civiles
qu'on a vues dans ces .derniers tems les fafnilles
bien con.feillées fe partageoient de bon accord
entre les peux partis. Le frère trouvoit la pro.-
te'diion d’un frère dans la faction- ennemie $ &
lorfque l'un des partis triomphoit, on étoit fur de
n'être pas facrifié : la neutralité ne donne pas ces
avantages. ■
Mais, fans infifter plus long-terris furies bons effets
qui réfultoient pour les particuliers de cette loi*
de Solon 3 elle paroît avoir, été d'une importance-
plus effentielle^ pour le bien public. S i les gens
de bien ne fe mêlent pas des affaires, de Ja république
j lorfqu'il y a quelque danger, la. répur
blîque demeüre abandonnée aux efprits faélieux ;
elle eft perdue. Relier dans 1 inaêtion , c eft manquer
au devcwr de citoyen. Si les efprits fages font
obligés dé fe déclarer polir ou contre, cette ne-
ceffité formera dans les commeneemens un tiers
parti, qui s'occupera du foin d'appaifer les différends
i il y employera toute .fa puilfance & toute
fa fagelfe. La perfuafiôn réuffit affez fouvent ,
lorfqu’elle eft accompagnée d'une force prête à
accabler le parti qui s'y refufe , en fe joignant à
l'autre 5 & en politique les prédications ne fervent
à rien i lorfqu'elles ne font pas accompagnées de
la force., Si le gros du peuple n'èft pas feduit,
il fe détermine pour le côté oùs-il voit tous ceux
qu'il eftipie prudens, & alors les forcenés ne de-
ireurent^plus affez redoutables pour fe foutenir.
Nous ignorons les effets de cette loi jamais elle
femble avoir été diélée par les vues d'une profonde
politique : elle paroît augmenter la confu-
lion en la rendant universelle j mais c'eft de cette
confufion que dut naître l'ordre. Elle produifoit
quelque chofe de plus 5 elle étoit une autorité
nouvelle, lorfque la première devenoit împuif-
fante : on demandera toujours, il eft vrai, comment
s'exerçoit cette autorité 5 car c'eft la partie
foible de tous les, gouvernemens qui-ne font^pas
monarchiques.': mais les anciens; fuppléoient par
l'adreffe à ce vice de leurs conftitutions.
La république de Vénife , inftruite par fes
malheurs paffés, s'eft plus.occupée qü'aucun autre
éta t, du moyen de réprimer & d etoüffer les
factions. Il y aùroit beaucoup de chofes à dire fur
les inqui.fi-tetirs d'état, & fur la bouche de pierre
qui les inftruit 5 mais ces terribles expediens , lies
. & affortis au refte des ftatuts, affûtent la tran-
quilité intérieureautant qu'il eft poffible de le
faire dans une ariftocratie.
De tous les troubles-qui peuvent déchirer un
é ta t, ceux que le faux zèle de religion excite,
font les plus difficiles à appaifer. L'efprit des
hommes, frappé parla religion, fe roidit contre
les obftacles j il devient auffi ardent à la défendre
, qu.e négligent à la fulvre lorfqu'il n'eft pas
faifi par l’enthoufiafme. ,
Toute religion que l'on contrarie, forme une
faction. On ne peut excepter de cette règle que
}a religion chrétienne dans fes premiers temps 5
elle feule n'a oppofé que la douceur & l’humilité
à la perfécution.
Toute religion fe divife en fèifte, chaque fede
produit 'une fattian 3 & ici la religion chrétienne
ne doit point être exceptée/
L'amour de la religion eft une paffion qui fe
peut avouer ; non-feulement elta eft permife , elle
eft édifiante 5 ■ il eft-beau ,de l'annoncer j îl eft
naturel qu'on la ferye avec force & obftinatîon.
L'ambition, l'amour, U jaloufie , la vengeance,,
enfin chaque paffion trouble tel, ou tel cerveau,
j§ affedte chacun, d'eux d'une manière différente
* mais tous les efprits font fufceptibles de
celle de la religion ; tous font préparés par l'éducation
à la recevoir; elle agit par un principe
uniforme : ce font des rayons qui partent d'un
même foyer,.qui fe dirigent vers un même objet
, & qui par conséquent fe réunifient. D'où
il réfulte que la religion eft le mobile le plus
univerfel .& le plus puifiant des fa&ions , &
qu'elle les'' rend les plus opiniâtres. ^
Auffi æt-on vu Xts factions appuyées fur la^ religion
devenir fi formidables , que les rois n'au-
roient pu entreprendre de les détruire , fans mettre
leurs états en péril. Les princes les plus fages
font tenus quelquefois de céder au tems dans de
pareilles circonftances. Henri III entra dans l'afîo-
ciation fondée pour fa ruine , & s’en déclara le
chef : cette politique paroifioit neceftaire. Il fe trou-
voit alors dans une telle conjonélure, que fon
feeptre fe feroit brifé, s'il eût voulu s'en fervir
contre l e . fanatifme. Conftans & Théodofe tolérèrent
les ariens, n'ofant les attaquer , & il
n'eft que trop d'occafions où les adminiftrateurs
fe trouvent obligés de fuivre la.même maxime:
On remarque que le grand nombre de feéleS
trouble moins la; tranquilité d’ un éta t, que lorf-
qu'on n'en connoît que deux. L'inconvénient politique
dé la diverfité des religions dans une même
fouveraineté, eft l'antipathie qu'elle caufe parmi
les peuples : les infultes & les querelles font plus
animées , lorfqu'elles font fondées fur des opinions
religieufes.
F A L K E N S T E IN , comté de l'Empire d’A llemagne.
Il eft borné au nord par le^grand bailliage
d'Alzey au-Palatinat j à L'oueft par le fous-
bailliage de Landsberg au duché des Deux-Ponts j
au fud par la principauté de Lautern j, & à- l’eft
par les terres des comtés de Wartemberg & la
féigneurie de Kirch - heim', qui appartient à la
maifon de Naffau-Weilbourg.
La religion^ luthérienne y eft la religion dominante
, depuis la réformation : à l’époque du>
traité de Weftphalie, elle y avoit déjà eu la
jouifiance exclufive|des éghfes écoles, presbytères
, rentes,. revenus & autres émolumens ec-
clefiaftiques ; mais on y trouve aujourd'hui beaucoup
de catholiques, fur-tout à Winweiler,
L'hiftoire des anciens feigneurs de Falkenjteirt
n'eft point encore débrouillée, non plus que leur,
généalogie. On. fait feulement que Philippe de
Polant, qui vécut au 1 3e fiè’cle ,. fut le premier
qui prit le nom. de Falkenfiein ; que fon,
époufe, co-héritière de Munzenberg , lui apporta
en dot une grande partie de la Wetteravie & plusieurs
autres terres, de que Cuno II & Phil-
lippe V I I fes- defeendans-formèrent deux branches
diftinéles. Philippe X , héritier de la branche ai-
née mourut, en 1407 >- & fes domaines.paffè-
rent. à fon coufin- Philippe X I ,. q u i,. ayant été
créé comte en 1337.par l'empereur Wence flas,
eft le fêul .de fa famille qui en ait porté le titre».
Il mourut en 1410 A & il eut pour fucceffeuar