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avec facilité 5 que les manufaétures du pays étoietit
foumifes à des droits rigoureux ; qu’ au contraire
les matières brutes venant de l’étranger , étoient
afïujetties à des droits plus confidérables que les
matières travaillées, & qu’ ainfi on favorifoit les
manufa&ures étrangères.
Que les gênes & les embarras qui refultoient
pour le commerce , de la nature , dç l'affiette &
de la mefure des impôts , étouffoient l’induftrie $
que ces maux fe trouvoient encore augmentés par
Ja méthode de perception, qui avojt trop multiplié
les employés, les bureaux & les vifttes.
Que cette multiplication d’employés , de bureaux
& de collecteurs, en accablant les fujets,
qbligeoit l’état à u.i grand nombre de ftériles dépenfes
, diminuoit les revenus du fifc , & entre-
»enoit dans l’oifiveté trop de gens qu’on pouvoit
employer aux arts utiles.
Que la multiplicité des regiftres & des comptes
introduisit, tant de parties diverfes, de fous-
divifions & de calculs pour les fommes à recevoir
& à envoyer à leur deftination, qu’il étoit prefque
împoflible à I’adminifiration & aux employés de fe
former une idée claire des impôts, & d’y apporter
line furveillance utile.
Après avoir expofé l’état de la queftion avec
beaucoup de netteté & d’efprit, M. le cardinal
Bon Compagni développe dans la première partie
de fon ouvrage, Yabfurdité de Vancien fyjlême j
dans la fécondé , la Jimphcité & les avantages du
nouveau 3 8c dans la troifième la faujfeté & la futilité
des objections. Il démontre par les faits : que
les objets de première nécejjité étoient furckargés dans
l'ancien Jyftême ; qu'ils étoient beaucoup plus chers' i
pour les pauvres que pour les'riches ; que les culti-
* vateurs de terres étoient fournis a des loix & a des
prohibitions , qui leur nuifoient infiniment , & qui
mettaient des obflacles a la culture ; que les droits
perçus a Bologne étoient extravagant & bigarres ,
dans les proportions qu’on fuivoit ; quus favori f oient
les manufactures étrangères , & contrariaient celles
du pays ; qua Bologne la perception des droits &
des revenus étoit diyifée en tant de mains s qu’i l en
réfultoit un extrême embarras pour les fujets , & un
grand préjudice pour l'état ; que tes impôts & les
fommes qu'ils produifoient, étoient ajjignés à tant de
petites parties, qu’ils embrouilloient la comptabilité •
qu'ils donnoient lieu a des exactions arbitraires &
que les abus échappoient à la vigilance de tous les
contrôleurs.
Il fait voir enfuite la jufiice , les avantages & la
modération du nouvel impôt fur les terres : les com-
penfations fans nombre qu'offre cet impôt : les bons
effets que produira la diminution des droits fur les
objets de confommation , & les règles jujtes d'après
lefquelles - on a fixé la proportion de ces droits : les
• avantages qui réfulteront du nouveau tarif fur les
marchandifes & les manufactures : la fimplicité & la
fûreté des nouvelles méthodes & des nouveaux réÉ
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glemens, il rend compte des vues de bien public
qui ont animé le foùverain.
Enfin il expofe la faujfeté Cf la contradiction des
calculs de Vauteur 'des Réflexions & des autres pamphlets
contre le nouveau régime : il prouve que ceux
du rapport envoyéjjj au pape & de la lettre du fouve-
rain pontife font exacts $ que les dettes contractées
pour les defféchemens doivent être comptées parmi les
dettes de la province de Bologne, & quil ne s'enfuit
pas que les fujets de cette province payent pour
les autres ÿ que la théorie des auteurs qiion vient de
cher, efi neuve & abfurde en fait de commerce ;
que leurs remarques fur la confiitution, ou fur l'ad-
minijtration du gouvernement de Bologne manquent de
juftejfe , qu'elles attentent a l'autorité fouveraine »
& que les prétendus fa its , allégués par les ennemis
de la lettre du pape & du nouveau régime , font des
menfonges.
Cette réponfe, où l’on voit toute la fagacité
d’un homme d’état & la confiance infatigable d’uh
miniftre vivement occupé du bonheur public , eft
terminée par des comptes furies diverfes parties
de l’ adminiftration de la province de Bologne.
L ’auteur expofe, en pafîant, fes opinions fur les
grandes queitions de l’ économie politique $ & fi
les hommes fyftématiques lui reprochent d’avoir
été très, - modéré, les autres l’en remercieront.
Il ne faut pas s’ étonner qu’une réforme fi utile
à la province, & fl généreufe de la part du prince
, puifque fon tréfor n’y gagnera pas un ccu ?
ait excité des réclamations fi vives. L ’intérêt
perfonnel & la jaloufie s’embarraffent peu du bien
public, & les bons adminiftrateurs doivent , en
général, efpérer la même récompenfe.
Les détails de la régence , tels que les ont fixe
les pap'es , ne s’obfervent plus : le fénat n’a point
la fubordination que lui impofent les loix j il décide
feul dans plufièurs c a s , où il auroit befoin
de l’aveu du repréfentànt du prince. Le légat de-
vroit aflifter à toutes fes aflemblées, & on en
tient fouvent fans lui. Les fenateurs veulent que
le gouvernement foit monarchi-ariftocratique : ils
prétendent que pour publier une ordonnance
ou é d i t , il faut qu’il foit foufcrit par le gion-
falonier & les an^iani , & c : on n’avoit con-
fulté ni le gonfalonîer , ni les anfiani 3 ni la
régence, parce que leurs confeils auroient tout
gâté : enfin le pape, pour donner au gouvernement
une force coaCtive, avoit établi des troupes qui
ne coûteront que 20 mille écus > & M. le cardinal
Bon Compagni , qui dévoile avec efprit le jeu
de la petite -confpiration 3 prouve très - bien que
les sbirres , employés jufqu’alors, étoient trop
corrompus > qu’ils humilioient les citoyens contre
lefquels on les faifoit agir j que la decence & la
néceflité obligeoient de recourir à un autre expédient.
Nous ne nous aviferons pas de prqnorfcer
fur le degré de pouvoir que revendique le ®nat de
Bologne : il a fait un mauvais ufage de foh autoë
g 1
*ité ; mais on ne doit pas juger avec trop de rigueur
ceux qui défendent la liberté publique. Au
•relie, la'fermentation fe calmera* ou plutôt elle
doit être calmée ; le fénat de Bologne adoptera
l'opinion des citoyens, qui ont reçu la reforme
avec des tranfports de joie : il fentira qu on
fait pour la province tout ce que permet l état
aétuel des chofes ; il fe fouviendra avec recon-
noiffance du courageux miniftre qui s elt 0CC“ P '
de fon bonheur, prefque maigre elle * & ou P P
éclairé qui s'elt elevé au-deuus de toutes es p
tites confidérations en'faveur de la province
.Bologne. Pour nous, qui pouvons juger cette
opération avec un défmtéreffement parfait, nous,
obfervetons que s parmi les plus belles retorm s
des autres gouvernemens, on n en citerait pas une
où l'on ait confondu avec autant de fermete les
pauvres * les riches 8c les puiffans ; 8r , pour don-
ner une idée frappante des abus & des injultices
qu’offroit l’ ancien régime , nous nous contenterons
’de dire que les petites mefures deftinees au pau- |
Vre étoient -accablées de droits tandis que les
grandes mefures payoient un impôt léger. Le propriétaire
ou le marchand qui vendoient le vin a
la corba , à la mezza corba, à la quartirola , ne
payoient que 9 liards par corba, & fis payoient
44 bajoques ou 44 fous & demi par jfrba, s ils
le vendoient par flacons/, par bouteilles : ainli
les fiches payoient 9 fur cet objet, tandis que les
pauvres payoient 267 5'car 44 bajoques & demi
„font 267 liards.
Il y a près de deux fiècles qu’on travaille aux
defféchemens du Ferrarois & du Bolonois 5 & depuis
i j98jufqu’ en 176 7, ces travaux avoient coûte
•639,899 écus romains.
. On a publié de temps à autre l'état des defféchemens
qui font effectués : on voit * par celui
de 1782 , que cette année on avoit rendu a la cul- .
ture, dans le Ferrarois, 1,893 tornaturis ou ar-
■ pens du pays, & 5637 arpensen près : de ces
2458 \ arpens , 779 ayant ete plantes en bois
ou laiffés en pâturage , il ne refte que 1679 \
d'arpens convertis „en terres labourables ou en
.prés.
' Le même compte attelle qu'ea 1782 on avoit
tendu à la culture ou aux pâturages , dans le Bolonois
, 13,592^ arpens, & qu'en diminuant les
terrains plantés de bois ou laiffes en pâturages,
on avoit converti en terres labourables & en près
5,843 f arpens.
On évalue à des fommes «ès-conlîdérables les re-
!venus qui en réfultent chaque année pour le Bolo-
. nois j mais il eft impoffible d'adopter les comptes
..exagérés qu'on trouve dans les écrits, fut ces matières.
M. le cardinal Bon Compagni, qui a fuivi
,ces defféchemens avec un zele .extreme, étant aujourd'hui
fecrètaire d'état, les fùiyra avec encore
plus d“*flivité ; Si puifqu'il a adopte la noble
franchife de quelques ndminiilrateurs modernes ,
il nous communiquera fans doute des refultats
précis.
S e c t i o n I I Ie.
Remarques fur tu pofition , Us productions, le commerce
& les manufactures de l’état de /'églife.
L'état de Véglifc devroit être le plus floriffant
& le plus heureux de tous les pays de 1 Europe :
la fertilité de la plupart de fes provinces ; la
richeffe de fes produélions qu'il pourroit multiplier
, & avec lefquelles il pourroit établir des ma-
nufaétures avantageufes 3 les reffources que lui
offrent pour le commerce fes ports 8c fa fituation
au bord de la mer Adriatique 8c de la Méditerranée;
les fommes confidérables que le pape retire
des nations catholiques, 8c l'argent qu'apportent
dans fes états une foule d'étrangers ; la natuie
du, gouvernement qui préfetve les peuples du fléau
de la guerre , 8c qui entraîne peu de dépenfes
d'adminiflration ; la perfonne 8c le^ caraétère du
chef q u i, mêm.e fous les mauvais règnes, affran-
chiffent les fujets des dépenfes folles, 8c mettent
toujours quelque chofe de paternel dans le gouvernement,
offrent des combinaifons heureufes pour l'ai-
fance, la profpérité 8c le bonheur de la nation.Cepen-
dant le pays eft peu cultivé, pauvre 8c mal peuplé
: fi l'on en croit Grolley, le dénombrement,
-entrepris par les foins du cardinal Valenti, fixe a
1,100,000 le nombre de fes habitans. La population
paroît être plus confidérable ; mais elle eft bien au-
deffous de ce quelle pourroit être. Le commerce
8c les manufactures y font dans un état déplorable ,
fil'on en excepte les villes de Bologne 8c d'Aticone.
Les taxes, dont les grains font furchargés, 8c
les réglemens publiés fous le pontificat d'innocent
X ; la nonchalance des grands propriétaires,
du bas peuple en général 8c de l'adminillration ,
tiennent l’agriculture dans une langueur extrême.
De mauvaifes loix que nous rapporterons plus bas ,
nuifent au commerce 8c aux manufactures ; l'inertie
8c la misère font chaque jour des progrès ;
les dettes s’accumulent, 8c les abus de tout genre
font devenus fi multipliés , que l'état femble ne
pouvoir plus fe foutenir, fans quelque reforme.
Les papes paroiffent fentirla néceffité de changer
de fyftême; ils font effrayés de ce qu’ils ont perdu
depuis trente ans i fis voient les puiflances catholiques
, fur lefquelles ils comptoient le plus, les
dépouiller d'une partie de leurs revenus ; 8ç les
operations du cabinet de Lisbonne, de Madrid,
de Naples, de Vienne 8c du fénat de Venife ,
leur montrent qu'ils ont à redouter d'autres évé-
nëmens pareils. La faine politique leur împofe la
loi de ne plus compter que fur leurs propres états ;
les provinces de \ églife leur offrent des reffources
fuffifantes 8caffurées; 8c en ranimant l'agriculture,
en favorifant la population, le commerce 8c lés