les fouverains & les fujets dans telle circonftance
donnée. Ainfi, lorfqu’ il fe prépare une révolution
dans le corps germanique & dans le relie de l’Europe
, les puilfances in'téreflees doivent, ce fem-
b le , accorder aux écrivains la permiffion de la
difcuter.
Quel peut être, après tou t, l’inconvénient de
ces difcuffions ? Si les auteurs déraifonnent, tant
pis pour eux ; ils feront punis de leurs fottifes par
le dédain ; s’ ils fe trompent, on s’en appercevra
bientôt i & quand ils font modérés, quand ils
obfervent ces bienféances qu’ordonnent tout-a-la-
fois la politeffe, la jullice naturelle & la raifon ,
leurs réclamations n’ont rien de dangereux. En
général, on redoute trop l’ effet de ces difcuffions
politiques ; & dans-les pays où on les défend avec
•te plus de rigueur , on n a jamais examine ce qu il
en réfulte de bien & de mal : on n’a point com-
paré les avantages & les inconveniens : ces der-
piers font foibles, & les premiers font importuns
: une nation éclairée n adore pas en lilence
les fottifes de fes maîtres 5 elle fe .permet alors
de vaines remarques dans la convérfation j mais
fes plaintes n’ont pas de fuite , & elles ne peuvent
en avoir,. parce que ce n efl pas avec les
lumières de l’ efprit qu’on excite des mouvemens
dans les états : les lumières font - fi peu dange-
reufes fous ce rapport, que, dans la plupart des
pays, l’un des meilleurs moyens d’enerver un
peuple, c’eft de l’éclairer & de l’occuper vivement
avec les lettres & les arts. D ’un autre cote,
•les adminiilrateurs & les princes peuvent-ils de-
couvrir d'eux-mêmes ce qui convient au régime
d’un étaf} Pour trouver le meilleur régime en.
ce qui a rapport à l’économie intérieure & à la
politique étrangère , on a befoin de méditations
fortes & fuivies ; il faut qu’ un grand nombre
d’hommes l’étudient, parce qu’ ils relèvent mu-
tuellement leurs erreurs, & parce que 1 un a dçs
vues qui ont échappé à l’autre.
i i ° . L ’ éleftion d’ un empereur eft la chofe qui
importe lè plus au bonheur & à la tranquillité
de l’E m p i r e & cependant cette. opération eft
exclufivement réfervee aux fept éleôeurs. Sept
princes fur environ trois cents, font ainfi chargés
de d’aéle le plus important pour le,corps
germanique ; & il feroit bien à defirer que tous
les membres de la diète y enflent fur cet objet
pne influence qù'on calculerait fur fes forces ref-
peaives. Il feroit alors plus aifé d’écarter du
trône impérial la puiflance qui infpireroit de l’effroi
, ou plutôt cette puiflance n’y arriverait
p a s , ou 'ne s’y maintiendrait pas fi. aifément.
Pour admettre les divers membres du corps germanique
à l'éleaion de l’empereur, il faudrait
îe s combinaifons fans nombre. Nous nous contenterons
de propofer là-deffus quelques idées.
N e pourroit-on pas établir que tous les états de
('Sippirf çpmpoferqient trente - cinq voix , par
exemple ; que chacun des éle&eurs aétuels et»
aurait une, & pour les vingt-huit autres divifer
les princes en vingt huit diftriéts : chacun de ces
diftriéts 3 de quelque nombre\ à3 états qu'il fût
compofé, n'en auroit qu'une 5 pour former la
voix d’un diftriét 3 on recueilleroit l’avis de tous
les états qui s'y trouveraient ; une petite abbaye
princière 3 une ville impériale, un petit comté ou
une feigneurie formeraient le tiers 3 le quart ., le
cinquième, le fixième ou le feptième d'un fuffra-
g e , tandis qu'un margrave ou un prince, maître
d'un domaine affez étendu , auroit lui feu!
un fuffrage, deux & même trais, félon l'étendue
de fes polfelïions & de fes moyens : en
fuppofant qu'il y e û t , par exemple, vingt - un
fuffrages par diftriéts, onze de ces fuffrages produiraient
la v o ix , lï on admettoit la règle de la
pluralité} & fi au lieu de la règle de la plûra'-
lité , on admettoit celle des deux tiers ou des
trois quarts, on calculerait les détails des votes ,
d'après cette proportion. Il y a lieu 4e croire
que cette réforme dans le corps germanique produirait
de bons effets, & attacherait tous les états
à la confédération. Cette réforme, établie^ avec
une forte d'appareil, rendrait un peu plus légales
les diverfes opérations des 4iètes > c a r , on doit
en convenir, les privilèges dés électeurs ne font
pas fondés fur des titres bien exaéts, & l'empereur
& la diète fe permettent' journellement des
aétes que lés diplômes & les capitulations n’au-
torifent pas.
iÿ ° . Parmi les avantages qu’aurait l’opération
fur laquelle nous venons de donner des détails,
il ne faut pas oublier qu’ il en réfulteroit plus de
zèle & de vigilance parmi les membres du corps'
germanique. Il en eft un grand nombre qui n’ af-
Iftent pas à la diète 5 & fi après leur avoir donné
un fuffrage quelconque dans l’éleélion de l’empereur,
on ftipuloit d’ une manière plus exprefle ,
fi on étendoitleurs droits à la diète, ils ne manqueraient
pas d’y envoyer, & alors Içs réfolutions
feraient mieux combinées.
140. Lorfqu-on étudie dans la conftitution germanique
ce qui a rapport à la diète , à fon ragimç
z à fes décrets, on voit que le régime fédératif
es états de l'Empire a été calculé aü hafard, ou
n faveur des éleéteurs & rdes princes jpuiffants,
It cependant de toutes les confédérations, au-
une ne devoit être combinée avec plus de foin ,
uifqu’aucune n’offroit autant d obftaçles a la
ranquillité intérieure & à la profperité generale.
)es détails fur cet objet nous mèneraient trop
fin ; St ceux de .nos ieéleurs qui méditeront at-
entiyement les articles A llemagne , D ie te ,
électeurs , E m pire , ne.douteront pas de la
uftefie de notre aflertion.
I f°. N ’eft-il pas clair, par exemple, que le*
tats confédérés de la ligue germanique devraient
voir une armée puiflante, facile à lever & a
entretenir, fe que le régime 8tfh marché de ces
troupes de l’union devroient etre fournis a des renies
invariables. Nous avons d i t , & tout- le
monde fait combien l’armée de 1 Empire eft peu
redoutable; quelles 'difficultés, quelles knteuts
& quels obftaçles on éprouve, lorfqu il s agit de
l’aflembler ; que d’embarras s’offrent de toutes
parts, lorfqU'on veut la mouvoir & .la mettre en
aélion, & enfin quels ont toujours ete fes toibles
fuccès. . ’
16°. Le lien qui attache quelques-uns des électeurs
& l’empereur lui-même à la confédération
germanique eft prefque idéal ; avec cette belle
règle des contingens à l’armee de 1 Empire ,
grandes .puilfances n ont , dans le fa it , d autre
engagement que celui de fournir un tres-petit nombre
de troupes, & ils peuvent a leur gre employer
le telle de leurs forces contre le bien de la
confédération. -
i j ° . Il y a des loix pour mettre au ban de
l’Empire les états réfraétaires j mais que lignifient
ces loix ? & fi on les a exécutées quelquefois ,
n’étoit - çe pas contre les fojbtes ? Si l empereur
q u i, indépendamment d"e fa qualité de chef_de
l'Empire, fe trouve louverain d une valte etendue
de domaines, fuit les intérêts & les vues ambi-
tieufes de fa maifon, aux préjudices de 1 Empire,
la confédération indique-t-elle avec preemon de
quelle manière on pourra le contenir ? Et quand
elle l’indiquerait, le corps germanique a-t-il la
force de~ réprimer une puiflance aufli conlide-
rable ?
18°. Il faut l’avouer, il y a quelque chofe de
bifarre dans cette confédération de tant d états
divers, qui donnent à leur chef le titre & la
qualité d'empereur , & qui rie lui accordent ni
des revenus , ni des troupes, ni une'influence,
proportionnés à une grandeur fi importante en apparence.
É t a t s - U n i s . Les treize - provinces qui
viennent de fecouer le joug de l’ Angleterre &
de former en Amérique dés états libres & indé-
pendans, ont pris ce nom. On en trouvera la
lifte plus bas. Leur pofition générale eft affez
connue, & nous l’ indiquerons d'une manière plus
précife dans la feétion 8e.
C et article fera fort long 5 mais il eft fi important
que les le&eurs ne s'en plaindront pas. Nous
donnerons, i° . un précis de l'biftoire p6ji»que
tics Etats-Unis jufqu'à l'époque de la révolHion.
Nous parlerons de la fituation où fe trouvoient
les colonies angloifes avant la révolution & de la
forme de leurs gouvernemens : nous indiquerons
les caufes & nous ferons Thiftoire^ de la
révolution : $°. noüs rapporterons l'a&e d’ indépendance
: 40. nous nous permettrons des remarques
générales fur les conftitutions des treize
Etats-Unis 3 & des remarques particulières fur
(Econ. polit. Çf diplomatique. Tom. I I .
tes provinces qui doivent changer leurs ’conftitutions,
ou les revêtir de formes plus te gales &
plus folemnelles : y°. nous tranferirons l'acte de
confédération, fur lequel nous nous permettrons
aufli des remarques, & nous dirons tout ce qui
a rapport au congrès & aux nouveaux pouvoirs
qu'il eft à propos de lui confier : 6°. nous traiterons
de la dette & des finances des Etats- Unis :
7°. nous expoferons dans quel état fe trouvent
aujourd'hui les nouvelles républiques américaines :
8°. nous parlerons des abus qu'elles doivent éviter
dans la "rédadion de leurs codes': 90. de 1 af-
fociation .des Cincinnati & des dangers de cette
inftitution : io°. de la population des Etats-Unis :
n a. du commerce, de la marine, de l'armee -
12°. des nouveaux états qui fe formeront dans le
territoire de Youefi , & des diftriéls qui demandent
déjà à être admis à la confédération américaine ,
ou qui ne tarderont pas à y être admis j 13 • en"
I fin des traités qu'ont formés les américains avec
I quelques puilfances de l’Europe, & nous terminerons
l'article par des ôbfervations politiques &
des détails fur tes fauvages qui fe trouvent dans
le voifinage ou dans l'enceinte des Etats - Unis.
Nous avons fait un article particulier fur chacune
des treize provinces, & on doit y chercher tes
détails propres a chacune de ces provinces. Nous
avons mis du foin dans la compofition de ces morceaux
, & nous avons tâché de fatisfaire a la fois
la curiofité des Ieéleurs indifférens, & de montrer
du zèle pour la prospérité de ces intereffantes
républiques.
S e c t i o n p r e m i è r e .
Précis de Phijîoire politique des colonies angloifes
de V Amérique feptentrionale 3 jufqu'a l'époque de
la révolution.
Nous avons rappelle à l’article de chacune des
, colonies l'époque de fa fondation 3 nous avons
parlé des travaux des premiers colons & des obf-
tacles qu'ils eurent à vaincre; des fecours que
leur donna la métropole, & enfin de tout^ce qui
s’eft paffé dans leur gouvernement j nous nous
contenterons d'ajouter ici quelques remarques générales.
Les anglois, perfécutés dans leur ifle pour leurs
opinions civiles & religieufes, fe réfugièrent fur
les côtes de l’Amérique feptentrionale. O a a ob-
feryé avec jufteffe que cette première émigration
ne pouvoit former des colonies bien florilfantesi
Les habitans de la-Grande-Bretagne aiment à voyager
j mais ils font tellement attachés au fol qui
les a vu naître, que des guerres civiles ou des
révolutions déterminent feules à changer de. climat
& de patrie ceux d'entre eux qui ont une
propriété, des moeurs ou de l'induftrie 5 les émi-
grans, dont nous parlons ic i , étoient accoutumés