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ou la république populaire. Ces trois fortes <te
gouvernement fubfiftent encore fous une forme
fimple ou diverfemeut compofée de la combinai-
fon de ces trois premiers. Mais quelles que puifetit
être ces formes d’autorités fouveraines, elles ne
font point la bafe du droit naturel des hommes
réunis en fociété , & ne décident .point de fon
elfence ; « car les loix varient beaucoup fous cha-
” cune de ces formes. Les loix des gauvernemens,
» qui décident du droit des fujets, ne font pref-
•> que jamais que dès loix pofitives ou d’inftita-
“ tion humaine j o r , ces loix ne fout pas le fon-
” dement effentiel & immuable du droit naturel».
Elles ne devroient être qu’une explication des loix
naturelles > mais comme elles sien écartent quelquefois
, ou qu’elles leur font contraires ', elles
ont trop peu de Habilité, pour qu’il foit poffible
d'examiner l’état du droit naturel des hommes fous
ces loix.
" En effet , là où les loix & la puifTance tuté-
« laire n’affurent point la propriété & la liberté,
” il n’y a ni gouvernement, ni fociétés profitables i
» il n’y a que domination & anarchie fous les ap-
» parences d’un gouvernement, parce que les loix
» pofitives & la domination y protègent les ufur-
” parions des forts, & anéantiffent la propriété '
» & la liberté des fbibles M.
Pour connoître rétendue du droit naturel des
hommes reunis en fociété , il faut donc remonter
aux loix naturelles , conftitutives du meilleur gouvernement
poffible. C e gouvernement confifte dans
1 ordre naturel & dans Tordre poffiif les plus avantageux
z ceux qui lui obéilTent ÿ car pour jouir
de la plénitude de leur droit naturel.., les hommes
doivent être fournis, dans la fociété, à des loix
naturelles & à des loix pofitives qui en dérivent.
Des loix naturelles.
Les loix naturelles ( i ) , infatuées par TÊtre
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fuprëme , comme les meilleures loix poffibles ,
font néceffairement la bafe du gouvernement le
plus parlait, & doivent fervir de règles aux loix
pofitives 5 car celles-ci ne font que des promulgations
des premières , ou des loix de manutention
relatives à Y ordre naturel, évidemment le .plus
avantageux au genre humain (2).
Les loix naturelles font établies à perpétuité,
pour la réprodu&ion .& la diftribution continuelle
des biens qui font néceflaires aux befoins des
hommes réunis en fociété , & aflujettis à Tordre
que ces loix leur prefcrivent.
Ces loix irréfragables forment le corps moral
& politique de la f o c ié t é p a r le concours régulier
des travaux & des intérêts particuliers des
hommes, inftruits par ces loix mêmes à coopérer
avec le plus grand fuccès poffible au bien commun,
& à en affurer la diltribution la plus avan-
tageufe à toutes les claffes de la fociété.
Enfin 3 ces loix fondamentales , qui ne font
point d’inftitution humaine (3) , & auxquelles
toute puiffance humaine doit être afîiijettie, eonl-
tituent le droit naturel des hommes, diétent les
loix de la juftice difeibutive, établirent la force
qui doit affûter la défenfe de la fociété , contre
les entreprifes injuftes des puiffances intérieures
& extérieures dont elle doit le garantir, & fondent
un revenu public, pour fatisfaire à toutes les
depenfes néceflaires à la fureté, au bon ordre &
a la profpérité de Tétat.
Des loix pofitives.
ÿ Les loix pofitives font des règles authentiques
établies par une autorité fouveraine , pour fixer
1 ordre de 1 adminiftration du gouvernement ; pour
maintenir ou réformer les coutumes & les ufages
introduits dans la nation j pour régler les droits
particuliers des fujets , relativement à leur état}
pour déterminer décifivement Tordre pofitif dans
r^ l Lel naturelles font ou phyfiques, ou morales. La loi phyiique eft, félon nous , le cours des chn,
fes de ce monde , re* *le par la force aûive que Dieu y répandit, & qu’il y entretient
phyfiqïe. ^ s C0nn0lllance des àioitsSc des devoirs réfultans du droit naturel, fondé fur la loi
Les loix phyfiques ou morales les plus avantageufes aux hommes réunis en fociété , font celles oui nnA ilsesx '° .X " aE“Tcllcs, de l’ordre des fociétés font les loix phyfiques même de la réproduâion nernét-npl!,.
2 “ biens neceflaires a la fubfiftance , à la confervation & a i l commodité des hommes O ^ om m t üvfl
P“ J . "J'WKut de ces lo ix , qui fixent-l’ordre des opérations de la nature & ^ t â v r i l de7homm«ft
r vail qui doit concourir avec celui de la nature â la reproduction des biens dont ils ont befoin Tout 7
K S ? -6 tof * î ï * * **?î * * * * * I & cette conftitution forme l’ordre pCfiq ufq S afMetrit à fts loix
les hommes reunis en fociete, lefquels, par leur intelligence & leur aflbciation , peuvent obtenir avec ah o f
dance, en obleryant les loix naturelles , les biens qui leur font néceflaires. P r avec abon-
&CE d6f0ldre > * * a
les
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les'cas dôuteux; réduits à des ,probabilit,ésr dfopl* '
nion ou de converjançp y p,our afleoir enfin les qp-
cifions d,e la juftice idiftrfautive. Mais nous ayons
vu que le droit légitime ne peut avoir, d'autre bafe,
■ ni d'autres principes .que les loix naturelles mêmes,
qui Conftituent Tordre effentiel de la foçiété $ ainfi
leis' loix pofitiyes, qui , déterminent dans le détajl
le droit naturel des çitqyens , étant indiquées, &
réglées par ces loix primitives, ne doivent être
introduites dans la nation qu'autant, qu'elles font :
conformes & rigoureüfement affujettips à ces premières
loix j elles ne.doivent donc pas être arbitraires
, & le légiflateur , foit le prince , foit la
nation, rie peut les rendre juftes, qu'autant qu'elles
font juftes par effence ( i) .
Le domaine de chacune des deux legiflations,
natwelle & pofitivc 3 fe diftingue évidemment par
les lumières de la raifon j car, les loix de part &
d'autre font établies & promulguées par des inf-
titutions & des formes (2) fort différentes. Les
unes font confîgnées dans le grand livre de la nature
, intelligible à tous ceux qui veulent l'étudier
fans préoccupation, & leur étude forme une
doélrine qui fe divulgue fans formalités. légales ;
ces loix font obligatoires , ; indépendamment d'aucune
contrainte & par leur feule évidence. Les
loix pofitives ou littérales font annoncées par les
ordonnances du fouverain : comme leur principal
objet eft d'oppoler une fanétion redoutable aux
déréglemens de l'homme pervers & aux attentats
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de l’homme jujufte, elles fqnt obligatoires, à raie
fon de là pçine attachée à leur tranfgreffion, quand
même elles ne feroient connues que par la fimplp
indication énoncée .dans. l'ordonnance.
Les loix pofitives ne peuvent fuppléer que fort
imparfaitement à la corinoiffance des loix de Tor-r
dre. Auffi, la première loi pofitive, la loi fondamentale
des autres loix pofitives, c'eft Yinfiitutiqn
de l'inflruftion publique & privée des. loix de l'ordre
naturel, qui eft la règle fouveraine de toute législation
humaine , de toute conduite civile , politique
,- économique & fociale,; car fans la con-
’ noiffançe’ des loix naturelles, qui doivent fervir
d e bafe aux loix pofitives, & de règles fouveraines
, à! la conduite des hommes, il n'y a nulle évidence
de jufte &; d'injufte, d’ordre pnyfique & d'ordre
moral,, nulle diftinétion effentielle de l’ intérêt général
.& de l'intérêt particulier, de la réalité des
caufes de la profpérité & du dépériffement des
nations ; nulle évidence enfin des droits facrés de
ceux qui commandent, & des devoirs de ceux à
qui Tordre focial preferit Tobéiffance.
Plus une nation s'appliquera(3) à les connoître,
plus Tordre naturel dominera chez e lle , & plus
l'ordre pofitif y fera régulier. On ne propoferoit
pas chez une telle nation une loi déraifonnable ;
car le gouvernement & les citoyens en apperce-
vroient auffi-tôt Tabfurdité.. Il n'y auroit que
l’ignorance qui pût en favorifer Tintrodu&ion ;
mais fi le flambeau de la raifon y éclaire le gou-
(O Souvent le droit légitime reftreint le droit naturel, parce que les loix des hommes ne font pas aufli
*> parfaites que les loix de l’aüteur de la nature, & parce que les loix humaines font quelquefois iurprifes
” par des motifs dont la raifon éclairée ne reconnoît pas toujours la juftice ; ce qui oblige enfuite la fageffe
* Kr ^giflateurs.d’abroger des loix qu’ils ont faites eux-mêmes. La multitude des loix contradictoires &
« abfurdes, établies fucceflïvement chez les nations, prouve manifeftement que les loix pofitives font fuit
jettes à s’écarter fouvent des règles, immuables de la iuftice & de l’ordre naturel le plus avantageux à la
» fociété ».
Traité du- droit naturel, par M. QuF s N A T , pag. 7 & 8.
1 ^es' naturelles renferment la règle & l’évidence de la règle. Les loix pofitives ne manifeftent que
la règle ; celles-ci peuvent être réformables & paflagères , & fe font obferver littéralement & fous des
peines decernees par une autorité coa&ive : 'les autres font immuables & perpétuelles , & fe font obferver
librement & avec discernement par des motifs ïhtéreffans, qui indiquent eux-mêmes les avantages de s’y
conformer : celles-ci aflurent des récompenfes, les. autres fuppofent des punitions.
(3) Chez une nation où les loix de l’ordre naturel font oubliées ou méprifées , l’altération du gouverne-
rn^ t ,’ Vlces de l’adminiftration opérant un changement rapide & confidérable dans les fortunes, les pro-
prietes le trouvent bientôt accumulées fur un petit nombre de têtes }.le refte des citoyens vit comme il peut
oe Ion îndufme & de fon travail ; & comme, parmi fes riches , la bizarrerie, le luxe prodigieux, la dépravation
des moeurs difpofent de leurs revenus en chofes de fantaifie ou dé vaine curiofité , la circulation qui
ûevoit ramener ces revenus,à la terre , eft interrompue- ou détournée de fon objet. Ces exemples fréquents
jntluent fur les chefs, augmentent les erreurs & les folles dépenfes. L’agriculture languiffante, opprimée par
des impôts de toute, efpéce, négligée par l’incurie des propriétaires, décline à vue d’oeil & ne donne plus
que de roibles produits ; le nombre des hommes diminue , & cependant une partie du peuple eft fans fà-
laires, & cette partie eft encore de-trop , puifqu’on ne peut la nourrir. Alors l’extrême neceflité , née de
lextreme inégalité , emploie tous les poffibles pour fe fatisfaire. Bientôt elle produit avec l’incertitude l’af-
tuce , la baflefle, la mendicité, l’égarement & le crime ; elle jette la fociété dans le trouble & le malheur ,
quelquefois dans des convulfions violentes, & enfin dans des crifes qui ne peuvent avoir de terme qu’une
révolution. Au contraire, dans une fociéré bien ordonnée , il n’y a rien de trop , parce que tout y eft à la
place. Tout y prpfpêre , parce qu’on y fuit les loix éternelles de la juftice ; que chacun y jouit pleinement de
les droits & remplit fès devoirs. L’inégalité y devient un avantage , en donnant plus de réflort & d’a&ivité
aux relations fociales , & l’accaoiflèment rapide de la population , effet de la profpérité générale, en eft
.^ §5? un® nouvelle çaufe. Un grand revenu liquide, retombant fans cefl’e fur la terre, y fait germer les
ricneiles & les falaires qui, répandus abondamment de tous côtés , font l’ame d’un commerce & d’une cir-
cuiation immenfes, & multiplient les hommes à l’infini , en les rendant toujours utiles.
Uzcon. polit. & diplomatique, Tom* II. V