
commerce 8c d'entreprifes qui. enrichiflent des in-
trigans 8c des fripons , pour dévouer à la misère
une multitude innombrable d’hommes , qui vivent
d un modique patrimoine, ou que leur caractère
vertueux 8c les circonftances «éloignent des places
& des affaires lucratives , exciteroient l'admi-
jration.
5 V*c qu'il y a de plus fâcheux pour la chambre
apoftolique,, tandis que le revenu eft demeuré le
meme, lès dettes & les dépenfes ordinaires ont
augmenté , malgré les rédudions d'intérêt qu'on a
faites fous quelques règnes.Pour donner fur ce fécond
point des.détails exads & précis, il faudroit avoir-
un tableau de eomparaifon- des dettes en 1712 ,
6 des dettes aduelles , de ce qu'on dépenfoit
alors, & de ce qu’on dépenfe maintenant ; 8c il
xi y a guères que la chambre apoftolique qui puiffe
Je donner. Cependant les papes n'enrichifîent plus
leurs familles aux dépens de l'é ta t, comme ils le
faifoient autrefois. Ils pouvoient alors difpofer fe- '
<rettement de très-grandes fommés, qui font aujourd'hui
fous la régie. de la chambre apoftolique.
l e u r autorité n'a pas diminué 5 mais le facrécob ;
lè g e a établi:peu-à-peu un ordre qui arrête lés
largefles défordonnées , ou qui contient le fouve-
rain par l'opinion publique. Ils créoient des fiefs
.en faveur de leurs parens, dans les provinces de
leur domination : les maifons papales ayant tout
envahi, il refte peu de pareils étàbliftemens à
former ; & fi le fouverain pontife en projettoit de
femblables, les cardinaux ne manqueroient pas de
lui adrefler des remontrances très-vives. On dit
q.ue le pape ne peut guères économifer ou donner
en argent que 50,000 écus par année.
2°. Nous nous perméttrons d'obferver ici que
des articles çonfiderables des revenus des papes,
qui ont déjà diminué, diminueront encore d'une
année à l'autre, & que cette diminution tenant
a des caufes puilfantes, 8c fur-tout aux progrès
de l'étude de l'économie politique 8c aux prétentions
des fouverains catholiques, qui fe multiplient
chaque jour, la cour de Rome ne viendra
pas à bout de. la prévenir. Le Portugal a rompu
la -plupart des liaifons lucratives au faint - fiège ,
qui n'entretient plus de nonces à Lisbonne , &
il ne permet plus de recourir à la daterie à ceux
qui obtiennent des bénéfices. L'Efpagne acheta ,
fous Benoît X IV , pour trois millions de piaftres,
la liberté des difpenfes qui ne font pas réfervées
à la componende, & l'affranchiflement des expéditions
de la daterie, excepté pour un petit nombre,
de bénéfices.
On croit que l'argent, verfé de France à Rome, foit
pour les b u lle s fo it pour les difpenfes, ne monte
année commune, qu'à 3 ,. pii 400,000 liv. , ainfi
que nous l'avons dit , 8c ce royaume payoit à ,
Rome, en 1712 , une fomme plus confidérable.
Sous Charles IX , on difcontinwa de payer, les ■
bulles ; mais fous Henri I I I , on rétablit l'ancien
ufage. Encore, les fommes payées à Rome par
la France, ont-elles plufieurs deftinations. Premièrement
, celle de former une diftribution pécuniaire
, qu'on appelle propice| au profit du pape
8c des cardinaux , dont plufieurs ont befoin de
ce lupplément à leur congrue. Secondement, de
contribuer, à l'entretien de quelques hôpitaux.
Trojfîemement , 1 de, concourir au paiement des
rentes viagères, conftituées par la chambre ecclé-
fiaftique , au profit des particuliers qui lui ont
confié leur argent.
Quoique les officiers de la daterie 8c les objets que
nous venons -d'indiquer, abforbent à-peu-près les
deux tiers des trois millions, auxquels on évalue
cette branche de revenu , 8c quoique i , io o , oooJ .
feulement foient employés à la décharge de l'éta t,
le trefor de la cour de Rome fentira cependant
cette diminution ; car il faudra bien pourvoir, de
maniéré ou d'aiitre, au dédommagement de ceux
| für qui elle tombera.
3°. L'article des dépouilles des eccléfîaftiques
des royaumes de Naples, d'Efpagne 8c de Portugal,
eft prefque nul, 8c il ne tardera pas à le
devenir tout-à-fàit. Dans l'état aéluel de l'Europe,
c'eft une branche de revenu , fur laquelle la cour
de Rome ne doit plus compter.
4°* Tout ce qui regarde les finances du pape
femble fufceptible d'améliorations, 8c d'améliorations
importantes. Les reffources 8c les impôts
qu'a imaginé la cour de Rome, la forme de per7
ception qu'elle a établi, 8c les moyens qu'elle
emploie pour augmenter fes revenus, font-ils bien
calculés? Leur Foible rapport elt-il proportionné
aux abus qu'ils entraînent, 8c au détriment qu'ils
caufent à l'induftrie, au commerce 8c aux manufactures
?
50. Les papes ont rendu vénales les charges^ de
la chancellerie 8c de la daterie, 8c plufieurs autres
; la même perfonne en pofsède plufieurs, que
fouvent elle exerce, ou qu'elle fait exercer par
des prête-noms $ mais dont elle perd la propriété
à fa mort..
La vénalité des charges eft par-tout un mal ;
chacun en convient aujourd'hui, 8c viendroit-on
à bout de prouver ici l'exception à la règle gé*
nérale ? Le faint-fiège eft allé plus loin encore que
les pays qui ©nt fi fort abufé de la vénalité- des
charges î 8c n* eft - il pas temps de réformer cet
abus ?Xe gouvernement de Rome doit être tout
paternel ; il doit porter l'empreinte de l'honnêteté
8c de la raifon j il faut qu'on y apperçoive tou-
jours cette noble vertu qui en eft le fondement 5
8c au-lieu de confier les divers emplois à ceux qui
ont de l'argent, ne convient-il pas de les; confier
aux hommes qui ont du mérite ? Si le fouverain
montre dans fon, adminiftration toute la fbiblefle
de l'humanité , ne nuira-t-il pas a la fainteté du
miniftère qu'il remplit ? Les, charges dont nous
parlons ne s'achetant que pour la v ie l leur vénalité
,a encore plus d'inconvéniens que celles dont
le fond paffe aux héritiers ; on paie à Tacheteur
8 pour cent de fon argent, 8c en perdant fon
emploi , lorfqu'il meurt, il perd aufli fon capital :
il ne peut même vendre fon-office-?, lorfqu'il eft
arrivé à l'âge de 70 ans, ou lorfqu'il eft dange-
reufement malade ; mais s'il fe trouve au-deflous
de cet âge, 8c s'il fe porte bien, on lui laifife la
liberté d'en difpofer, pourvu qu'il furvive 20 jours.
D'après un pareil arrangement, les poflefleurs des
charges font-ils modérés dans l'exercice de leurs
droits ? N e cherchent-ils pas à tirer tout le parti
poftible d'un emploi qui va-4eur échapper ? L'honnêteté
peut-elle les contenir, quand ils fe voient
à la fin de leur carrière ? Et les malverfations des
fiibalternes ne nuifent-elles pas au refpeét qu'on
doit au fouverain ?
Le prix des charges étant d'ailleurs très-confidé-
rable; car quelques-unes de la chambre apoftolique
coûtent 80 à ioô mille écus romains, les titulaires,
pour fe dédommager des rifques que court une fi
grande fomme,. peuvent-ils être modérés dans la
perception de leurs droits ?
. 6°. La douane de Rome rapporte , dit - on ,
280,000 écus au pape ; mais elle gêne beaucoup
le commerce. Si les campagnes étoient bien cultiv
é e s , 8c fi l’on mettoit l'impôt fur les productions
, en établilfant le nouveau régime avec quelque
foin , n'exciteroit-on pas l'induftrie au lieu
de l'arrêter ? 8c le commerce ne retrouveroit-il pas
une partie de la liberté qui lui eft fi néceflaire ?
D'autres douanes font établies dans quelques villes
du pape , 8c leur foible produit compenfe-t-il le.
mal qu'elles font au commerce, dont la langueur
auroit befoin de toute efpèce d'encouragemens, ?
On dit que les douanes des villes du patrimoine
de S. Pierre rapportent 52000 écus j que celle
d'Ancône en ' rapporte 9,000 ; celle de Bénéyent
2,464 ; celle de Ferrare 74,346 , 8cc. ; 8c lors
même qu'on fuppoferoit ce produit beaucoup plus,
confidérable, fuffiroit-il pour dédommager de fes
funeft.es effets ? Les prohibitions- deviennent fur-
tout funeftes à une nation engpurdie par une longue
parefle, qui fe ferf du plus: leger prétexte
pour végéter dans l'indolence. G*eft la négligenc
e , ce font les vues bornées des adminiftrateurs
qui ont établi les douanes dans les pays agricoles
& fur le continent ; 8c ft elles , conviennent aux
ifles, en quelques cas particuliers , adonnées au
commerce, on peut par-tout ailleurs leur fubfti-
tuer avec1 fruit, des impôts fur les productions
qui fe perçoivent fur les lieux de culture.
• Au refte, il n'y . a point de douanes fur les-,
frontières > elles fe: trouvent répandues dans quelques.
villes , d'après une. règle qui, pour être appréciée
, exige beaucoup de connoiflances du local
du pays y elles embraffent un feul diftriét,
qu'on appelle le territoire romain, autour duquel
elles forment un’ cordon ; 8c les villes exceptées,
ce qui entre dans ,1e refte des états du faint-fiège,
r/y eft point fujet. Les marehandifes destinées
pour Rome né payent qu'à Rome, 8c celles qui
font deftinées pour les autres lieux de ce territoire de
Rome, payent fur la frontière du territoire. Nous,
n'ofons .nous * permettre des réflexions fur cet arrangement
: on a peut-être quelques raifons de
gêner la province de Rome, 8c de laifler les autres
plus libres , quoique la règle générale foit
d'établir les douanes fur les frontières; un:état
peu riche 8c mal cultivé, 8c où le commerce eft;
prefque nul, qui entraîne tout à la capitale j dans
laquelle fe rendent en foule les étrangers de- tous
les pays de l'Europe , eft peut - être fufceptible
d’une exception. Il peut en être d'autant plus fufceptible,
qu'il n'y a pas de mal à tirer ainfi de
l'argent des étrangers, que les ruines de l'ancienne
Rome 8c de la Rome moderne attireront toujours ,
8c q u i, vu le peu derichefles du pays, n'auront
de long-temps à fe plaindre de la cherté des denrées
8c du féjoür de la capitale de l'état ecclé-;
fiaftique. Mais s'il eft convenable de laifler les
douanes autour du territoire de Rome; à n'en-
vifager que la profpérité de l’état, il ne l'eft pas
dé fouffrir les abus qu'on voit à celle de Rome.
Les cardinaux, les grands feigneurs 8c les ambaf-
fadeurs ont des droits de franchife, en vertu def-
quels ils font entrer une certaine j .portion de
denrées, fans èn payer les droits.. Fs en font-ils
pas entrer fouvent le double 8c même Je triple ?
Les commis le voient, 8c n'ofent s’y oppofer :
ils craignent d'avoir pour maître demain , celui
qu'ils feroient punir aujourd'hui ; ils redoutent les
parens ou les amis de celui qui régnera un jour ;,
mais ces abus paroififent inhérens à la conftitution
de Rome ; 8 c, s'il faut indiquer des réformes po£~
fibles, ou d'une difficulté, ordinaire, il fera inu-y
: tile d’infifter fur celle-ci.
Toutes les foieries étrangères payent vingt-deux-
pour cent de l'eftimatioo i> vies draps; fins, payent
moins que lés draps groflîers, afin d'encourager •
les fabriques du pays : cette difpofition eft afîez.
convenable, du moins dans l'état où fe trouvent
les« manufactures du pays 3 mais on ne voit nulle
part des commis plus corrompus, & la plupart des.
négocians viennent à bout d'éluder les droits du fifc.
70. Les impôts,paroiffent mal aflis dans toutes
les provinces de l’état de V ég ît fe , 8c leur, perception
ne femble pas moins défeélueufe. Qn voit
que l'étude de l'économie politique y eft fort négligée
, 8c qu'on y connoît peu les vrais principes
de la pvofpérité d'une nation. Qu'on ne s'y
.trompe p as , l'eTprit 8c ,1a raifon ne . fuffifent pas
aujourd’hui' pour adminiftrer convenablement les-
états : l'économie politique eft une fciencp.fi vafte
8c fi compliquée : les effets de chaque opération
ont une influence fi marquée fur tout ce qui tient
au bonheur 8c à la richefle du peuple : pour calculer
ces effets avec précifion , il faut combiner
tant d’élémens, 8c avoir égard à tant de circonf-
tances particulières ; il faut approfondir tant de
queftions fur le régime des fociétés , qu'on eft sûr
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