
magafins pour deux ou trois ans, comme on en
fait de bled. La crainte de ne pouvoir les vendre
avant qu’elles fe gâtent, décourage leur culture >
c ’eft peut-être le plus grand obftacle à ce qu'elles
deviennent jamais dans un vafte pays celui des
végétaux , dont les différentes claffes. du peuple
tirent leur principale fubfiftance , comme on la
tire du pain.
G R A N D -M A IT R E DE F R A N C E & dé la
maifon du roi. Voye-^ le Di&ionnairé de Jurif-
prudence. Voye^ dans le même di&ionnaire ,
des détails fur d autres charges qui commencent
par le mot grands, -
G R A T IF IC A T IO N S . Nous entendons ici par
c e mot j des fommes accordées par un gouvernement
, pour encourager l’exportation ou l’importation
d’ un article de commerce. On leur
donne auffi le nom de primes.
Ces gratifications ont été inventée^ par la politique
moderne , peut-être même né font-elles
pas très-anciennes. Il relie un affez grand nombre
de pays en Europe, qui n’en accordent point :
c ’ eft la Grande-Bretagne qui en fait le plus d’u-
fage : On prétend quelles y metteht les négocians
& les manufacturiers, en état de vendre leurs marchai!
difes chez l’étranger à aulli bon ou meilleur
marché que leurs rivaux. Iis en exporteront 3 dit- ;
.on y une plus grande quantité , & la balance du
commerce fera plus en faveur de l’Angleterre.
Nous ne pouvons3 ajoutent les anglais qui défendent
le fyftême des gratifications, nous ne
pouvons donner à nos ouvriers ce monopole ,
comme nous le leur avons donné chez nous 3 8c il
n’y a pas moyen de forcer les étrangers à ache-
. ter d’eux, comme nous y avons forcé nos compatriotes.
Le meilleur expédient , faute de celui
là, c’eft de les payer pour qu’ ils achètent.
On fent que ce que nous dirons des gratifications
accordées par l’Angleterre, eft applicable
aux gratifications accordées par les autres pays,
8c qu’ en examinant les préjugés répandus fur
cette matière , il étoit bon de choifir la
nation qui paioît le mieux entendre le commerce.
. Les fèuls commerces, fufceptibles de gratis
fications , font ceux où le marchand eft obligé
de vendre fes marchandifes pour un prix
qui ne lui rend point fon capital avec les profits
ordinaires , ou dans lefquels il eft obligé de vendre
les chofes moins qu’ elles ne lui coûtent réel-
lement. La gratification eft accordée pourcompenfer
cette perte, & pour encourager le négociant à con-
tinuer j ou peut-être à commencer un commerce
dont on fuppofe que les frais font plus grands
que les retours 5 dont chaque opération abforbe
une partie du capital qu’on y a employég &
qui eft tel de fa nature , que , fi tous les autres
commerces lui reffembloient, il ne refteroit bientôt
plus de capital dans le pays*
• II faut obferver que les commerces favorifeV
par les gratifications g & qui n’iroient pas fans
cet appui , font les feuls que deux nations
püiffent faire long temps , de manière qu’il
y en ait une qui perde toujours , & qui vende^
conftamment fes marchandifes pour moins
qu’elles ne lui coûtent , en pienant le total
de fes frais, jufqu’au moment de la vente. Si
la gratification ne rendoit pas au négociant ce
qu il perdroit fans cela fur le prix de fes marchandifes
, fon intérêt l’obligeroit aufli-tôt d’employer
ailleurs fon capital, ou de trouver iii>
autre commerce où ce capital put lui rentrer
avec.Jes profits ordinaires. Mais les gratificationsy
comme tous les expédiens du fyftême mercant
i l e , ne peuvent avoir d’autre effet que celui de
forcer le commerce à prendre une direéliot»
beaucoup moins avantageufe que celle qu’il au-
roit prife de lui-même.
L ’auteur anglais des traités fur les grains , a-
montré clairément que depùis le premier établif-
fement- de^ la gratification fur l’exportation de
cette denrée, le prix des grains exportés, d’après
une évaluation* affez modérée ., a excédé
celui des grains importés, d’après une évalua-"
tion tort haute, d’une fournie beaucoup plus
grande que je montant de toutes les gratifications
qui ont été payées durant cette période, C ’eft
\ à ce qu’ il imagine , felon les vrais principes du fy ftême
mercantille, une preuve claire que ce commerce
de grains forcé, eft avantageux à la nation,
la valeur de L’exportation furpaffant celle de l’importation
, d’une femme bien plus forte que
toute la dépenfe extraordinaire que le- public a
faite pour que ces grains fuffent exportés. Il ne
confidere pas que cette dépenfe extraordinaire,,
ou la gratification 3 eft la plus petite partie de
la dépenfe que l’exportation des ^grains coûte
réellement à la fociété. Il faut mettre auffi en
ligne^ de compte , le capital que le fermier a employé
à la production. A moins que le prix des blés
d’Angleterre vendus chez l’etfanger., ne remplace
non-feulement la gratification , mais encore ce ca*
pital avec les profits ordinaires des fonds, lesanglois
perdent, & les fonds nationaux font diminués
d’autant. Mais c’ eft précifément parce qu’on a
jugé ce prix infuffifant, qu’on a jugé la gratifia
cation néceffaire.
Le prix moyen du blé e ft , dît--on,.conlidérable-
ment tombé depuis rétabliffement de la- gratification.
M. Smith a tâché de montrer que le prix
moyen du blé avoit commencé à bailler un peu
vers la fin du dernier fiècle, & qu’il a continué
de baiffer , durant le cours des foixante*
quatre premières années du notre.. Et „ en
fuppofant cet évènement auffi réel qu’il Je croit ,,
il a du arriver en dépit, & non- en vertu de la
gratification.
Dans les années d’abondance, la gratification
occafionnant une exportation extraordinaire x riens
Je gtain à un prix plus haut dans le pays, que
celui qu'il, devrait avoir naturellement. C etott-Ia
le but qu'on fe propofoit ouvertement dans 1 mf-
titutïon. Dans les années de difette, quoique la
gratification (oit ' fouvent fufpendue, la pande
exportation qu'elle occalionne dans les années fertiles,
doit cependant, empêcher plus ou moins,
que l’abondance de l'une ne fupplée a la difette
de l’autre. Ainfi. dans les années abondantes &
dans les années ftériles , la gratification doit tenir
le prix du blé en argent un peu plus haut,
dans le marché intérieur, qu’ il ne le ferait naturellement.
, , „
Aucune perfonne raifonnable ne contettera, )e
penfe , que tel eft l'effet de la gratification dans
l'état aftuel du, labourage. Mais bien des gens
ont penfé quelle tend à encourager l'agriculture
, en auiirant au fermier, un prix meilleur
que .celui qu’il auroit fans elle , 8c que j aug-
Jrientation des grains, qui pourrait s'enfume a
la longue, feroit capable d'en faire tomber le
prix plus bas que la gratification ne le ferait monter
dans l'érat aéluel d'amélioration où ferait l ’agriculture.
. . . -
Je réponds que la chofe pourroit arriver, il I effet
de la gratification étoit de hauffer le prix réel
du grain, ou de mettre le fermier en état d’entretenir
avec une égalé quantité de giains, un
plus grand nombre d'ouvriers de la même manière
, libérale , médiocre ou chétive, dont ils
font communément entretenus dans fon voiiînage.
Mais il eft évident que cet effet ne peut être
Qpgj-g fjj par ls gratification , m pur aucune mfti-
tution humaine. C e n’ eft pas fur le prix r e e l,
mais feulement fur le prix nominal des grains,
que la gratification peut influer.
Le véritable effet de la gratification eft moins
de hauffer la valeur réelle du grain, que de dégrader
la valeur réelle de l’argent , ou de faire
qu’une égale quantité d’argent foit échangée contre
une moindre quantité non-feulement de grains,
mais -de toute autre marchandifes 5 car le prix du
blé en argentrègle celui de toutes les autres marchandifes.
. 1 7 *
Ainfi , quand la gratification mettroit le fermier
en état de vendre fon blé quatre fchelings le
boifleau, au lieu de trois fchelings fix pences, &
de payer à fon maître une rente en argent proportionnée
à ce lurhauffement du prix pécuniaire
qüï opète également ou prefque également dans
tout le monde commerçant, eft d’une très-petite
confëquence pour chaque pays particulier. Si le
furhauffement qu’ elle amène de tous les prix en
argent, ne rend pas plus riches ceux qui les
reçoivent, il ne les rend pas réeilemeut plus pauvres.
de fon produit , cependant , fi , d’après ce
furhauffement dans le prix du b led , quatr,e.
fchelings n’achètent pas plus de marchandifes
d’une autre efpèce, que trois fchelings fix pen-
çes n’en auroient acheté auparavant, ni la fortune
du fermier , ni celle du maître, n’augmenteront
de la moindre chofe par ce changeaient
; le fermier n’en cultivera pas mieux la
‘terre, 8c fon maître n’en vivra pas mieux.
. Cette dégradation de la valeur de l’or 8c de
l ’argent, qui yient de la fertilité des mines, 8c
Un fervice de vaiffelle d’argent, devient
réellement à meilleur marché, & la valeur de
toute autre chofe relie réellement la même qu’au«
paravant.
Mais fi cette dégradation dans la valeur de
l’argent, arrive dans un feui pays comme un effet
de fa fituation particulière ou de fes inftitu-
tions politiques , elle devient pour lui d une très-
grande importance, & bien loin de tendre à
rendre quelqu’un plus riche, elle tend à rendre
• tout le monde beaucoup plus- pauvre. Le fur-
haufifement du prix pécuniaire de toutes les marchandifes,
tend alors à décourager , dans ce pays
particulier, toutes les efpècès d’induftrie qu’on
y exerce, 8c à mettre les nations étrangères
en état de fournir chez les autres 8c chez
lui-même, prefque tout pour une moindre quantité
d’argent, que fes ouvriers ne peuvent le
donner.
L ’Efpagne & le Porrugal » comme ^ propriétaires
de mines , font condamnés à distribuer
l’or & l’argent dans tous les autres
pays de l’Europe. Ces métaux doivent donc
naturellement être un peu meilleur marché en
Efpagne & en Portugal, que dans les autres parties
de l’Europe;. Cependant la différence ne devroit
pas excéder les frais de la cargaifon 8c
de l’afturance î & à raifon de la grande valeur
de ces métaux , en proportion de leur volume,
la cargaifon eft peu de chofe, & l’afïLirance eft
la même que pour toute autre marchandife d’une
égale valeur. Ainfi l’Efpagne & le Portugal fouf-
friroient peu de leur fituation particulière, fi
leurs dëfavantages n’étoiçnt aggravés par leurs
inftitutions politiques.
L ’Efpagne en taxant, 8c le Portugal en défendant
l’exportation de l’or 8c de l’ argent, font
monter la valeur de ces métaux dans les autres
pays , au-défi us de la valeur qu’ils ont chez eux.
Lorfque vous retenez un courant d’ eau par une
é.clufe, dès que l’eau eft montée jufqu’au fom-
met, elle s’écoule néceflairement comme s’il n’y
avoit point d’éclufe. La défenfe de l’exportation
ne peut retenir une plus grande quantité d’or 8c
d’ argent en Efpagne 8c en Portugal , que ce que
ces deux royaumes peuvent en employer , que
ce que le produit annuel de leurs terres $c
leur travail leur permet d’en convertir en monnoie,
en yailfelle, en dorures 8c autres ornemens. Quand
ils en ont cette quantité, Féclufe ell pleine, 8c
le furplus qui arrive doit néceffairenient s’écouler.
Auffi félon tous les rapports que nous en avons,
•l’exportation annuelle de l’or 8c de l’argent qui