
françoife a eu toujours des ennemis en Europe ,
la Hollande , en s'unifiant à eux , nous portoit des
coups très-dangereux, comme l'expérience lJaprouvé
dans la guerre delà fuccefiion au commencement
de ce fiècle. L'Angleterre ayant perdu l'alliance des
Provinces-Unies , durant la guerre qui vient de fe
terminer, le cabinet de Verfailles a cru devoir
«’attacher ces républiques par un traité d'alliance :
le traité ftipule les fecours d'hommes & de vaif-
feaux que nous leur donnerons, & ceux qu'elles
nous fourniront elles-mêmes i & il eft bien à délirer
que le fuccès réponde aux grandes & nobles
vues du miniftre qui a fait cet arrangement. La Fran•
ce fe trouve intéreflee plus que jamais à la pacification
de ces républiques orageufes $ nous dirons à
l'article P r o v i n c e s - U n i e s , à quel point elles
font déchues de leur ancienne fplendeur î combien
leur alliance peut devenir onéreufe y avec
quelle coupable négligence elles ont fait la der-
: nière guerre , & combien elles feront peu utiles
à la première, li des événemens qu'on ne peut
encore prévoir ne rendent pas la tranquillité aux
. différens états, & ne raniment pas la vigueur &
l ’énergie dans le coeur de leurs citoyens.
Nous dirons qu'elles font formidables en Afîe ,
& qu'elles pourroient avoir une puilfante marine j
mais que leur extrême corruption annonce une
révolution fatale à leur liberté , & peut-être à
leur exiftence. Voye^ l'article P r o v i n c e s -
U n i e s .
L'Italie ne peut inquiéter la France. Les républiques
& les princes qui l’habitent, ne redoutent pas
la France, dont les expéditions dans cette contrée
ont toujours été malheureufes , & il femble que le
cabinet de Verfailles ne doit fonger à l'Italie que
pour y produire ou y arrêter des révolutions con-
rraires à fes intérêts. Mais, par la combinaifon
des intérêts politiques de l'Europe, le plus fort
doit encore ménager les foibles, & le roi de
France eft réduit, à la veifle ou au milieu d'une
guerre, à ménager le pape, le roi de Naples &
le roi de Sardaigne : car bien que le pape, aie
confidérer comme prince féeulicr, ne foit pas
à craindre, fa puiflance , comme chef de l'églife
catholique , eft d'autant plus redoutable qu'elle
-agit fur les confciences, & que fes opérations
font couvertes d’un profond fecret. Trois raifons
■ impofent des ménagemens à l'égard du fouverain
pontife : i ° . l'intiuence qu'il a dans les affaires
générales de l'Europe : 2°. le crédit qu'il fait fe
ménager en Italie, & 3°. l'autorité même dont
il jouit en France. Quoique les privilèges de l'é*
gîife gallicane foient fort étendus, & que le pouvoir
du faint - fiège , à' l’envifager extérieurement
, ne foit pas confidérable dans le royaume
, le pape a une influence direéle dans toutes
les affaires eccléfiaftiques , & une influence
fecrette dans les affaires politiques. Les archevêques
, les évêques, les prêtres , les moines , &
tous les membres du clergé lui font attachés plus
] ou moins. Voye% l'article Et AT IDE l3egii£&!
Le roi de Naples eft un prince de la maifon
de Bourbon, trop foible, il eft vrai, pour former
des entreprifes contre la France, par mer ou
par terre : mais il eft fubordonné à quelques
égards aujourd'hui au cabinet de Madrid, & il
convient de le ménager, ainfi qu’il convient de
ménager l'Efpagne. Voye[ l'article N a p l e s .
Le roi de Sardaigne garde la porte de l'Italre
avec les principales fortereffes qui en défendent
l'entrée. Si fes forces-, comparées à celles de la
France, ne font pas confidérables, elles le deviennent
ordinairement par la difeipline de fes troupes 9
les approvifionnemens de fes magafins , de fes
arfenaux , par la richeffe de fbn tréfcr & le bon
état^de fes finances, par fes alliances avec la
maifon d'Autriche, les princes d'Italie & les puif-
fances maritimes > & pour les affaires d'Italie, il
fait toujours pencher la balance du côté où il fe
tourne. Voye^ les articles P iémont & Sa r d a i gne.
Les fuiffes pourroient attaquer le royaume ÿ
s'ils s'uniffoient avec d'autres puiffances j mais
i ° . leur maxime n'eft point d'attaquer 5 20. leur
intérêt: & leur difpofition naturelle les mettent du
parti de la France ; 30. un grand nombre de fuiffes
font au fervice de cette couronne. Le cabinet
de Verfailles entretient l'amitié de ces républiques
y & il en vient à bout d'autant plus aifé-
ment, que divers ^cantons lui font dévoués, &
que la Suifle, en général , ne fauroit fe paffer
de l'argent de la France. Voye1 1'articje C or p s
HELVETIQUE.
L ’Allemagne doit nécefïairement occuper l'attention
du cabinet deVerfailles.Nous parlons ailleurs
des mefures & des vues qui conviennent à cette
couronne , relativement aux princes qui compo-
fent le corps germanique. La maifon d'Autriche
fe trouve à la tête du corps germanique,. depuis
Rodolphe de Habsbourg. Toute l ’Europe s'eft
même habituée à la regarder comme le contrepoids
de la maifon de Bourbon ; & les puiffan-
ces maritimes fur-tout, fe font fait une loi de
tenir l'une & l'autre dans un équilibre prefque
égal, en foutenant celle qui paroiffoit la plus foible.
De là eft née une rivalité ouverte entre ces
deux maifons.
L'abaiffement de celle d'Autriche a été longtemps
un des plus grands objets de la politique
de la France y on l'a vu y travailler pendant trois
fiècles. Il s'eft donné plus de cent batailles pour
arriver à ce but. A la mort de l'empereur Charles
V I , dernier prince de k maifon de Habsbourg
, le moment parut favorable. La dignité
impériale qui avoit toujours fubfifté dans cette
maifon, paffa à Celle de Bavière : on crut que
le miniftère françois feroit les plus grands efforts
pour en écarter la maifon d'Autriche 5 mais l'empereur
Charles VII étant mort en 1.745, le cabinet
F R A
»e- Verfailles • fembla perdre de vue fon grand
projet, & elle ne s’oppofa <jue faiblement a e-
leélion de François I “' , grand-duc de Tofcane.
La dignité impériale rentra ainfi dans la nouvelle
maifon d'Autriche h fur laquelle eft entee.cel e
de Lorraine. Les cabales & les intrigues de la
cour firent oublier l'ancien fyfteme politique.
Le traité d'alliance que la France 8c la cour de
Vienne ont figné en 17 58 , a excite & ex.^‘,teJ a
tous les jours de vives critiques. Il feroit aile de
le juftifîer par les principes'de la raifon 8c de
l'humanité i mais les objeétions dont il elt lu -
ceptible , ne peuvent être difeutees ici. Maigre
cette alliance, l’intérêt des-deux maifons elt n
oppofé que l'exécution de ce traite, ett fournis a
beaucoup de circonftances ; & , par la natijre des
chofes , elles doivent fe furveiller avec un foin extrême.
„ 1 1
La France entretient des mimftres dans les cours
éleélorales, à la diète de l’Empire, & auprès
des princes les plus puiffans de l’Allemagne, ann
d’ être inftruite de tous les projets & de toutes
les affaires, & de fe ménager des amis & des
alliés. Il eft important pour elle d'avoir un gros
parti dans le corps germanique ; il elt meme de
fon intérêt qu’il foit divifé. Elle n a pas befoin
d’y exciter la divifion, & elle y trouve des par-
tifans fans beaucoup de peine. Un corps de cette
nature ne peut être parfaitement d accord , oc
la France a toujoursdes moyens d a s attacher des
princes allemands, en les aidant a maintenir leurs
privilèges. V oy e^ l’article A llemagne.
Le Nord j malgré fon éloignement, influe dans
les affaires générales de la France. La Pologne a
occupé plus d'uné fois le cabinet de Verfailles,
quoique les françois ne faffent aucun commerce
direét avec ce royaume : elle a effaye fouvent de
placer fur le trône de Pologne un prince de la
maifon de Bourbon. Henri I I I , le dernier prince
de la famille des Valois , fut roi de Pologne avant
d’être roi de France. Le cardinal de 1 olignac le
donna toutes les peines imaginables pour procurer
cette couronne au prince de C on n , apres la mort
de JeanSobieski; & lorfque le roi Augufte mour
u t , on fait avec quel zèle le cabinet de Ver-
failles s’efforça de donner le feeptre a btamilas
Leskinski, dont Louis X V etoit le gendre. Il eft
à defirer pour le bonheur de la France ou on ne
cherche plus à mettre fur le trône de Pologne
un prince de la maifon de Bourbon : ce trône ,
après le partage qui s’ eft fait de nos îours, doit
être dédaigné par nos princes ; & dans quel labyrinthe
de négociations, de jaloufip ôr de guerres
nous nous placerions! Il feroit inutile d indiquer
ici les vues politiques que doit avoir la France
i l’égard de la Pologne. Les puiffances qui en
ont pris la moitié , voudront un jour s emparer
du relie. V o y e i l’ article P ologne.
Le Danemark peut, en recevant des fubfldes,
fbjjroiï à la Fonce douze à quinze mille upm-
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mes, & le cabinet de Verfailles a toujours cherché
à s’en faire un allié. C e pays d’ ailleurs reçoit
une quantité confidérable de nos marchandifes &
de nos denrées, qui font payées principalement
fur Hambourg ou Amfterdam. Le Danemark eft
d’ailleurs le maître du pafiage du fund, objet de
très-grande importance pour le commerce du nord.
Ainfi la Francs ménage.la cour de Copenhague,
quoiqu’ elle compte plus fur fes liaifons & fes al- ■
liances avec les fuédois, ennemis naturels des
danois, & que toute forte de raifons mettent le
Danemark dans lés intérêts de l ’Angleterre. V ayc£
l’ article D a n em a r k .
La Suède a été de tout temps amie & alliée
de la France. Sans examiner fi une certaine conformité
d’efprit &c de caraâère entre les deux
nations a produit ces rapports, un. interet réciproque
les a cimentés. La France a prefque toujours
payé des fubfides aux fuédois. Ils ont préféré
conftamment les nôtres i ceux de l’Angle-,
terre. Il f 3 d’ailleurs un commerce réciproque
entre les deux peuples : car la Suède nous fournit
une infinité de chofes néceffaires à la conf-
truétion des vaiffeaux & à la marine en général, 8c la France lui envoie fes denrées & quelques
marchandifes en échange. La France ménagé la
Suède comme on ménage un allié naturel. Nous
ne parlerons pas ici de l’équilibre du nord, que
nous expliquerons en examinant les^ intérêts des
puiffances qui le compofent ; la Suède a befoin
de l'argent des françois, & il y a des régimens
Suédois conftamment au fervice de la France.
Foyer l’article S uede. - . . ,
La Ruffie eft devenue redoutable depuis le régné
de Pierre I : elle augmente tous les jours fes
forces ; & elle accroît fon importance dans le
monde politique. Elle a des armées nombreufes j
j elle gouverne tant de contrées , .qu’ elle peut
déconcerter ou détruire tous les projets des autres
puiffances dans le nord, en Pologne & en
Allemagne. Elle entretient de plus une efeadre
affez confidérable , quelle fait agir non-feulement
dans la Baltique , mais dans la mer du
Nord & dans la méditerranée. En 1733 , lorfque
le roi Stanillas fe trouva afliégé dans la ville
de Dantzik , les troupes françoifes & mofeo-
vites fe battirent pour la première fois , &
les premières , inferieures en nombre, eurent du
défavantage. On s’occupe des foins, d augmenter-
le commerce de la France avec la Ruffie, & ces
détails fuffifent pour indiquer fes rapports politiques
avec le cabinet de Verfailles. Voye^ 1 article
R u ssie. , ,
La Porte Ottomane n’ a jamais ete dedaignee
pat le cabinet de Verfailles. L’ambaffadeur qui y
réfide , a le pas fur tous les autres ambafladeurs.
Les turcs peuvent tenir trois états chrétiens en
échec ; favoir, la Hongrie, la Ruffie & la Pologne
, 8c la cour de France a raifon de les met- 1 tre dans fes intérêts. L e grand-feigneur pourrait
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