
93 toutes les femmes , tous les en fans , tous ceux
33 qui s’occupent des fciences & des lettres, en quel-
» que genre que ce fo it , les artifans, les manu-
» facturiers & les pêcheurs non armés, & habi-
?3 tans des bourgs, villages ou lieux non fortifiés,
*» & en général tous ceux qui travaillent pour
*> la fubfiftance & le bonheur du genre humain,
* auront la permiflion de continuer leurs emplois
» refpe&ifs s les troupes de l’ennemi, au pouvoir
» duquel le fort de la guerre les fera tomber ,
*> ne molefteront point leurs perfonnes , . ne brii-
33 leront ou ne détruiront point leurs maifons, ne
33 ravageront point leurs champs ; mais s’ il elt
w néceffaire de leur prendre quelque chofe pour
33 l’ufage des troupes, on les paiera d’une manière
» raifonnable. Tous les navires marchands & de
93 commerce, occupés de l’échange des produc-
-33 tionsdes différens endroits, & du foin de rendre
M les chofes néceffaires à la v ie , ou les Amples
33 commodités, plus faciles à obtenir & plus gé-
33 nérales , pourront paffer librement & fans être
93 moleftés. Les parties contractantes n’accorde-
33 ront point de commilïion à des vaiffeaux armés
*3 par les particuliers , & ne les autoriferont point
03 a prendre ou détruire ces navires marchands,
33 ou à interrompre leur commerce 33.
jfïrt. 24. « Afin qu’on ne détruife pas les pri-
« fonniers de guerre, en les envoyant dans des
33 pays éloignés & des climats rigoureux, ou en
93 les entaffant dans des lieux mal fains, les deux
-°3 parties contractantes promettent folemnellement
93 l’une à l’autre, & au monde entier , qu'elles n’a-
93 dopteront point de pareils ufages > qu1 elles n’en-
93 verront point les prisonniers dans les Indes orien-
93 raies , ou dans aucune autre partie de l ’A fe U
33 de l'Afrique 3 mais que ces prifonniers feront
33 détenus dans quelques parties de leurs domai-
33 nés en Europe, ou en Amérique : quon leur
33 alignera des lieux fains y quon ne les enfer-
33 mera pas dans des cachots , des vaijfeaux ou des
33 prifons y quon ne les mettra point aux fers y qu'on
33 ne les liera point 3 & quon ne leur ôtera d'au.-
33 cune maniéré L'ufage de leurs membres 5 que les
33 officiers feront élargis fur leurs paroles 3 dans des
33 dijlricts convenables G* de bons quartiers y que les
33 foldats feront répandus dans des cantonnemens ajfc£
« ouverts Cf affe£ étendus pour refpirer l'air & faire
33 de l'exercice ; quon les logera dans des barraques
33 auffi fpacieufes & auffi bonnes que celles des trou-
33 pes y au pouvoir defquelles ils fe trouveronty quion
33 fournira chaque jour aux officiers 3 autant de ra-
33 tions x & des mêmes articles & de la même qua-
33 lité y que celles qui feront données en nature ou
33 autrement y aux officiers ennemis du même rang y
33 que tous les foldats prifonniers auront la même
33 ration que les foldats de la puijfance che% laquelle
30 ils fe trouveront y que la valeur de ces rations
» fera payée par l’autre puiffance , lorlqu’a la fin
33 de la guerre on procédera a la liquidation ré-
33 ciproque des comptes pour la fubfiltance de ces
» prifonniers y que ces comptes ne feront mêlés a
» aucun autre compte, U que leur folde ne pourra être
33 retenue comme une fatisfaêtion , ou en repréfaille
>3 d aucun autre objet, ou pour aucune autre caufe
33 quelconque 3 réelle ou prétendue ; que chacune des
33 parties aura le droit d'entretenir un commijfaire
33 des prifonniers 3 a fa nomination 3 dans chacun 33 des cantonnemens dts prifonniers qui fe trouveront
*° en 14 pojfeffion de l'autre, lequel commijfaire verra
33 les prifonniers auffi fouvent qu’il lui plaira y fera
33 autorifé a recevoir 6? a diftribuer les chofes d*a-
33 grément ou de commodité 3 qui pourront être en-
33 voyées aux prifonniers ; & à rendre compte de fon
30 adminijlration dans des lettres ouvertes , adrejfées
33 a ceux qui l'emploieront. Mais que fi un officier
33 viole fa parole, ou fi un autre pnfonnier s’é-
» çhappe des limites de fon cantonnement ,
33 après qu’on le lui aura défigné, cet officier,
33 ou tel autre prifonnier particulier , perdra
33 les droits & les avantages qui lui avoient été
33 réfervés par cet article. Nous déclarons que le
33 pretexte de la diffiolution de tous les traités par 33 la guerre , ou tout autre prétexte quelconque 3 ne
33 fera point regardé comme annullant ou fufpendant
33 l'effiet de cet article ou. du précédent y mais au
33 contraire que nous tétabliffions précifément pour
33 l'état de guerre 3 & qu’il doit être auffi facré du-
33 rant la guerre 3 que les articles les mieux avérés
*3 du droit naturel U du droit des.gens »
Il faut admirer ici comment les républiques ,.
& fur-tout celles de l’Amérique, fçavent faire
ufage de leur raifon & profiter de l’expérience 5
elles fe fouviennent du vaiffeau: le Jtrjèy , dans
lequel onze mille de leurs prifonniers font morts
en trois ans , ils fe fouviennent de ceux de leurs
citoyens qui ont été envoyés aux Indes orientales-
La cruauté de la Grande-Bretagne a- déterminé
les Etats- Unis à demander les ftipulations dont
nous venons de parler. Ils ont cherché à diminuer'les
maux & les malheurs du genre humaia
pendant la guerre. C ’eft un grand pas vers cet
objet fi intéreffant, d’avoir fouftrait l’agriculture
& le commerce à fes effets , & les difpofitions
. du 23e article Jaififent peu de chofe à defirer là-
delfus. Le 13 e article établit un autre point qui
, eft auffi important, celui d’affranchir le commerce
des nations neutres , des vexations, des délais &
des pertes qu’il éprouve de la part des peuples
belligérans-y fous prétexte que les navires font changés
de contrebande. Ces. vexations ont été portées'
fi loin de nos jours, qu’ efifin les puiffances-
neutres ont fenti la néceffité. de le réunir & de
s’armer pour les interdire. Elles ont déclaré qu’à
l’avenir certains articles , défignés dans leurs ma.-
nifeftes , ne feroient pas réputés coKtrebande, &
que fi. l’une des nations en guerre prétendoit les
faifir ou les confifquer à ce titre ,, elles demanderaient
fatisfaâion & feroient caufe commune.
Elles, ont ainfi diminué de beaucoup la lifte des
objets de contrebande : leur réglement a mérité
l’approbation du monde entier , & il eft devenu;
une partie du droit des nations. Le i f j article
«
du traité des Etats-Unis avec lé roi de Pruffe,
étend & perfectionne ces ftipulations favorables-à
l’humanité 5 car il efface également les articles de
contrebande que les neutres avoient cru devoir
eonferver, & il ôte ainfi aux officiers des vaiffeaux
belligerans la tentation de trouver des articles
confifcables : tentation qui les porte à arrêter
tous les navires neutres, à fe rendre fur leurs
bords pour les fouiller 3 lorfqu’ils font à bord , à
y commettre des a étions irrégulières, & fouvent
à enlever les équipages pour les conduire fur leurs
propres vaiffeaux. La dernière guerre a fourni des
exemples fans nombre de ces abus , & on croit
que la même chofe arrive dans toutes les guerres.
Si on l’examine bien,-on verra que la vifite &
l’infpeétion des articles appellés de contrebande,
font rarement utiles. L’ufage de faifir de pareils
articles s’introduifit dans l’enfance des arts, &
alors en pouvoit embarraffer l’ennemi, en interceptant
les munitions & les provifîons de guerre
qu’on trouvoit fur l’Océan j mais les arts font aujourd’hui
trop répandus , pour que les nations
belligérantes foient réduites à la route de mer pour
s’en procurer. Exceptées les villes affiégées , à
l’égard defquelles l’article dont nous parlons ,
maintient l’ancien ufage, il n’eft point de peuple
en Europe > qui ne puiffe trouver chez lui ces articles
jufqu’ici prohibés , ou les tirer par terre du
pays de leurs voifîns , fur-tout depuis que la neutralité
armée a déclaré que les munitions navales
ne feroient plus de contrébande. Les articles encore
réputés de contrebande, font donc les reftes
d’un ufage qui fubfifte , lorfque les caufes qui
l’ônt produit n’exiftent plus} & en continuant à
les vifiter & à les faifir , on maintiendra donc un
abus. L’objet que nous traitons ici, peut avoir
des fuites très-heureufes j lorfque les vexations ,
auxquelles donnent lieu les articles réputés de
contrebande, auront été une fois abolies, par les
conventions particulières de quelques puiffances,
il y a lieu d’èfpérer que la réforme s’étendra de
peuple en peuple, & que fi elle ne devient pas
générale , elle diminuera toujours les maux de la
guerre.
L’Angleterre n’a point encore figné de traité
de commerce ayec les républiques du nouveau-
Monde : on vient même de renouveller ( au commencement
de .178(3 ) pour une année,l’aéte qui
règle par interim le commerce des Etats- Unis avec
la Grande-Bretagne & les ifles angloifes de l’Amérique.
Afin de juftifier ce délai, on a dit au parlement
que la Jamaïque préparait , une pétition far
cet objet, & qu’il fallait attendre. M. Jenkinfon
qui a propofé le délai , après avoir évalué à- 700
le nombre des bâtimens anglois employés l’année
dernière au commerce des Etats- U n is , & le nombre
de leurs matelots à 4000 > a établi des principes
& des faits bien inexaâs. « Les américains,
33 a-t-il dit, feront forcés, s’ils veulent fe défaire
33 de leur excédant en grains , d’admettre les pro-
50 durions de nos ifles 3 ils ont été exclus des ifles
françoifes , & félon toute apparence, ils ne trou-
33 ver ont pas plus d’accès dans la métropole de ces
33 colonies. »> M. Jenkinfon ne fait donc pas qu’un
arrêt du confeil d’état de France, du mois d’août
1784, ouvre, dans les ifles françoifes de l’Amérique,
plufieurs ports aux bâtimens étrangers. Il
n’ a donc pas lu -le traité qui permet aux navire#
des Etats- Unis de venir dans quelques ports de
la France j on peut l’affurer que le cabinet de Ver-
failles ne fonge pas à enfreindre cet article du
traité. Nous remarquerons en paffant que les anglois',
bien inftruits des affaires de leur pays, ne-
le font guères de celles des autres nations , &
qu’il eft affligeant de les voir débiter au parlement
tant de fottifes & tant de fauffetés fur les fran-
çois & fur les américains.
C et aéte qui règle par intérim le commerce des
Etats - Unis avec l’Angleterre , permet feulement
aux américains d’exporter leurs productions dans
les ifles angloifes, fur des bâtimens anglois j & il eft
ainfi fondé fur le principe fondamental de l’aCte de
navigation 5 mais il y a lieu de croire que les anglois
né pourront plus fuivre les grandes maxime#
qu’ils ont fuivi jufqu’ à préfent.
Là pofïtion des Etats - Unis les éloigne de ces
intrigues politiques des nations européennes, qui
offrent fi peu d’avantages & un fi grand nombre
de pertes. Lorfque dans les fiècles à venir, l’Amérique
contiendra une multitude de peuples civili-
fés , elle fera réduite à contracter des alliances ,
• à établir’ auffi un fyftême d’équilibre & à fe livrer
aux négociations, aux traités & aux guerres qui
en font la fuite j mais que les nouvelles républiques
attendent cette époque , • & qu’elles ne fe
preffent pas. Il faut les avertir d’un danger qui
les menace à la première guerre que fe feront l’Ef-
pagne, la France & l’ Angleterre. On les preffera
d’y entrer pour obtenir leurs navigateurs & leurs
vaiffeaux, .pour-jouir des reffources que donnera
leur pays j on leur préfentera des récompenfes ,
on leur promettra de grands fecours : puiffent-elles
fe fouvenir toujours qu’ elles n’ont befoin de per-
fonne, & qu’ en prenant part aux guerres & aux
intrigues de l’Europe, elles compromettront leur
liberté & leur bonheur ! Mais d’un autre côté ,
qu’elles n’oublient pas les bienfaits dont la France
les a comblés. On dit que des férvices politiques
ne doivent infpirer aucune reconnoiffance aux
états. Cette maxime dangereufe n’eft pas toujours
vraie, & quelles qu’ aient été les vues du cabinet
de Verfailles, les américains doivent chérir à jamais
l’allié généreux qui a pris fi noblement leur
défenfe & qui les a rendus libres. C ’eft pour eux
un devoir indifpcnfable de lui prodiguer leurs fecours
, lorfqu’il en aura befoin j mais c’eft le feul
peuple qui puiffe les réclamer, & la première loi
d’ un gouvernement étant de calculer les propres
intérêts & fes convenances, les Etats - Unis verront
toujours qu’ il leur convient de ne pas fè
mêler des guerres de l’Europe. Si ces guerres pro-
düifent prefque toujours des hostilités dans les di