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confervant la forme extérieure de la chaujfure Romaine.
Si nous n'avions que les monumens pour décrue
les ckaujfures des Grecs , nous ferions réduits
à ne parler que d'une fïmple femelle liée
fur le coude-pied & jufqu’à la moitié de la jambe
par le moyen de deux bandelettes croifées plusieurs
fois , ce qui formoit le cothurne des voyageurs
j des chalfeurs , des héros , &c. Ce cothurne
chauffé par la mufe de la tragédie & par
ks aéteurs tragiques , avoir un caraétére particulier
, Tépaiffeur de la femelle > qui fervoit à les
exhauffer , & qui eft très-vifîble fur les bas-reliefs
où font représentées les Mufes. Les écrivains
Grecs parlent de plulîeurs autres ckaujfures que
nous avons placées dans ce dictionnaire à leurs
articles refpeétifs , pour faciliter l’intelligence
de ces écrivains , & pour fuppléer au défaut de
monumens.
Nous ferons obferver d’abord que l’on peut réduire
à trois fortes toutes les chaujfures $ aux
bottes ou bottines ( Voye^ ce mot) ; aux foti-
liers ou ckaujfures pleines, & aux fandales ou femelles
lîmples. C’ell à ces trois fortes que nous
rapporterons tout ce que nous aurons à dire fur
les ckaujf res antiques.
Les ckaujfures des Romains reffernblorent à
celles des G re c s , fa u f quelques légères d ifférences.
L ile s ctoient faites ordinairement de cuir ,. &
«i une peau très-fouple, appelée aluta. Ce cuir doux
écoit la matière des fouiiers pleins , tels que le
calceus , le maliens & le pkicajium. Quant à la
folea y a la caliga , à la crepida 3 aux baxea , au
jandàiium > au foccus & au cothurne * elles COIîftf-
toient effentiellement en une femelle plus ou-moins j
épaiife 3 fixée fur le pied , qu’ elle laiffoit à découvert
, par des bandelettes ou courroies.
Le calceus & le muleus ne différoient du pero ,
qu’en ce que ce dernier étoit fait de peaux de
bêtes non tannées-> & que les deux autres étoient
de peaux préparées. La. chaujfure de cuir non
préparé paüë pour avoir été commune à toutes
les conditions. Le muleus 3 qui étoit de cuir aluné
& rouge , étoit une chaujfure a lunule. Voyez
lunule. Dans les premiers temps de Rome, il
if étoit porté ordinairement queparles patriciens,
ks fénateurs , les édiles. Ces magiftrats ne s tn
fervoient que dans les jours de cérémonies ,
comme triomphes , jeux publics, &c. Il paro'it.
qu’il y avoir telle chaujfure qu’on pardonnait à-
la jeuneffe , mais qu’on n-exeufoit pas dans un
âge plus avance. On reprochoit à Cefar de porter
fur le retour de l’âge , une chaujfure haute &
rouge. Le calceus & le muleus couvroient tout
Je pied , & montoient jufqu au milieu de la-
jambe. Les Romains poussèrent le luxe fort loin
dans cette partie du vêtement, & y employèrent
l ’o r , l’argent & les pierreries. Ceux qui fe pi-
q joient de galanterie , veüioient à ce que la chauf-
fure prît bien la forme du pied. On ia garniffoit.
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d’étoffe molle , on la ferroit fortement avec des
courroies appelées anfe $ quelques-uns même
oignoitnt auparavant leurs pieds avec des pat-
fums.
Le pero étoit fait de peaux de bêtes non préparées
> c’étoit une chaujfure rullique j elle alloit juf-
qu’à la moitié des jambes Le ph&cafum étoit
de cuir blanc & léger 5 cette chaujfure conve-
noit à des pieds délicats: les prêtres d’Athènes
& d’Alexandrie la portoient clans les facrifices.
La caliga étoit la chaujfure des gens de guerre >
c’étoit une groffe femelle d’où portoient des
bandes de cuir qui fe croifoienc fur le coude-
pied , & qui faifoient quelques tours vers la
cheville : il y a voit quelquefois une de ces
courroies qui paffoit entre le gros orteil & le
; fuivant , & alloit s’aflèmbler avec les autres.
Le camp a gus- différoit peu du caliga 5 c’étoit la
chaujfure de l’empereur & des principaux de
; l’armée : il paroît que les courroies- de celui-ci
étoient plus légères qu’à la caliga , & formoient
j un réfeau fur la jambe.
La folea , fa crepida , le fandaliun , l’a- gai Lie a
étoient des femelles retenues fur la. plante du
pied: voilà ce qu’elles avoient dé commun ; quant
\ a leur différence on l’ignore, on fait feulement
; que la folea & la gallica n’alloient point avec
la toge ,, mais qu’on les portoit avec la penula.
Les femmes fè fervoient de ces deux ckaujfures ,.
foit à la v ille fo it à la campagne. Il paroît par
‘ quelques endroits de Cicéron , qu’il y avait une
folea cis bois qui étoit très-lourde, & qu’on
. lioit aux pieds des criminels pour, les- empêcher
■ de s’enfuir.
La -crepida différoit peu de la fo le a& ne cou-
vrok le pied que par intervalles. La\baxea étoit
une chaujfure de philofophes î il y en avoir de-
, feuilles de palmier. On. n’a d’autres conjeélures.
fur la fycionia > finon que- c’étoit une chaujfure
très - légère. Quant au foccus- foc , & ait
cothumus , cothurne ,, so c q u e & co -
’ THURNE.
Les Romains portoient quelquefois des ekauf-
fures faites avec des toiles de lin, udones , eomrçie
les hifforiens nous l’apprennent d’Antonin , qui-
fuivoit en cela les pratiques des pythagoriciens.
Les efclaves & les pauvres fe fervoient de:fabots
(■Voye-[ ce mot ) , ou de chaujfure de bois. Mais'
fo r , l’argent, les perles & les pierresprécieufes.
brilloiënt fur celles des riches {'Plant.. Bacch. il.
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Etiam rogas , qui foccisi habeat auro fûppattum
folum..?
Les femmes portoient ordinairement deschauf-
fur es blanches , jaunes , 8vc. , ainfi que les*
hommes- efféminés. Mais les Romains étoient en:
général chauffés; de noir. Les rois, feuls avaient
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porté, à l’imitation des fouverains d'Albe, des I brodés en or ou en argent , comme nous le
chaujfures rouges ; & les triomphateurs fe chaut- \ voyons à quelques pieds chauffes 5 mais pour
«èrent de la même couleur , comme nous l'apprenons
d'une infcrîption gravée à Rimini, en
l'honneur de C. Marius: de. manubieis. cim-
BRICEIS. ET TEUTONICEIS. ÆDEM. HONORI.
VICTOR. FECIT. VESTE. TR1UMPHALI. CAL-
ceis. puniceis. Les empereurs confervèrent la
chaujfure des triomphateurs , même dans le bas-
Lmpire. Sévère-AJexandre dérogea à cet tifage
porta des chaujfures blanches ( Lamprid. 40. )
Les Sénateurs marchoient nuds-pieds comme les
.autres citoyens, dans le commencement de la
république 5 mais ils portèrent depuis une chauf-
fure noire, ornée de croîffans( lunule)
ou lunules d’argent, qui devinrent un de leurs
attributs dillin&ifs.
Retirés dans leurs maifons , les Romains quit-
toient le calceus & chauffoient la folea , qui leur
fervoit de pantoufle. Ils le quittoient pareillement
avec la toge, quand ils fortoient de Rome ,
& quand ils alloient fe repofer à la campagne j
■ de forte que le calceus étant inféparable de la
toge, on défignoit, par la réunion de ces deux
•chofes, le fejour de la ville & les fonctions des
magifïrats. C’eft ainfi qu’on les trouve employés
dans la lettre ( v u , 3. ) où Pline exhorte fon
ami à revenir à Rome : Quin ergo in urbem redis ,
ubi dignitas , honor , amicitis, tam fuperiores quant
minores 1. . . . . ' quoufque calcei nufquant ? toga fe-
riata ?
Les anciens quittoient leurs cnaujfures en fe
mettant à table , afin de ne pas gâter les lits
fur lefquels ils fe couchoient à demi en prenant
leur repas.' Ils fe faifoient fuivre par des
efclaves qui les déchauffoient, gardoient leurs
chaujfures pendant le repas , & les rechauflbient
lorfqu’ils fortoient de table. On appeloît ces
ferviteurs du nom générique fandaligeruli ,
porte-chauffures j & leur emploi étoit un des
plus vils. Tibulle en fait mention, pour montrer
que le pauvre fe prête au plus vil miniftère
Auprès des riches ( 1. y. )
Pauper erit prsjlo tîbi , prstflo pauper adibit
Primus & in tenero fixas erit latere. . .
Vinclaque de niveo detraket ipfe pede.
‘Winckelnaann, qui employoit toute fa vie à
étudier les monumens antiques , décrit ainfi les
chaujfures des hommes & des femmes ( Hijt. de
ArtP liv. rv. chap. y. )3
Les fouiiers des Romains différoient de^ceux
des Grecs, au rapport d’Appien (Appian. Mitkrid.
p. i 14. I. 17.) * mais nous ne fommes pas en état
d’indiquer en quoi confiftoit cette différence.
Les Romains de diffin&ion portoient des fouiiers
de cuir rouge qui venoit du royaume de Pont,
f e s foulicfs^ appelés mullpi, étoient quelquefois
1 ordinaire ils étoient de cuir noir <x montoien
jufqu’à mi-jambe ( PLorat. 1. fat. 6. 27. ) , ce qui
formoit des efpèces de brodequins, tels qu on en
voit aux figures de Caftor & de Pollux. Le Ja-
fon de Verfailles , ttatue nommée mal-à-propos
Quintus Cincinnatus , offre une chaujfure que
les artiftes pourroient donner aux figures héroïques.
Cette chaujfure a des femelles avec des
bords à-l’entour de la largeur d’un doigt, & un
cuir qui foutient le talon 5 ils font lacés fur le
coude-pied par des bandes de cuir qui partent
des femelles, & fe trouvent attachées au - def-
fus des chevilles. Lepaffage de Pline , où il dit*
en parlant des finges : Laqueis calceari imitationc
venantium tradunt ( P lin, lib. 8. c. 80. ) pour-
roit être appliqué aux fouiiers tiffus de cordes ,
tels qu’on en voit au cabinet d’Herculanum.
Les commentateurs expliquent ordinairement ce
paffage par les filets dans lefquels on prend les
finges , tandis que l’auteur latin a voulu dire
que ces animaux fe font des fouiiers de cordes
comme les chaffeurs ».
» On fait que la nobleffe athénienne portoit
des fouiiers ornés d’une demi-lune d’argent ou
d’ivoire , comme la nobleffe romaine en portoit
avec une lune 5 mais ce caraétere ne s eft pas
encore trouvé à aucune ftatue romaine ».
*> La chaufure des femmes confiftoit ou en fou-
liers entiers ou en lîmples fandales. Quant aux
fouiiers, on en voit à piufieurs figures des peintures
d’Herculanum ( Pitt. Ercol. 1.1. tab. 7. 21.
23. ) 5 ils font quelquefois jaunes , comme ceux
de Vénus à un tableau des bains de Titus ( Bar-
toli , Pitt. ant. tav. 6. ) , & comme ceux que
portoient les Perfes ( Æfchïl. Perf. v. 661. ). Les
ftatues de femmes nous offrent aulfi des fouiiers
entiers , comme le groupe de Niobé. Du relie ,
les fouiiers de ces dernieres figures ne s’arron-
diffent pas par le bout, comme ceux des premiers
, ayant une forme plus large. Les fandales
attachées aux pieds ont communément ua
doigt d’épaiffeur, & font compofées de plus d’une
femelle. Ces chaujfures étoient formées quelquefois
de cinq femelles coufues enfemble 5 ce que
nous diftinguons aux fandales de 1 une des bd Ses
Pallas de la Villa-Albani, par autant d’incifions,
qui font épaiffes de deux doigts. Les fandales
compofées de quatre femelles, s’appeloient qua-
drifolea. ( ArckeL difput. p. 23. ) ».
« Le liège paroît avoir fervi à la compofition de
ces femelles , ce bois étant léger & ne prenant
point l’humidité. Cette femelle étoit garnie par-
deffus & par-deffous d’un cuir qui déborde:-: ie
liège , comme on le voit à une petite Pallas de
bronze confervée à la \illa-Albani. Aujourd hui
encore , il y a des religteufes en Italie , qui
portent une pareille chaujfure. La \ ilia Ludovic
fenferme ,#ne Pallas plus grande que nature