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ctoit paflee & le bruit du vent cefle. Dans la
fuite, lorfque le temple fut plus riche, & que
l'oracle fut devenu plus célébré, on prit des
hommes pour remplir ce miniftere 5 & cela, tant
pour foulager les pythies, qui étoient trop employées
, que parce qu’elles ne retenoient pas aflèz
bien les réponfes de l'oracle qu'elles dévoient réciter
en vers, & qu’elles donnoient lieu par-là
aux gens d'efprit d'en faire des railleries qui ne
poqvoient tourner qu’au défavanrage de l’oracle.
3. Le troifième fujet eft l’homme en manteau.
A l’occafion des engaftrimythes dont l’auteur a
parlé dans l'obfervation précédente , il lui femble
que cet homme en manteau en pourroit bien être
un. Son habit n’y eft pas contraire, puifque, félon
Strabon & Plutarque, ‘ c’étoient des poètes qui
faifoient cette fonction , & que celui-ci eft enveloppé
de fon manteau , comme on dépeint ordinairement
les poètes. Le papier roulé qu’il tient
y convient aufli fort bien, puifqu’ils étoient obligés
de rendre les réponfes de l'oracle en vers : cette
conjecture parojt fi heureufe & fi bien fondée à
^'auteur, qu'il ne fait point difficulté de changer
d’opinion touchant cette figure, & de préférer
fon poète engaftrimythe au philofophe Bias de
M. Spanheim, qu'il avoit adopté fi hautement
dans fon explication particulière de ce monument.
( Cet article eft du rédacteur du Supplément de VEncyclopédie
) .
On trouve dans le premier volume du mufeum
Pio-Clémentin, publié en 1782. par M. Vifcqnti,
un deflin de Vapotkéofe d'Homère, fait fur l'original
du connétable Colonne, avec une explication
nouvelle & jufte de ce fameux bas-relief. En
voici l'abrégé : quant aux preuyes, elles fe trouveront
placées à chaque article des Mufes.
Cette apotkéofe eft partagée en quatre plans.
Jupiter, que l'aigle, le fceptre & le diadème font
reconno'jtre au premier coup-d’oe il, occupe feu!
le premier plan. On voit au fécond, en commençant
par le côté droit que détermine le fceptre
de Jupirer, i° . Calliope tenant des tablettes ;
2.0. Clio portant un rouleau ou volume ; 30. Thalie
gefticulantde la main droite,& tenant une lyre de
la gauche ; 40. Euterpe tenant deux flûtes égales ;
5 0. Melpomène avec un voile & les hauts cothurnes
tragiques, oubliés jufqu'à ce jour par
les graveurs ; elle eft un peu élevée au-deflus du
plan; 6 °. enfin Erato qui danfe. On apperçoit une
lyre placée entre Euterpe & Erato. Si on la donne
à la dernière , on s’appuyera de l’exemple des
Mules d'Herculanum & de celles du mufæum Pio-
Clémentin. Mais fi on attribue cette lyre à Euterpe
, il faudra convenir de la nouveauté de cet
attribut, & le rapporter à l’infpe&ion fur la rnu-
fïquc, déjà indiquée pîr les deux flûtes.
Le troifième plan offre, i°. au-delfous de Calliope
, Therfpficore tenant une lyre & le pleétrum ;
i ° . Uranie avec fon globe; 30. Polymnie, déeflb
dp la Mémoire, enveloppée d’pn grand manteau 3
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4*- fur la même ligne l’antre de Coricie, quf
donna fon nom aux Mufes, & dans lequel paroît
Apollon Mufagète ou joueur de ly re, appelé à
Rome Aéfiaque ou Palatin, ayant à fes pieds la,
cortine de Delphes, un arc & un carquois. La
pythie eft avec lui dans l’antre de Coricie, &
elle tient un plat ou une coupe qu'elle lui préfente.
Peut-être eft-elle Phémonoè, qui inventa le
vers hexamètre. Hors de l'antre & fur la même
ligne, on voit une figure adoffée à un grand trép
ied , & élevée fur un focle. M. Vifconti la prend
pour Olénus de Ly cie, fondateur de l’oracle de
Dçlphes ^ & qui chanta le premier des vers hexamètres.
Des tapifteries ornent le quatrième plan figuré
en portique. ,Homère omhpos, affis fur un trône
recevant des facrifices, & couronné par l’Univers,
fixe d'abord les regards., Une femme coèffée de
toursTepréfente l'Univers, oikoïmenh. Auprès
d’elle eft placé le Tems ailé, xponos, tenant
le.rouleau des vers d’Homère, qu'il confèrve aveo
foin. L'Univers & le Tems occupent la droite du
quatrième plan & le derrière du trône. Aux deux
côtés du trône font fculptées la belliqueufe Iliade,
IAIAS, tenant une épée, & lavoyageufe Odyflee,
OAïs s e ia , qui tient un apluftre de navire. On
voit des rats au bas du trône, pour faire allufion
au poème attribué à Homère, appelée la Batra-
comiomachie, o u , félon d'autres, aux critiques
d’Homère. Devant le poète eft élevé un autel
orné de têtes de boeufs & de feftons, & fur la
plinte duquel font gravés deux A A , ou plutôt
AA , 3 1 , nombre par lequel le fculpteur avoit
défigné cette partie de fon oeuvre, ou l'antique
poffeflTeur du bas-relief, ce morceau de fa col-
leétion de marbres. A côté de l’autel eft le boeuf
qui doit fervir de viétinie 5 & entre le poète &
l'autel paroît un petit garçon avec un va-fe de
facrifice & la patère. Il repréfente la Fable,
MY0os, dont le genre eft mafeulin dans la langue
grecque.
Sur le même plan & à la gauche de l'autel 5
on v o it, i°. l’Hiftoire, is t o p ia , tenant un rouleau
; 2«. la Poéfie, noiHSlS, élevant deux flambeaux
pour le facrifice; 30. la Tragédie, TFAm-
a ia , ayant un voile fur la tête avec les hauts
çothurnes & levant une main \ 40. la Comédie ,
koem qaia , élevant aufli la main droite; c°. enfin
un grouppe de cinq figures que nous allons décrire
féparément.
L’enrant, première figure du grouppe , eft le
fymhole de la Nature, <dy s is ; la fécondé eft la
Vertu, a p e t h , qui élève la main droite; la
troifième repréfente la Mémoire , mnhmh , qui
paroît concentrée en elle-même. On reconnoïç
la quatrième figure pour la Fidélité, n iS T ls ,
au doigt qu’elle porte à fa bouche, & au rouleau
d’aétes qu’elle tient de la main gauche. La Sagefle*
2Q<sia , eft la cinquième figure du grouppe : elle
eft. voilée 3 & porte fa main yers fqn menton |
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attitude qui cara&érife les philofophes fur les
ancieus monumens.
Reinold {Hift. litt. Gr. & Lat. p. 79.) dit que
Y apotkéofe d'Homère a été faite entre la 72e & la
00e olympiade, & il tire cette conclufion de la
manière dont eft écrit le nom grec du Tems. Si
cette obfervation étoit exacte, le bas-relief du
connétable Colonne feroit un des plus anciens
monumens de l’antiquité , & dateroit du tems
du haut ftyle. Mais elle n’eft fondée que fur la
manière fautive dont eft écrit le mot xponos
fur le deflin qu'il avoit entre les mains. Tous peux
qui ont dilferté fur cette apotkéofe, ont erré par
la même raifon. Les figures qui compofent ce
bas-relief n’ont pas huit pouces françois de hauteur
; de manière que des deflinateurs néghgens
ou peu inftruits ont omis des détails très-nécef-
faires pour l'explication d’objets aufli petits. Cette
infidélité des deflins a caufé toutes les méprifes
des favans qui opt voulu expliquer Vapotkéofe
d'Homère fans avoir vu le marbre. La Mufe tragique,
par exemple, qui porte pour infeription
le mot Tragédie, eft représentée fur le deflin en
vieille femme, chauffée comme les autres figures;
tandis que fur le marbre elle eft jeune, belle & montée
fur de hauts cothurnes. On n’à pu voir fur ces
deflins infidèles le rouleau placé fous le flége
d'Homère, & rongé par deux fouris ; & par conséquent
on n'y a pas reconnu un écrit roulé,
qui rend encore plus claire l'image fymbolique
de la Batrachomiomachie.
Winkelmann a relevé dans fes Monumens de
l’Antiquité,- quelques méprifes des favans qui ont
voulu expliquer Vapothédje d'Homère ; & fes critiques
lumineufes ont fervi de flambeau à M. Vifconti,
fon élève & fon fucceffeur, dans l'explication
que nous avons rapportée. Winkelmann ajoute
encore une obfervation dans fon Hiftoire de l’A rt,
fur les deux bandes qui defeendent du carquois
d’Apollon fur le couvercle du trépied (la cortine).
C’étoient des lanières de cuir ou des courroies,
comme nous l'apprend l'hiftoire d'Ariftomène ,
général des Meflfénéens. Ce grand capitaine s'étant
écarté de fon camp fur la foi d'une trêve faite
avec les Spartiates, il tomba dans une embufeade
que lui avoient dreffée les archers Crétois, qui
étoient à la folde des, Lacédémoniens. S'étant
rendus maîtres de fa perfonne, ils lui lièrent les.
pieds & les mains avec les courroies qui fervoient
a attacher leurs carquois. Paufanias, /. 4 , p. 326.
U apotkéofe d'Homère a été repréfentée aufli fur
un vafe d’argent fait en forme de mortier, &
trouvé à Herculanum. Ce poète immortel, dont
la tête eft. couverte avec fon manteau, eft placé
fur un aigle & tranfporté dans les airs. A fes
côtés, font aflifes fur des feftons deux femmes
qui ont chacune une épée courte. Celle de la
droite porte un cafque ; fa tête eft appuyée, &
elle paroît enfevelie dans des réflexions profondes.
Une de fes mains eft pofée fur fon épée. La femme
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qui eft à la gauche du poète eft coèffée avec un
bonnet pointu, tel que le porte Ulyfle : d’une
main elle tient une rame, & l’autre eft placée
fur fon épée. On reconnoît l'Iliade & 1 Odyflee
aux attributs de ces deux femmes. La rame & le
bonnet pointu fans bords que portent encore les
marins dans le Levant, rappellent le voyage fur
mer du père de Télémaque. Les cignes qui font
fculptés avec les feftons au - defîiis de la figure
déifiée, font aufli allufion à la poéfie. Eayardi,
dans le Catalogue raifonné des decouvertes d’Her-
culanum , a reconnu ic i, contre toute apparence,
l'apotkéofe de Jules-Céfar. La barbe feule de la
figure portée par l’aigle, auroit d û , fans autre
cara&ère, lui faire éviter cette méprife. Sans la
barbe, le comte de Caylus , en publiant ce petit
monument, (Rec. d'ant. t. i 3 pl. 41. p. 121.) i'au-
roit donné pour l’apotkéofe d’un empereur, parce
qu'il n'en a jugé que d’après un deflin où l’on ne
voit uniquement que la figure aflife fur l’aigle.
Apothéose de Romulus. Le fénateur Buona-
roti a publié cette apotkéofe, que l’on voyoit dans
un diptyque des comtes de la Ghérardefca, parmi
fes Obfervations fur les vafes de verre ornés de
figures, imprimées à Florence en 17 16 ; & le
P. de Montfaucon l'a donnée une fécondé fois au
public, au tome 3e du Supplément de l’ Antiquité
expliquée. Cet ouvrage, fait dans les fiècles de la
décadence" des arts, avoit été deftiné fans doute
pour être donné en préfent dans les fêtes Quiri-
nales marquées dans les Faftes au 17 février, ou
en d'autres jours célèbres par des courfes de
chevaux faites en l'honneur de Quirinus, & qu'on
appeloit Quirini Circenfes. On voit en effet un
quadrige de chevaux qui courent à bride abattue ,
& un quadrige d'éléphans qui porte Romulus.
Au haut de la première face du diptyque, s'offre
un monogramme compofé des lettres du mot
Romulus. Cette face peut être divifée en deux
plans. Celui du haut repréfente l'apotkéofe de Romulus
porté au ciel par les vents & par les tourbillons.
Des deux vents qui le foutiennent, l'un
eft jeune & ailé ; l’autre_, qui porte aufli des ailes ,
a la tête d'un Satyre barbu avec des cornes. Au-
deflus de Romulus, eft repréfentée une partie du
zodiaque, furmonté de cinq dieux, dont l’un porte
la barbe & pourroit être Jupiter. Aucun attribut
ne diftingue les quatre autres. Buonaroti foup-
çonne que ce font les planètes, réunies au nombre
de cinq. Une figure féparée des cinq premières
par le zodiaque, a la tête entourée d’un nimbe,
qui la feroit reconnoître pour le foleil & pour la
fixième planète. Peut-être que Romulus, le Mars
des Romains, va prendre la place* de la planète
du nom de Mars, & compléter le nombre de
fept.
On voit au-deflous de Romulus, fur le fécond
plan, un de ces catafalques à plufieurs étages ,
que l'on rencontre fouvent fur les médailles des
confécrations d’empereurs. Ce n’eft pas, comme