
hâte , autour duquel chaque année les troupes
romaines dévoient faire des évolutions, & les
députés des confédérations gauloifes dévoient
faire des / applications.
Dans les camps, les autels étoient placés devant
la tente des empereurs ou des généraux. Cette
pofition étoit conforme aux rites facrésj car il
falloit que le facrificateur fût tourné du côté de
l'orient, & , fi la chofe étoit impoflible, vers un
fleuve ou vers un chemin. On fait que la principale
rue du camp étoit alignée fur la tente du
chef j de forte que le facrificateur fe trouvoit
placé vis-à-vis de l’armée & de la porte Prétorienne
, qui étoit toujours tournée du côté de
l ’orient ou de l’ennemi.
En s’embarquant, on ne manquoit pas d’ élever
des autels aux divinités de la mer ; on immoloit
un taureau à Neptune & à Apollon , des brebis
noires à la Tempête, & des blanches aux Zéphirs :
Nigram hyemi pecudem, Zephyris felicibus alb'am.
L ’on jetoit leurs entrailles dans les flots, & l’on
ne levoit point l’ancre fans s’être aflfuré de la protection
des dieux.
Quoique chacun eût de petits autels dans fa
maifon, pour y facrifier aux Lares, aux Génies,
aux Junons & aux divinités protectrices de fa
famille ; prefque tous les aCtes importans de la
vie civile, fe faifoient devant les autels. C’étoit
aux pieds des autels, comme nous l’avons v u ,
que l’on ratifioit les traités pour les rendre inviolables,
que l’on prêtoit ferment , que l’on célé-
Jbroit les noces, que Ton. fe juroit une amitié
étroite} c’etoit enfin autour des autels que l’on
donnoit les feftins publics & religieux.
On élevoit des autels pour obtenir des dieux
des bienfaits perfonnels, ou pour les remercier
des grâces que l’on à voit obtenues non-feulement
pour foi-même, mais encore pour, fes- parens,
les amis, fes patrons & pour les Auguftes. Les
Recueils d’infcriprions l’atteftent à chaque page.
Suétone dit d’ailleurs dans la vie de Çaligula,
(c. 8. n. 3.) pour indiquer le lieu de fa naiflance,
que Pline l’ancien allure dans .fes écrits que cet
empereur étoit né dans lé pays de T rêves, dans
un endroit où l’on voyoit des autels avec cette
infcriptioH :
O b a g r i p p i n a e
P U E R P E R I U M
Lorfque l’on voulpit honorer quelque divinité
, on entouroit fon autel des rameaux de
l’arbufte qui lui étoit confacré. On en failbit des
guirlandes dont on entouroit les autels ; c’efl:
pourquoi Virgile les appelle des colliers, torques
(Georg. iv . 276). On les couvroit aufli de fleurs,
& Stace a réuni ces deux circonftances dans les
vers fuîvans ( Tkeb. 8. 298-) ; -
. ~. ~. . 7 . ... . . Geminàs ergo ilicet aras
Arboribus vivis & niaito cefpite texi
Imperat ,• innumerofque de& fua munera flores
Addit.
Ovide dit aufli (Trifl. n i., 13. i j .) de ces guirlandes
:
Fumida cingatur florentibus ara coronis.
On entrelaçoit ces fleurs de bandelettes de laine
teinte en diverfes couleurs. Properce appelle une
de ces bandelettes laneus orbis (iv . 6 . 6 .) :
Ter que focum circa laneus orbis eat.
Quelque refpeCt que les anciens témoignaflent
pour leurs autels, on les vit cependant les ren-
verfer quelquefois. C’étoit la marque d’une douleur
amère, d’un défefpoir violent, &.iineefpèce
de vengeance qu’ ils exerçoient contre lés dieux.
Arrien ( i l. 21.) nous en a confervé un exemple
mémorable 5 celui d’Alexandre, qui fit renverfer
les autels, & brûler les temples d’Efculape, parce
que tout l’art des médecins n’avoit pu arracher
fon ami au trépas.
Enfin, parmi les excès que les vainqueurs com-
mettoient dans les villes prifes d’aflaut & dans les
pays conquis,-on regardoit comme les plus graves
le renverfement des autels. Philippe V fut puni
par les Romains de cé facrilége. Florus ( il. 7.)
dit que les Athéniens implorèrent l’afliftance des
Romains contre ce roi de Macédoine, qui, après
les avoir vaincus, avoit renverfé les autels & les-
temples des villes de leur domaine. Cette accufa-
tion fervit aux ambitieux defcendans de Romulus,
de prétexte fpécieux pour dépouiller ce monarque
d’une grande partie de fes états & de fes conquêtes.
La forme des autels anciens varioit à l’infini.
On en trouve de ronds, dont la hauteur a le plus
fouvent deux fois & demie leur épaifleur ou diamètre.
D’autres font carrés j plusieurs offrent à
la vue un carré long. Leur hauteur varie communément
entre-deux & trois pieds. Nicomaque de
Gérafe (Aritkmet. I. 2. p. yé.) dit que les plus
anciens autels, & fur-tout les ioniques, font plus'
hauts que larges, & que la bafe n’eft pas égale à
la corniche. Saumaife a parlé d’ une manière trop
générale, en difant que les autels des anciens
étoient ordinairement carrés ou de forme cubique;
car on en trouve beaucoup de ronds. On
en voit aufli quelques-uns triangulaires, qui
ont été confondus fouvent avec des candélabres
de même figure ; & réciproquement les candé-r
labres ont été appelés aufli improprement des
autels.
L ’erreur de Saumaife, qui a été fuivi par un
grand nombre d’antiquaires, eft venue de ce que
l’on a pris fouvent pour des autels les. cippes que
l’on plaçoit fur les tombeaux. Cette erreur n’auroit
pas
pas eu lieu, fi l’oft avoir rencontré plus fouvent
le cara&ère diftin&if fuivant.
Quelques autels antiques font creufés en-demis
Sc percés de côté, pour recueillir & laifler écouler
enfuite les libations. On en voit cinq pareils fur
les vafes étrufques de la bibliothèque du Vatican.
Le P. Montfaucon, qui a fait defîiner deux fem-
blables autels d’après des vafes antiques, a pris
le trou latéral & le fluide qui s’ échappe par cette
©uvert-üfe, pour des bandelettes & d’autres orne-
mens. Mais il a été repris par Winkelmann, qui
à fait defliner un de ces vafes du Vatican dans fes
Monumenti antichi iriediti}.n°. l8 l .
Nous allons faire connoître quelques-uns des
autels les plus célèbres, dont il eft fait mention
dans les écrivains grecs & latins.
AJ autel d* Acca Laurentia étoit placé a Rome
près du forum Boarium, dans le Velabre.
Vautel <£Adoption étoit le monument élevé
par les Romains (on ignore dans quelle région),
pour conferver le fouvénir de l’adoption de Livie
dans la famille Julia. Tibère-,,fon fils, le de- '
truifît, étant jaloux des honneurs rendus à fa
mère. Tacite (Annal. 1. 14).'
AJ autel d’Aius Locutius fe voyoit dans le quartie
r appelé la rue Neuve, qui appartenoit à la
•huitième région. O11 l’avoit élevé dans l’endroit
o ù , pendant la nuit, une voix inconnue avoit
annoncé l’arrivée des Gaulois.
AJ autel de V Amitié. Tacite (Annal, iv. 74. 2.)
dit que le fénat voulant éternifer l’amitié de Tibère
pour Séjan, réfolut d’ élever un autel à l’Amitié ,
orné de leurs portraits. On ignore la place où il
fut drefle.
AJ autel d’Anchurus. Sous le règne de Midas,
la Phrygie fût ébranlée par des tremblemens de
terre, qui firent entr’ouvrir une cavité vafte &
profonde. L ’oracle ayant été confulté fur cette
ouverture, répondit qu’elle fe fermeroit après
qu’on y auroit jeté la chofe la plus précieufe de la
Phrygie. Anchurus, fils de Midas, penfa que rien
ne fauroit être plus précieux que la vie d’un
homme. Il monta aufli-tôt à cheval, embrafla
tendrement le roi fon père & fon époufe Timothée
, & fe précipita enfuite dans le gouffre. La
terre s’étant refermée fur lui, Midas fit dreffer
un autel au même endroit, qu’il confacra à Jupiter
du mont Ida. Plutarque, dont nous apprenons ce
fait, ajoute que cet autel étoit dore. Ovide l’a
chanté dans fes Métamorphofes.
AJ autel d’Apollon fut confacré par les Athéniens,
afin qu’il les délivrât de la pefte. L ’oracle
de ce dieu ayant été confulté, répondit que pour
arrêter ce fléau, il falloit lui élever un autel
double de l’autel cubique qui lui étoit déjà confacré.
AJ autel d’Apollon fmrop, générateur, fe voyoit
Ù Délos. On n’y immoloit jamais dç vi&inà£S*
Antiquités, Tome I ,
Les prières feules fervoient d’offrande. C’efl celui
que Pythagore falua avec refpeôfc, comme nous
l’avons dît plus haut.
AJ autel d’Apollon, oblique ou étoit placé
ordinairement chez les Grecs, dans les rues, à
côté de la porte des maifons.
AJ autel d’Apollon Spodius , de Cendres , étoit
à Thèbes. Paufanias en parle (-Beotic. r x .) , &
nous l’avons décrit plus haut.
AJ autel des Apothéofes. On voit fût plufieurs
médailles impériales* cet autel, que l’on portoit
dans la cérémonie de l’apothéofe des Auguftes.
Il y a ordinairement du feu fur cet autel, & des
aigles qui ornent la bafe. On lit autour felix
m em o r iA & c o n s e c r a t io . Le dernier mot a
fait appeler ces médailles des C o n sé cr a t ion s .
AJ autel de Carmente étoit placé au bas du Capitole
, près- de la porte Carmentale.
AJ autel de Confus étoit dans un petit temple
fouterrein, auprès des bornes du grand Cirque.
On n’ouvroit les portes de ce temple que pendant
les jeux facrés du cirque.
AJautel de Corne à Délos a été décrit plus
haut.
AJ autel de Diane appaifée, Diane, placabilis ,
étoit dans la Tauride, auprès des Palus-Méo-
tides j ce qui l’a fait appeler Méotide: par Juvénal
(Satyr. 15. n y ) . Il étoit dédié à Diane, qui ne
vouloit plus de viôtimes humaines, & que l’ on
nommoit à caufe de cela, Diane appaifée. Ce fut
auprès de cet autel qu’Efculape rendit la vie au
malheureux Hippolyte.
AJ autel de Bacchus étoit placé fur la partie du
théâtre des Grecs, qu’ils appeloient thymelé'o u
le lieu des facrifices.
AJ autel de Platon' & de Proferpine étoit placé
dans le.champ de Mars. On ne le découvroit qu’à
la célébration des jeux féculaires, flc l’on y
facrifioit pendant trois nuits confécutives. 11 en
fera parlé plus au long dans les Jeux sécul
a ir e s .
AJ autel divarum Cornifcarum etoit dans la 140
région. Panvini rapporte l’infcription luivante d’un
femblable autel :
BeiVAS
CORNIS CA S
SACRUM
Feftus dit qu’il y avoit au-delà du Tybre un efi»*
. droit confacré aux corneilles, parce qu’on croyoit
que Junon protégeoit cette efpêce de corbeaux.
AJ autel de Drufus y frère de Tibère, fut élevé
fur les bords du Rhin. Nous en avons parlé plu#
haut.
AJ autel d’ Evandre étoit fur le mont AvenUBj
' près de la porte trigemina.
R b b