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 pagaie  à  la  main,  chercha  long-temps  une  pirogue  
 pour rejoindre la corvette; mais il s’égara dans les bois,  
 et  les  naturels  le  rattrapèrent ;  F ab ry ,  Della-Maria  
 et même Grasse,  si je devais les  croire,  auraient toujours  
 désiré  rentrer  à leur  poste,  malgré  toutes  les  
 insinuations  des naturels pour les  engager  à s’établir  
 à  Tonga-Tabou.  Jlartineng  seul,  homme  adroit  et  
 rusé,  paraissait  avoir  nourri  jusqu’à  la  fin  le  désir  
 de  rester  dans  l’île ,  et  ce  n’aurait  été que la veille au  
 soir  qu’il  se  serait décidé  à  rallier  son  bord  et  à  séparer  
 sa  cause de  celle  de Simonet  et de  Reboul. 
 Simonet  était  un  véritable  scélérat,  déjà  puni  à  
 bord  comme  voleur  et  soupçonné  d’autres  crimes  
 encore plus  odieux.  Il était assez  naturel  qu’il  se  décidât  
 à  rester  au milieu  d’un peuple  sauvage,  où son  
 caractère  entreprenant et  son  adresse  au  maniement  
 des  armes  à  feu  pouvaient  lui  valoir  une  certaine  
 considération.  On  l’avait  entendu  former  des  voeux  
 pour  la  perte  du  navire,  pour  la mort  des  officiers,  
 et  Ton  pensait  même  qu’il  avait  tiré  le  coup  de fusil  
 dirigé  contre M.  Guilbert  et qui perça  le  grand  canot  
 de  part  en  part.  Il  était  devenu  publiquement  le  
 satellite  de  Tahofa,  qu’il  suivait  partout  le  fusil  sur  
 Tépaule. 
 Jc'fus bien  aise  d’être  débarrassé  d’un  aussi mauvais  
 sujet ;  mais  je  regrettai qu’il  eût  réussi  à  débaucher  
 l’imbécile  Reboul, matelot  passable  et  naturellement  
 assez tranquille. Mais il était si borné,  qu’il ne  
 sentit  probablement  pas  toute  l’étendue  de  la  faute 
 qu’il  commettait,  en  suivant  les  perfides  suggestions  
 de  son  compatriote Simonet. 
 Aussitôt que les prisonniers furent  rentrés  à bord,  
 la  chaloupe  alla  déraper  l’ancre  à  une  seule  patte,  
 tandis  que  nous  virions  sur  la  petite  chaîne.  A  onze  
 heures  et demie,  la dernière ancre qui nous  tenait fut  
 dérapée,  et nous  fîmes roule sous les huniers avec une  
 bonne  brise d’E . ,  en  nous  dirigeant  vers  la  passe  du  
 nord. 
 Monté sur le  ton du petit mât d’hune, M.  Guilbert  
 m’indiquait la position  et  la direction  des brisans  que  
 la  marée  haute  couvrait  presque  entièrement  à  nos  
 regards.  Après  avoir  dépassé  le  parallèle  de  Fafaa,  
 le  fond  décrût  rapidement  de  vingt-trois  à  quinze,  
 quatorze,  douze,  dix  el huit brasses.  Je me décidai à  
 mouiller pour  le  reste  de  la journée,  afin  d’achever  
 nos préparatifs  de départ.  Fafaa nous  restait alors  au  
 S.  E.  S.  du monde,  à deux milles  de distance. 
 Nous  voulûmes embarquer la chaloupe dans  la soirée  
 ;  mais  la  houle  ayant fait casser  la poulie du bout  
 de  vergue  de misaine,  cette  opération  fut  remise  au  
 lendemain.  Du  reste,  on  s’occupa  de  préparer  la  
 corvette  pour  une  longue  traversée.  Malgré  la paix  
 conclue  et  la  distance  de  près  de  quatre  milles  où  
 nous  nous  trouvions  désormais  de  Mafanga,  on  fit  
 encore  une  bonne  garde  durant  la nuit. 
 Je  questionnai l’un  après  l’autre  tous  les matelots  
 qui  avaient été captifs  des  sauvages ;  voici les  renseignemens  
 que j ’en obtins  ; 
 Immédiatement  après  l’enlèvement  du  canot,  ils