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voyais menacé de tribulations semblables à celles que
Bougainville eut à essuyer, durant la même saison de
l’année, dans ces dangereux parages. Avec de pareilles
circonstances, sur ces côtes hérissées de récifs,
une exploration géographique avec un seul bâtiment
sans ancres à j e t , ni grelins, était une affaire
trop hasardeuse pour offrir quelques chances de réussite.
D’un autre côté, si je voulais me borner à opérer
la traversée par quelques-uns des passages déjà connus,
il y avait sans doute beaucoup d’espoir de succès ;
mais cette navigation n’aurait rien ajouté à l ’hydrographie,
el ne remplissait nullement le but de ma
mission.
Après de mûres réflexions, je pensai que le parti
le plus sage, le plus profitable, et même le plus honorable
pour l’expédition de VAstrolabe, était d’exécuter
sur-le-champ l’exploration de la côte méridionale
de la Nouvelle-Bretagne et de la côte septentrionale
de la Nouvelle-Guinée, en renvoyant à l’année
suivante nos travaux sur la côte méridionale de cette
dernière île. Malgré les difficultés et les dangers
qu’offrait encore ce dernier parti, de nombreuses
chances de succès s’y rattachaient, tandis que je n’en
voyais aucune dans l’autre. Je fis part aux officiers de
T Astrolabe de ma nouvelle résolution, et je vis qu’elle
leur était agréable. Braves et dévoués , ils m’auraient
suivi, sans objections ni murmures, au milieu des dangers
du détroit de Torrès, mais ils ne pouvaient pas
pins que moi se dissimuler que notre perte aurait été
presque inévitable.
D E L ’A S Ï R O L A B E . 485
A six heures vingt-cinq minutes du matin, la vigie
signala, droit devant nous, la petite île de la veille,
que je nommai île Adèle , du nom du brick que commandait
Ruault-Coutance. Peu après elle fut visible
de dessus le pont, ainsi que les hautes terres de l’île
Rossel. A huit heures et demie nous étions parvenus
sur le méridien, et à trois milles au nord de l’île
Adèle. C ’est tout simplement un banc de corail, de
deux ou trois cents toises de diamètre, surmonté d’un
bouquet d’arbres, et environné d’un récif qui va se
joindre à File Rossel, dont l’île Adèle est cependant
éloignée de près de sept milles. Cette chaîne de brisans
rend l’approche du cap de la Délivrance fort
dangereuse par un temps couvert.
Je gouvernai ensuite droit au nord du monde,
tandis que M. Jacquinot profitait des moindres éclaircies
pour observer des angles horaires et déterminer
la position de l’île Adèle. A neuf heures quarante-cinq
minutes, je gouvernai droit à l’ouest pour atteindre
le méridien du cap de la Délivrance, ce qui eut lieu à
dix heures el demie, et M. Jacquinot prit alors de
nouveaux angles horaires.
De neuf à onze heures, nous nous trouvâmes à
deux lieues des côtes de l’île Rossel, qui est composée
de montagnes fort élevées et couverte d’une verdure
très-épaisse. Quelques fumées nous ont fait connaître
qu’elle était habitée. La direction de la côte el la
comparaison des latitudes m’ont fait soupçonner que
le cap désigné par d’Entrecasteaux, comme celui de
la Délivrance, n’était que la partie N. E. de l’ile
1827.
3o juin.
I !