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doué d’une charmante f ig u r e , jo u a it à côté de sa mère ; il était
vêtu d’une petite éto ffe, qui laissait nus les liras et la p o itr in e ;
un c o llie r de verre b leu , marque insigne de lu x e , pendait à
son c o u ; sa tête ra sé e , à la mode des enfans de T o n g a , était
ornée , sur les tempes , de deux touffes de cheveux frisés
tout brillans d’huile de co c o . Dans un coin de la maison, p lu sieurs
jeunes fille s , dont les formes et la figure étaient ravissantes,
s’o ccu pa ien t de je ne sais quels détails de ménage. Ces
jo lie s filles étaient les odalisques du .seigneur T a b o fa , q u i , au
dire de R it c h e t t , en comptait v in g t- tro is dans sa maison de
Béa . As.surément, nous n’aurions pas mieux demandé nous-
mêmes que de faire connaissance a v e c elles ; mais le regard du
maître les tenait clouées à leu r p la c e , et je compris que le
v ieux su ltan , en me cédant son nom , n’av a it pas prétendu
pousser plus loin la communauté.
A prè s a v o ir offert à la femme du ch e f un présent convenable
de co llie rs et de bagues , nous prîmes p la c e sur la natle. Le.s
femmes sortirent aus s itôt, et on fit les préparatifs du déjeuner.
D ’abord on étendit dev ant nous de grandes feuilles de ban
an ie r , puis on y p laça des bananes cuites et crues et des
ignames; un instant après on servit diverses sortes de poissons
cuits. Un m ata-b oula i, q u i ne mangeait pas , préparait p ou r le
ch e f et p o u r nous des morceaux qu’il dépeçait fo rt p ro p r e ment;
enfin on apporta deux poissons argentés que le même
serviteur o u v r it encore v iv a n s , ca r ils sortaient de la mer , et
nous vîmes avec surprise notre hôte en manger sans autre prép
aration que de tremper des morceaux dans de l ’eau de mer.
T a h o fa , devinant sans doute ce qui causait no ire é tonnement,
nous engagea à plusieurs reprises à faire comme lu i ; e t , les
premiers dégoûts une fois v aincus, je fus to u t étonné de trouver
cette nourriture sans apprêt beaucoup p lus supportable que je
ne 1 eusse jamais imaginé . L e repas a c h e v é , on présenta au
ch e f deux ou trois fragmens de b an an ie r ; il les fe n d it , en ex prima
l’eau et s’en la va les lèvres et le b o u t des doigts. Après
cette a b lu t io n , tout le monde rentra dans la cabane : la fem m #
c l l’enfant du ch e f v inrent sc p la c e r près de n o u s , et le reste
des serviteurs se tint d e b o u t, au fond de la maison, du côté
de la mer.
A lors commença une scène que nous observâmes avec d’au tant
plus d’in té r ê t , qu’elle nous donna mieux que tous les l i vres
possibles une mesure exacte du caractère et de la c iv il isation
raffinée de ces peuples que nous nommons encore s a u vages.
T a b o fa , qui était à dem i-é ten du sur la n a t te , se le v a
to u t -à - c o u p , se prosterna devant T en fa n t, e t , ap p liqu an t son
fron t contre te r r e , i l saisit le pied de son fils , se le posa sur la
n u q u e , et resta quelques instans dans cette posture ; après
q u o i, se re le vant g ra v em en t, il rep r it sa p lac e accoutumée.
C e t exemple fut suivi p ar la mère du p e tit g a r ç o n , et successivement
par tous les serviteurs du ch e f qui s’avancèrent tour
à to u r p o u r donner à l’enfant cette marque de respect à la q
uelle ils ajoutaient encore un baiser sur le pied. C ’éta it ainsi
que T a b o fa trav aillait à consolider l ’édifice de puissance qu’ il
avait élevé p ou r sa dynastie. L ’adoption de l’cn fan l par la
T amaha l’élev ait de d ro it à toutes les p ré ro gative s de la race
ro yale , dont cette v ie ille femme était le seul membre survivant
dans l ’i le , et T a b o fa , en p ro fon d p o litiq u e , se soumettait le
premier à toutes ces momerles de respect p o u r lesquelles il
a v a it prob ablemeiil dans son coe u r un p rofon d mépris.
Pen dan t tout ce baise-pieds, le p e tit bonhomme jo u a it , a lla
it , v e n a it , sans se prêter le moins du monde aux hommages
de sa cour q u i saisissait l’instant favo rab le p ou r s’acquitter de
son devoir.
L a maison fut encore une fois quittée par les nombreux serviteurs
de T a b o fa ; il ne resta p lu s avec le maître et nous
qu’une ou deux vie ille s femmes. On apporta des rouleaux d e -
toffe qui devaient nous servir de traversins. L e c b e f s e lc n d it
sur le dos et ne tarda pas à sommeiller...
Dans une excursion que nous fîmes p lus lard à Moua , beau
v illa g e situé sur la grande te r r e , au bo rd du lagon , nous r e -
çiimcs de P a lou l’ae c iie il le p lu s oblig eant. A notre débarque