1827.
Mai.
naient t Astrolabe poussèrent au large; l’on eût dit
qu’elles exécutaient ce mouvement à un signal convenu,
tant il fut rapide et simultané. J’en fus surpris
et en meme temps satisfait, dans l’espoir que nous allions
être bien plus libres dans nos manoeuvres par
l’absence des naturels. D’ailleurs, comme je connaissais
la haute influence de Tahofa, je présumai qu’il
n’avait pas voulu qu’aucun marché eût lieu à bord
après son départ, et qu’il avait donné des ordres en
conséquence. J’avais remis à Read quelques objets
que je lui avais promis, et une médaille en bronze de
l ’expédition ; cet Anglais avait disparu quelques minutes
avant Tahofa.
^ Un instant auparavant j ’avais chargé M. Jacquinot
d envoyer le bot (le plus petit canot) à terre avec deux
hommes pour ramener Jacon. Mais cet officier m’avait
fait observer qu’il n’avait pas eu le temps de faire
faire la provision de sable habituelle pour nettoyer le
pont; comme la yole devait rester à la mer pour marcher
en avant du navire, et éclairer sa route, sous la
direction de M. Lottin, il me proposa de l ’expédier
avec un nombre suffisant de bras pour faire promptement
une petite provision de sable. Celte observation
me parut juste, et je priai seulement M. Jacquinot de
placer un élève dans le canot pour surveiller les hommes
et accélérer leur travail, en lui enjoignant de ne
pas rester plus d’une demi-heure à terre. Ce canot
était parti et arrivé au rivage quelques minutes avant
les naturels.
Neuf heures venaient de sonner, et j ’étais descendu
1827,
Mai.
dans ma chambre pour déjeuner à la hâte avant l’appareillage
, quand un bourdonnement confus et général
me rappela précipitamment sur le pont. On me
dit alors que les naturels, réunis en force sur la
pointe de Pangaï-Modou , avaient attaqué nos hommes,
et tentaient d’enlever l’embarcation. Je saisis
ma lunette, el je distinguai sans peine quelques-uns
de nos hommes luttant contre une masse compacte
de sauvages, et ceux-ci qui s’efforcaient d’entraîner à
la fois et le canot et les matelots. pi.t.xxxvit.
On me proposa, et je fus moi-méme un instant
tenté de faire tirer un ou deux coups de canon sur la
plage. Mais une réflexion subite m’arrêta : ou je ferais
viser sur le rassemblement, ou les coups seraient dirigés
par-dessus la tête des naturels ; dans le premier
cas, je risquais de tuer des Français avec les sauvages ;
dans l ’autre, ce n’était qu’un vain épouvantail pour
des insulaires aussi aguerris contre l’effet des armes à
feu.
Je préférai faire embarquer vingt-trois hommes
dans le grand canot, et les détacher à la poursuite des
ravisseurs sous les ordres de MM. Gressien et Pâris.
M. Gaimard voulut se joindre à eux. Cette opération
fut promptement exécutée; mais je n’avais pas voulu
laisser partir ce détachement sans l’armer complètement
de fusils , de sabres, de piques et de munitions ;
cette précaution avait entraîné vingt minutes environ
de retard.
Durant ce temps, les naturels au nombre de plus
de cinq cents, redoublant de vitesse et d’efforts.