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 Avni.  N.  E.,  ce  qui  n’améliorait  nullement  notre  situation. 
  Cette disposition singulière des marées tient probablement  
 à  la  direction du  canal,  à  la  configuration  
 des  terres  et  des  récifs,  surtout  à  la  proximité  du  
 grand lagon  intérieur. Quoiqu’il  en  soit, je restai dès-  
 lors tristement  convaincu que  le  changement de vent  
 pouvait  seul nous  tirer  de  danger. 
 Le ciel  se  couvrit,  et  le  vent  continua  de  souffler  
 au  S.  E.  avec  de  petites  risées  ,  doni  la  moindre  
 me  faisait  frémir  pour  nos  grelins.  Qu’alors  j ’eusse  
 ardemment  désiré me  retrouver  en  pleine  mer,  sauf  
 à  m’y  voir  de  nouveau  en  butte  aux  plus  furieuses  
 tempêtes  et  aux  vagues  les  plus  menaçantes!....  La  
 veille  encore  je  déplorais  les  retards  qui  m’empêchaient  
 de toucher  à Tonga-Tabou,  et maintenant que  
 j ’y   étais,  j ’aurais  voulu,  au  prix  des  plus  grands  
 sacrifices,  m’en  voir  à  deux  mille  lieues!...  Telles  
 sont les  chances auxquelles  l’homme de mer est  sans  
 cesse  exposé dans les voyages  de découvertes !.... 
 Du  moment  où  la  corvette  avait  échoué,  les pirogues  
 des  naturels étaient  arrivées  successivement,  et  
 avaient fini par nous environner de toutes parts ; mais  
 je  n’avais  permis  qu’à  un  petit  nombre d’hommes qui  
 s’annoncaient pour être des  chefs,  epai,  de monter  à  
 bord  et  d’y  rester  pour maintenir  l ’ordre  et  la  tranquillité  
 parmi  leurs  compatriotes.  Toutefois je  reconnus  
 bientôt  que  ces  prétendus  eguis  ne  jouissaient  
 presque d’aucune  influence,  ou bien  qu’elle  s’étendait  
 au plus aux individus qui dépendaient immédiatement 
 de  leur  autorité ;  les  autres  faisaient  à peine attention  iSs-,  
 à leurs ordres ou s’en moquaient ouvertement. Malgré  
 cet  inconvénient,  je  dois  rendre  à  ces  sauvages  la  
 justice de dire qu’ils  se  comportèrent  en  général  avec  
 douceur  et  convenance  pendant  toute  la  durée  de  
 nos  opérations  forcées.  S’ils ne voulurent  point nous  
 prêter  leur  assistance,  au  moins  ils  se  gardaient  de  
 nous  causer aucun  embarras ,  et  se dérangeaient eux  
 et  leurs  pirogues  au  moindre  signe  que  nous  leur  
 adressions quand cela devenait nécessaire. 
 Vers  trois  heures,  un  jeune  Anglais  nommé  .John  
 Read  parut  à  bord  avec  une  lettre  de  recommandation  
 de  M.  Thomas,  l’un  des  missionnaires  établis  
 dans l’ile. Read  faisait  partie  de  l’équipage  du Ceres  
 qui  fit  naufrage  il  y  a  sept  ou  huit  ans  sur  les  iles  
 Hapaï. Depuis  cette  époque,  il  habitait  parmi  les naturels  
 dont  il  avait  adopté  les  coutumes,  la manière  
 de  vivre,  et  même  le  costume.  Cette  existence  paraissait  
 lui  convenir  parfaitement,  et  il  ne  songeait  
 nullement  à retourner  en  Europe.  Pour mieux  conserver  
 son  indépendance,  il  n’avait  voulu  s’attacher  
 au  service  d aucun  chef d’une manière  spéciale,  bien  
 qu’il  résidât  le  plus  souvent  à  Bea.  Je  reçus  Read  
 avec amitié et même avec  une  sorte de considération ;  
 j étais  charmé  d’acquérir  dans  ce  jeune  homme  un  
 utile  interprète  près  des  naturels,  et j ’espérais  obtenir  
 de  lui  des  renseignemens  satisfaisans  sur  la  conduite  
 à  tenir  à  l’égard  de  ces  hommes,  afin  de  me  
 concilier  leur  affection. 
 Sur les quatre heures,  dans une  autre pirogue,  ar