VOYAGE
1827. inspirer. Chacun peut être inspiré, quelque soit son
Mai. gjjjjg jjj société ; mais les chefs jouissent beaucoup
plus fréquemment de cet avantage.
Je rendis ma visite à Hata et à sa femme qui en parurent
flattés, et me firent voir avec orgueil leur superbe
malaî, les \>eWL^faï-tokas de leur famille et
leurs dépendances. Ensuite je parcourus le village de
Hifo , j’examinai ses fortifications qui consistaient en
une solide palissade bien entretenue et en un fossé
assez profond, large de quinze à vingt pieds et à demi-
rempli d’eau. Mes guides me firent observer que
Hifo n’avait jamais été pris dans les guerres civiles
de Tonga.
Après avoir également rendu ma visite au bon
Houla-Kaï, dont l’habitation me parut charmante, et le
malaï entretenu avec un soin exquis, je rentrai au lo gis
des missionnaires où nous dinâmes de fort bon
appétit avec des poules et du lard bouilli, des ignames
et de l’eau de coco. Hata, chef de Hifo, qui dînait
avec nous , avait eu soin de se parer de son beau collier
en dents de baleine, l’ornement le plus distingué
ri. LXXVI. qu’un guerrier de Tonga puisse porter. Toutefois il
admirait beaucoup mon uniforme brodé, et surtout
les épaulettes qui le séduisaient tout-à-fait. Il ne put
même s’empêcher de demander à madame Thomas
pourquoi son mari ne portait pas un pareil habit, de
préférence à ses vêtemens noirs qui avaient une si triste
apparence.
Comme je voulais absolument regagner la corvette
dans la journée, dès deux heures après midi, je pris
DE L ’ASTl lOLABE. 8.5
congé des missionnaires, et nous nous rembarquâmes.
Quoique la mer ne fût qu’à demi-basse, il fallut traîner
le canot l ’espace de deux milles environ. D ’après les
indications de Ritchett, je me dirigeai vers Holoa pour
passer entre cet îlot et la pointe située en face de lui.
Mais a deux milles d’Holoa, nous ne trouvâmes que
quatre ou cinq pouces d’eau; le canot fut encore traîné
l’espace d’un mille. Je voulais du moins atteindre
Holoa pour y allumer un feu et passer la nuit à l’ahi i
du vent et de la pluie, après avoir tiré la baleinière
sur le rivage. Il fallut même renoncer à cet espoir : la
nuit était arrivée, et les matelots fatigués avaient perdu
toute espèce de courage et de bonne volonté. En conséquence,
à un mille d’Holoa, je pris le parti de rester
au milieu du banc et d’attendre que la marée pût nous
remettre à flot. Nous nous arrangeâmes de notre
mieux dans le canot, mais nous étions bien loin d’être
à notre aise, car l’air était froid et humide, et il tomba
même: quelques grains de pluie. Plus heureux que
nous, Ritchett regagna le rivage et alla passer tranquillement
la nuit dans sa case à Nioukou-Lafa.
Enfin vers une heure et demie du matin, l’embarcation
se retrouva à flot. J’ordonnai à nos hommes
de reprendre les avirons , et nous parvînmes bientôt
au bord du brisant ; mais la mer y déferlait avec fureur.
Je le fis prolonger jusqu’à terre dans l’espoir de
trouver un passage oui le ressac fût moins violent.
Par tout le danger était le même ; enfin, ennuyé de
chercher, je recommandai au patron de gouveiner
droit contre la lame, et aux canotiers de forcer sur
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