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Avril.
Pl. LXIV.
daient à vil prix à nos matelots. Aussi ceux-ci passaient
à faire bonne chère tout le temps où ils n’étaient
pas obligés de travailler, notre position les inquiétait
peu, et je voyais que la plupart d’entre eux se consolaient
d’avance de faire naufrage sur une ile où les
ressources étaient aussi abondantes.
Je reçus un second message de M. Thomas qui me
demandait des détails sur notre navigation , le nom
du navire , le lieu d’où nous venions , celui où nous
allions, e t c ., et me priait en outre de lui procurer du
savon, de la chandelle, etc. On sent bien que j ’étais
peu disposé à m’occuper de semblables réclamations
, aussi fis-je très-peu d’attention à la missive de
M. Thomas.
Dans la matinée, nous vîmes aussi arriver Tahofa.
C ’est un homme de cinquante ans, d’un caractère
tres-décidé, d une attitude martiale, et qui passe pour
être le plus grand guerrier et le chef le plus puissant
deTonga-Tabou. Réfléchi, silencieux, et même un
peu taciturne, il est aussi i-éservé dans sa conduite,
aussi circonspect que Palou est communicatif, et se
montre disposé à la gaieté et à la plaisanterie. Tahofa se
disait beau-fils de Tonga-Tea (Attago de Cook), et
neveu de Poulaho, dont il reconnut les portraits
dans l ’ouvrage de ce navigateur. A cette vue, malgré
sa fermeté habituelle, le coeur de Tahofa s’attendrit
, et il rendit à ces images chéries le salut filial
en posant son nez contre elles et versant quelques
larmes.
Je fis à Tahofa un accueil aussi distingué, aussi affectueux
qu’à Palou; j ’offris à chacun d’eux un fusil de
munition et une belle pièce d’indienne à grands dessins;
puis je réclamai leur amitié et leur protection en
faveur des Français de l’Astrolabe, si le navire venait
à se perdre. Les deux eguis reçurent ces objets avec
une satisfaction marquée, et en exprimèrent toute
leur gratitude par l’organe de nos interprètes. Singleton
m assura qu’ils étaient particulièrement sensibles
aux égards que je leur témoignais, plus encore
quaux riches présens qu’ils venaient de recevoir,
quelle que fut néanmoins la haute valeur de ces
présens. 11 ajouta que l’amitié des deux eguis
m était certainement acquise, du moins autant qu’il
était possible de compter sur les sentimens de ces
hommes.
Désormais rassuré sur les dispositions des deux
premiers chefs du pays, je songeai sérieusement au