Tonga-Tabou. Certainement, s’il eût été revêtu d’un
costume anglais ou français, rien dans son ton ni
dans sa tournure n’eût pu faire soupçonner qu’il n’appartenait
pas à une nation civilisée. Cependant cet
homme n’avait jamais eu l’occasion de se trouvei-
long-temps de suite avec des Européens.
Une certaine gravité règne habituellement dans
leurs traits et dans leurs gestes, mais elle se trouve
tempérée par une douce affabilité et un grand fond de
politesse. Quelquefois même ils se livrent à de légères
plaisanteries qui n’ont ni l’aigreur de celles du Zélandais
, ni la naïve simplicité de celles du Taïtien ; et
dans ces occasions ils savent admirablement se maintenir
dans les bornes des convenances. Enfin l’hospitalité
est un devoir pour eux, et celui qui y manquerait
se ferait mépriser de ses concitoyens. Sous ce
dernier rapport, il est vrai que leurs relations avec
les Européens ont singulièrement modifié leurs idées
et leurs habitudes.
Ces insulaires sont très-attachés à leurs parens, à
leurs amis et à leurs chefs. Leurs relations domestiques
sont douces et affectueuses; les femmes sont
traitées avec les égards dus à leur sexe; les enfans
sont i’objet de toute la tendresse el des soins les plus
attentifs de la part de leurs parens. Enfin les chefs
eux-memes affectent une douceur, et l’on pourrait
dire une bienveillance soutenue envers leurs inférieurs.
ils portent un profond respect à la vieillesse, et ce
sentiment est consacré chez eux d’une manière auibenlique
par une de leurs coutumes dont nous parlerons
plus lard.
Naguère les rangs de la société pouvaient se classer
ainsi qu’il suit, le touï-tonga, les eguis, les mata-
boulais, les mouas et les touas.
Le touï-tonga était un personnage revêtu d’un caractère
divin et sacré, dont l’influence était également
reconnue, et la personne révérée dans toutes les îles
Tonga, et même dans quelques-unes des îles Hamoa et
Viti. Bien que son autorité temporelle fût bornée sous
divers rapports, tous les autres eguis, quel que fût
leur pouvoir, ne pouvaient se soustraire, en paraissant
devant lu i, à l’humiliant salut du moë-rtioë. Des
cérémonies particulières étaient observées pour son
mariage , ses funérailles et le deuil qui les accompagnait
: en parlant de lu i, on employait en certaines
occasions un langage différent ; il n’était ni tatoué ni
circoncis comme tous les autres hommes. Enfin à une
époque fixe de l’année, et dans une fête qui prenait le
nom de Natchi, de toutes les îles Tonga on venait
lui présenter les prémices des productions terrestres
qui jusqu’à ce moment étaient frappées d’un tabou
général '.
Dans les attributions du touï-tonga, il est difficile
de ne pas saisir sur-le-champ une ressemblance assez
l'rappante avec le caractère et les honneurs dont les
chrétiens catholiques avaient environné la personne
du chef de leur religion ; puissance spirituelle sans
1 yiavinev, 11, p. l i S et suiv.
Élol social.