1827.
M a i.
coulumèrent si bien à l’effet de notre artillei'ie, qu’aussitôt
le coup parti ils se levaient quelquefois pour aller
cbercher ceux des boulets qui s’enterraient dans le
sable des fortifications.
Dès le premier coup de canon, nos hommes avaient
disparu. Cela me confirma dans l’idée que les naturels
n’avaient pas l’intention de leur faire de mal, et qu’ils
tenaient seulement à les conserver à leur service.
Depuis dix heures et demie jusqu’à onze heures et
demie, trente coups de caronade furent successivement
tirés, dont quelques-uns à mitraille. Les naturels
répondirent par quelques coups de mousqueton,
et certaines balles passèrent pardessus le navire. Les
amarrages des bragues, usés sans doute par l’humidité,
avaient presque tous manqué , et l’on fut
obligé de cesser le feu pour les réparer; de leur côté,
les insulaires profitèrent de cette suspension pour
fortifier leurs remparts.
Après le dîner de l’équipage, la chaloupe, sous
les ordres de M. Cuilbert et armée de deux espingoles,
est allée mouiller notre ancre de poste dans le S. S .E . ;
puis nous avons viré dessus, en filant de la petite
chaîne. La chaloupe, pendant cette opération, a reçu
plusieurs coups de fusil, dont aucune balle n’a heureusement
fait de mal, et elle a répondu par deux
coups d’espingole. A deux heures , nous étions définitivement
affourchés fort près du récif, avec soixante-
dix sept brasses de la petite chaîne et vingt-cinq de
la grosse. IN ous avons fait de nouveau embossure et
présenté le travers au village.
Le feu a recommencé, et les mitrailles pointées
avec soin ont très - bien porté. A la première décharge
, qui est tombée sans doute sur le gros de la
troupe, les naturels ont poussé de grands c ris, en
agitant un grand nombre de morceaux d’étoffe. Nous
avons pris ce signal pour un défi, car il n’a été suivi
du reste d’aucun mouvement qui annonçât le désir de
parlementer. Vingt-quatre coups ont encore été tirés
à des intervalles de quelques minutes entre chacun
d’eux, douze à boulet et douze à mitraille. En général,
les coups à mitraille étaient suivis de cris redoublés
, tandis qu’un profond silence accompagnait les
boulets.
A quatre heures, les amarrages avaient encore
manqué, et il fallait s’occuper de les refaire, ainsi que
de remplacer l’apprêté consommé. Le brave Reynaud,
notre maître canonnier, qui avait pointé presque tous
les coups qui furent tirés dans la journée, ne cessa
de déployer une activité et une intelligence qui lui
firent beaucoup d’honneur.
Au coucher du soleil, les naturels firent sur la
corvette une décharge de douze coups de fusil, et
pour le coup de retraite nous dirigeâmes sur le village
un coup de canon à mitraille. La surveillance la plus
active fut observée durant toute la nuit ; elle était d’autant
plus nécessaire qu’à marée basse les naturels
pouvaient s’approcher à pied sec sur le récif, à moins
de vingt toises de la corvette. Pour peu qu’ils eussent
été entreprenans , ils pouvaient hasarder une attaque
de nuit qui nous eût été funeste.
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