il
derniers étaient venus plusieurs A ng la is qui étaient à lenr
scrvic e. C eu x -c i dirent à M. d’U rv ille que la ch a loupe serait
infaillib lem en t p illé e si elle a lla it à terre. Cette considériition
■engagea le commandant à la ga rder à b o rd.
Deux de nos embarcations furent envoyées à H i fo , chez les
missionn.tircs : elles portaient les papiers de l ’e xp éd ition , les
ca r te s, les dessins d’historique et d’histoire n a tu r e lle , les montre
s, linéiques instrumens n au tiq u e s , et de plus deux chemises
et un pantalon à chacun de nous.
Un grand nombre de p irogues échouées sur les récifs nous
entoura ient. U ne nuée de naturels rôdaient autour de nous, ou
bien , debout sur les ré c ifs , attendaient lo dénouement : on eût
dit autant de co rb eaux qui attendaient leu r proie.
U ne partie de l ’équip age passa la n uit dans les embarcations
; dans la ch a loupe se trouv aient M M . Q u o y , Sainson ,
Bertrand et F a ra gu e t ; dans le grand e a n o t , M . P a r is ; et dans
la grande b a le in iè r e , M . Dudemaine. Les autres personnes de
ré la t -m a jo r restèrent à b o rd. L a nuit fut p lus p énible encore
que la précédente. Mon ami K a n a n -G a t a , fils de P a lo u ,
s’étant couch é dans mon l i t , je pris une couverture et un
o r e ille r , et je vins me co u ch e r sur le p o n t , à côté de M M . .lae -
q u in o t , Gressien et G u ilb e r t.
Le 22 a v r i l , anniversaire de notre premier départ de T o u lo
n , M . John T h oma s , Tun des deux missionnaires anglais de
H i lo , v in t a b o rd de VAstrolabe. Lc s renseignemens qu’il nous
donna sur les naturels ne furent rien moins que satisfaisans. 11
nous dit que si nous faisions n a u f r a g e , nous serions entièrement
dépouillés p ar e u x , et q u ’il fa lla it ren on ce r à l’idée de
conserv er nos effets. 11 était certes bien dur de perdre nos c o llections
en même temps que le n a v ir e ; mais en fin , lo rsqu’on
fa it un v o y a g e de découvertes dans les îles à r é c if s , on doit
s attendre ;î de p,areils aecidens : c’est même cc qui nous av a it
déterminés à en vo y e r de Tcnériffc et de Port-Jackson , :'i T lns -
t i lu t de F ranc e et au Jardin des P lan te s , nos mémoires et nos
co llection s zo o lo g iq u e s , afin de la is se r , en cas d’a c c id e n t , un
souvenir de la nouvelle Astrolabe. L e pauvre missionnaire
était p âle et souffrant : je Tinvitai à descendre dans le carré
pou r prendre quelques alimens; il me dit alors qu’il était saisi
de fro id et qu’il n’av a it pas de chemise sur le corps. Je le pruu
d’en ac cep ter une des miennes, en lu i offrant tout ce dont il
pourrait av o ir besoin. 11 eut quelques vomissemens : sans
doute que la position peu rassurante dans laque lle nous étions
venait ajouter à ses souffrances. Lo rsqu e cette indisposition fut
dissipée , M . T h oma s me fit part du désir qu’il avait d’acbeter
une montre. Il v o u lu t bien céder à ma p r iè r e , en acceptant la
m ien n e , qui était fo rt modeste : c ’était une montre d argent.
A quatre heures du soir, le com m an d an t, voulant profiter
d’une brise lé g è r e , tenta d’appareiller : la brise a y an t f a ib l i ,
nous fûmes de nouveau portés sur le ré c if. On sonda de 1 avant
et on annonça sept pieds d’ e a u ! ... Nous crûmes que cette foi.s
c ’en était fait de l’Astrolabe . M . d’U rv ille pensa de même ; il dit
an lieutenant de faire semblant de m anoe u v re r, pendant q u ’il
a lla it descendre dans sa chambre avec les chefs du pays. L e
commandant s’arrangea avec les trois grands ch e f s , T é loqu cn l
P a lo u , le b elliqueux T ahofa et le riche L a v a k a , p our que
l ’équ ip ag e fût à terre sous leu r p rotection e t'n o u r r i par leurs
soins : il leu r fit des cadeaux assez importans , qui parurent
les satisfaire. P en d an t ce temps , M . Gressien v in t dire au
lieutenant que Ton p ou rrait très-bien reprendre les amarres ;
c ’est cc que Ton fit aussitôt avec une p romptitude étonnante ,
to u t le inonde tra v a illan t avec v igu eu r . L e commandant remonta
sur le p o n t , déjà résigné sur la perte de l ’A s tro la be ;
et i l a p p r it , avec plus de p la isir encore que de su rp r ise , on
le co n ço it fa c ilem en t, que Ton a v a it repris les am a rre s , et
que p ar conséquent rien n’était encore désespéré.
A v a n t l ’ap p areilla ge , M . d’U rv ille a v a it , à Tinsu des ch e fs ,
fa it mettre tous les fusils à fond de c a le , sous sa ch am b re ,
afin q u e , dans la d éb â c le , les naturels ne pussent p o in t s’en
em pa re r , cette partie du navire devant être .submergée la
première.