et défilent autour du faï-toka. A mesure qu’ils passent
derrière, les hommes aux torches les jettent par
terre, et le reste de la troupe jette ses tomes et bo-
latas. Puis chacun descend et va se rasseoir comme
auparavant. Le mata-boulai chargé de la direction
des cérémonies divise la foule en plusieurs groupes,
et enjoint à chacun d’eux de nettoyer le terrain jusqu’à
une certaine distance du faï-toka ; après quoi tous les
spectateurs se retirent dans leurs huttes temporaires.
A la nuit, quelques personnes placées près du tombeau
recommencent à sonner de la conque, tandis
que d’autres entonnent une espèce de récitatif, partie
dans un langage inconnu, partie en dialecte hamoa.
Pendant ce temps, un certain nombre d’assistans se
prépare à une cérémonie fort bizarre, et sans doute
si ancienne que le motif en est aujourd’hui complètement
ignoré. Ces hommes, au nombre de soixante
environ, se placent devant le tombeau. Lorsque le
chant est fini et que les conques ont cessé de retentir,
une des femmes du deuil s’avance, s’assied hors du
faï-toka et s’adresse ainsi au peuple : « O hommes !
» vous êtes rassemblés ici pour accomplir les devoirs
» qui vous sont imposés ; levez-vous et faites en sorte
» de les remplir complètement. » Après ces paroles,
la femme se retire dans le faï-toka; les hommes désignés
s’approchent du tertre sacré, chacun d’eux y
dépose ses excrémens, puis se retire.
Le lendemain, au point du jour, les femmes du premier
rang, telles que les épouses et les filles des plus
grands chefs, suivies des femmes de leur suite, arrivent
en procession, portant deux à deux des corbeilles
, avec de larges coquilles, pour enlever les ordures
déposées la veille ; il n’est pas une femme qui se
refusât à prendre part à cet acte d’humilité religieuse.
Quelques-unes des femmes du deuil sortent ordinairement
du fai-toka, et viennent prêter leur aide, de
sorte que l’endroit est bientôt nettoyé. Cette cérémonie
se répète durant quatorze nuits consécutives, et
toujours dans le même ordre. Aucun étranger ne peut
assister à ces étranges cérémonies. Le seizième jo u r ,
de bon matin, les mêmes femmes se présentent, mais
désormais parées de leurs plus beaux atours et de
guirlandes de fleurs ; elles ont de nouvelles corbeilles
et font encore semblant de nettoyer la place, bien
qu’il n’y ait plus d’ordures. Puis elles retournent au
m o u a pour reprendre leurs naltes de deuil et leurs
colliers de feuilles d’ifi.
Mariner observe que les naturels eux-mêmes avaient
coutume de témoigner le regret qu’ils éprouvaient touchant
la nécessité d’accomplir la partie sale et dégoûtante
de cette cérémonie, mais ils pensaient qu’elle
était indispensable pour démontrer leur profonde vénération
pour le caractère divin du touï-tonga ; en
effet son objet était de prouver qu’il était du devoir
des plus grands chefs, et même des lémmes les plus
délicates et du premier rang, de s’abaisser aux fonctions
les pl,us viles et les plus dégoûtantes, plutôt que
de laisser souiller le terrain sacré où le touï-tonga était
inhumé.
Pendant un mois, à partir du jour de l’enterrement.