
 
        
         
		1825. 
 Av.il, 
 leur d’un navire anglais,  e(  depuis quelques mois  établi  
 dans l’iie.  Cet  homme,  disait-il,  avait  appris dans  
 quelle dangereuse situation  se  trouvait  la corvette,  et  
 il  s’était  fait fort  de  nous  tirer sur-le-champ  d’embarras. 
   Comme  je témoignais  mon incrédulité, Singleton  
 m’assura  avec  chaleur  que  John  était  un  excellent  
 marin, et qu’on pourrait s’en rapportera lui. Rittchett  
 appuyait celte opinion de toutes  ses  forces.  Leur confiance  
 dans  les  talens  nautiques  de  ce nouveau-venu  
 me  parut  si  bien  établie,  que je  commençai  à croii’e  
 que  ce matelot,  dans  ses  courses  au  travers  du  clie-  
 nal,  avait  pu  y  découvrir  un  banc  peu  éloigné  de  
 nous,  et  je  concevais  qu’en  pareil  cas notre dernière  
 ancre,  élongée et mouillée  sur ce banc, pourrait,  avec  
 notre  dernier  câble,  réussir  à  nous  éloigner  du  brisant. 
 Je fis  signe  à  John  de s’approcher de moi  et  lui demandai  
 s’il  avait  effectivement  trouvé  quelque expédient  
 pour  sauver la  corvette.  Il  répondit en mauvais  
 anglais,  mais  avec  beaucoup  d’assurance,  que  rien  
 n’était plus  facile,  qu’il ne  s’agissait que de porter une  
 ancre  à jet  et  des  grelins  sur  le  récif de  l’autre  côté  
 du  chenal  et  de  nous haler  dessus.  Je  me  contentai  
 de  lui  répondre  que  le  chenal  avait  deux  milles  de  
 largeur,  qu’on ne pouvait  élonger  d’ancre à celte distance, 
   au  travers  d’un courant aussi  violent,  et  surtout  
 dans  un  espace  qui  n’offrait  point  de  fond  à  
 quatre-vingts brasses ; qu’enfin, quand tout cela serait  
 praticable, cette manoeuvre nous était interdite attendu  
 que  toutes  nos  menues  ancres  et  tous  nos  grelins 
 étaient déjà  au  fond.  Ainsi  s’évanouit  ce  faible  rayon  1827.  
 d’espérance.  Aïiü. 
 Lavaka  parut  enfin  dans  la  matinée  :  c’était  un  
 homme  de  quarante - cinq  ans,  d’une  belle  taille,  
 mais d’une  physionomie  sans aucune  expression.  Ses pi.  l x x x i i i .  
 moyens  me  parurent  très-bornés,  et  il  ne  me  sembla  
 jouir que d’une  autorité fort équivoque  parmi  ses  
 concitoyens.  Singleton  convint  que  l’influence  de  
 Lavaka  était  d’une  nature  presque  toute  religieuse,  
 mais  telle  néanmoins  que  Palou  et  Tahofa  ne  voudraient  
 rien  faire  ni  décider  sans  son  assentiment. 
 Pour  les  présens et  la considération,  je devais  donc  
 l’assimiler  à  ces  deux eguis,  et  j ’agis  en vertu  de  ce  
 principe.  Je  regrettais  vivement  l’absence  du  touï-  
 longa,  car il m’eût été bien plus facile de m’entendre  
 avec  ce  demi-dieu  vivant, qu’avec  le  triumvirat  qui  
 présidait  maintenant  au  gouvernement  de  Tonga-  
 Tabou. 
 Vers midi,  nous  vimes M.  Thomas,  l’un des deux  
 missionnaires  de  la  société  de  Wesley  établis  sur  
 file ; je  fus  d’autant  plus  sensible  à  cette  démarche  
 de  sa part,  que  c’était  un dimanche,  jour  inviolable  
 dans  les  statuts  de cette secte,  qu’il  avait  eu  un  long  
 trajet  a  faire  en  pirogue,  et  que  la  mer  le  fatiguait  
 cruellement.  11  s’intéressa  vivement  à  notre affreuse  
 position  et me  fit  toutes  sortes  d’offres  obligeantes. 
 Du  reste je ne  tardai  pas  à m’apercevoir  que, malgré  
 le  respect  que  les  naturels  portaient  à M.  Thomas,  
 comme  Européen  et  comme  prêtre,  il  n’avait  pas  la  
 moindre influence sur leur esprit  ni sur  leurs  actions.