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 agrès de  Pangaï-Modou  à Manima,  Oneata,  et même  
 sur  Nougou-Nougou.  Vainement  M.  Gressien,  par  
 une manoeuvre  habile,  avait voulu  leur  couper  la  retraite  
 en  se  dirigeant  d’abord  sur  Oneata ;  malgré  
 toute  la  diligence  qu’il  fit,  les  fuyards  s’étaient  déjà  
 soustraits à sa  poursuite,  et ceux qui étaient  restés  en  
 arrière  traversèrent l’entrée du lagon et passèrent  sur  
 la  rive de Hogui. 
 D ’ailleurs  le grand  canot,  tirant trop  d’eau,  fut arrêté  
 par  les récifs à une grande distance du rivage,  et  
 nos  hommes  furent  obligés de  se mettre  à  l’eau  jusqu’à  
 la  ceinture  pour  aborder  sur  l’ile.  Il  en  fut  de  
 même  quand ils  voulurent passer d’Oneata à Nougou-  
 Nougou. 
 Des naturels en petit nombre, et c’étaient sans doute  
 les champions  les plus déterminés,  s’approchaient de  
 temps en  temps fort près des  Français,  en gambadant  
 et  en  faisant  toute  sorte  de  grimaces,  comme  pour  
 provoquer  leurs  ennemis  et se moquer  d’eux.  Quelques  
 coups  de  fusil  furent tirés sur ces  insolens et téméraires  
 sauvages;  mais  leur  promptitude  et  leur  
 mobilité étaient telles qu’on  ne  pouvait les ajuster,  et  
 leur audace resta  impunie. 
 Du  bord,  et la lunette  à la main,  je suivais attenli-  
 vero.ent  les  moindres  mouvemens  des  deux  partis;  
 souvent je  frémissais d’inquiétude  en  voyant  que  nos  
 matelots,  au lieu de se maintenir en troupe serrée,  se  
 disséminaient de  tous  côtés  et  s’exposaient  isolément  
 et presque sans défense aux coups des sauvages.  Sans 
 aucun doute,  si ceux-ci  avaient  su  tirer parti de  cette  
 faute,  les Français  eussent  été exterminés  l’un  après  
 l’autre,  sans  qu’il  en  eût  échappé  un  seul.  On  doit  
 juger de quel poids mon ame fut  soulagée quand  je vis  
 les naturels  céder  enfin  le  champ  de  bataille  à  leurs  
 ennemis  et disparaître dans les bois. 
 Nous vimes alors  nos hommes traîner  la  yole,  que  
 les  sauvages ,  dans  leur  fuite,  avaient  été obligés d’abandonner  
 sur  le  récif  entre  Pangaï-Modou  et  Manima. 
   Ils  eurent  beaucoup  de  peine  à  la  remettre  à  
 flot;  quand ils  y eurent  réussi,  ils  se  rembarquèrent  
 dans  le  grand  canot  et  se dirigèrent  sur  la  pointe  de  
 Pangaï-Modou.  Alors j ’envoyai MM. Guilbert,  Sainson  
 ,  Bertrand  et  Imbert  pour  renforcer  le  détachement  
 et donner  à M.  Gressien l’ordre de mettre  le feu  
 à  toutes  les maisons  qu’il  trouverait  :  car j ’étais  convaincu  
 que ce moyen seul pourrait intimider les naturels  
 et  les  amener  à  faire  quelques  propositions  de  
 paix,  attendu  qu’il  m’était  désormais  impossible  de  
 poursuivre Tahofa et ses  sujets jusque  dans  Bea ,  où  
 ils  étaient  par  le  fait  inaccessibles  à  toutes  nos  attaques. 
 Au  retour  de  la  baleinière,  j ’appris  avec  un  vrai  
 plaisir que M.  Gressien avait réussi  à délivrer de captivité  
 MM.  Dudemaine, Jacon et Gannac. Le premier,  
 après avoir passé  la nuit chez  son  ami Moe-Agui,  qui  
 l’avait  bien  accueilli,  s’en  revenait  avec  lui  vers  la  
 corvette,  quand  ils  rencontrèrent  les  naturels  qui  
 fuyaient  la  poursuite  du  grand  canot.  Sur-le-champ  
 Moe-Agui  arracha  des  mains  de M.  Dudemaine  son