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 mon  invitation nos  hôtes prirent,  quoiqu’à regret,  le  
 parti  de nous  quitter.  Par précaution j ’avais  formellement  
 exigé  d’Ounong-Lebou  qu’une  de  leurs  pirogues  
 restât derrière nous  ,  toute prête  à les  recevoir  ;  
 autrement ils paraissaient disposés à rester avec nous,  
 et  nous  eussions  pu  les  emmener  oti  nous  aurions  
 voulu ,  tant leur confiance en nous  était  déjà bien étab 
 lie !...  Mais j ’avais  présent  à  la mémoire  l’embarras  
 que m’avaient causé  Toumboua-Nakoro et ses compagnons  
 , je n’avais  aucune envie de me remettre sur les  
 bras une  charge semblable. 
 Je  donnai  à Ounong-Lebou,  lorsqu’il  me  quitta,  
 une médaille  de l’expédition,  qu’il me promit de conserver  
 avec  soin.  Il  avait  fourni  à  M.  Gaimard  les  
 noms  de plus  de deux cents  îles dans  l’archipel V it i,  
 mais il est probable que dans ce nombre se trouvaient  
 confondus de  simples noms de  districts pour les deux  
 grandes  îles. 
 Les  communications  étendues  que  nous  venons  
 d’avoir  avec  les  naturels  de  cet  archipel  me  confirment  
 de plus  en  plus  dans  l’opinion  que  j ’avais  déjà  
 conçue à leur sujet,  savoir que ces insulaires,  formant  
 le  dernier  anneau  de  la  race  noire  océanienne  vers  
 l’e s t ,  se  seront  sans  doute  opposés  aux  progrès  de  
 la  race jaune  ou  polynésienne  vers  l’occident.  Après  
 un  long état  de guerre,  ils  en  sont  venus  entre  eux  
 à  des  relations  amicales;  les  Kaï-Tongas  sont  admis  
 comme  négocians  et  même  comme  colons  sur  plusieurs  
 des  îles  Viti;  des  alliances  fréquentes  se  forment  
 entre les  deux races,  et de leur mélange résulte  
 une  race  intermédiaire  qui,  dans  un  siècle  ou deux,  
 formera  peut-être  la  population  principale  de  cet  
 archipel. 
 La  nuit  a  été délicieuse,  et nous  l’avons  passée  en  
 panne  ou aux  petits bords.  Nous jouissons  d’un beau  
 clair  de  lu n e ,  et  la  mer,  aussi  calme  que  celle d’un  
 bassin,  est  à  peine  légèrement  ridée  par  une  faible  
 brise d’E.  Quel contraste  avec  les  tourmentes continuelles  
 des jours passés ! 
 Vers quatre heures  et demie  du  matin,  le courant  
 nous  ayant  reportés  au  large,  nous  faisons  roule  au  
 N.  et  au  N.  N.  O.  en  forçant de voiles,  pour  nous  
 rapprocher delà partie  S.  O.  de Viti-Levou.  Ce  côté  
 de l’île  offre  les  sites  les  plus  agréables,  un  terrain  
 bien cultivé et une  suite non  interrompue  de  collines  
 en  pente douce, depuis les  rivages de la mer couverts  
 de  cocotiers,  jusqu’aux  hautes  montagnes  de  l’intérieur. 
   On a remarqué un village considérable dont les  
 maisons ont  paru  d’une  très-grande  dimension. 
 Vers  neuf heures ,  comme nous n’étions  qu’à deux  
 lieues  de la côte,  le  calme  est  revenu  ,  et nous avons  
 été  rejoints par une douzaine de  pirogues,  qui depuis  
 le  matin  voguaient  vers  nous  de  toute  la  force  de  
 leurs  pagaies.  Elles  apportaient  quelques  cochons,  
 des ignames,  un  petit nombre  de  cocos  et  de  poules  
 et  des  armes.  Tous  ces  objets ont été achetés moyennant  
 de  la poudre,  des haches el des ciseaux;  car ces  
 naturels  ne  faisaient  aucun  cas  des  étoffes,  verroteries  
 el autres articles  de  cette nature. 
 1 8 2 7 . 
 Juin. 
 Iri