deux après ce t événement. J ’aurais été un g ran d in g ra t d ’a ttire
r un p a re il m alheur sur le dign e mandarin , qui se montrait
si complaisant p o u r m o i; je lu i affirmai qu’i l n ’aurait rien à
crain dre de mon in d is c r é tio n . M a lg ré ma p a ro le , i l se ca cha
constamment la figure avec ses m a in s , e t , le dessin a ch e v é , i l
v in t s’assurer lu i-m êm e si je n’avais p o in t usé de q u e lq u e
supercherie p o u r tra c e r le talisman mor te l q u ’il redo u ta it si
fort.
L a v e ille des noces, un dîn e r splendide réu n it chez le p ère
du fiancé M . M o o r re e s , lieu ten an t-gou v e rn eu r , l ’ éta t-majo r
de la co lon ie c t quelques-uns d 'en tre nous. U n m agn ifiqu e
co u v e r t à l ’européenne remplissait la plus g ran d e salle de la
maison , et dans une g a le r ie vois in e une tahle p a r t icu liè re était
réservée aux nombreux con v ive s chinois. L e père de famille
présida à no tre festin qui fut des p lu s re ch e r ch é s , mais i l ne
toucha à aucun mets. Son fils faisait les honneurs du g a la c h in
o is , seulement il v in t, à diverses reprises, dans la salle où nous
m an g io n s , oflTrir avec une g râ ce toute aimable des toasts aux
p r in c ip a u x personnages de la réunion. T o u t se passa avec une
é légance et une politesse admirables. A l ’issue du dîn e r nous
accompagnâmes l ’hono rab le M . Moorrees à la be lle résidence
de B a to u -G a d ja , où les troupes se liv ra ien t à l ’ex e rcic e de
la cib le . L a présence de no tre nombreuse société ex cita l’émulation
des soldats qui tirèrent à m e rv e ille . M. Moorrees nous
fit ensuite se rv ir des rafraîchissemens dans sa jo lie maison
de A e r -H o lla n d a , où Ton tro u v e , sous Tomhre des arékiers, les
b a in s le s p lu s purs et les plus frais. I l eut même la b onté de
nous offrir le séjour de cette m a ison , et de mettre à no tre disposition
to u t ce qui s’y t r o u v a i t , et ce la avec cette b o n n e fran chise
et c e t ab andon si aimable q u ’on ne trou v e p eu t-ê tre que
chez les bons Hollandais d’Am b o in e .
Pendant que nous terminions la soirée dans cette charmante
et opulente re t ra ite , la maison du Chinois s’ était remplie d’une
(oule d’indiv idus qui se liv ra ien t à la jo ie au milieu du b ru it
d une musique éclatante et des sons étourdissans des tam-tams.
NOTES. 75 3
Un e b r illan te illumination é c la ira it la demeure des deux futurs
ép ou x .
L e lendemain eut lieu la cé rémon ie des noces. V e rs c in q
heures du so ir , le m a r ié , en présence d’une nombreuse assemb
lé e , ex écuta avec son p è re une quantité de gén u flex ion s et
de salutations dev ant deux autels dressés à ce t effet dans la
chambre p r in c ip a le de la maison. C h a cu n de ces autels éta it
ch a rgé de dorures , de dragons h id e u x , de belles fleurs en cire
c t de nombreuses bo u g ie s co lorées . A u dehors de la maison
des centaines de flû te s , de timbres et de tam -tam s faisaient
retentir T a ir, et d’énormes détonnations d’artifices ach e va ien t
d’as sourdir les assistans. L e fiancé so r tit c t fu t enfermé dans
une chaise magnifique de soie b leu e cha rgée des p lu s riches
ornemens. Son costume éta it b l e u , o rné d’une bro d e r ie d’or
et de perles qui représentait des dragons aux y e u x enflammés ;
sa bo u cle de ce inture c t le sommet de son b o n n e t se com p o saient
de superbes diahians. I l se mit en marche vers la maison
de l ’ép o u s e , ac com p a gn é d’u n nombreux co r tèg e de musiciens,
de tireurs d’ar tifice et d’une double h a ie d’hommes qui p o r ta
ien t de lon gu e s lances cha rgées d’innomb rables banderolles .
Ce tableau p le in de m o u v em en t, ce b r u i t , cette m a gn ific en c e ,
composaient un sp e c ta cle vé r itab lem en t ex traordina ire et dont
la n ouveauté nous frappa.
P en d an t l’absence du jeu n e fian c é , la fam ille faisait d is tr ibu
e r à Tassemblée des rafraîchissemens a b on d an s , mais p r in cipa
lem en t des confitures. On les serv ait sur de petites soucoup
es d’o r avec des fourchettes de même m é ta l, e l telle fu t la
p ro fu s ion et la v a r ié té de ces jo lie s frian d ise s, que les p lus in trépides
amateurs ne p u ren t v en ir à b o u t d’en go û te r une p arc
e lle de chaque espèce dilTérente. Le s femmes de la fam ille , qui
sont admises dans ces grandes occasions en présence du m on d e ,
se ten a ien t dans la chambre n u p t ia le , et fo rmaient un charmant
tab leau p ar la dou ce expression de leurs trails c t leurs cheveux
noirs d’ébène relevés sur le sommet de la tê t e , et ornés de
quelques pierreries. L a chambre des ép ou x offrait un tel assem