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b lag e d’étoffes p ré cieu se s , de b ijo u x et d’objets de lu x e d’un
g o û t et d’une ex écution ra vis sante, q u ’on en était réellement
éb lou i. L e l i t , aussi la rg e que lo n g , éta it entouré de draperies
o û l’o r et les perles fines b r illa ien t de toutes p arts. A u milieu
de la ch am b re , deux s iè g e s , une tab le richement o rn é e , et
deux tasses à th é , en o r s c u lp t é , attendaient les deux ép o u x
qui devaient a c com p lir la cé rémonie de l ’é change des coup es .
L e fracas q u ’on entendit dans la rue an n on ça le re tou r de la
procession q u i ramenait les fiancés. A u m ilïeu d’un tumulte
e x trêm e , la m a r ié e , p o r té e dans une chaise ro u g e d’une grande
r ich e s se , v in t mettre p ied à ter re au seu il de la maison où elle
fu t reçue p ar son b e au -p è re . E l le éta it vêtue d’un e ample robe
é carla te brodée des mêmes dessins que ce lle du fiancé ; une
gaze no ire parsemée d’ étoiles d’a rg en t v o ila it ses tr a it s , et lu i
tombait ju squ ’à la ce in tu re . Dès que le père lu i eut offert la
m a in , e lle commença à s’av anc e r, mais d’un mouvement si
le n t , si im p e r c ep tib le , q u ’elle resta p lusieurs minutes à p a r co
u r ir l’espace de deux ou trois toises qui la séparait de la
chambre nuptiale. Dans ce tte chambre on recommença une
série de sa in ts , de p o s tu re s , de génuflexions exécutés avec
cette in c ro y ab le lenteur de mouvemens qui p a ra ît con s tituer la
p r in c ip a le con d ition de la cé lébra tion du mariage. En fin un
crescendo d e b r u i t , d’instrumens, de p é tards, de c r is , un tap
a g e in fe rn a l, en un m o t, annonça la con c lus ion de la c é r é monie
des noces. E n ce m om en t, le mari p r it une main de la
jeu n e fem m e , et enleva le v o ile q u i lu i d é ro b a it les traits de ce lle
qui était devenue son épouse et qu’ i l n’a v a it jamais dû envisager
jusque-là. C ’est une condition fo r t d u r e , si on l ’o b s e rv e , mais
on nous assura q u ’en C h in e , comme a ille u r s , on t r o u v é , g râ ce
au c i e l , des matrones charitables q u i compatissent aux maux
des pauvres fian c é s , et p a rv ien n en t, au m o y en d’innocentes
supercheries, à élu d e r la sévér ité absurde des usages.
Les mariés fu ren t con duits à la table où ils p roc édè ren t à
1 échangé des tasses de th é , avec des mouvemens dont la vitesse
n excédait pas ce lle de l’a igu ille d’une montre. I l p a ra ît que
nos deux jeunes gens ava ient fait de nombreuses répétitions de
cette espèce d’e x e r c ic e , car ils réussirent p arfaitement à imiter
des automates , ct plus d’une fois la famille p a ru t notablement
édifiée de l ’auguste majesté empreinte sur leurs immobiles p h y s
ionomies. Nous n’y trouvâmes pas tout-à-fait le même charme.
Etouffes dans la fo u le , au m ilieu d’une atmosphère de quarante
d e g ré s , nous quittâmes la p la c e vers m in u it , au moment où
la m a r ié e , toujours avec la même len teu r , se disposait à quitter
sa robe ro u g e p o u r en prendre une b lan ch e . E n ce m om en t,
comme p o u r nous récomp enser de notre persistance à su b ir une
te lle c o r v é e , la mariée le v a les y eu x p o u r la première fo is , et
c ’éta it v ra im en t dommage qu’elle les eût tenus si lo n g - tem p s
cachés. La phys ionomie de cette jeun e femme , sans être p ré cisément
jo l ie , offrait un ensemble fo r t ag réab le. L ’ étonnante
b lan ch eu r de son te int contras ta it avec le n o ir b r illa n t de sa
ch e v e lu re , et la magnifique couronne de diamans dont elle était
parée ne co n tr ib u a it pas peu à re le v e r ses modestes attraits.
Les fêtes du mariage d urè ren t en co re trois jo u rs au milieu
des festins c t de la musique. Q u e lq u e s jours ap rè s , le jeune
marié éta it in s ta llé à la p la c e de son père , c t continuait son
commerce en dign e C h in o is , c ’ es t-à -dire q u ’il p ra t iq u a it avec
p e r fe ction l’art p rofitab le de v en d r e un objet six ou h u it fois
p lus que sa valeur .
[E x t r a i t du J o u rn a l de M . S a in so n .)
L e 2 o c to b r e , M . de Sainson et moi nous sommes conduits
p a r M . P a a p e , toujours p le in d’o b lig e an c e , aux fiançailles
d’un jeune C h in o is , que l ’on nous dit être l ’un des p lus riches
marchands do la co lon ie . Nous trouvons déjà réunis chez lui
M M . M o o r re e s , S te ym an , L en g a ck e r , E lg e n b u iz e n , L a n g ,
R om b o u t , O l i l , M a r ten s , ainsi que M M . Lesson e t Dudemaine.
L e nom du fiancé est On-Kiehhinn. On est le nom de maison
; K iekhin n , p rén om , signifie quelque chose qui éclaire.