terres basses et boisées de celte pointe, nous vimes
deux ou trois fumées qui nous annoncèrent que les
naturels dont nous avions reçu les visites devaient
habiter aux environs de cet endroit. De nouveau je
regrettai que ma maladie m’eût obligé de renoncer an
projet de faire une excursion vers cette partie de la
côte, afin de pouvoir observer ces liommes dans leur
intérieur.
Une mer dure et clapoteuse, sans être très-grosse,
relarde beaucoup notte sillage. Néanmoins, à deux
heures après midi, comme nous n’étions plus qu’à
huit milles de la partie de la còte de la Nouvelle-
Bretagne située sur le parallèle du hâvre Carteret,
nous fimes une station durant laquelle on ne trouva
point fond dans le détroit, en filant quatre-vingt-dix
brasses de ligne. A celte distance, les terres de la
Nouvelle-Bretagne nous ont paru aussi couvertes de
bois, aussi peu cultivées que celles de la N ouvelle-
Irlande; mais leur pente est moins escarpée vers les
bords de la mer, bien qu’à l’intérieur les montagnes
atteignent une plus grande hauteur. En outre, la cote
parait saine et sans dangers.
Le vent se maintenant au S. S. E. avec un ciel
couvert et une grosse mer, nous avons continué de
courir des bordées le long de la côte pour nous soutenir
contre le vent et le courant. Au coucher du
soleil, des coups de tonnerre et des éclairs répétés
nous ont annoncé le retour des orages, el dès dix
heures les grains ont recommencé chargés de jiluie el
de vent. Nons avons passé la nuit aux petits bords,
et non sans de vives inquiétudes sur les effets des
courans sur notre marche, le long d’une côte inconnue
et peuplée de sauvages inhospitaliers.
En outre, les fatigues de la journée ont eu une
influence marquée sur l’état de ma santé ; ce soir je me
suis senti un redoublement de malaise général et
certains frissons fébriles. Mais je suis décidé à passer
outre, et à ne renoncer à l’exploration de la côte
méridionale de la Nouvelle-Bretagne qu’après une
lutte vigoureuse contre les élémens.
Après une nuit très-fatigante sous tous les rapports,
au jour le vent a diminué, mais la pluie n’a pas
cessé el la houle est toujours très-dure. J’ai continué
de louvoyer. A huit heures du malin, ayant pu revoir
la côte dans de courtes éclaircies, j’ai vérifié qu’au lieu
de perdre dans le nord, nous avions au contraire
sensiblement gagné vers le sud.
A midi, nous nous trouvions à dix milles à l’E.
S. E. du cap B u lle r, vis-à-vis du vaste enfoncement
qui règne entre le cap Buller et le cap Orford, et
qui, dans cet endroit, doit réduire à une presqu’île
très-resserrée la partie nord de la Nouvelle-Bretagne.
Un pic assez remarquable, situé à trente milles
dans l’ouest, se rapporte parfaitement à celui que
d’Entrecasteaux nomma pic Deschamps.
M. Lottin, maintenant chargé des opérations hydrographiques
, met à profil les moindres intervalles
d’un temps un peu lucide pour se procurer tous les
relèvemens nécessaires à son travail.
A deux heures un quart, nous virâmes de bord