Singleton m’a souvent répété que la population de
Tonga-Tabou devait monter à vingt mille ames, et
que les chefs réunis pouvaient mettre huit mille
hommes sous les armes. Les derniers missionnaires
ont estimé à quatre mille individus la population entière
du canton de Hifo, ce qui conduirait à un résultat
total au moins aussi considérable. Toutefois ,
pour éviter toute exagération, nous ne porterons cette
population qu’à quinze mille habitans, dont quatre
ou cinq mille en état de combattre. Certainement ce
nombre est encore prodigieux, en raison du peu d’étendue
du territoire de Tonga-Tabou , mais il ne faut
pas perdre de vue que cette ile n’est qu’une suite de
jardins et de vergers admirablement cultivés et de la
plus grande fertilité. En outre la pèche offre à ces
insulaires des ressources importantes et journalières,
iiabiians. ' Lcs habitans des îles Tonga sont en général grands,
rapports piiy- bien faits et bien proportionnés. Leur embonpoint est
s'qi'ss- raisonnable, à quelques exceptions près parmi les
chefs ; sans offrir l’obésité naturelle aux Taïtiens,
leur corps est beaucoup plus replet que celui des Zélandais
, et ils doivent ce double avantage à une nourriture
saine et abondante jointe à un exercice modéré.
Leurs physionomies sont agréables et présentent
une variété de traits comparable à ce que nous
observons en Europe ; plus graves, plus sérieux que
dans l’indigène de Taïti, ces traits sont néanmoins
moins sauvages, moins sévères que ceux du Nouveau-
Zélandais. Plusieurs ont le nez aquilin et les lèvres
assez minces; presque tous ont les cheveux lisses.
Enfin la couleur de leur peau est peu foncée, surtout
parmi les chefs, et cette circonstance donne à plusieurs
d’entre eux une ressemblance encore plus
marquée avec les Européens des contrées méridionales.
Ces divers caractères se retrouvent encore à un
degré plus marqué chez les femmes, surtout chez
celles d’un rang supérieur qui s’exposent moins à
l’influence de la chaleur. Il en est qui, à la taille la
plus avantageuse, à la démarche la plus noble, aux
formes les plus parfaites, unissent les traits les plus
délicats, un teint presque blanc ou seulement basané.
Ces femmes, comme l’ont très-bien avancé
Cook et Forster, pourraient servir de modèles aux
artistes pour les proportions. On ne pourrait leur
reprocher que d’avoir les jambes et les pieds trop
gros.
A Tonga, la race polynésienne m’a semblé offrir
moins de mélange avec la race noire océanienne ou
mélanésienne qu’à Taïti ou à la Nouvelle-Zélande. On
y trouve beaucoup moins que partout ailleurs de ces
individus à taille rabougrie, nez épaté, cheveux crépus
ou frisés et peau d’un brun très-foncé. Ce fait est
d’autant plus remarquable, que les îles Tonga sont
immédiatement suivies à l’O. par les îles Viti qui sont
demeurées au pouvoir de la race noire.
Bien que ces insulaires jouissent en général d’une
bonne santé , quelques-uns d’entre eux sont sujets à
une sorte de lèpre qui dégénère quelquefois en ulcères
cancéreux de la nature la plus envenbnée. Ils