1827. dans une espèce d’e x il, et cela, disait-on, par suite
de son trop grand penchant pour la guerre et de ses
mauvais procédés envers les principaux chefs de l’île.
Enfin sur les cinq heures arriva Palou, l’un des
trois eguis dont les Anglais venaient de me vanter le
n. Lxiv. pouvoir. Ce chef n’avait guère que trente-six ans ,
mais son excessive corpulence, sa tête rasée et sa gravité
lui en eussent fait donner davantage. Son abord
est gracieux, ses manières agréables, et tout en lui
prévient en sa faveur. Il parle un peu l’anglais, son
intelligence est remarquable, et je fus bientôt convaincu
que son influence sur ses compatriotes était
bien supérieure à celle de tous les chefs qui s’étaient
présentés jusqu’alors. Ses ordres étaient écoutés avec
respect, ou du moins avec déférence, bien qu’il eût
toujours soin de les énoncer avec une modération et
une douceur extraordinaires. .Te comblai Palou de
marques d’amitié auxquelles il parut très-sensible ; et
je lui cédai même ma chambre de la dunette, pour
son usage particulier, tant qu’il voudrait séjourner à
bord.
Palou, qui se nommait aussi Fatou, était premier
chef de Moua, et se disait fils du toubo qui reçut
M. d’Entrecastcaux ; mais je crois qu’il n’était que le
gendre de cet egui, dont je vis plus tard le véritable
fils. Du reste Palou se souvenait parfaitement d’avoir
vu les vaisseaux de d’Entrecasteaux, surtout il se
rappelait les fusées volantes que ce capitaine avait fait
tirer devant les insulaires , et qui avaient produit un
grand effet sur leur imagination.
Peu de temps après le coucher du soleil, tous les 1827.
naturels se retirèrent successivement avec leurs piro- Avril,
gues, et il n’en resta à bord qu’une quinzaine auxquels
j ’avais permis d’y coucher. De ce nombre était
Palou, dont la présence m’était devenue d’un grand
intérêt.
Nonobstant la position critique où se trouvait l’A s trolabe,'\
p ne jugeai pas à propos de faire veiller l’équipage.
J’étais persuadé qu’en accordant aux matelots
un repos salutaire, je leur épargnerais autant d’inquiétudes
inutiles ; en outre je pourrais mieux compter
sur leurs efforts, quand la nécessité me forcerait à les
rappeler au travail. En conséquence, à sept heures du
soir, je fis coucher tout le monde comme à l’ordinaire,
en ne conservant que quelques hommes de
garde.
Mais neuf heures venaient à peine d’être piquées,
que le grelin de devant cassa, et cette partie du navire
venant désormais à l’appel de la chaîne seule, ne se
trouvait plus qu’a huit ou dix pieds du récif. Pour peu
que la chaine cédât, ou le rocher qui soutenait son
ancre, je devais m’attendre à voir l’avant de la corvette,
dans les fortes houles qui survenaient par intervalles,
s’abattre sur les pointes acérées du corail, et
s’y démolir en peu de temps.
L ’équipage fut réveillé; malgré la répugnance que
j ’éprouvais à sacrifier ainsi mes ancres l’une après
l’autre, une des ancres de poste fut embarquée dans
la chaloupe , et mouillée dans le sud par quarante-
t'inq brasses de fond, à moins de vingt-cinq toises du