
 
        
         
		430 V O Y A G E 
 1827. 
 Juin. 
 même distance Motougou semblait  être  une  terre peu  
 étendue,  mais  d’une  élévation considérable.  Aussi je  
 m’étonnai  qu’elle n’eût encore  été  aperçue  par aucun  
 navigateur. 
 Totoua  et Motougou  étaient  certainement  des  découvertes  
 de  T Astrolabe,  et  Mouala  était  si  incorrectement  
 placé  sons  le  nom  de  Merla-Evou,  que  
 notre  travail valait presque une découverte.  On pourrait  
 en  dire  autant  de  toutes  les  îles  que nous  avons  
 déjà  signalées dans  l’archipel Viti. 
 J’ai  peine  à  croire  que  Mouala,  plus  minutieusement  
 exploré,  ne  pût  offrir  un  bon  mouillage  entre  
 ses  récifs.  Mais  une  pareille  recherche  ne  pouvait  
 nous convenir,  à nous  dénués  de  grelins et d’ancres  à  
 jet.  Dès que  nous  eûmes  terminé  nos opérations  sur  
 les  trois dernières  îles,  empressés  de  poursuivre nos  
 explorations,  nous  laissâmes  porter  au  N.  O.  pour  
 nous  rapprocher  de  Nhao  et des  terres plus  à TO.  A  
 cinq heures  et demie,  nous avons  entrevu  nn  instant  
 les  sommités  de  Nhao,  à  douze  ou  quinze  lieues  de  
 distance.  Puis nous avons  couru de  petits  bords  sous  
 les huniers deux ris pris.  Il  fait  un  temps  détestable,  
 et le vent  souffle  à  TE.  et  à TE. N.  E .,  grand  frais  ,  
 avec un  ciel  très-chargé et  une mer très-grosse. 
 A  cinq  heures  cinquante minutes  du  matin,  nous  
 gouvernons  au N.  N. O . ,  en  augmentant  de  voiles.  
 A sept heures cinquante minutes,  à travers la brume,  
 nous  avons  revu  une  terre  très-haute,  et  à  neuf  
 heures vingt  minutes nous  avons  tout-à-coup  découvert  
 au vent  à nous ,  un  récif dangereux  fort  éloigné 
 D E   E ’A S T l lO L A B E . 4 3 1 
 de  terre,  et  qui  nous  a  paru  occuper  une  grande  .  
 étendue.  Le  temps menaçant  de  toutes parts,  j ’ai repris  
 un moment les amures à bâbord.  Puis à dix heures  
 et demie,  dans une courte  éclaircie , j ’ai laissé de nouveau  
 porter aiiN.  O.  N.  pour  approcher  la  terre. 
 A midi  nous  n’étions plus  qu’à  huit  ou  dix  milles  
 des  terres,  et  à  quatre milles des écueils sur  lesquels  
 la mer brisait  avec  fureur. Mais  en  ce moment le ciel  
 s’est  chargé des nuages  les plus  sombres ,  et le temps  
 a pris la plus  effrayante  apparence ;  pour  la première  
 fois,  depuis  notre  entrée  dans  l’archipel Viti,  la latitude  
 observée  nous  a  manqué.  Sous  d’aussi  tristes  
 auspices,  je  ne  pouvais  songer  à  m’approcher  des  
 terres  de Viti-Levou,  et je  fus  obligé de  reprendre  la  
 bordée du  sud. 
 Le  brisant  que  nous  avons  reconnu  dans  la  matinée  
 fait probablement partie  de  celui  qui  se  trouve  
 devant Neïrai,  et  sur  lequel  se  perdit  le  navire  l’E-  
 liza.  Il  a  ’fallu  des  circonstances  aussi  déplorables  
 pour  m’empêcher de  l’explorer  avec  plus de soin. 
 Il n’y avait que quelques  momens que nous avions  
 repris  la bordée du  large  quand  l’orage  qui nous menaçait  
 depuis  le  matin  éclata  dans  toute  sa  violence.  
 Éclairs,  tonnerre,  rafales,  et  pluie par  torrens  tellement  
 épaisse  qu’on n’aurait  pu  rien distinguer  à deux  
 ou  trois  longueurs  du  navire ;  tout  se  réunit  pour  
 rendre notre navigation aussi pénible que dangereuse.  
 Cela  dura sans  intervalle  et  sans  diminution  jusqu’à  
 quatre heures  et demie,  où  la  pluie  diminua un  peu.  
 A  six  heures  elle  reprit avec  une  nouvelle  force,  et 
 ^9* 
 1827. 
 Juin.