Cérémonies.
naturels de leur classe, et ne sont l’objet d’aucune
sorte de considération personnelle pour leur titre de
prêtre. Ils s’associent aux chefs comme les autres
mata-boulais et mouas, et, malgré le caractère divin
qui se rattache à sa personne, le touï-tonga n’a pas
plus de rapports avec eux qu’aucun des autres chefs
de Tonga.
Avant d’entrer dans le détail des cérémonies religieuses
les plus importantes de Tonga, nous devons
faire observer que dans ces iles, comme à la N ouvelle-
Zélande, le mot exprime un état d’interdiction,
durant lequel l’objet qui en est frappé se trouve sous
l’empire immédiat de la divinité. L ’homme ne peut
l’enfreindre sans s’exposer aux conséquences les plus
funestes, à moins d’en détruire Faction par certaines
formalités prescrites.
Ainsi le terrain consacré à un dieu ou devenu la
sépulture d’un grand chef est tabou ; on impose le
tabou sur une pirogue que l ’on veut rendre plus sure
pour de longs voyages. Il est défendu de combattre
en un lieu sujet au tabou, et ceux qui se permettraient
une pareille action seraient eux-mêmes sujets au tabou
et soumis à une expiation envers les dieux. Quelques
espèces de vivres, comme la chair de la tortue
et celle d’une sorte de poisson, sont dits tabou; l’on
ne peut en manger qu’après en avoir offert un petit
morceau a la divinité. Toute espèce de provision peut
etre tabouée par une prohibition qui porte le nom de
faha-egui, faire noble.
Les fruits ou fleurs taboues sont désignés par des
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morceaux de tapa ou de natte taillés en forme de
lézard ou de requin qu’on place dessus. Pour empêcher
certaines productions de devenir rares, le
taboa est imposé sur elles : cela arrive après le natchi
et autres cérémonies semblables, où l’on fait une
grande consommation de vivres. Ce taboa ne cesse
que par une nouvelle cérémonie, qui prend le nom de
falm-lahi, et qui rend gnôfoua ou libre la chose interdite
G
L ’homme coupable d’un vol ou de tout autre crime
a manqué au tabou, et, dans cet état, on suppose
qu’il est spécialement exposé à être mordu par les
requins. 11 en résulte, chez ces peuples, un jugement
de Dieu d’une nature assez singulière. On contraint
l’individu soupçonné d’un vol à se baigner dans certains
endroits de la mer fréquentés par les requins;
et, s’il est mordu ou dévoré, son crime demeure
avéré.
Celui qui touche le corps d’un chef mort ou quelque
chose à son usage habituel devient tabou, et le
temps seul peut le relever. La durée de ce tabou,
pour le corps d’un chef, est de dix lunes pour les
hommes des classes inférieures ; mais pour les eguis
elle n’est que de trois, quatre ou cinq lunes, selon la
prééminence du mort. S ’il s’agit du corps du touï-
tonga, le tabou est de dix lunes, même ))0ur les
chefs les plus puissans. Durant tout ce temps, la
personne tabouée ne peut point toucher à ses vivres,
ï M a r in er , I I , p. i 85 et suiv.
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