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 te r r e ,  soit  en  mer.  Il  v o u la it  aussi  sauver  les  effets des hommes  
 de  l ’é q u ip a g e ;  e t ,  p o u r   rem plir  ce  b u t ,  il  fit  donner  l’ordre  
 que  tous  les  hommes  eussent  à  embarquer  leu r  sae  dans la  ch a lo 
 u p e .  Cela  eut  lieu  à  deux  heures  de  l ’a p r è s -m id i;  il  y   avait  
 v raiment du p laisir à  voir l ’éno rmilé  des sacs  :  chaque  b om m e ,  
 ne  v o u lan t  rien  p e rd r e ,  emportait ju sq u ’à  de mauvaises n a tte s ,  
 des  coquilles  brisées  et  les  plus  misérables  objets  d’é chan g e ;  à  
 te l p o in t  que  la  chaloupe  ne p ouv an t pas  tout  con tenir ,  on  fut  
 o blig é  de  déba rquer  les  couvertures  de  la in e ,  et  de  réduire  les  
 sacs  à  une  dimension  un  peu  plus  raisonnable. 
 Q u an t  à  m o i ,  je  m’empressai  de  mettre  dans  la  ch a lo u p e ,  
 a  Tabri  du  n au fra g e ,  une  é c rito ire   en  bronze  que  j ’avais  reçue  
 à  mon  départ  de  Paris  de  mesdames  G eo ffro y   S a in t -H ila ir c ,  
 et  les  OEiivres  du  poète  à  qui  je  dois  l ’épigraphe  de  mon  
 journ al  ; 
 J ’affronte  de nouveaux  orages  : 
 Sans doute  à de nouveaux  naufrages  
 Mon  frêle  esquif est  dévoué. 
 Que  t’importe  eu quels  lieux  le  destin  le  prépare  
 Un  glorieux  tombeau  ? 
 L a m a r t i n e . 
 L es   désirs  du  commandant  ne  se  b o rn aient  pas  aux  doeii-  
 ineiis  de  l ’expédition  ,  aux  instrumens scientifiques et aux  effets  
 des  matelots;  il  v o u la it  aussi  mettre  une  partie  de  l’équipage  
 hors  de  tout danger  :  dans  cette  in ten t io n ,  i l   désigna  un  ce r tain  
 nombre  de  personnes  ,  parmi  lesquelles M .  Q u o y   et m o i,  
 p ou r   a lle r   sur  la  côte  passer  la  n uit  à  terre  avec  la  ch a lo 
 u p e .  M .  Q u o y   dit  à  M .  d’U rv ille   qu’i l  préférait  partager  
 le  sort  de  ceux  qui  resteraient  à  b o rd ,  et  qu’il  n’ira it  p o in t  
 dans  la  ch a loupe   sans  un  ordre  formel  de  sa  p art.  L e   conimandant  
 le  lu i  donna  au s s itô t,  en  ajoutant  q u ’ il  éta it  essentie 
 l  qu’il  y   eût  à  te r ie   des  hommes  raisonnables  qui  pussent  
 av o ir  de Tinfiuence  auprès  des  indigènes . M .  Q uo y   me  témo igna  
 q u e ,  dans  ces  circon s tan ce s ,  nous  ne  devions  point  être'  
 séparés;  c’ était  bien  mon  désir  aussi,  mais  ic i  il  falla it  le  comb 
 a ttre.  Comme  ch iru rg ie n -m a jo r ,  je  ne  devais  point  quitter  
 le   commandant;  et  d’a ille u r s ,  de  cette  m an ière,  mon  ami  et  
 moi nous  serions  tém o in s ,  lu i de cc  qui  ar r iv e ra it  sur  la  c ô t e ,  
 et moi  de  ce  qui  aurait  lieu   sur  l ’Astrolabe.  Je  priai M .  d U r -   
 v ille  de  m’accorder  la   faveur  de  rester  à  b o r d ,  lui  disant  que  
 je   ne  pouvais  pas  le  q uitter  au  moment  du  danger  :  il  v o u lu t 
 bien y   consentir. 
 T o u t   étant  ainsi  r é g lé ,  e t  le  départ  de  la  ch a lo u p e   fixé  à  
 quatre  h eu re s ,  le  commandant ne  v ou lan t  rien  av o ir   a  se  rep 
 rocher,  fit assembler  l’éta t-majo r sur le   p on t,  et  demanda successivement  
 à  cha cun  de nous  si  nous  c roy ion s   p référab le  d’e n v 
 o y e r   la  ch a lo u p e   ou  de  la   ga rder  à  bord  :  l ’envo yer  à  terre  
 fut Topinion  à  peu  près  unanime. 
 A lo r s ,  le  commandant  harangua  l’équip age  et  dit  en  peu  
 de  mots  :  «  qu’ il  pensait  à  sauver  les  effets  et  à  mettre  une  
 »  partie  des  hommes  en  sûreté  ;  qu’ il  leu r   recommandait p a r -   
 ..  ticu liè rem en t  une  extrême  p rudence  dans  leu r   conduite  
 B  avec  les n atu re ls ,  et de bien  remarquer que  la  faute  d’un  seul  
 »  p o u v a it  occasioner  la  perte  de  tous.  »  N o u s   sommes  donc  
 p e rd u s !  dit  un  matelot  nommé Q u ém en e r ,  désigné  p o u r   alle r   
 chez  les  missionnaires;  dans  ce  cas j e   préfère  rester  d  bord.  
 L e   commandant  lu i  rép on dit  que  «  la perte  du  navire  n était  
 »  p o in t  ce r ta in e ;  qué  les  moyens  que  Ton  prenait  étaient  
 »  dictés  p ar  la   p ru d en c e ,  et  que  l u i ,  Quémener,  .avait  été  
 »  choisi  p o u r   interprète ;  qu’en  cette  qualité  il  serait  u tile  à  la  
 .   mission;  qu’on  ne  le   mettait  pas  dans  la   cha loupe  comme  
 »  mauvais m a te lo t, mais bien  comme  remplissant des  fonctions  
 ..  importantes.  »  Quémener  se  tu t ,   n’a y an t rien  à  rép liquer . 
 I l  y   av a it à  bo rd  de  l ’Astrolabe  un  assez  bon  nombre  de naturels  
 parmi  lesquels  on  comptait  quelques  ch e fs ,  et  avec  ces