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 1027. 
 Mai. 
 150 VOYAGE 
 l’eau,  où  il  s’était  avancé  beaucoup  plus  que  la première  
 fois.  Mais  les insulaires  lui adressèrent un  coup  
 de  fusil qui le  lit revenir sur le  rivage,  d’où  il  cria  au  
 canot de retourner à bord et de ne point tirer;  qu’autrement  
 il  serait massacré par les  sauvages,  ainsi  que  
 tous  ses  camarades. 
 M.  Guilbert  revint  à  bord  sans  avoir  tiré  un  seul  
 coup,  et  j ’approuvai  sa  conduite.  Désormais  il  était  
 évident  que  les  astucieux  sauvages  voulaient  attirer  
 nos  hommes  dans  un  piège,  pour  en  massacrer  le  
 plus  qu’ils  pourraient et me dégoûter de  toute  tentative  
 ultérieure.  Leur  précipitation  seule  avait  fait  
 échouer leur stratagème;  et sans  le coup de fusil  trop  
 tôt  tiré,  il  est  probable  que  51.  Guilbert et ceux qui  
 l’auraient  accompagné  seraient  tombés  en  leur  pouvoir. 
   Sans  doute  le  moment  était  arrivé  d’avoir  recours  
 aux  moyens  extrêmes,  et peut-être eussé-je  dû  
 m’y  résoudre  sur-le-champ.  Toutefois,  pour  éviter  
 tout reproche de violence et de précipitation, je résolus  
 d’attendre jusqu’au lendemain et de laisser encore  
 la nuit aux réflexions des naturels. 
 M.  Guilbert  s’était  assuré  que  la  corvette  pouvait  
 sans danger accoster de  lrès-près*les  récifs ;  la marée  
 était  basse,  et  l’acore  des  brisans  était  maintenant  
 très-visible.  En  conséquence,  cet  officier  retourna  
 dans la chaloupe mouiller la grosse ancre,  qui n’avait  
 qu’une patte,  à deux encâblures dans le S.  S. O . , par  
 treize  brasses.  La  première  ancre  fut  dérapée,  et  
 nous  nous  hâlames  sur  l’ancre  à  une  patte.  Cette  
 manoeuvre,  exécutée  avec  de  grosses  ancres  et  des 
 DE  L ’ASTROLABE. 151 
 grelins  à  demi  usés  ou  rongés  par  les  coraux,  fut  
 longue  et  pénible,  car  les  aussières,  les  orins  et  les  
 serre-bosses manquaient à chaque  instant.  Toutefois,  
 à  force  de  soins  et  de  fatigues,  sur  les  cinq  heures  
 du  soir,  nous  nous  trouvâmes  mouillés  à  peu  de  
 distance  du  brisant et  à bonne portée de  caronade  de  
 Mafanga. 
 Comme de coutume,  à  six heures du soir,  le coup  
 de  canon  de  retraite  fut  tiré,  et  les  naturels  y  répondirent  
 par  un  coup de carabine  dont la  balle  vint  
 siffler  au  travers  du  gréement.  Pour  la  nuit,  l’appel  
 fut fait aux postes de combat,  les  fanaux  furent  tenus  
 allumés,  et  tout  fut  prêt  pour  le  cas  d’attaque.  Le  
 grand  canot  et  la  chaloupe  furent  amarrés  le  long  
 du bord  avec des chaînes en fer.  La brise du S.  S.  E.  
 fut  généralement  faible;  mais  par  interyalles  il  passait  
 des  rafales  plus  fraîches,  et  qui  nous obligèrent  
 à filer quelques  brasses de  la  chaîne. 
 Dans  la  position  où  nous  nous  trouvions,  nous  
 étions  à  portée  de  voix  avec  les  hommes  placés  au  
 bord du  rivage.  Dès  six heures du  matin,  le matelot  
 Martineng  reparut  sur  la  plage,  et  nous  héla  d’envoyer  
 un  canot  à  terre  avec  un  officier.  Je  lui  fis  répondre  
 que,  si  les  naturels  avaient  réellement  envie  
 de  rendre  les  prisonniers,  ils pouvaient  les renvoyer  
 dans une pirogue, ou même se  contenter de les laisser  
 revenir  à  la  nage  à  bord ;  qu’aussitôt  la  paix  serait  
 faite.  Martineng  renouvela  la demande d’envoyer  un  
 officier  à  terre  sans  armes  ;  je  lui  déclarai  que  je  
 voulais  parler  à  Singleton,  et  que  cet  Anglais  eût  à 
 1827. 
 Mai.