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 1827. 
 Juillet. 
 force au nord,  finirent  par m’entraîner  sous  le  vent  
 de l’entrée du hâvre.  La  nuit approchait,  et  une  fois  
 lancé  clans  le canal  Saint-Georges,  il  était  impossible  
 que le ven t et le courant du sud me permissent de revenir  
 devant celte partie de  la Nouvelle-Irlande.  Cependant  
 le canot  ne  reparaissait  point,  et je me  voyais  sur  le  
 point d’abandonner un officier et huit matelots  sur un  
 sol  entièrement dénué  de  ressources,  et  à  la  merci  
 des  sauvages  les plus barbares  de  la mer du Sud.  C’était  
 les  dévouer  à une  perte  inévitable.  Celte  idée terrible  
 me  fit frémir,  et  j ’en  fus  tellement  frappé,  que  
 je  résolus,  à quelque prix  tjue ce fû t ,  de donner dans  
 le  hâvre. 
 Ainsi,  bien que la  prudence  repoussât  ce  parti, je  
 tentai un  dernier  effort en forçant de voiles pour doubler  
 la  pointe sud  de  l’île Leigh ;  car  je  croyais  alors  
 que l’espace compris entre l’île Leigh et l’île aux Cocos  
 était barré par  des  brisans.  A  travers  les  torrens  de  
 pluie cpii ne  cessaient  de  tomber,  h  peine  si  nous  saisissions  
 de  temps  eu  temps,  et  très-confusément,  la  
 forme  de  l’île  Leigh,  et  le  plus  souvent  nous  ne  
 voyions rien du  tout. 
 Néanmoins,  à quatre  heures et demie,  nous  étions  
 arrivés  à  deux encâblures au plus  de  la  pointe  méridionale  
 ,  et je me flattais  encore de  l’espoir de  la surmonter  
 facilement,  quand  M.  Guilbert,  que  j ’avais  
 envoyé  sur  les barres,  me héla qit’il  était  impossible  
 de doubler,  et qu’il  fallait sur-le-champ virer lof pour  
 lof,  pour éviter de nous perdre.  J’avais  suivi cet avis,  
 quand un rapide  coup-d’oeil jeté autour de la corvette 
 me  fit  reconnaitre  combien  cette  manoeuvre  serait  
 imprudente.  La  brise,  très-fraîche jusqu’alors ,  avait  
 presque entièrement tombé  et venait de nous laisser à  
 la merci  d’une  grosse houle  et  du  courant ;  le  bâtiment  
 obéissait à  peine  à  sa  barre,  et il allait  être jeté  
 sur  les roches  de  la  côte  éloignées  à  peine  de trente  
 toises sous  lèv ent,  avant  d’avoir  repris  sur  l’autre  
 bord  pour  s’en  éloigner.  Quant  à  faire  naufrage,  je  
 pensai  d’ailleurs  qu’il  valait  mieux  que  ce  malheur  
 eût  lieu  le  plus  près  possible  de  la  pointe  de  l’île  
 Leigh,  afin  de  nous  trouver  plus  voisins  de  l’entrée  
 du hâvre, oii  la mer serait plus  tranquille. 
 Je  donnai  donc  contre-ordre,  la  voilure  fut  rétablie; 
   heureusement  la  corvette  n’avait  pas  encore  
 arrivé,  et  elle continua d’avancer  par un mouvement  
 presque  insensible. Mais  quand  elle  fut  précisément  
 devant  la  pointe,  il  y  eut  une  longue  pause,  où  il  
 nous parut impossible  que  nous  pussions la doubler.  
 Nous n’étions pas à plus de dix toises des  roches de  la  
 côte,  mais  la  pluie  tombait avec  une  telle violence,  
 que nous  pouvions  à peine apercevoir les arbres  suspendus  
 sur  nos  têtes.  Tout  autour du  navire,  d’effrayantes  
 tètes  de  coraux  se  montraient  à  trois  ou  
 quatre brasses  sous Teau.  Certes, jamais un équipage  
 ne  contempla  de  plus  près  les  approches  d’un  naufrage  
 en  apparence  devenu  inévitable.  La  plupart  
 de  nos  hommes  gardèrent  un  morne  silence,  effet  
 naturel  de  leur  consternation ;  quelques  matelots  
 néanmoins  voulurent  se  livrer  à  de  piteuses  exclamations  
 ;  mais,  d’un  ton  sévère,  je  leur  enjoignis  le 
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 1827. 
 Juilicl, 
 Pl.  cm.